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10/04/2014 | FRANCE | N°12LY22088

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 10 avril 2014, 12LY22088


Vu l'ordonnance n° 372825 du 18 novembre 2013 en tant que le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a décidé d'attribuer à la Cour administrative d'appel de Lyon le jugement de la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 mai 2012 sous le n° 12MA02088, en application des dispositions de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, ainsi que les documents visés par celle-ci, enregistrés au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon sous le n° 12LY22088 ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour

administrative d'appel de Marseille le 24 mai 2012, présentée pour...

Vu l'ordonnance n° 372825 du 18 novembre 2013 en tant que le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a décidé d'attribuer à la Cour administrative d'appel de Lyon le jugement de la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 mai 2012 sous le n° 12MA02088, en application des dispositions de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, ainsi que les documents visés par celle-ci, enregistrés au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon sous le n° 12LY22088 ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 mai 2012, présentée pour M. B...A..., domicilié ... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Nîmes n° 1000994 du 29 mars 2012 en tant, d'une part, qu'il n'a pas entièrement annulé la décision du 11 mars 2010 lui réclamant un trop perçu d'un montant de 7 639,06 euros et, d'autre part, qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de Pôle Emploi à lui verser une somme de 7 000 euros à raison du préjudice subi du fait de l'illégalité fautive de cette décision ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 mars 2010 et de condamner Pôle Emploi à lui verser la somme de 7 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de Pôle Emploi une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que:

- concernant la légalité de la décision du 11 mars 2010, il justifie ne pas avoir cumulé l'aide à la création ou à la reprise d'entreprise (ACCRE) et l'allocation de solidarité spécifique (ASS) dès lors qu'il n'a bénéficié de l'ACCRE qu'à compter du 1er avril 2007 pour une durée limitée d'un an, qu'il n'a bénéficié de l'ASS qu'à compter du mois de janvier 2008, qu'il n'a jamais dégagé de revenu d'activité de son entreprise, qu'il a procédé à la radiation de son entreprise à la fin de l'année 2008, qu'il a signé un contrat de travail à durée indéterminée le 19 janvier 2009 et que la radiation de son entreprise n'a été effective que le 19 mars 2009 ;

- l'illégalité de la décision du 11 mars 2010 constitue une faute de nature à engager la responsabilité de Pôle Emploi ; il a subi des préjudices moral, matériel et financier imputables à cette faute, qui doivent être indemnisés à hauteur de 7 000 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 février 2013, présenté pour Pôle Emploi Languedoc Roussillon, qui conclut au rejet de la requête et à titre subsidiaire, à ce que l'article 2 du jugement soit annulé ;

Il soutient que :

- il doit être mis hors de cause dès lors que la décision réclamant à M. A... un trop perçu a été prise par l'Etat et non par Pôle Emploi qui s'est borné à notifier cette décision ;

- à titre subsidiaire, la décision contestée a été prise conformément aux dispositions des articles L. 5141-1, L. 5141-3 et R. 5141-28 du code du travail alors applicables et L. 161-1-1 du code de la sécurité sociale, le cumul de l'ACCRE et de l'ASS ne pouvant excéder un an ; c'est à tort que le Tribunal a retenu la date du 1er avril 2008 correspondant à une année après l'enregistrement au registre du commerce et des sociétés alors qu'il convient de prendre comme point de départ la date de création effective qui était le 1er janvier 2007 ; la date de versement de l'ASS est sans incidence sur la durée autorisée du cumul des allocations ; M. A...ne justifie pas avoir cessé de percevoir l'ACCRE en avril 2008 et indique, au contraire, qu'il a cessé son activité à la fin de l'année 2009 après avoir été embauché le 19 janvier 2009 et que son entreprise était radiée en mars 2009 ; l'administration justifie, quant à elle, avoir versé l'ASS jusqu'au 31 mai 2009 ; le jugement doit ainsi être infirmé en ce qu'il annulé la décision du 11 mars 2010 en tant qu'elle concerne le versement de l'ASS à M. A...pour la période antérieure au 1er avril 2008 ;

