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18/04/2013 | FRANCE | N°12LY01052

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 18 avril 2013, 12LY01052


Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2012, présentée pour la société Steelmag, dont le siège est 105 rue de Vaugraine à Saint-Pierre d'Allevard (38830) ;

La société Steelmag demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903639 du 24 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a, à la demande de M. B...C..., annulé la décision du 28 mai 2009 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville a, d'une part, retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique présenté p

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Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2012, présentée pour la société Steelmag, dont le siège est 105 rue de Vaugraine à Saint-Pierre d'Allevard (38830) ;

La société Steelmag demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903639 du 24 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a, à la demande de M. B...C..., annulé la décision du 28 mai 2009 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville a, d'une part, retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique présenté par la société Steelmag et, d'autre part, annulé la décision du 17 novembre 2008 par laquelle l'inspecteur du travail avait refusé d'autoriser le licenciement de M. C...et autorisé ledit licenciement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de M. C...la somme de 5 000 euros, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et de les condamner aux dépens ;

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier, en raison d'une violation du principe du contradictoire, dès lors qu'elle n'a reçu la communication d'aucune pièce de procédure avant la notification du jugement attaqué ;

- elle n'avait pas vocation à être partie à l'instance, dès lors que M. C... était resté salarié de la société Ugimag France, en liquidation judiciaire, son contrat de travail n'ayant pas été transféré ;

- le signataire de la décision ministérielle en litige, qui a bénéficié d'une délégation de signature par une décision du 5 juillet 2007, publiée au Journal officiel du 20 juillet 2007, était bien compétent pour signer cette décision ;

- le ministre pouvait retirer sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique dans le délai de recours contentieux, dès lors que le licenciement était justifié par des motifs économiques avérés ;

- dès lors que le recours hiérarchique reposait exclusivement sur des pièces déjà communiquées à l'inspecteur du travail et que la procédure contradictoire devant l'inspecteur du travail avait été communiquée au ministre, M. C... ne pouvait avoir de nouvelles observations à formuler ;

- le ministre du travail se trouvait en situation de compétence liée, dès lors que l'administration ne peut apprécier, à l'occasion de la demande d'autorisation de licenciement, si le choix des salariés dont le licenciement est envisagé est conforme à l'ordre des licenciements applicable dans l'entreprise, ni modifier la liste des salariés concernés, et alors que M. C... n'a jamais remis en cause le jugement du tribunal de commerce prévoyant la suppression de son poste ni la décision de l'inspecteur du travail qui constatait l'existence d'un motif économique ; dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des formalités prévues par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 est inopérant ;

- dès lors que M. C... n'a jamais contesté qu'au jour de la décision de l'inspecteur du travail, à laquelle il convient de se placer, il existait un motif économique à son licenciement, ni qu'était satisfaite l'obligation de reclassement, toute argumentation relative à l'absence de motif économique rendant nécessaire la suppression de son emploi devra être écartée, le ministre n'ayant fait que confirmer l'analyse de la situation opérée par l'inspecteur ;

- M. C... ne peut utilement remettre en cause les choix opérés par la société Steelmag en 2009, alors que sa situation actuelle ne peut être prise en compte, seule la situation économique de la société Ugimag, au 1er septembre 2008, devant être prise en considération ;

- contrairement à ce qu'a soutenu M. C..., aucun autre salarié n'a été formé pour occuper son poste alors qu'il était encore dans l'entreprise ;

- dès lors que M. C... a refusé les propositions de reclassement, au sein du groupe dont faisait partie la société Ugimag, alors qu'il pouvait occuper ces postes sous réserve d'une reconversion, il ne peut soutenir que ces propositions n'étaient pas sérieuses ;

- M. C..., qui a refusé la remise en mains propres des propositions de reclassement, a bénéficié d'un délai de réflexion suffisant ;

- le licenciement de M. C... était sans lien avec son mandat ; la catégorie d'emploi d'aide conducteur ne comportait qu'un salarié et disparaissait sans qu'il soit besoin de faire application des critères retenus au salarié l'occupant, alors que la société Ugimag a souhaité donner une chance à ce salarié en rattachant sa catégorie à celle des conducteurs de l'activité aimants, l'intéressé totalisant toutefois le moins de points ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 septembre 2012, présenté par M. C..., qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la société Steelmag, dont il résulte de la fiche Sagace qu'elle a été destinataire des pièces de la procédure de première instance, ne peut soutenir que le jugement serait irrégulier au motif de manquements au principe du contradictoire ;

