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02/08/2016 | FRANCE | N°15LY00931

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 02 août 2016, 15LY00931


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions en date du 29 janvier 2015 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination, ainsi que celle, du même jour, ordonnant son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1500694 du 2 février 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon,

faisant droit à sa demande, a annulé ces décisions et a enjoint au préfet de la Ha...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions en date du 29 janvier 2015 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination, ainsi que celle, du même jour, ordonnant son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1500694 du 2 février 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon, faisant droit à sa demande, a annulé ces décisions et a enjoint au préfet de la Haute-Savoie de délivrer à M. C...une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois suivant la notification de son jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 mars 2015, le préfet de la Haute-Savoie demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 2 février 2015 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le premier juge, M. C...n'était pas fondé à soutenir que faisaient obstacle à son éloignement les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans les prévisions desquelles il n'entrait pas ;

- le surplus de ses moyens de première instance est par ailleurs également infondé.

Par ordonnance du 30 décembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 22 janvier 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Lévy Ben Cheton a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. C..., ressortissant géorgien né en 1974, déclare être dans un premier temps entré en France en 2012, puis de nouveau le 29 janvier 2015 ; que par deux arrêtés du 29 janvier 2015 le préfet de la Haute-Savoie l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et l'a placé en rétention administrative pour cinq jours ; que cette autorité fait appel du jugement du 2 février 2015, par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé l'ensemble de ces décisions ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans sa rédaction applicable au litige : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C... a été interpellé par les services de la police aux frontières de Chamonix le 29 janvier 2015, alors qu'il venait de pénétrer sur le territoire français à bord d'un autocar assurant la liaison Milan-Paris, en possession de documents d'identité polonais falsifiés ; qu'il entrait donc dans le cas prévu par les dispositions du 1°) du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur le fondement desquelles le préfet de la Haute-Savoie a décidé son éloignement ;

4. Considérant que si l'intéressé a soutenu devant le premier juge n'être allé en Italie qu'afin de chercher un acte de naissance, et résider en France depuis 2012, il n'apporte à l'appui de telles allégation aucun commencement de preuve ; qu'il ne saurait être, par suite, regardé comme résidant en France de façon habituelle, au sens des dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que c'est donc à tort que, pour annuler la décision faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français et, par voie de conséquence, les décisions fixant le pays de destination et portant placement en rétention administrative, le premier juge s'est fondé sur le motif tiré de ce que le préfet de la Haute-Savoie avait méconnu ces dispositions ;

5. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués devant le tribunal ;

6. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté en litige a été signé par M. B... A... du Payrat, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Savoie, qui bénéficiait d'une délégation de signature du 30 juillet 2012 du préfet de ce département, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Haute-Savoie, à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Haute-Savoie, sous réserve de certaines exceptions dont ne relèvent pas les décisions prises en matière de police des étrangers ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de refus de titre de séjour doit être écarté ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que l'ensemble des décisions contestées est motivé, en fait comme en droit, avec une précision suffisante au regard des exigences de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 alors en vigueur ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit au point 4, M. C..., qui ne résidait pas en France de façon habituelle, n'entrait pas, quel que soit son état de santé, dans les prévisions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet n'était donc nullement tenu de consulter le médecin de l'agence régionale de santé avant de décider de son éloignement ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...). /Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) e) Si l'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. (...) " ;

10. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, M. C... a été interpellé par les services de police alors qu'il venait de pénétrer irrégulièrement sur le territoire français en possession de documents d'identité polonais falsifiés, mentionnant une autre identité que la sienne ; que s'il était également en possession d'un passeport en cours de validité, il ne justifiait ni de la réalité de ses moyens d'existence, ni d'un hébergement stable sur le territoire français, ni de garanties de représentation suffisantes propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire ; qu'ainsi, il entrait dans les prévisions de ces dispositions, sur lesquelles le préfet a, à bon droit, fondé sa décision le privant de délai de départ volontaire ;

11. Considérant, en cinquième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) / 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) " ;

12. Considérant que, pour les motifs déjà exposés aux points 3 et 10, le préfet de la Haute-Savoie a fait une exacte application des dispositions précitées du 6° de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en décidant de placer M. C... en rétention administrative ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions en litige ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon du 2 février 2015 est annulé.

Article 2 : La demande de M. C...devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. D... C....

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie et au procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Annecy.

Délibéré après l'audience du 5 juillet 2016 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Picard, président-assesseur,

M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 août 2016.

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N° 15LY00931

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY00931
Date de la décision : 02/08/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Laurent LEVY BEN CHETON
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA

Origine de la décision
Date de l'import : 09/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-08-02;15ly00931 ?
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