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19/03/2013 | FRANCE | N°12LY01618

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 19 mars 2013, 12LY01618


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 26 juin 2012 sous le n° 12LY01618, présentée pour la société Plein Vent ;

La société Plein Vent demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lyon n° 1003002 du 26 avril 2012 qui, à la demande de l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron et de l'association Coiron à venir, a annulé l'arrêté, en date du 20 avril 2010, par lequel le préfet de l'Ardèche lui a accordé un permis de construire en vue de la reconstruction, à Freyssenet, d'une éolienne endommag

ée par un incendie ;

2°) de rejeter la demande présentée au tribunal administratif...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 26 juin 2012 sous le n° 12LY01618, présentée pour la société Plein Vent ;

La société Plein Vent demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lyon n° 1003002 du 26 avril 2012 qui, à la demande de l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron et de l'association Coiron à venir, a annulé l'arrêté, en date du 20 avril 2010, par lequel le préfet de l'Ardèche lui a accordé un permis de construire en vue de la reconstruction, à Freyssenet, d'une éolienne endommagée par un incendie ;

2°) de rejeter la demande présentée au tribunal administratif de Lyon par l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron et l'association Coiron à venir ;

Elle soutient que les premiers juges ont admis à tort l'intérêt pour agir de l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron et de l'association Coiron à venir ; qu'il n'est pas démontré que le conseil d'administration de la première de ces associations a valablement délibéré ; que la seconde n'a pas justifié d'une situation d'urgence permettant à son président d'introduire la requête présentée au tribunal administratif de Lyon ; que l'instruction d'une demande de permis de construire présentée au titre de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme ne doit porter que sur le respect des conditions prévues par ce texte et sur l'existence d'un éventuel problème de la sécurité pour les occupants de l'immeuble à reconstruire ; qu'ainsi, la légalité du permis initial ne pouvant être remise en cause, il ne saurait être question de recommencer l'instruction qui a abouti à sa délivrance ; que l'étude d'impact réalisée dans le cadre de la demande initiale est suffisante, y compris en ce qui concerne le risque d'incendie ; qu'il n'était pas nécessaire de procéder à une nouvelle enquête publique ni de requérir l'avis de l'autorité environnementale ; qu'en tout état de cause, les irrégularités relevées par le jugement attaqué, à les supposer constituées, n'étaient pas de nature à justifier l'annulation du permis de construire en cause, en l'absence de toute atteinte à une garantie offerte aux tiers et de toute portée sur le sens de la décision ; qu'en effet, l'étude d'impact prétendument manquante aurait nécessairement eu le même contenu que celle du permis initial ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 janvier 2013, présenté pour l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron par Me Maillot, concluant au rejet de la requête et à la condamnation de la société Plein Vent à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que son intérêt pour agir est parfaitement démontré, eu égard à l'objet et au ressort géographique défini par l'article 2 de ses statuts ; que le conseil d'administration a validé, dans les conditions prévues par les articles 9 et 11 de ces statuts, l'action engagée par son président ; que le tribunal a estimé à bon droit que la circonstance que le permis de construire était sollicité au titre de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, lequel est sans effet sur l'application des règles de procédure et de compétence, ne dispensait pas le pétitionnaire de produire une étude d'impact et l'administration de soumettre le projet à enquête publique, comme l'imposent les articles R. 122-5 et R. 123-1 du code de l'environnement ; que ces irrégularités ont privé les tiers d'une garantie ; qu'à tout le moins, il appartenait au préfet de mettre en oeuvre le principe de participation prévu par l'article L. 110-1 4° du code de l'environnement ; que les formalités de l'étude d'impact et de l'enquête publique s'imposaient d'autant plus que le projet de reconstruction à l'identique peut être refusé pour des motifs de sécurité -les risques à prendre en considération étant aussi bien ceux auxquels sont exposés les tiers que