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28/02/2013 | FRANCE | N°12LY00945

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 28 février 2013, 12LY00945


Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2012, présentée pour Mme E...C...épouse A...et M. B...A..., domiciliés résidence des Trèves, allée des peupliers à Miribel (01700) ;

M. et Mme A...demandent à la Cour :

1°) d'annuler les jugements n° 1106197 et 1106198 du 29 décembre 2011 par lesquels le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés en date du 28 juin 2011 du préfet de l'Ain refusant de leur délivrer un titre de séjour, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours e

t fixant le pays à destination duquel ils seront renvoyés ;

2°) d'annuler, pour e...

Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2012, présentée pour Mme E...C...épouse A...et M. B...A..., domiciliés résidence des Trèves, allée des peupliers à Miribel (01700) ;

M. et Mme A...demandent à la Cour :

1°) d'annuler les jugements n° 1106197 et 1106198 du 29 décembre 2011 par lesquels le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés en date du 28 juin 2011 du préfet de l'Ain refusant de leur délivrer un titre de séjour, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel ils seront renvoyés ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdits arrêtés ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre principal de leur délivrer des titres de séjour d'un an portant la mention "vie privée et familiale", à titre subsidiaire de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il ait réexaminé leur situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- le refus de titre de séjour opposé à Mme A...a été édicté à l'issue d'une procédure irrégulière car le médecin, ayant rendu un avis sur sa santé, ne bénéficiait pas d'une délégation en vigueur ; il est entaché d'erreur de droit car son traitement n'est pas disponible au Kosovo, où elle ne peut être correctement prise en charge du fait des structures médicales, du système d'assurance maladie et de sa pathologie ; les refus de titres n'ont pas été précédés d'une saisine de la commission du titre de séjour ; ils sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation ;

- les obligations de quitter le territoire français sont illégales du fait de l'illégalité des refus de titre de séjour ; elles sont entachées d'erreur de droit, le préfet s'étant cru à tort en situation de compétence liée ; elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; la mesure d'éloignement opposée à Mme A...méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions fixant le pays de renvoi sont insuffisamment motivées ; elles sont illégales en raison de l'illégalité des refus de titre de séjour et des obligations de quitter le territoire français et sont entachées d'erreur de droit, le préfet s'étant cru à tort tenu par l'appréciation portée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ; elles méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le délai de départ volontaire qui leur a été imparti est entaché d'erreur d'appréciation ;

Vu les jugements attaqués ;

Vu les décisions du 2 mars 2012 du bureau d'aide juridictionnelle refusant d'accorder à M. et Mme A...le bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Vu la mise en demeure adressée le 31 octobre 2012 au préfet de l'Ain, en application des dispositions de l'article R. 612-3 du code de justice administrative et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2013 :

- le rapport de Mme Samson-Dye, premier conseiller ;

1. Considérant que M. et MmeA..., de nationalité kosovare, entrés en France en 2008, ont sollicité l'asile ; que Mme A...a, par ailleurs, demandé un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté les demandes de M. et Mme A...tendant à l'annulation des arrêtés en date du 28 juin 2011 par lesquels le préfet de l'Ain a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils seront renvoyés ;

Sur la légalité des décisions contestées :

En ce qui concerne les refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé.(...) " ;

3. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise, que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ;

4. Considérant que le refus de titre de séjour opposé à Mme A...a été édicté au regard d'un avis émis le 2 mai 2011 par le docteur Hamel, médecin inspecteur de la santé publique, agissant pour le compte de l'agence régionale de santé ; qu'il est allégué, et non contesté, que si elle bénéficiait d'une délégation de signature, celle-ci n'était pas entrée en vigueur à la date de l'avis litigieux ; que, cependant, cette circonstance n'est pas, en l'espèce, de nature à avoir exercé une influence sur le sens de la décision prise au vu de cet avis par le préfet de l'Ain ni à avoir privé Mme A...d'une garantie ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour à la requérante a été prise au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté ;

