La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/05/2016 | FRANCE | N°15LY01049

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 5, 31 mai 2016, 15LY01049


Vu la procédure suivante :

I - Par une requête enregistrée le 25 mars 2015 sous le n° 15LY01049 et un mémoire enregistré le 15 décembre 2015 qui n'a pas été communiqué, la SAS Tomiya, la SAS Verinne, la SARL Menodis et la SAS Distribution Casino France demandent à la cour :

1°) d'annuler la décision n° 2358 D du 12 novembre 2014 par laquelle la commission nationale d'aménagement commercial a admis le recours de la société Ville-la-Dis contre la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de la Haute-Savoie du 10 juillet 2014 refusant de l

ui délivrer une autorisation d'exploiter à titre provisoire un hypermarché à l'...

Vu la procédure suivante :

I - Par une requête enregistrée le 25 mars 2015 sous le n° 15LY01049 et un mémoire enregistré le 15 décembre 2015 qui n'a pas été communiqué, la SAS Tomiya, la SAS Verinne, la SARL Menodis et la SAS Distribution Casino France demandent à la cour :

1°) d'annuler la décision n° 2358 D du 12 novembre 2014 par laquelle la commission nationale d'aménagement commercial a admis le recours de la société Ville-la-Dis contre la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de la Haute-Savoie du 10 juillet 2014 refusant de lui délivrer une autorisation d'exploiter à titre provisoire un hypermarché à l'enseigne E. Leclerc d'une surface de vente de 2 700 m², sur le territoire de la commune de Ville-la-Grand et a autorisé ce projet ;

2°) de mettre une somme de 1 500 euros à la charge solidaire de la société Ville-la-Dis et de l'Etat à verser à chacune d'elles en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la décision contestée n'est pas suffisamment motivée ;

- le dossier de demande est incomplet dès lors qu'il ne comporte pas d'information sur la capacité des voies à absorber les flux de circulation et que les éléments fournis ne permettent pas d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement ;

- la commission nationale a apprécié les critères législatifs au regard du caractère provisoire de l'autorisation demandée alors qu'une telle autorisation n'est pas prévue par la loi, ce qui ne lui a pas permis de porter une appréciation globale sur la situation ;

- le projet nuira à l'animation de la vie urbaine dès lors que le déplacement du magasin entraînera un bouleversement de l'économie au niveau local et qu'il n'est pas garanti que l'activité cessera après le délai de deux ans nécessaire pour la réalisation des travaux de l'hypermarché actuel ;

- il n'est pas certain que les aménagements nécessaires à la desserte du magasin seront réalisés lors de l'ouverture au public ;

- le projet ne prévoit pas d'amélioration du bâtiment existant qui ne s'accorde pas avec les espaces verts et le bâti environnant, aucune mesure n'est prévue pour maîtriser la consommation énergétique et le projet entraine un accroissement de l'imperméabilisation des sols.

Par un mémoire enregistré le 17 septembre 2015, la société Ville-la-Dis conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la commission nationale d'aménagement commercial qui n'a pas produit d'observations.

II - Par une requête enregistrée le 25 mars 2015 sous le n° 15LY01056 et un mémoire enregistré le 15 décembre 2015 qui n'a pas été communiqué, la société constructions industrielles savoyardes (CIS) et la société La Colline demandent à la cour :

1°) d'annuler la décision n° 2358 D du 12 novembre 2014 par laquelle la commission nationale d'aménagement commercial a admis le recours de la société Ville-la-Dis contre la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de la Haute-Savoie du 10 juillet 2014 refusant de lui délivrer une autorisation d'exploiter à titre provisoire un hypermarché à l'enseigne E. Leclerc d'une surface de vente de 2 700 m², sur le territoire de la commune de Ville-la-Grand et autorisant ce projet ;

2°) de mettre une somme de 5 000 euros à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'obligation de participation du public a été méconnue ;

- il n'est pas établi que l'avis du ministre chargé du commerce a été signé par une autorité compétente ;

- le projet n'a pas été présenté de façon sincère dès lors que le bâtiment existant a été modifié avant le dépôt de la demande d'autorisation et ne porte pas sur le " drive " existant, qui doit faire l'objet d'une autorisation ;

- les autorisations provisoires ne sont pas prévues par le code de commerce et l'autorisation délivrée ne précise pas sa durée de validité ;

- il n'est pas garanti que l'exploitation du magasin ne sera que provisoire ;

- la qualité environnementale du projet est insuffisante ;

- les conditions d'accès au projet sont insuffisantes.

Par un mémoire enregistré le 8 décembre 2015, la société Ville-la-Dis conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- les deux sociétés requérantes sont dépourvues de tout intérêt pour agir contre la décision contestée ;

- les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la commission nationale d'aménagement commercial qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vaccaro-Planchet,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., représentant la SAS TOMIYA et autres, celles de MeE..., représentant la SAS Ville-la-Dis, et celles de MeF..., représentant la Selarl Parme avocats, avocat de la société CIS et autre.

Une note en délibéré, présentée pour la SAS Tomiya, la SAS Verinne, la SARL Menodis et la SAS Distribution Casino France, a été enregistrée le 12 mai 2016.

Une note en délibéré, présentée pour la société CIS et la société La Colline, a été enregistrée le 12 mai 2016.

