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24/04/2014 | FRANCE | N°13LY00303

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 24 avril 2014, 13LY00303


Vu, I, la requête, enregistrée le 7 février 2013 au greffe de la Cour sous le n° 13LY00303, présentée pour M. A...C..., domicilié ...;

M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205741 du 3 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 10 mai 2012 par lesquelles la préfète de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

2°) d'annuler lesdites décisions pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjo

indre à la préfète de la Loire de procéder au réexamen de sa situation administrative et de ...

Vu, I, la requête, enregistrée le 7 février 2013 au greffe de la Cour sous le n° 13LY00303, présentée pour M. A...C..., domicilié ...;

M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205741 du 3 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 10 mai 2012 par lesquelles la préfète de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

2°) d'annuler lesdites décisions pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire de procéder au réexamen de sa situation administrative et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'une semaine sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. C...soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale au titre de l'exception d'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour dès lors que cette dernière est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen particulier, a été prise en violation des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que de l'article L. 313-11 7° du même code et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée et n'a pas fait l'objet d'un examen particulier ;

- elle méconnaît les articles L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en production de pièces, enregistré le 28 mars 2014, présenté par la préfète de la Loire ;

Vu la décision du 14 décembre 2012, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. C...;

Vu, II, la requête, enregistrée le 12 juin 2013 au greffe de la Cour sous le n° 13LY01504, présentée pour M. A...C..., domicilié ...;

M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1207894 du 28 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 mai 2012 de la préfète de la Loire lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

2°) d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. C...soutient que :

- l'autorité administrative a commis une erreur de droit en n'examinant pas dans un premier temps les considérations humanitaires ou les motifs exceptionnels permettant d'envisager une admission exceptionnelle au séjour au regard de la vie privée et familiale puis les motifs exceptionnels invoqués pour solliciter une carte de séjour " salarié " ;

- en statuant sur sa demande de titre de séjour au regard des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que M. C...a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la préfète de la Loire a dénaturé sa demande ;

- la décision litigieuse a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne pouvait lui être opposé l'absence de visa et de contrat visé par la DIRECCTE ainsi que la situation de l'emploi ;

- la décision litigieuse est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la préfète de la Loire a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en production de pièces, enregistré le 28 mars 2014, présenté par la préfète de la Loire ;

Vu la décision du 22 avril 2013, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. C...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2014 :

- le rapport de Mme Samson, président,

- les conclusions de M. Levy Ben Cheton, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant M.C... ;

1. Considérant que les requêtes enregistrées sous les n° 13LY00303 et 13LY001504 concernent le même requérant et présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.C..., de nationalité serbe, est entré en France à la date déclarée du 21 avril 2010 ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile, par décision du 30 septembre 2010, confirmée le 5 septembre 2011 par la Cour nationale du droit d'asile ; que l'intéressé a présenté, le 15 mars 2012, une demande d'admission exceptionnelle au séjour et de délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " ; que par décisions du 10 mai 2012, la préfète de la Loire a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé ; que par décision du 31 août 2012, l'autorité préfectorale a prononcé son placement en rétention administrative ; que par jugement n° 1205741 du 3 septembre 2012, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon, saisi dans le cadre du dernier alinéa du III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a annulé la décision de placement en rétention administrative et a rejeté les conclusions de M. C...dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination ; que, par jugement du 28 février 2013, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 mai 2012 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que M. C...relève appel de ces deux jugements ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des requêtes ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de l'article 27 de la loi du 16 juin 2011 : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ;

4. Considérant qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement des dispositions précitées, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; qu'en supprimant, par l'article 27 de la loi du 16 juin 2011, la référence au troisième alinéa de l'article L. 313-10, le législateur a entendu ne pas limiter le champ de l'admission exceptionnelle à la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " aux cas dans lesquels cette admission est sollicitée pour exercer une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement, définis par arrêté ministériel ; que, dans ce cadre, il incombe à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

5. Considérant, d'une part, que pour rejeter sa demande de délivrance d'un titre de séjour présenté sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la préfète de la Loire, par la décision contestée du 10 mai 2012, ne pouvait, comme elle l'a fait, opposer à M. C...l'absence de visa d'entrée sur le territoire ni indiquer qu'après avoir examiné la situation de M. C...au regard de l'article L. 313-10 dudit code, l'intéressé ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 40 de la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile dans la mesure où le métier de manoeuvre qui lui est proposé par la société Adevia ne figure pas sur la liste prévue à l'arrêté du 11 août 2011, lequel a d'ailleurs été annulé par une décision du 26 décembre 2012 du Conseil d'Etat ; que, d'autre part, en mentionnant " qu'après une étude attentive de l'ensemble de la situation de l'intéressé, aucun des documents présents à son dossier ne constitue un élément d'ordre exceptionnel ou humanitaire qui justifierait son admission exceptionnelle au séjour ", alors qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...résidait et travaillait en France depuis plus de deux ans à la date de la décision litigieuse et avait joint à sa demande des éléments et pièces relatifs à son activité professionnelle, la préfète de la Loire n'a procédé à aucun examen de sa situation professionnelle ; qu'elle a dès lors méconnu l'étendue de ses obligations et a entaché sa décision d'erreur de droit ; que, par suite, M. C...est fondé à soutenir que le refus de délivrance du titre de séjour qui lui a été opposé, le 10 mai 2012, doit être annulé ; qu'il en est de même, par voie de conséquence, des décisions du même jour faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office à l'issue de ce délai ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu 'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé " et qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. / Si la décision de ne pas accorder de délai de départ volontaire, la décision de placement en rétention ou la décision d'assignation à résidence est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) " ;

8. Considérant que le présent arrêt n'implique pas, eu égard aux motifs sur lesquels il se fonde, que la préfète de la Loire délivre une carte de séjour temporaire à M. C...; qu'en revanche, il y a lieu de prescrire à la préfète de la Loire de se prononcer à nouveau sur sa situation dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, après lui avoir délivré, dans un délai de quinze jours, une autorisation provisoire de séjour ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, une somme de 1 200 euros à verser à Me B... au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991, sous réserve que Me B...renonce à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les jugements du 3 septembre 2012 et 28 février 2013 du Tribunal administratif de Lyon refusant à M. C...la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'issue de ce délai sont annulés.

Article 2 : L'arrêté du 10 mai 2012 par lequel la préfète de la Loire a refusé de délivrer à M. C... un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination est annulé.

Article 3 : Il est enjoint à la préfète de la Loire de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. C...dans le délai de quinze jours et de se prononcer sur sa situation dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me B...la somme de 1 200 euros sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 5 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., au ministre de l'intérieur et à la préfète de la Loire.

Délibéré après l'audience du 8 avril 2014 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président,

Mme Samson, président-assesseur,

M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 avril 2014.

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Nos 13LY00303...

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00303
Date de la décision : 24/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Dominique SAMSON
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : CADOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-04-24;13ly00303 ?
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