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17/07/2014 | FRANCE | N°13LY01509

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 17 juillet 2014, 13LY01509


Vu la requête, enregistrée le 13 juin 2013, présentée pour M. A...B..., domicilié ...;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200454 du 21 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet du Rhône a rejeté sa demande de carte de séjour ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence temporaire portant la mention "

vie privée et familiale " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte d...

Vu la requête, enregistrée le 13 juin 2013, présentée pour M. A...B..., domicilié ...;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200454 du 21 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet du Rhône a rejeté sa demande de carte de séjour ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil d'une somme de 1 196 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Il soutient qu'il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et que le silence gardé sur cette demande a fait naître une décision implicite de rejet laquelle est, en l'absence de communication des motifs dans le délai d'un mois, entachée d'un défaut de motivation ; que cette même décision méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 juin 2014, présenté par le préfet du Rhône qui conclut au rejet de la requête en se référant à ses écritures devant le tribunal administratif ;

Vu la décision du 4 juillet 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juillet 2014, le rapport de M. Clot, président ;

1. Considérant que M. B..., de nationalité algérienne, est entré en France le 10 mai 2011 afin de rejoindre son épouse et leurs enfants ; qu'il a sollicité, le 29 juillet 2011, la délivrance d'un titre de séjour ; que, par décision du 19 décembre 2011, le préfet du Rhône lui a délivré une autorisation provisoire de séjour d'une durée de six mois, renouvelée le 12 juin 2012 ; que M. B... relève appel du jugement du 21 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé durant plus de quatre mois par le préfet du Rhône sur sa demande de titre de séjour ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : " (...) le silence gardé pendant plus de deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet. Lorsque la complexité ou l'urgence de la procédure le justifie, des décrets en Conseil d'Etat prévoient un délai différent. " ; qu'aux termes de l'article R. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le silence gardé pendant plus de quatre mois sur les demandes de titre de séjour vaut décision implicite de rejet " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par courrier du 27 juillet 2011, M. B...a formulé une demande de titre de séjour, régularisée le 29 juillet 2011 par sa présentation personnelle à la préfecture ; que cette demande tendait à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le silence gardé pendant plus de quatre mois par le préfet du Rhône sur cette demande a fait naître une décision implicite de rejet ; que cette décision implicite ne peut être regardée comme ayant été abrogée par la décision ultérieure du 19 décembre 2011 par laquelle le préfet du Rhône a délivré au requérant une autorisation provisoire de séjour de six mois ; que, par suite, le jugement attaqué, rejetant comme irrecevables les conclusions de M. B...tendant à l'annulation de la décision implicite née du silence gardé sur sa demande de titre de séjour, est irrégulier et doit, en conséquence, être annulé ;

5. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informés sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 5 de la même loi : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués " ;

7. Considérant que M. B...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour le 29 juillet 2011 ; qu'en l'absence de réponse du préfet, une décision implicite de refus de délivrance est née le 29 novembre 2011 ; que, par un courrier reçu le 5 décembre 2011 par le préfet du Rhône, soit durant le délai de recours contentieux, M. B... a demandé les motifs de cette décision implicite ; que le préfet n'a pas répondu à cette demande dans le délai d'un mois qui lui était imparti ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. B...est fondé à soutenir que la décision implicite de refus de délivrance d'un titre de séjour opposée par le préfet du Rhône est entachée d'illégalité ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution, par le même jugement ou le même arrêt. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ; que l'article L. 911-3 de ce code dispose que : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " ;

9. Considérant que l'annulation prononcée par le présent arrêt implique seulement qu'il soit procédé à un nouvel examen de la situation de M. B... ; qu'il y a lieu d'accorder pour ce faire un délai d'un mois au préfet ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Sabatier, avocat de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au profit de Me Sabatier, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 21 mai 2013 et la décision implicite de refus du préfet du Rhône de délivrer un titre de séjour à M. B...sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de réexaminer la situation de M. B...dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Sabatier, avocat de M.B..., la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. B...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Il en sera adressé copie au préfet du Rhône et au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Lyon.

Délibéré après l'audience du 3 juillet 2014 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Poitreau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 juillet 2014.

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N° 13LY01509


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01509
Date de la décision : 17/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-07-17;13ly01509 ?
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