5. Considérant qu'eu égard à la rédaction du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable à la date de la décision en litige, Mme A...ne peut utilement se référer à l'effectivité de l'accès aux soins ; qu'il ressort des pièces du dossier, alors même que les molécules qui lui sont prescrites en France ne seraient pas inscrites sur la liste dite des médicaments essentiels disponibles au Kosovo à la date de cette décision, qu'il existe des structures médicales et des médicaments susceptibles de traiter sa pathologie dans son pays d'origine ; qu'il n'est pas établi que les évènements traumatisants qu'elle allègue avoir vécus au Kosovo seraient tels qu'aucun traitement approprié ne pourrait y être sérieusement envisagé ; que, par suite, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé méconnaît les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant que M. et Mme A...ne résident en France que depuis 2008, en qualité de demandeurs d'asile, avec leur fils né en 2006 et leur fille née en 2009 et ont passé l'essentiel de leur vie dans leur pays d'origine ; qu'eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, les refus de titre de séjour ne sont pas entachés d'erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif à la commission du titre de séjour : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir ladite commission que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions énoncées, notamment à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non de celui de tous les étrangers qui s'en prévalent ; que les requérants ne sont pas au nombre des étrangers remplissant les conditions énoncées à cet article pour obtenir un titre de séjour de plein droit et qu'ainsi, le préfet n'était pas tenu de soumettre leur cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter leur demande ;

En ce qui concerne les obligations de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité des refus de titre de séjour ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que Mme A...n'établissant pas qu'elle ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

10. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort de la rédaction des décisions contestées que le préfet ne s'est pas cru tenu d'assortir ses refus de titre de séjour de mesures d'éloignement ; que, dès lors, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;

11. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

12. Considérant qu'au soutien de ce moyen, invoqué à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français qui ne désignent pas le pays de renvoi, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir des conséquences d'un retour au Kosovo ; qu'en toute hypothèse, ainsi qu'il a été dit précédemment, Mme A...n'est pas fondée à soutenir qu'elle ne peut disposer d'un traitement adéquat dans son pays d'origine ; que, compte tenu des conditions de séjour en France des intéressés, les mesures d'éloignement ne portent pas d'atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale ;

15. Considérant, en cinquième lieu, qu'eu égard aux circonstances de l'espèce précédemment rappelées, les mesures d'éloignement litigieuses ne sont pas entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne le délai de retour volontaire :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions dirigées contre ces décisions ;

16. Considérant que les requérants font valoir qu'un délai de retour volontaire supérieur à 30 jours aurait dû leur être accordé compte tenu de leur présence en France depuis 3 ans, du traitement médical suivi par Mme A...et de la scolarisation de leur fils Endi ; que ce dernier est toutefois né en 2006 et scolarisé à l'école maternelle ; qu'en n'accordant pas, à titre dérogatoire, un délai supérieur à 30 jours à M. et Mme A...pour quitter le territoire français, le préfet n'a pas entaché ses décisions d'erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :

17. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité des refus de titre de séjour et des décisions d'éloignement prises à leur encontre à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les décisions fixant le pays de destination ;

18. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort ni des termes des décisions en litige, ni des pièces du dossier, que le préfet de l'Ain, qui a examiné l'ensemble des éléments relatifs à la situation de M. et MmeA..., se soit cru lié par l'appréciation portée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile pour estimer que les décisions désignant le pays de destination ne méconnaissaient pas l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant en situation de compétence liée ne peut qu'être écarté ;

19. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter les moyens présentés en première instance et repris en appel, tirés de l'insuffisance de motivation de ces décisions et de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes ; que leurs conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...A..., à M. B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 7 février 2013 à laquelle siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

M. D...et Mme Samson-Dye, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 28 février 2013.

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N° 12LY00945

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY00945
Date de la décision : 28/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : DEBBACHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-02-28;12ly00945 ?
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