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16/03/2023 | FRANCE | N°22DA00931

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 16 mars 2023, 22DA00931


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2105946 du 1er avril 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 avril 2022, Mme A..., représentée

par Me Lequien, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 jui...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2105946 du 1er avril 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 avril 2022, Mme A..., représentée par Me Lequien, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jours de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- cette décision est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet du Nord s'est exclusivement fondé sur l'avis défavorable émis le 26 février 2021 par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 5221-2 du code du travail ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- cette décision est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 février 2023, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.

Il soutient que, pour les motifs développés dans les écritures produites au nom de l'Etat devant le tribunal administratif, les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour et des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller,

- et les observations de Me Lequien, représentant Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A..., de nationalité ivoirienne, née le 30 janvier 1992 à Grand-Bassam (Côte-d'Ivoire), est entrée en France le 15 septembre 2012, sous-couvert d'un passeport national revêtu d'un visa " étudiant " délivré par les autorités consulaires françaises, valable du 30 août 2012 au 30 août 2013. Elle a ensuite été mise en possession d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", valable du 6 octobre 2013 au 5 octobre 2014, régulièrement renouvelée jusqu'au 5 octobre 2019. Elle a ensuite été mise en possession d'une carte de séjour portant la mention " étudiant en recherche d'emploi ", valable du 13 novembre 2019 au 12 novembre 2020. Le 3 décembre 2020, Mme A... a demandé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié, sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, reprises sous l'article L. 421-1 du même code. Par un arrêté du 5 juillet 2021, le préfet du Nord a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 1er avril 2022 dont Mme A... relève appel, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, si le préfet du Nord s'est approprié les termes de la décision du 26 février 2021 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi des Hauts-de-France a refusé de délivrer à Mme A... une autorisation de travail, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette autorité se serait estimée liée par cette décision pour refuser de délivrer à l'intéressée le titre de séjour sollicité par celle-ci.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 422-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque la carte de séjour temporaire portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise " est délivrée en application du 1° de l'article L. 422-10, son titulaire est autorisé, pendant la durée de validité de cette carte, à chercher et à exercer un emploi en relation avec sa formation ou ses recherches, assorti d'une rémunération supérieure à un seuil fixé par décret et modulé, le cas échéant, selon le niveau de diplôme concerné. / A l'issue de cette période d'un an, l'intéressé pourvu d'un emploi ou d'une promesse d'embauche satisfaisant aux conditions énoncées au 1° de l'article L. 422-10 se voit délivrer la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " (...) prévue aux articles L. 421-1 (...), sans que lui soit opposable la situation de l'emploi. ". Aux termes de l'article L. 421-1 du même code : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. / (...) ". Aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail : " L'autorisation de travail est accordée lorsque la demande remplit les conditions suivantes : / 1° S'agissant de l'emploi proposé : / a) Soit cet emploi relève de la liste des métiers en tension prévue à l'article L. 421-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et établie par un arrêté conjoint du ministre chargé du travail et du ministre chargé de l'immigration ; / b) Soit l'offre pour cet emploi a été préalablement publiée pendant un délai de trois semaines auprès des organismes concourant au service public de l'emploi et n'a pu être satisfaite par aucune candidature répondant aux caractéristiques du poste de travail proposé ; / (...) / 5° Lorsque l'étranger est titulaire d'une carte de séjour portant les mentions "étudiant" ou "étudiant-programme de mobilité" prévue à l'article L. 422-1, L. 422-2, L. 422-5, L. 422-26 et L. 433-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il a achevé son cursus en France ou lorsqu'il est titulaire de la carte de séjour portant la mention "recherche d'emploi ou création d'entreprise" prévue à l'article L. 422-14 du même code, l'emploi proposé est en adéquation avec les diplômes et l'expérience acquise en France ou à l'étranger. "

4. Ainsi qu'il a été dit au point 1, Mme A... s'est vu délivrer, le 13 novembre 2019, un titre de séjour portant la mention " étudiant en recherche d'emploi ", valable jusqu'au 12 novembre 2020. A ce titre, Mme A... soutient qu'elle était en droit de se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " sans que lui soit opposable la situation de l'emploi tel que prévu au dernier alinéa de l'article L. 422-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'au soutien de sa demande de titre de séjour, présentée le 3 décembre 2020, soit après expiration de sa précédente carte de séjour temporaire, Mme A... a déclaré être sans profession. Par ailleurs, si Mme A... a conclu le 19 janvier 2021 un contrat de travail à durée indéterminée, en qualité d'assistant administratif, avec une société d'édition, cette dernière n'a sollicité une autorisation de travail à ce titre que le 22 février 2021. De plus, à supposer qu'en opposant à Mme A... l'absence de recherches par son employeur, auprès des organismes de placement concourant au service public de l'emploi, en vue de recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail, le préfet du Nord se soit prévalu de la situation de l'emploi, il ressort des termes mêmes de la décision contestée que cette autorité s'est également fondée sur l'absence d'adéquation entre le poste d'assistant administratif et les études suivies par Mme A.... Si la requérante conteste cette appréciation, il ressort des pièces du dossier que Mme A... a obtenu le 15 avril 2019 le titre de " Manager de la communication et stratégie digitale - spécialité M2 Web Management, Marketing Digital et Médias Sociaux " auprès d'un établissement d'enseignement supérieur privé, lequel est sans rapport avec les fonctions d'assistant administratif, qui relèvent du statut " employé " de la convention collective de l'édition. Or, il ressort des pièces du dossier que le préfet du Nord aurait pris la même décision en se fondant sur ce seul motif. Dès lors, et en tout état de cause, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

5. En troisième lieu, si Mme A... a résidé régulièrement en France entre septembre 2012 et novembre 2020, celle-ci a été admise au séjour jusqu'en novembre 2019 afin d'y poursuivre ses études et n'avait donc pas vocation à demeurer sur le territoire français, puis, l'année suivante afin de chercher un emploi en relation avec sa formation, recherche qui n'a toutefois pas abouti. Par ailleurs, si Mme A... soutient qu'elle réside chez son oncle avec ses demi-frères et demi-sœurs, elle n'apporte aucun élément probant quant à la réalité et à l'intensité des liens qu'elle entretiendrait avec ces derniers. De plus, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée, célibataire et sans enfant, n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt ans et où résident ses parents. Par ailleurs, si la requérante indique souffrir d'une maladie thyroïdienne diagnostiquée en mars 2020, elle n'apporte aucun élément au soutien de ses allégations. Enfin, rien ne fait obstacle à ce que Mme A... trouve un emploi en adéquation avec sa formation professionnelle hors de France et en particulier en Côte-d'Ivoire. Par suite, le préfet du Nord, en refusant de l'admettre au séjour, n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de Mme A....

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 5 que Mme A..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour.

7. En second lieu, le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à Mme A... de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée, doit être écarté par les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 6 et 7 que Mme A..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera transmise au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 2 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. Bertrand Baillard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mars 2023.

Le rapporteur,

Signé : B. BaillardLe président de chambre,

Signé : C. Heu La greffière,

Signé : Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Nathalie Roméro

2

N°22DA00931


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00931
Date de la décision : 16/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Bertrand Baillard
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : LEQUIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-03-16;22da00931 ?
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