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29/03/2018 | FRANCE | N°16LY03170

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 5, 29 mars 2018, 16LY03170


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Courant SAS a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, de rétablir son déficit reportable de l'exercice clos en 2007 à concurrence de 21 697 euros et, d'autre part, de lui accorder la restitution de sa créance déclarée en application de l'article 220 quinquies du code général des impôts au titre de l'exercice clos en 2008, d'un montant de 50 213 euros.

Par un jugement n° 1305881 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure d

evant la cour

Par une requête enregistrée le 13 septembre 2016 et un mémoire enregistré ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Courant SAS a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, de rétablir son déficit reportable de l'exercice clos en 2007 à concurrence de 21 697 euros et, d'autre part, de lui accorder la restitution de sa créance déclarée en application de l'article 220 quinquies du code général des impôts au titre de l'exercice clos en 2008, d'un montant de 50 213 euros.

Par un jugement n° 1305881 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 13 septembre 2016 et un mémoire enregistré le 2 juin 2017, la société Courant SAS, représentée par Me Besson, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 12 juillet 2016 ;

2°) de lui accorder la restitution de créance et le rétablissement de déficit reportable demandés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- s'agissant de la créance de report en arrière de déficit, l'article 223 G du code général des impôts ne fait pas de distinction suivant que le bénéfice déclaré par la société mère au titre de l'exercice de report est un bénéfice propre ou un bénéfice du résultat d'ensemble ;

- l'instruction A H-9-88 du 9 mai 1988 ne va pas à l'encontre de cette interprétation du texte ;

- la fusion entre la société Courant SAS et sa filiale n'a eu aucune incidence dans la prise en compte des résultats du groupe ;

- le passif de taxe sur la valeur ajoutée à régulariser rejeté par l'administration est justifié.

Par des mémoires enregistrés le 20 mars 2017 et le 12 juin 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens présentés par la société Courant SAS n'est fondé.

La clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 30 juin 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Savouré, premier conseiller,

- les conclusions Mme Bourion, rapporteur public ;

- les observations de Me Besson, avocat de la société Courant SAS ;

Deux notes en délibéré, présentées pour la société Courant SAS, ont été enregistrées le 14 mars 2018.

Considérant ce qui suit :

1. La société Courant SAS, société holding qui détient des sociétés exerçant leur activité notamment dans le domaine de la fabrication et la commercialisation de gaines, tubes, tuyaux et grillages en plastique, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 2006, 2007 et 2008, à l'issue de laquelle l'administration a refusé d'admettre en déduction, au titre de l'exercice clos en 2007, un passif de taxe sur la valeur ajoutée de 21 697,80 euros, issu de sa fusion avec la SARL Corelco. Cette rectification a entrainé une réduction du déficit déclaré au titre de cet exercice. Par ailleurs, l'administration a réduit à 496 834 euros la créance de report en arrière de déficit initialement déclarée par la société Courant SAS au titre de l'exercice clos en 2008 pour un montant de 547 047 euros. La société Courant SAS interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la réintégration de cette somme de 21 697,80 euros à son déficit de l'exercice clos en 2007 et au rétablissement de sa créance de report en arrière de déficit.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments invoqués, ont motivé avec une précision suffisante leur réponse aux moyens soulevés devant eux par la société Courant SAS. Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Au fond :

En ce qui concerne le passif de taxe sur la valeur ajoutée :

3. Aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net imposable est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminuée des suppléments d'apports et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ". Il appartient au contribuable de justifier du principe et du montant de ses écritures de passif.

4. Au cours de l'exercice clos en 2007, la société Courant SAS a absorbé la SAS Corelco, acceptant à cette occasion l'intégralité du passif de cette dernière. L'administration a cependant refusé d'admettre un passif de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant total de 21 697,80 euros, en l'absence de pièce justificative. Si la SAS Courant a produit devant les premiers juges un extrait de son compte général mentionnant cette somme sous l'intitulé " fusion corleco sarl " et un extrait de compte général de la SAS Corelco avant fusion, relatif à la taxe sur la valeur ajoutée à régulariser, mentionnant un loyer d'un montant de 10 584 euros et des " prestations de management " pour un montant de 11 113,20 euros, ces documents ne permettent pas de justifier l'existence d'un passif de taxe sur la valeur ajoutée. Si elle produit, pour la première fois en appel, deux factures mentionnant les mêmes montants de taxe sur la valeur ajoutée, celles-ci sont datées du 31 mai 2010 et ne sauraient, dès lors, justifier l'existence d'un passif à la clôture de l'exercice 2007.

