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23/04/2013 | FRANCE | N°12LY03186

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 23 avril 2013, 12LY03186


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 27 décembre 2012, présentée pour M. B...A..., domicilié ... ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205712, du 20 novembre 2012, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 11 juin 2012, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français, lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours et désignant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office

l'issue de ce délai ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentio...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 27 décembre 2012, présentée pour M. B...A..., domicilié ... ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205712, du 20 novembre 2012, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 11 juin 2012, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français, lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours et désignant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office à l'issue de ce délai ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation, dès la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ; qu'elle méconnaît également les stipulations du 1 de l'article 3 de la Convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination sont illégales en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour qui les fonde ; que ces mêmes décisions sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ; que la décision lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours est entachée d'un défaut de motivation et d'examen préalable et méconnaît, par suite, les stipulations des articles 7 et 14 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ; qu'en prenant à son encontre cette même décision, le préfet a méconnu les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et les stipulations de l'article 41 la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne qui consacrent le droit pour toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; que cette même décision est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français qui la fonde ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations ;

Vu la décision du 24 janvier 2013, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...A...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2013 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public,

- et les observations de Me Pillet, avocat de M.A... ;

Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens ;

1. Considérant qu'aux termes du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : " au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...A..., ressortissant algérien né le 30 mars 1994, est entré régulièrement en France, le 27 mars 2011, muni d'un visa Schengen de court séjour délivré par les autorités espagnoles, accompagné de sa mère, alors enceinte, qui a donné naissance en France, le 9 août 2011, à un enfant, de nationalité française car né d'un père lui-même né sur le territoire des départements français d'Algérie avant le 3 juillet 1962 ; que la mère de M. B... A...s'est ainsi vu délivrer un certificat de résidence d'un an en sa qualité de mère d'un enfant français ; que si, dès son arrivée en France, la mère de M. B... A..., en situation de grande précarité et hébergée dans un foyer, n'a pas pu prendre en charge son fils Mohamed qui a été confié à des amis en Corse avant d'être placé, dès le 27 avril 2011, comme mineur isolé auprès de la direction des interventions sociales et sanitaires de Haute-Corse, puis d'être confié aux services de l'aide sociale à l'enfance du département du Rhône à compter du 23 novembre 2011, afin de lui permettre de se rapprocher de sa mère et de son jeune frère, M. B...A..., à la date de l'arrêté en litige, vivait auprès de sa mère et de son jeune frère ; qu'à cette même date, M. B... A..., avait été scolarisé auprès de la mission générale d'accueil et de remotivation, avait commencé son apprentissage de la langue française et avait préparé un certificat de formation générale qui l'avait conduit à envisager de devenir agent polyvalent de restauration, suite aux stages effectués dans ce domaine en milieu professionnel ; qu'ainsi, nonobstant le caractère relativement récent de son séjour en France et la présence, en Algérie, de son père et de deux de ses frères à la date de la décision en litige, M. B... A...devait, dans les circonstances particulières de l'espèce, être regardé comme ayant fixé le centre de ses intérêts privés et familiaux en France, où il disposait d'attaches familiales très proches et d'un projet professionnel ; que, par suite, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, par arrêté du 11 juin 2012, le préfet du Rhône a méconnu les stipulations précitées du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que cette décision de refus de délivrance de titre de séjour doit donc être annulée ; qu'il en est de même, par voie de conséquence, de l'obligation de quitter le territoire français dont elle est assortie ainsi que de la décision accordant à M. A...un délai de départ volontaire de trente jours et de celle désignant l'Algérie comme pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'issue de ce délai ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

4. Considérant que M. A...n'a pas présenté de conclusions aux fins d'injonction de délivrance d'un titre de séjour mais seulement de réexamen de sa situation administrative ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé " et qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, modifié par l'article 48 de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. / Si la décision de ne pas accorder de délai de départ volontaire, la décision de placement en rétention ou la décision d'assignation à résidence est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...)" ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet du Rhône de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. A...dans le délai de quinze jours suivant la notification de cet arrêt et de se prononcer sur sa situation administrative, en tenant compte des motifs du présent arrêt, dans le délai de deux mois suivant sa notification ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat quelque somme que ce soit au profit de l'avocat de M.A..., au titre des frais exposés devant la Cour et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1205712, du 20 novembre 2012, du Tribunal administratif de Lyon, ensemble, les décisions du préfet du Rhône, du 11 juin 2012, refusant la délivrance d'un titre de séjour à M.A..., l'obligeant à quitter le territoire français, lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours et désignant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office à l'issue de ce délai, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. A... dans le délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt et de se prononcer sur sa situation administrative, dans le délai de deux mois.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au préfet du Rhône et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 10 avril 2013 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

Mme Méar, président assesseur,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 avril 2013.

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N° 12LY03186


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY03186
Date de la décision : 23/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : PILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-04-23;12ly03186 ?
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