ceux auxquels sont exposés les occupants de l'immeuble en cause ; que le dossier de demande de permis ne contenait pas même l'étude d'impact réalisée à l'occasion de la première procédure de permis ; que le fonctionnement des éoliennes génère des risques pour les tiers ; qu'il en va spécialement ainsi en l'espèce, compte tenu de la proximité d'une route et de maisons d'habitation ; que l'incendie qui a détruit l'engin suffit à démontrer la réalité du danger ; que le dossier de demande de permis de construire ne satisfait pas aux exigences des articles R. 431-5 et suivants du code de l'urbanisme, dès lors qu'il ne contient ni notice, ni indication de la hauteur de l'éolienne projetée, ni mention de la démolition de l'engin existant ; que le préfet n'a pas procédé aux consultations requises par l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme ; que l'avis du maire de Freyssenet, exigé par l'article R. 423-72 du même code, est entaché d'irrégularité, cet élu étant nu-propriétaire du terrain d'assiette du projet et donc intéressé à l'affaire ; que le II de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme a été méconnu, en l'absence de dispositions propres à assurer la préservation des paysages et milieux naturels, alors que le plateau du Coiron forme un ensemble paysager remarquable et est inclus dans une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique de type II ; que le permis de construire contesté a été délivré en violation de la règle d'urbanisation en continuité des bourgs, villages, hameaux ou groupe de constructions existants fixée par le III du même article, lequel imposait une délibération du conseil municipal de Freyssenet ; que le projet litigieux ne saurait être regardé comme pouvant bénéficier de la dérogation prévue par ce texte concernant les installations ou équipements publics ; que la jurisprudence n'admet la qualification d'équipements publics, pour les parcs éoliens d'entreprises privées, que dans certaines circonstances tenant à leur importance et à leur destination ; que cette qualification ne saurait être retenue en l'espèce, s'agissant d'un projet comportant une seule éolienne en dehors de toute démarche de planification locale ; que l'implantation retenue ne respecte pas la règle de recul fixée par l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme, qui est applicable à l'ensemble des bâtiments, notion dont les éoliennes n'ont pas à être exclues ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 février 2013, présenté pour la société Plein Vent, concluant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ; elle sollicite en outre la condamnation de l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient en outre que l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron ne peut utilement se prévaloir de la délibération de son conseil d'administration du 23 mars 2012, produite pour la première fois en cause d'appel ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 110-1 4° du code de l'environnement est inopérant dès lors, d'une part, qu'une enquête publique avait été organisée en 2003, à l'époque de l'instruction du permis primitif, d'autre part, que cette disposition est inopposable en l'absence de règlement d'application ; que l'étude d'impact réalisée en 2003 n'avait ni à être jointe au dossier, ni à être actualisée ; que le risque de communication d'incendie est négligeable, de sorte que l'arrêté contesté ne méconnaît pas l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; que le préfet n'avait pas à procéder à de nouvelles consultations ; que l'avis du maire de Freyssenet n'est entaché d'aucune irrégularité, les allégations de la requérante quant à son intéressement n'étant aucunement démontrées ; que les dispositions de l'article L. 145-3 III du code de l'urbanisme sont inopposables dans le cadre d'un permis délivré sur le fondement de l'article L. 111-3 du même code ; qu'en tout état de cause, les parcs éoliens tels que celui de l'exposante revêtent le caractère d'équipements publics au sens de cette disposition et dérogent donc à la règle de constructibilité en continuité de l'existant ; que l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme n'est pas applicable aux éoliennes, qui ne sont pas des bâtiments au sens de ce texte ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 2013 :

- le rapport de M. Zupan, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me Gelas, représentant la Selarl CGR Legal, avocat de la société Plein Vent, et celles de Me Montésinos-Brisset représentant Maillot avocats associés, avocat de l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron ;