- les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ne peuvent être écartées dès lors que le jugement du tribunal de commerce du 2 septembre 2008 n'a pas précisément défini les catégories professionnelles concernées par les licenciements et que la saisine de l'inspecteur est intervenue plus d'un mois après le jugement, contrairement aux dispositions de l'article L. 621-4 du code de commerce alors applicables, et alors qu'il résulte d'une lettre de la société Steelmag du 5 décembre 2008 qu'il a été intégré aux effectifs de ladite société à compter du 1er décembre 2008 ; c'est cette société qui a pris l'initiative d'exercer un recours hiérarchique contre la décision de l'inspecteur du travail et qui a procédé à son licenciement ;

- la société requérante n'apporte pas d'éléments de nature à établir que le signataire de la décision en litige bénéficierait d'une délégation de signature ;

- le ministre, qui disposait d'un délai de quatre mois, jusqu'au 19 mai 2009, pour statuer de manière expresse sur le recours hiérarchique, est réputé avoir pris, à l'expiration de ce délai, à défaut de notification d'une décision expresse, une décision implicite de rejet, créatrice de droits pour le salarié, et il ne pouvait rapporter cette décision par une décision notifiée après l'expiration du délai de quatre mois ;

- la décision implicite de rejet du recours hiérarchique ne pouvait être retirée à défaut d'illégalité et en l'absence d'invitation du bénéficiaire de cette décision à présenter des observations, en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- la situation économique de la société Steelmag ne justifiait pas qu'il soit procédé à son licenciement, alors qu'en outre, elle a fait appel à de nombreux intérimaires, sur les postes préalablement occupés par les salariés licenciés, et que son poste n'a pas été supprimé puisqu'un autre salarié a été formé pour l'occuper ;

- l'employeur n'a pas satisfait à son obligation de reclassement, dès lors que les postes proposés ne correspondaient pas à sa qualification et qu'il n'a pas disposé d'un délai de réflexion suffisant ;

- il existe un lien entre son mandat et le licenciement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du commerce ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mars 2013 :

- le rapport de M. Seillet, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;

- et les observations de Me Puig, avocat de la société Steelmag et de la Selarl Administrateurs judiciaires partenaires, et de Me Fessler, avocat de M.C... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 29 mars 2013, présentée pour la société Steelmag et pour la Selarl Administrateurs judiciaires partenaires ;

1. Considérant que la société Ugimag, dont M. C... était salarié, en qualité d'aide conducteur, a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire, par un jugement du Tribunal de commerce de Grenoble du 15 avril 2008 ; que, par un jugement du 2 septembre 2008, ledit Tribunal a arrêté un plan de cession partielle du fonds de commerce et des actifs de la société Ugimag au profit de la société Steelmag, la jouissance du fonds étant confiée au repreneur dès le 1er septembre 2008, et a autorisé l'administrateur judiciaire à procéder au licenciement de 27 salariés non repris par le cessionnaire dans le cadre du plan ; que la société Ugimag a sollicité l'autorisation de licencier, pour motif économique, M. C..., membre du premier collège de la délégation unique du personnel ; que, par une décision du 17 novembre 2008 l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser ledit licenciement ; que, par une décision du 28 mai 2009, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville a, d'une part, retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique présenté par la société Steelmag contre la décision du 17 novembre 2008 de l'inspecteur du travail et, d'autre part, annulé ladite décision et autorisé le licenciement de M. C... ; que la société Steelmag fait appel du jugement du 24 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a, à la demande de M.C..., annulé ladite décision du ministre du travail du 28 mai 2009 ;