En ce qui concerne le report en arrière du déficit de l'exercice clos en 2008 :

5. Aux termes de l'article 220 quinquies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " I. Par dérogation aux dispositions du troisième alinéa du I de l'article 209, le déficit constaté (...) par une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés peut, sur option, être considéré comme une charge déductible du bénéfice de l'antépénultième exercice et, le cas échéant, de celui de l'avant-dernier exercice puis de celui de l'exercice précédent (...) / L'excédent d'impôt sur les sociétés résultant de l'application du premier alinéa fait naître au profit de l'entreprise une créance d'égal montant. La constatation de cette créance, qui n'est pas imposable, améliore les résultats de l'entreprise et contribue au renforcement des fonds propres. (...) ".

6. L'article 223 A du même code dispose que : " Une société peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés ou d'établissements stables membres du groupe (...) ".

7. Aux termes du 1 de l'article 223 G de ce code : " Lorsque la société mère opte pour le régime prévu au paragraphe I de l'article 220 quinquies / a) Le déficit d'ensemble déclaré au titre d'un exercice est imputé sur le bénéfice d'ensemble ou, le cas échéant, sur le bénéfice que la société mère a déclaré au titre des exercices précédant l'application du régime défini à la présente section, dans les conditions prévues à l'article 220 quinquies.(...) ".

8. Si, dans sa rédaction alors applicable, l'article 223 G du code général des impôts permettait qu'une société mère qui demande le report en arrière de son déficit d'ensemble procède à son imputation sur le bénéfice d'ensemble d'un exercice antérieur, c'est à la condition que le groupe n'ait pas subi, dans son activité, des transformations telles qu'il n'est plus, en réalité, le même.

9. Lors de l'exercice clos en 2005, la société Courant SAS était la société mère d'un groupe d'intégration fiscale comportant la SAS Courant International. Cette société ayant été absorbée par la société Courant SAS, cette dernière n'a pas formé de groupe fiscalement intégré lors des exercices clos en 2006 et 2007. Elle est de nouveau devenue société mère d'un groupe fiscalement intégré lors de l'exercice clos en 2008, ce groupe comprenant deux filiales nouvellement créées, la SAS Courant et la SAS Corelco. La société Courant SAS a demandé en 2009 le report en arrière du déficit d'ensemble de l'exercice clos en 2008, à hauteur de 1 641 142 euros. Ce déficit a été imputé à concurrence de 1 464 468 euros sur le bénéfice d'ensemble de l'exercice clos en 2005 et de 176 674 euros sur le bénéfice de l'exercice clos en 2006. L'administration a considéré que la société Courant SAS ne pouvait imputer son déficit de l'année 2008 que sur son bénéfice propre de l'année 2005 et non sur le bénéfice d'ensemble comprenant celui de sa filiale de l'époque, la SAS Courant International. L'imputation du déficit de l'exercice clos en 2008 sur le bénéfice de l'exercice clos en 2005 a ainsi été réduite de 150 640 euros, entrainant une réduction de la créance déclarée de 50 213 euros.

10. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'activité du groupe fiscal que la société Courant SAS constituait lors de l'exercice clos en 2005 avec la SAS Courant International était identique, d'une part, à celle qu'elle a exercée en son nom propre lors des deux exercices suivants, après l'absorption de cette dernière et, d'autre part, à celle exercée par le groupe fiscalement intégré constitué lors de l'exercice clos en 2008. Par suite, la société Courant SAS était en droit de procéder à l'imputation de son déficit d'ensemble de l'exercice clos en 2008 sur la totalité du bénéfice d'ensemble de l'exercice clos en 2005, quand bien même elle n'a pas appliqué le régime prévu par les articles 223 A et suivants du code général des impôts lors des exercices clos en 2006 et 2007.

11. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la société Courant SAS est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant au rétablissement de sa créance de report en arrière de déficit au titre de l'année 2008 à un montant de 547 047 euros.

Sur les frais liés au litige :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à la société Courant SAS d'une somme de 2 000 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : La créance de report en arrière de déficit de la société Courant SAS au titre de l'exercice clos en 2008 est rétablie au montant de 547 047 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 12 juillet 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la société Courant SAS la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Courant SAS est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Courant SAS et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Drouet, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 mars 2018.

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N° 16LY03170


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 16LY03170
Date de la décision : 29/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-01-04-10 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Report déficitaire.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : AKTHIS SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-03-29;16ly03170 ?
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