1. Considérant que la société Plein Vent relève appel du jugement, en date du 26 avril 2012, par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé, à la demande de l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron et de l'association Coiron à venir, l'arrêté du préfet de l'Ardèche du 20 avril 2010 lui accordant un permis de construire en vue de la reconstruction, sur le territoire de la commune de Freyssenet, d'une éolienne détruite par un incendie survenu le 30 octobre 2009 ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant que l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron a pour objet, défini par l'article 2 de ses statuts, de " protéger l'environnement, les espaces naturels et les paysages de la vallée du Barrès (...), du plateau et des vallées du Coiron " et de " lutter contre toutes les atteintes qui pourraient être portées contre cet environnement à chaque fois qu'elles toucheront au caractère naturel des espaces et des paysages " ; qu'elle justifie ainsi, l'éolienne litigieuse étant située sur le plateau du Coiron, d'un intérêt suffisant pour contester le permis de construire délivré à la société Plein Vent, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le préfet de l'Ardèche a fondé sa décision sur l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme conférant un droit à la reconstruction des ouvrages détruits depuis moins de dix ans nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire ; que l'appelante, par ailleurs, n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause la régularité de la délibération, en date du 23 mars 2012, par laquelle le conseil d'administration de cette association a habilité son président, comme le prévoit l'article 10 des statuts, à contester le permis de construire en cause et qui, contrairement à ce qui est soutenu, avait été produite devant le tribunal ; qu'ainsi, à supposer même que le président de l'association Coiron à venir n'ait pas quant à lui reçu pouvoir d'ester au nom de cette association, le tribunal a pu valablement admettre la recevabilité de la demande dont il était saisi ;

Sur le fond :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté contesté : " La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d'urbanisme en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié " ; que cette disposition n'a ni pour objet ni pour effet de dispenser le pétitionnaire et l'autorité d'urbanisme du respect des formalités prévues par les textes en ce qui concerne la présentation et l'instruction des demandes de permis de construire, quand bien même elles avaient été accomplies lors de la délivrance du permis initial et ce dernier fût-il récent ; que sa mise en oeuvre impose en outre à cette autorité de porter une appréciation sur le caractère de reconstruction à l'identique et sur l'existence d'un risque pour la sécurité publique, et ne procède donc pas d'une situation de compétence liée ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance desdites formalités ne saurait être jugé inopérant ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 553-2 du code de l'environnement, alors en vigueur : " L'implantation d'une ou plusieurs installations produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent dont la hauteur du mât dépasse 50 mètres est subordonnée à la réalisation préalable : a) De l'étude d'impact définie à la section 1 du chapitre II du titre II du livre Ier du présent code ; b) D'une enquête publique soumise aux prescriptions du chapitre III du titre II du livre Ier du présent code " ; qu'il est constant que la société Plein Vent n'a pas produit d'étude d'impact et que l'arrêté contesté a été pris sans que le projet ait fait l'objet d'une enquête publique ; que la circonstance que ces formalités ont en revanche été accomplies en préalable à la délivrance, le 4 décembre 2003, du permis de construire portant sur la réalisation du parc éolien dont fait partie l'éolienne accidentellement détruite est sans incidence sur le constat des irrégularités ainsi commises ; que celles-ci ont privé le public du droit d'expression qui lui est reconnu dans le cadre d'un tel projet, et revêtent ainsi un caractère substantiel, comme l'énonce à bon droit le jugement attaqué ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Plein Vent n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du préfet de l'Ardèche du 20 avril 2010 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la société Plein Vent la somme qu'elle réclame en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions que cette association présente sur le même fondement ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Plein Vent est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Plein Vent, à l'association de défense de l'environnement du Barrès et du Coiron et à l'association Coiron à venir. Copie en sera adressée au préfet de l'Ardèche.

Délibéré après l'audience du 26 février 2013, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président de chambre,

M. Bézard, président,

M. Zupan, président-assesseur.

Lu en audience publique, le 19 mars 2013.

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N° 12LY01618

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01618
Date de la décision : 19/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. David ZUPAN
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SELARL CGR LEGAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-03-19;12ly01618 ?
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