- les conclusions indemnitaires ne sont pas recevables en l'absence de liaison du contentieux ; M. A...ne justifie pas qu'il a subi un préjudice du fait du recouvrement des sommes ; la décision demandant le remboursement de l'indu n'est pas illégale et, à titre principal, Pôle emploi, qui n'est pas l'auteur de cette décision, ne peut être regardé comme étant à l'origine d'un quelconque préjudice ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 mars 2013, présenté pour M.A..., qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que sa demande est dirigée contre les décisions contestées ; que Pôle Emploi est responsable de la gestion des allocations en cause et qu'ainsi, seule sa responsabilité est engagée à raison des préjudices qu'il a subis ; qu'il justifie ne pas avoir cumulé l'ASS et l'ACCRE ; qu'il justifie des préjudices subis ;

Vu la décision du 5 juin 2012, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Marseille a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. A...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l 'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 2014 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

1. Considérant que, par un courrier en date du 11 mars 2010, Pôle Emploi a notifié à M. A... la décision du directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Gard lui réclamant un trop perçu d'allocations de solidarité spécifique d'un montant de 7 639,06 euros au motif que les droits à cette allocation ne lui étaient pas ouverts à compter du 1er janvier 2008 ; que, par un jugement en date du 29 mars 2012, le Tribunal administratif de Nîmes, après avoir rejeté, comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître, les conclusions de M. A...dirigées contre une autre décision du 11 mars 2010 par laquelle Pôle Emploi avait notifié un avis de prise en charge de l'allocation de retour à l'emploi dans la limite de 330 jours et celles de Pôle Emploi tendant à la condamnation de M. A... à un euro symbolique, a annulé cette décision du 11 mars 2010 réclamant un trop perçu d'un montant de 7 639,06 euros en tant seulement qu'elle concerne le versement de l'allocation de solidarité spécifique à M. A...pour la période antérieure au 1er avril 2008 et a rejeté le surplus des conclusions ; que M. A...relève appel dudit jugement en tant que le tribunal administratif a rejeté le surplus de sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 11 mars 2010 lui réclamant un trop perçu d'un montant de 7 639,06 euros et, d'autre part, à la condamnation de Pôle Emploi à lui verser une somme de 7 000 euros à raison du préjudice subi du fait de l'illégalité fautive de cette décision ;

Sur la légalité de la décision du 11 mars 2010 :

2. Considérant que selon l'article L. 351-24 du code du travail repris ensuite, à compter du 1er mai 2008, à l'article L. 5141-1, les personnes créant ou reprenant une activité économique, industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, soit à titre individuel, soit sous la forme d'une société, à condition d'en exercer effectivement le contrôle, pouvaient, sous certaines conditions bénéficier des exonérations sociales mentionnées à l'article L. 161-1-1 du code de la sécurité sociale ; que selon les dispositions des articles L. 351-24-2 et R. 351-41 du code du travail, reprises ensuite aux articles L. 5141-3 et R. 5141-28, les personnes admises au bénéfice des dispositions de l'article L. 351-24, reprises ensuite à l'article L. 5141-1, et qui percevaient l'allocation de solidarité spécifique recevaient une aide de l'Etat, correspondant au versement de ladite allocation, attribuée pour une durée d'un an à compter de la date de création ou de reprise d'une entreprise ;

3. Considérant que M. A...soutient qu'il remplissait les conditions pour bénéficier de plein droit de l'allocation de solidarité spécifique à compter du 1er avril 2008 et que la décision notifiée le 11 mars 2010 est ainsi entachée d'illégalité ;

