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06/11/2014 | FRANCE | N°13LY01472

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 06 novembre 2014, 13LY01472


Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2013, présentée pour M. A... C..., domicilié... ;

M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200567 du 9 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune des Martres d'Artière et du département du Puy-de-Dôme à lui verser la somme de 10 883,60 euros avec intérêts au taux légal en réparation des dommages causés à la clôture de sa propriété par les travaux réalisés sur la route départementale n° 54 ;

2°) de prononcer

la condamnation demandée ;

3°) de mettre à la charge de la commune des Martres d'Artière et...

Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2013, présentée pour M. A... C..., domicilié... ;

M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200567 du 9 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune des Martres d'Artière et du département du Puy-de-Dôme à lui verser la somme de 10 883,60 euros avec intérêts au taux légal en réparation des dommages causés à la clôture de sa propriété par les travaux réalisés sur la route départementale n° 54 ;

2°) de prononcer la condamnation demandée ;

3°) de mettre à la charge de la commune des Martres d'Artière et du département du Puy-de-Dôme les dépens et une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que les travaux de voirie réalisés par le département du Puy-de-Dôme ont eu pour effet d'accroître la pente du talus appartenant à la commune des Martres d'Artière, situé en contrebas de sa propriété, ce qui a provoqué une érosion du sol et des dommages à sa clôture ; que selon l'expert judiciaire, la faiblesse des fondations de la clôture n'est pas la cause des dommages ; que ceux-ci résultent du défaut d'entretien normal du talus ; que la commune et de département doivent en outre réparer les conséquences des dommages permanents de travaux publics qu'il subit, qui excèdent les inconvénients normaux de voisinage et qui sont spéciaux en ce qu'ils ne touchent que les riverains de la route départementale n° 54 ; que pour la réparation du dommage, il y a lieu de retenir la solution proposée par l'expert, d'un coût de 10 883,60 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 septembre 2013, présenté pour la commune des Martres d'Artière, représentée par son maire en exercice, qui conclut à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que la plus-value apportée à la propriété de M. C... vienne en déduction de l'indemnité qui pourrait lui être due, à la condamnation de l'Etat et du département du Puy-de-Dôme à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre et à la mise à la charge de M. C... d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la requête est irrecevable faute pour M. C... d'établir avoir acquitté la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts ; que le requérant ne justifie d'aucun préjudice certain, puisqu'il n'est fait état que d'un risque ; qu'aucun lien de causalité avec des travaux publics n'est, au demeurant, démontré, trois experts s'accordant pour retenir que les dommages à la clôture ont été provoqués par la structure de cette clôture et la présence de végétation ; que l'expert judiciaire n'établit pas que le talus a été modifié par les travaux ; que l'utilité des travaux préconisés par cet expert n'est pas démontrée ; que la réalisation d'un mur neuf aurait pour effet d'apporter à la propriété de M. C... une plus-value qui doit venir en déduction de l'indemnité réclamée ; que le département du Puy-de-Dôme qui a réalisé les travaux sur la route départementale n° 54 et l'Etat qui en a assuré la maîtrise d'oeuvre, doivent la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 novembre 2013, présenté pour le département du Puy-de-Dôme, représenté par le président du conseil général en exercice, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. C... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la requête, qui ne fait que reprendre la demande de première instance, est irrecevable ; que le lien de causalité entre les travaux entrepris sur la route départementale et la dégradation de la clôture de M. C... n'est pas établi ; qu'au contraire, le dommage résulte de la présence de végétation et du caractère précaire des fondations de la clôture ; que la construction d'un mur apporterait une plus-value ;

Vu l'ordonnance du 4 avril 2014 fixant au 23 avril 2014 la date de clôture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 avril 2014, présenté pour M. C... qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance du 25 avril 2014 reportant au 11 juin 2014 la date de clôture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 juin 2014, présenté pour le département du Puy-de-Dôme, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que M. C... ne peut se prévaloir d'un nouveau rapport d'expertise non contradictoire ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 juin 2014, présenté pour la commune des Martres d'Artière qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2014 :

- le rapport de M. Clot, président ;

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Guinot, avocat de M. C..., de Me Perraudin, avocat du département du Puy-de-Dôme et de Me Martins da Silva, avocat de la commune des Martres d'Artière ;

1. Considérant que M. C... est propriétaire, 27 route de Lussat, aux Martres d'Artière (Puy-de-Dôme), d'un terrain sur lequel une maison d'habitation a été édifiée en 1980 ; que ce terrain surplombe la route départementale n° 54, dont il est séparé par un talus ; que M. C... se plaint de désordres ayant affecté la clôture de sa propriété, qu'il impute à des travaux d'aménagement de la chaussée et d'enfouissement de réseaux réalisés sur cette voie en 2001 et 2004 ; qu'il fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune des Martres d'Artière et du département du Puy-de-Dôme à lui verser une indemnité en réparation de ces désordres ;

Sur les fins de non-recevoir opposées à la requête par la commune des Martres d'Artière et le département du Puy-de-Dôme :