1. Considérant que, par une décision du 12 novembre 2014, la commission nationale d'aménagement commercial a admis le recours de la société Ville-la-Dis contre la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de la Haute-Savoie du 10 juillet 2014 refusant de lui délivrer une autorisation d'exploiter à titre provisoire un hypermarché à l'enseigne E. Leclerc d'une surface de vente de 2 700 m² sur le territoire de la commune de Ville-la-Grand et a autorisé ce projet ; que la SAS Tomiya et autres, d'une part, et la société CIS et autre, d'autre part, demandent l'annulation de cette décision de la commission nationale d'aménagement commercial ;

2. Considérant que ces requêtes sont dirigées contre la même décision ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la société Ville-la-Dis à la requête de la société CIS et de la SCI La Colline :

3. Considérant que la société Ville-la-Dis soutient que les sociétés requérantes ne justifient d'aucun intérêt leur donnant qualité pour agir ;

4. Considérant que la société CIS affirme être propriétaire d'un terrain situé au sein de la zone d'activité du Mont-Blanc à Ville-la-Grand, sur lequel est exploité un ensemble commercial, et allègue avoir obtenu deux autorisations d'exploitation commerciale ; que toutefois, elle n'apporte aucun élément relatif à l'incidence économique directe et certaine qu'aurait le projet sur un ensemble commercial dont elle serait propriétaire ;

5. Considérant que la seule qualité de propriétaire de terrains à vocation commerciale situés dans la zone de chalandise du projet ne suffit pas à conférer à la société La Colline, qui n'est ni exploitante, ni propriétaire d'un commerce sur lequel le projet est susceptible d'avoir une incidence économique directe et certaine, un intérêt pour agir contre la décision contestée ;

6. Considérant que, dès lors, la fin de non recevoir opposée par la société Ville-la-Dis à la requête de la société CIS et de la SCI La Colline doit être accueillie ;

Sur la légalité de la décision du 12 novembre 2014 :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés " ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 752-6 du même code : " Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ; b) L'effet du projet sur les flux de transport ; c) Les effets découlant des procédures prévues aux articles L. 303-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 123-11 du code de l'urbanisme ; 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet ; b) Son insertion dans les réseaux de transports collectifs " ;

9. Considérant que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce ; que, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 4 août 2008, la densité d'équipement commercial de la zone de chalandise concernée ne figure plus au nombre de ces critères ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Ville-la-Dis exploite un hypermarché d'une surface de vente de 3 200 m² à l'enseigne E. Leclerc sur le territoire de la commune de Ville-la-Grand ; que, par une décision devenue définitive du 13 janvier 2011, la commission nationale d'aménagement commercial l'a autorisée à porter la surface de vente de cet hypermarché à 5 900 m² ; que par la décision contestée du 12 novembre 2014, la commission nationale d'aménagement commercial l'a autorisée à exploiter à titre provisoire, pendant la durée, de 24 mois, des travaux de reconstruction de l'actuel magasin, une surface de vente de 2 700 m² à aménager au sein d'un ancien bâtiment industriel utilisé comme entrepôt et qui accueille le " drive " de l'enseigne, dont la société est propriétaire à Ville-la-Grand ; que dans ces conditions, l'extension de l'hypermarché actuel et la création d'une surface de vente provisoire durant les travaux induits par cette extension forment, en réalité, un projet unique, au sens des dispositions précitées du code de commerce ; que ce projet devait, en vertu de ces dispositions, faire l'objet d'une seule demande d'autorisation, comportant notamment une analyse de son impact global sur la clientèle et les équipements existants dans la zone d'attraction ; qu'en soumettant successivement à la commission nationale des demandes visant à l'extension de l'hypermarché qu'elle exploite, puis à la création d'une surface de vente temporaire, pour la durée des travaux nécessités par cette extension, la société Ville-la-Dis n'a pas permis, en l'espèce, à la commission de se livrer, comme elle y était tenue, à l'appréciation globale de l'impact, sur la zone de chalandise, de l'ensemble de l'opération ; qu'ainsi, comme le soutiennent la SAS Tomiya et autres, la décision de la commission nationale d'aménagement commercial du 12 novembre 2014 est entachée d'une erreur de droit ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la SAS Tomiya et autres sont fondées à demander l'annulation de la décision de la commission nationale d'aménagement commercial du 12 novembre 2014 ;

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par la SCI La Colline et la société CIS soit mise à la charge de la société Ville-la-Dis et de l'Etat ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre la somme de 750 euros à la charge de l'Etat et la même somme à la charge de la société Ville-la-Dis au titre des frais exposés par la SAS Tomya et autres à l'occasion du litige ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société CIS et de la SCI La Colline est rejetée.

Article 2 : La décision n° 2358 D du 12 novembre 2014 de la commission nationale d'aménagement commercial est annulée.

Article 3 : L'Etat et la société Ville-la-Dis verseront, chacun, la somme globale de 750 euros aux sociétés Tomiya et autres.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Tomiya, à la SAS Verinne, à la SARL Menodis, à la SAS Distribution Casino France, à la société Ville-la-Dis, à la société constructions industrielles savoyardes, à la SCI La Colline et à la commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2016, à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. B...H... et M.C..., présidents-assesseurs,

M. G...A...et Mme Vaccaro-Planchet, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 31 mai 2016.

1

5

N°s 15Y01049, 15LY01056


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 15LY01049
Date de la décision : 31/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Véronique VACCARO-PLANCHET
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : CASTERA

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-05-31;15ly01049 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award