Sur les conclusions de la société Steelmag tendant à ce qu'elle soit mise hors de cause dans l'instance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1224-1 du code du travail : " S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. " ; que, selon le II de l'article L. 631-19 du code de commerce : " Lorsque le plan prévoit des licenciements pour motif économique, il ne peut être arrêté par le tribunal qu'après que le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel ont été consultés (...) et que l'autorité administrative compétente a été informée / Le plan précise notamment les licenciements qui doivent intervenir dans le délai d'un mois après le jugement. Dans ce délai, ces licenciements interviennent sur simple notification de l'administrateur (...) Lorsque le licenciement concerne un salarié bénéficiant d'une protection particulière en matière de licenciement, ce délai d'un mois après le jugement est celui dans lequel l'intention de rompre doit être manifestée." ; qu'aux termes de l'article R. 642-3 du même code : " (...) Le jugement arrêtant le plan indique le nombre de salariés dont le licenciement est autorisé ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées. " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, si la cession de l'entreprise en redressement judiciaire arrêtée par un jugement du tribunal de commerce entraîne en principe, de plein droit, le transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et, par voie de conséquence, la poursuite par le cessionnaire des contrats de travail attachés à l'entreprise cédée, conformément aux dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail citées ci-dessus, il peut être dérogé à ces dispositions lorsque le plan de redressement prévoit des licenciements pour motif économique, à la double condition, d'une part, que le plan de cession ait prévu les licenciements devant intervenir dans le délai d'un mois après le jugement arrêtant le plan et, d'autre part, que ce jugement indique le nombre de salariés dont le licenciement est autorisé, ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées ; que lorsque l'autorisation de licencier un salarié protégé est requise dans le cadre de l'exécution d'un plan de cession, le contrat se poursuit de plein droit avec la société cessionnaire si l'autorisation n'a pas été demandée ou a été refusée ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le plan de cession de la société Ugimag a été arrêté, ainsi qu'il a été dit au point 1, par un jugement du 2 septembre 2008 du Tribunal de commerce de Grenoble, qui indiquait notamment que l'administrateur devrait procéder au licenciement des salariés non repris ; que ledit jugement n'indiquait pas que lesdits licenciements devaient intervenir dans le délai d'un mois ; que si l'administrateur judiciaire de ladite société a demandé, au demeurant plus d'un mois après le jugement, à l'inspecteur du travail, sur le fondement de ce jugement, l'autorisation de licencier M. C..., salarié protégé, cette autorisation a été refusée par une décision du 17 novembre 2008 de l'inspecteur du travail ; qu'après ce refus d'autorisation, le contrat de travail de M. C... s'est poursuivi avec la société Steelmag, ainsi que celle-ci le lui a d'ailleurs indiqué dans une lettre du 5 décembre 2008, l'informant qu'il avait été intégré aux effectifs de ladite société à compter du 1er décembre 2008, et qu'elle le lui a ensuite rappelé dans la lettre de licenciement ; que, dès lors, la société Steelmag n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'avait pas la qualité de partie à l'instance ; qu'au demeurant, la décision ministérielle en litige a été prise sur un recours hiérarchique formé par ladite société, ainsi d'ailleurs qu'elle l'avait indiqué à M. C...tant dans ladite lettre du 5 décembre 2008 que dans la lettre de licenciement : qu'elle avait ainsi la qualité de bénéficiaire de ladite décision ; que lorsqu'un tiers saisit un tribunal administratif d'une demande tendant à l'annulation d'une autorisation administrative individuelle, le Tribunal doit appeler dans l'instance la personne qui a délivré l'autorisation attaquée ainsi que le bénéficiaire de celle-ci, la communication de la demande conférant à ces personnes, conformément aux dispositions de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, la qualité de parties en défense, qui les rend recevables à faire appel du jugement annulant l'autorisation, alors même qu'elles n'auraient produit aucune défense en première instance ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance, et notamment de la fiche d'instruction établie par le greffe du Tribunal administratif de Grenoble, que l'ensemble de la procédure a été transmise, au plus tard le 18 octobre 2011, à la société Steelmag, à l'adresse de cette société figurant sur les pièces produites avec la demande de M. C..., après que le greffe eût demandé à ce dernier d'en communiquer les coordonnées complètes, qui est également l'adresse à laquelle le jugement attaqué lui a été notifié ; que, dès lors, la société Steelmag ne peut invoquer l'irrégularité du jugement qui résulterait de la méconnaissance du principe du contradictoire au motif qu'elle n'aurait pas obtenu la communication des pièces de la procédure ;

Sur la légalité de la décision ministérielle en litige :

6. Considérant que la décision de l'inspecteur du travail accordant ou refusant l'autorisation de licencier un salarié protégé est soumise au contrôle hiérarchique dans les conditions du droit commun ; que, dans le cas où l'inspecteur a refusé l'autorisation de licenciement, la décision ainsi prise, qui a créé des droits au profit du salarié intéressé, ne peut être annulée ou réformée par le ministre compétent que pour des motifs de légalité, compte tenu des circonstances de fait et de droit existant à la date à laquelle s'est prononcé l'inspecteur du travail ; que, si le ministre annule ladite décision, il lui appartient de se prononcer sur la demande d'autorisation de licenciement, compte tenu des circonstances de droit et de fait à la date à laquelle il prend sa propre décision ;

