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19/07/2016 | FRANCE | N°15LY03856

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 19 juillet 2016, 15LY03856


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

- d'une part, d'annuler les décisions du 26 août 2015 du préfet de l'Isère portant refus de délivrance d'un titre de séjour, assorti de l'obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et prononçant une assignation à résidence ;

- d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1505343 du 29 août 2015, le magistrat désigné

par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté les conclusions de sa demande à fin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

- d'une part, d'annuler les décisions du 26 août 2015 du préfet de l'Isère portant refus de délivrance d'un titre de séjour, assorti de l'obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et prononçant une assignation à résidence ;

- d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1505343 du 29 août 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté les conclusions de sa demande à fin d'annulation des décisions du préfet de l'Isère du 26 août 2015 portant obligation de quitter le territoire français, refusant un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et portant assignation à résidence.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2015, présentée pour M. D...E..., domicilié..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1505343 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble du 29 août 2015 en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère du 26 août 2015 portant obligation de quitter le territoire français sans délai et assignation à résidence ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ainsi que la décision du préfet de l'Isère du 26 août 2015 prononçant une interdiction de retour sur le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour "vie privée et familiale" et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise au terme d'une procédure irrégulière à défaut pour le préfet d'avoir transmis l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ou de l'avoir cité dans son intégralité ; elle est insuffisamment motivée et le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ; le refus de titre méconnaît les stipulations de l'article 6-7° de l'accord franco-algérien, eu égard aux conséquences de l'arrêt du traitement qui n'est pas disponible en Algérie, et il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 511-14-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'existait aucune nécessité de nature à justifier une obligation de quitter le territoire français.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 octobre 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel).

Le préfet de l'Isère a transmis, le 21 juin 2016, l'avis émis le 19 novembre 2014 par le médecin de l'agence régionale de santé Rhône-Alpes.

Par un mémoire, enregistré le 24 juin 2016, présenté pour M.E..., il maintient les conclusions de sa requête par les mêmes moyens.

Il soutient, en outre, que :

- le médecin de l'agence régionale de santé a rendu un avis incomplet dès lors que ce dernier n'indique pas s'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié en Algérie ;

- la décision en litige est entachée d'un défaut d'examen dès lors que le préfet n'a pas examiné la condition de l'accès effectif au traitement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2016 le rapport de M. Seillet, président.

1. Considérant que M. E..., ressortissant algérien né le 8 janvier 1985 à Chlef (Algérie), entré en Italie le 5 octobre 2011 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour valable 30 jours et qui déclare être entré le même jour en France, a sollicité son admission au séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6-7° de l'accord franco-algérien en se prévalant de son état de santé ; que par une décision du 10 juillet 2013 il a fait l'objet d'une décision d'obligation de quitter le territoire qu'il n'a pas exécutée ; qu'il s'est présenté le 24 octobre 2014 à la préfecture de l'Isère et a demandé à nouveau un titre de séjour sur le même fondement de l'article 6-7° de l'accord franco-algérien ; que par un arrêté du 26 août 2015 le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et a fixé le pays de destination ; que par un arrêté du même jour le préfet de l'Isère l'a assigné à résidence ; que M. E... fait appel du jugement du 29 août 2015 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère du 26 août 2015 portant obligation de quitter le territoire français sans délai et assignation à résidence ; qu'il demande également l'annulation de la décision du même jour d'interdiction de retour sur le territoire français ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'il n'est pas contesté que le médecin de l'agence régionale de santé de Rhône-Alpes a émis, le 19 novembre 2014 un avis, selon lequel l'état de santé de M. E... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que si M. E... fait valoir qu'il appartenait au préfet de l'Isère de produire l'avis ainsi émis par ledit médecin, ce qu'il a fait au demeurant en appel, aucune disposition législative ou réglementaire ne lui imposait de le communiquer de lui-même à l'intéressé ; que le moyen tiré de ce que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé serait insuffisamment motivé peut être utilement invoqué pour contester la légalité d'un refus de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que ledit médecin, qui a estimé que le défaut de prise en charge médicale de M. E... ne devrait pas entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, n'avait pas, en l'espèce, à motiver son avis sur l'existence d'un traitement effectivement disponible dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision en litige serait fondée sur un avis irrégulier du médecin de l'agence régionale de santé doit être écarté ; qu'il en est de même du moyen tiré de ce que le préfet de l'Isère n'a pas davantage motivé sa décision sur le point de savoir s'il existe un traitement adapté à l'état de santé du requérant en Algérie ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour, notamment lorsque la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger, ce qui est le cas en l'espèce ; que ces dispositions ont pour objet de dispenser l'obligation de quitter le territoire français d'une motivation spécifique, dans la mesure où sa motivation se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision faisant obligation à M. E... de quitter le territoire français doit être écarté ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Isère n'aurait pas procédé à un examen particulier de la demande de M. E... ;

4. Considérant, en troisième lieu, que M. E... excipe de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour du 26 août 2015 ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) " ;

6. Considérant que la décision de refus de délivrance de titre de séjour en litige se fonde notamment sur l'avis du médecin de l'agence régionale de santé de Rhône-Alpes du 19 novembre 2014, selon lequel l'état de santé de M. E... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que si les certificats produits par M. E..., établis par le professeur Merloz, du centre hospitalier universitaire de Grenoble et par M.A..., kinésithérapeute, confirment la nécessité d'un suivi médical après les interventions de la jambe gauche qu'il a dû subir en France, en raison d'une rupture de l'appareil extenseur en conséquence d'une libération du quadriceps après un allongement du fémur par fixateur externe, ils sont cependant insuffisants pour remettre en cause l'avis dudit médecin et pour démontrer que le défaut de prise en charge pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, à supposer même établie la circonstance qu'il ne pourrait effectivement bénéficier en Algérie d'un traitement approprié à son état de santé ; que, par suite, la décision de refus de titre de séjour n'a pas méconnu les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

7. Considérant, en quatrième lieu qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;

8. Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, il ne ressort pas des pièces du dossier que le défaut de prise en charge médicale pourrait entraîner pour M. E... des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, dès lors, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant, en cinquième lieu, que le moyen, déjà soulevé en première instance, tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les motifs retenus par le premier juge et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Isère se serait estimé tenu d'obliger M. E... à quitter le territoire français sans délai et qu'il aurait commis une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que ladite décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. E... ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère du 26 août 2015 portant obligation de quitter le territoire français sans délai et assignation à résidence ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'annulation de la décision du même jour d'interdiction de retour sur le territoire français, au demeurant nouvelles en appel et, par suite, irrecevables, aux fins d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2016 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

M. C...et MmeB..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 19 juillet 2016.

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N° 15LY03856


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03856
Date de la décision : 19/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : JAYLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-07-19;15ly03856 ?
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