4. Considérant qu'il ressort cependant des pièces du dossier que, par une décision du 23 janvier 2007, le préfet du Gard a accordé à M. A...l'aide à la création d'entreprise prévue à l'article L. 351-24 du code du travail, repris ensuite à l'article L. 5141-1, sous réserve que son entreprise soit déclarée dans les trois mois suivants la date de cette décision au registre du commerce ; qu'il ressort de l'extrait du registre du commerce produit par l'intéressé que la société à responsabilité limitée " Personne Service Plus " qu'il a créée a été immatriculée le 21 décembre 2006 avec, comme date de début d'activité, le 1er avril 2007 ; que M. A...a ensuite sollicité le 20 novembre 2007 l'octroi de l'allocation de solidarité spécifique qui lui a été accordée le 6 décembre 2007 à compter de janvier 2008 ; que cette allocation lui a été versée jusqu'au 31 mai 2009 ; que toutefois, et alors que le ministre ne conteste pas en appel que, comme l'a jugé le Tribunal pour annuler la décision du 11 mars 2010 en tant qu'elle porte sur la période antérieure au 1er avril 2008, le 1er avril 2007 correspondait à la date de création de l'entreprise de M.A..., il résulte des dispositions susmentionnées des articles L. 351-24-2 et R. 351-41 du code du travail, reprises ensuite aux articles L. 5141-1 et R. 5141-28, que l'intéressé ne pouvait bénéficier de cette allocation que pendant un an à compter de la date de création de son entreprise ; qu'ainsi, à compter du 1er avril 2008, M. A...ne pouvait plus légalement cumuler l'allocation de solidarité spécifique avec l'aide à la création d'entreprise dont il bénéficiait sur le fondement de l'article L. 351-24 du code du travail repris ensuite à l'article L. 5141-1 ; qu'il ne ressort pas en outre des pièces du dossier, notamment des bilans et comptes de résultats de son entreprise produits par le requérant, que, contrairement à ce qu'il soutient, son entreprise avait cessé toute activité et ne bénéficiait plus de l'aide à la création d'entreprise sous la forme d'une exonération des charges sociales dès l'année 2008 au cours de laquelle il a commencé à percevoir l'allocation de solidarité spécifique ; qu'en revanche, il ressort de l'extrait du registre du commerce et des sociétés dont aucun élément produit au dossier ne remet en cause les mentions qui y sont portées, que son entreprise a cessé toute activité à compter du 10 mars 2009, cette société ayant été dissoute de manière anticipée à compter de cette date, M. A...ayant d'ailleurs mentionné cette date de cessation d'activité dans sa demande d'allocation du 1er mars 2010 adressée à l'administration ; qu'ainsi, et comme le fait valoir le requérant, dès lors qu'à compter du 10 mars 2009 il cessait de bénéficier de l'aide à la création d'entreprise prévue à l'article L. 351-24 du code du travail repris à l'article L. 5141-1, en raison de la disparition de son entreprise, l'administration ne pouvait pas légalement se fonder sur les dispositions des articles L. 5141-3 et R. 5141-28 du code du travail, reprenant celles des articles L. 351-24-2 et R. 351-41, pour lui refuser le bénéfice de l'allocation de solidarité spécifique ;

5. Considérant que, par suite, la décision notifiée par un courrier du 11 mars 2010 de Pôle Emploi est entachée d'illégalité en tant que le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle réclame à M. A...le remboursement d'un trop perçu de cette allocation pour la période du 10 mars 2009 au 31 mai 2009 ;

Sur les conclusions indemnitaires :

6. Considérant que M. A...demande la condamnation de Pôle Emploi à l'indemniser des préjudices matériel, moral et financier qu'il a subis du fait de l'illégalité de la décision du 11 mars 2010 ;

7. Considérant que, si l'illégalité d'une décision constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique, il résulte de l'instruction que, comme le fait valoir à titre principal Pôle Emploi, la décision de demander le remboursement d'un trop perçu d'allocation de solidarité spécifique au motif que les droits de M. A...à cette allocation n'étaient pas ouverts à compter du 1er janvier 2008 a été prise par le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Gard, Pôle Emploi s'étant borné à notifier cette décision par courrier du 11 mars 2010 ; que, par suite, les illégalités dont est entachée cette décision ne peuvent être regardées comme étant imputables à Pôle Emploi, dont la responsabilité ne saurait ainsi être engagée à raison desdites illégalités ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, notifiée par courrier de Pôle Emploi du 11 mars 2010, en tant que, par cette décision, le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Gard lui réclame le remboursement d'un trop perçu d'allocation de solidarité spécifique pour la période du 10 mars 2009 au 31 mai 2009 ;

Sur les conclusions de M. A...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

9. Considérant que Pôle Emploi n'étant pas, dans la présente instance la partie perdante, les conclusions de M. A...tendant au paiement par Pôle Emploi à son conseil d'une somme au titre de ces dispositions doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La décision notifiée par courrier du 11 mars 2010 est annulée en tant que le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Gard réclame à M. A... un trop perçu d'allocation de solidarité spécifique pour la période du 10 mars 2009 au 31 mai 2009.

Article 2 : Le jugement du Tribunal du Tribunal administratif de Nîmes du 29 mars 2012 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Pôle Emploi Languedoc Roussillon et au ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social.

Délibéré après l'audience du 20 mars 2014 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 avril 2014.

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N° 12LY22088


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY22088
Date de la décision : 10/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Travail et emploi - Politiques de l'emploi - Aides à l`emploi.

Travail et emploi - Politiques de l'emploi - Indemnisation des travailleurs privés d'emploi.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SELARL CHATEL et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-04-10;12ly22088 ?
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