2. Considérant que M. C... justifie avoir acquitté la contribution pour l'aide juridique prévue par les dispositions alors en vigueur de l'article 1635 bis Q du code général des impôts ;

3. Considérant que la requête susvisée de M. C..., qui ne constitue pas la reproduction littérale et exclusive de ses écritures devant le tribunal administratif, satisfait, dès lors, à l'exigence de motivation qu'imposent les dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, applicable en appel en vertu de l'article R. 811-13 du même code ;

4. Considérant, par suite, que les fins de non-recevoir opposées à la requête par la commune des Martres d'Artière et le département du Puy-de-Dôme ne peuvent être accueillies ;

Au fond :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif, que les fondations en béton des poteaux supportant la clôture de la propriété de M. C... ont été déstabilisées par l'érosion du sol, dont le facteur déclenchant a été le terrassement pratiqué en aval du mur, ayant provoqué l'affouillement des fondations et le déversement de l'ouvrage ; qu'ainsi, et contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, les désordres sont imputables au département du Puy-de-Dôme, propriétaire de la voie, à l'égard de laquelle M. C... a la qualité de tiers, et à la commune des Martres d'Artière, qui a fait réaliser des travaux au pied du talus qui constitue un accessoire de cette voie ; qu'il incombe à ces deux collectivités solidairement de réparer les conséquences de ce dommage accidentel ;

6. Considérant que l'expert désigné en référé, comme d'ailleurs l'expert mandaté par l'assureur de M.C..., estime que les racines des végétaux présents à proximité de la clôture, en certains points seulement de celle-ci, ne peuvent expliquer les désordres, de caractère généralisé et que, au contraire, ces racines peuvent avoir contribué à retenir la terre et donc à diminuer l'érosion ; que si l'expert mandaté par l'assureur du département mentionne la fragilité des fondations et la vétusté de la clôture, cette appréciation n'est pas corroborée par l'expert nommé en référé, pour lequel la vétusté est la conséquence et non la cause du sinistre ; que, dès lors, aucune circonstance n'est de nature à atténuer la responsabilité encourue par le département et la commune ;

7. Considérant que le coût des travaux nécessaires pour remédier aux désordres, permettant de rétablir la clôture à son emplacement initial, sans qu'il en résulte de plus-value, a été évalué à 10 883,60 euros par l'expert, qui a mentionné, dans sa réponse aux dires, que cette solution, acceptée par M. C..., est celle qui respecte le mieux l'intégrité de sa propriété ; que cette somme doit être mise à la charge, solidairement, du département du Puy-de-Dôme et de la commune des Martres d'Artière ; que, comme il le demande, M. C... a droit aux intérêts au taux légal de cette somme à compter du 26 mars 2012, date d'enregistrement de sa demande au greffe du tribunal administratif ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;

9. Considérant que le département du Puy-de-Dôme a financé des travaux de voirie sur la route départementale n° 54, dans la traversée de la commune des Martres d'Artière ; que toutefois, ladite commune, dont il résulte de l'instruction qu'elle assurait la maîtrise d'ouvrage de ces travaux, ne justifie d'aucun manquement du département à des obligations lui incombant ; qu'il résulte également de l'instruction que les services de l'Etat ont assuré la maîtrise d'oeuvre des travaux de voirie précités ; que toutefois, la commune ne justifie d'aucun manquement de ces services dans l'exécution de cette mission ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune des Martres d'Artière n'est pas fondée à demander à être garantie par le département du Puy-de-Dôme et par l'Etat de sa condamnation ;

11. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 2 005,09 euros, doivent être mis à la charge, solidairement, du département du Puy-de-Dôme et de la commune des Martres d'Artière ;

12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidairement du département du Puy-de-Dôme et de la commune des Martres d'Artière le paiement à M. C... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la contribution pour l'aide juridique qu'il a acquittée ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le département du Puy-de-Dôme et la commune des Martres d'Artière, qui sont les parties tenues aux dépens, bénéficient d'une somme au titre de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 9 avril 2013 est annulé.

Article 2 : Le département du Puy-de-Dôme et la commune des Martres d'Artière sont condamnés solidairement à payer à M. C... la somme de 10 883,60 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 26 mars 2012.

Article 3 : Les frais d'expertise sont mis à la charge solidairement du département du Puy-de-Dôme et de la commune des Martres d'Artière.

Article 4 : Le département du Puy-de-Dôme et la commune des Martres d'Artière verseront solidairement à M. C... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la contribution pour l'aide juridique.

Article 5 : Les conclusions du département du Puy-de-Dôme et de la commune des Martres d'Artière sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au département du Puy-de-Dôme, à la commune des Martres d'Artière et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Copie en sera adressée à M.B..., expert.

Délibéré après l'audience du 16 octobre 2014 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique le 6 novembre 2014.

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N° 13LY01472 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01472
Date de la décision : 06/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-03-04-01 Travaux publics. Différentes catégories de dommages. Dommages créés par l'exécution des travaux publics. Travaux publics de voirie.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SCP CHASSAIGNE - PAILLONCY - GUINOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-11-06;13ly01472 ?
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