7. Considérant, en premier lieu, qu'il n'est pas contesté qu'à la date de la décision de l'inspecteur du travail du 17 novembre 2008, refusant l'autorisation de licencier M. C..., la dégradation persistante des résultats de la société Ugimag, puis le retrait de son principal client, représentant 35 % de son chiffre d'affaires, qui avait conduit à sa mise en redressement judiciaire et à la cession de son fonds de commerce autorisée par un jugement du Tribunal de commerce de Grenoble ayant autorisé le licenciement de 27 salariés, constituait un motif économique de nature à justifier la suppression du poste de M. C... et son licenciement, ainsi au demeurant que l'avait mentionné ladite décision ; que les circonstances, à les supposer établies alors même qu'elles sont contestées par la société requérante, qu'un salarié aurait, à compter d'avril 2009, été spécialement formé pour prendre le poste de M. C... afin de l'occuper à partir du 3 octobre 2009 et qu'entre le licenciement, survenu le 12 juin 2009, et cette date, l'entreprise aurait eu recours à de nombreuses heures supplémentaires et au changement d'horaires d'autres ouvriers, ne sont pas de nature à établir que la situation économique de l'entreprise ne justifiait pas la suppression du poste de M. C... à la date de la décision de l'inspecteur du travail ni à celle de la décision ministérielle en litige ; qu'à supposer même établi le caractère " litigieux " de la définition des catégories professionnelles pour la mise en oeuvre des critères d'ordre des licenciements, cette circonstance n'est pas de nature, à elle seule, à démontrer, en l'absence d'un autre indice, l'existence d'un lien entre le mandat détenu par M. C... et son licenciement ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler la décision ministérielle en litige, les premiers juges se sont fondés sur le motif tiré de l'existence d'un tel lien ;

8. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par M. C... tant en première instance qu'en appel ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2422-1 du code du travail : " Le ministre chargé du travail peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet. Ce recours est introduit dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de l'inspecteur. Le silence gardé pendant plus de quatre mois sur ce recours vaut décision de rejet " ; qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-547 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...) " ; qu'aux termes de l'article 18 de la même loi : " Sont considérées comme des demandes au sens du présent chapitre, les demandes et les réclamations, y compris les recours gracieux ou hiérarchiques, adressées aux autorités administratives. (...) " ;

10. Considérant que si, en excluant les décisions prises sur demande de l'intéressé du champ d'application de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, le législateur a entendu dispenser l'administration de recueillir les observations de l'auteur d'un recours gracieux ou hiérarchique, il n'a pas entendu pour autant la dispenser de recueillir les observations du tiers au profit duquel la décision contestée par ce recours a créé des droits ; qu'il suit de là qu'il ne peut être statué sur un tel recours qu'après que le bénéficiaire de la décision créatrice de droits a été mis à même de présenter ses observations, notamment par la communication du recours ; qu'il en est de même lorsque l'administration, après avoir rejeté implicitement le recours, retire ladite décision implicite de rejet et fait droit audit recours ;

11. Considérant que si le ministre chargé du travail pouvait légalement, dans le délai de recours contentieux, rapporter sa décision implicite, acquise dans les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article R. 2422-1 du code du travail, rejetant le recours hiérarchique formé contre la décision de l'inspecteur du travail refusant d'autoriser le licenciement d'un salarié protégé, qui était créatrice de droit au profit de celui-ci, si ces deux décisions étaient illégales, il appartenait alors audit ministre qui, contrairement à ce que soutient la société requérante, ne se trouvait pas en situation de compétence liée, de mettre à même M. C..., bénéficiaire de la décision créatrice de droits que constituait le rejet du recours hiérarchique formé par la société Steelmag, de présenter ses observations, notamment par la communication du recours ; qu'il n'est pas contesté que M. C... n'a pas été mis à même de présenter ses observations ; que, dès lors, la décision du 28 mai 2009 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville a retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique présenté par la société Steelmag puis a annulé la décision du 17 novembre 2008 par laquelle l'inspecteur du travail avait refusé d'autoriser le licenciement de M. C...et autorisé ledit licenciement, a méconnu les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Steelmag n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 28 mai 2009 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et tendant à la condamnation solidaire de l'Etat et de M. C... aux dépens ;

Sur les conclusions de M. C... tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés à l'occasion de la présente instance par M. C... et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Steelmag est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Steelmag, à la selarl Administrateurs judiciaires partenaires, à Me B...A..., mandataire judiciaire, au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à M. B... C....

Délibéré après l'audience du 28 mars 2013 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Poitreau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 avril 2013.

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N° 12LY01052


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01052
Date de la décision : 18/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : SCP FESSLER JORQUERA CAVAILLES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-04-18;12ly01052 ?
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