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17/05/2018 | FRANCE | N°17LY02551

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 17 mai 2018, 17LY02551


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 17 février 2017 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a refusé de renouveler son titre de séjour, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour " étudiant " sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut de lui remettre une carte de séjour " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, d'annuler l'obligation de quitter le territoire français

prise à son encontre.

Par le jugement n° 1701681 du 23 mai 2017, le tribunal ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 17 février 2017 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a refusé de renouveler son titre de séjour, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour " étudiant " sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut de lui remettre une carte de séjour " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, d'annuler l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre.

Par le jugement n° 1701681 du 23 mai 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 17 février 2017 et enjoint au préfet de délivrer à Mme A...D...un titre de séjour " étudiant " dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 23 juin 2017, le préfet de la Haute-Savoie demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 mai 2017 ;

2°) de rejeter les conclusions de MmeD....

Le préfet soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé son arrêté du 17 février 2017 en retenant qu'il a commis une erreur d'appréciation en mettant en cause la réalité et le sérieux des études de MmeD....

Par un mémoire en défense enregistré le 18 février 2018, MmeD..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) de confirmer le jugement attaqué et de rejeter la requête du préfet de la Haute-Savoie ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 au titre des frais d'instance.

Mme D...fait valoir que :

- la requête signée par le directeur de la citoyenneté et des libertés publiques est irrecevable dès lors qu'il n'est pas établi que ce directeur disposait d'une délégation de signature régulièrement publiée ;

- le préfet a bien commis une erreur manifeste d'appréciation sur le caractère sérieux de ses études ;

- c'est à tort que le préfet a refusé de renouveler son titre de séjour mention " étudiant " ; il a violé les articles L. 313-7, R. 313-7 et R. 313-36 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; non seulement ses études sont réelles et sérieuses, mais en plus elle a des moyens d'existence ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Gondouin ;

1. Considérant que MmeD..., née en 1992 et de nationalité russe, est arrivée en France le 16 septembre 2012 sous couvert de son passeport revêtu d'un visa de long séjour mention " étudiant " valable du 5 septembre 2012 au 5 juillet 2013 ; qu'elle a ensuite obtenu trois titres de séjour sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, valables du 12 octobre 2013 au 9 novembre 2016 ; qu'elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour le 10 novembre 2016 ; que, par un arrêté du 17 février 2017, le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et d'une décision désignant le pays de destination en cas d'éloignement forcé ; que le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté préfectoral par un jugement du 23 mai 2017 dont le préfet de la Haute-Savoie relève appel ;

Sur la recevabilité de la requête :

2. Considérant que, par un arrêté du 21 novembre 2016, publié au recueil des actes administratifs spécial du même jour, le préfet de la Haute-Savoie a donné délégation à M. E... C..., directeur de la citoyenneté et des libertés publiques, en cas d'absence ou d'empêchement des membres du corps préfectoral, à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, requêtes, recours ou tout autre acte de procédure pris en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier les mémoires introductifs d'appel devant les juridictions administratives et devant les juridictions judiciaires ; que, dès lors qu'il n'est pas établi que les membres du corps préfectoral n'étaient pas absents ou empêchés le 23 juin 2017, jour de la signature de la requête devant la cour, la fin de non-recevoir opposée par Mme D... ne peut qu'être écartée ;

Sur le motif d'annulation retenu par le jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de la première phrase de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention "étudiant" " ; qu'il appartient à l'administration, saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour temporaire présentée en qualité d'étudiant, d'apprécier, à partir de l'ensemble des pièces du dossier, la réalité et le sérieux des études poursuivies ;

4. Considérant que Mme D...est présente sur le territoire français depuis le 16 décembre 2012 ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'elle a suivi deux ans d'étude de la langue française avant de s'inscrire en 2014 à l'Ecole supérieure de commerce du sport pour suivre la formation " Bachelor Management du Commerce du sport " ; qu'elle n'a pas obtenu son diplôme et a décidé de se réinscrire à l'Institut Privé Campus Langues pour améliorer son niveau de français à l'écrit ; que Mme D...a suivi à nouveau des cours de français dans l'institut précité en 2015/2016 et 2016/2017 et obtenu un niveau B2.2 en langue française ; qu'à la date de la décision attaquée, Mme D...était en France depuis plus de quatre ans sans avoir obtenu de diplôme ; que Mme D...fait valoir qu'elle a décidé " par précaution et à contrecoeur, de parfaire son français écrit, en renouvelant son inscription à l'Institut privé Campus Langues et de reporter ses études à l'École supérieure de commerce à l'automne 2017 " ; que, toutefois, et contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, le préfet de la Haute-Savoie n'a pas commis d'erreur d'appréciation lorsqu'il a retenu dans sa décision refusant de renouveler le titre de séjour de Mme D...que les études poursuivies en France ne peuvent être considérées comme réelles et sérieuses au sens de l'article L. 313-7 du code précité ; qu'il ne ressort au demeurant pas des écritures produites devant la cour que Mme D... s'est effectivement réinscrite à l'École supérieure de commerce à l'automne 2017 ;

5. Considérant que le préfet de la Haute-Savoie avait également retenu, pour refuser de délivrer un titre de séjour à Mme D..., qu'elle ne justifiait pas des ressources suffisantes prévues par l'article R. 313-7 du code précité ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a jugé que Mme D...justifiait à la date de la décision préfectorale contestée de ressources suffisantes pour prétendre au bénéfice d'un titre de séjour portant la mention " étudiant " ; que le préfet qui pouvait, pour le seul motif tiré de l'absence de caractère réel et sérieux des études, refuser de renouveler le titre de séjour mention " étudiant " de MmeD..., ne conteste pas cette partie du jugement ;

6. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme D...tant devant le tribunal administratif qu'en appel ;

Sur les autres moyens :

7. Considérant, en premier lieu, que M. Guillaume Douheret, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Savoie, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de la Haute-Savoie du 21 novembre 2016, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que les moyens soulevés à l'encontre du refus de titre de séjour ayant été écartés, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

9. Considérant, en troisième lieu, que Mme D..., qui séjourne régulièrement en France depuis plus de quatre ans, fait valoir qu'elle est parfaitement intégrée, qu'elle entretient une relation avec un ressortissant français depuis plus de deux ans et a de nombreuses attaches personnelles en France ; que, toutefois, Mme D... conserve également de fortes attaches en Russie, où résident notamment ses parents et où elle a, elle-même, vécu l'essentiel de sa vie ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision portant obligation de quitter le territoire contestée ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 17 février 2017 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignation du pays de destination en cas d'éloignement forcé et lui a enjoint de délivrer à Mme D... un titre de séjour portant la mention " étudiant " ;

Sur les frais liés au litige :

11. Considérant que Mme D...étant en l'espèce partie perdante, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 1701681 du 23 mai 2017 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme D... devant le tribunal administratif de Grenoble ainsi que ses conclusions présentées devant la cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'État, ministre de l'intérieur et à Mme A...D....

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 12 avril 2018 où siégeaient :

M. d'Hervé, président

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Gondouin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 mai 2018.

2

N° 17LY02551


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY02551
Date de la décision : 17/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : ARABOV

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-05-17;17ly02551 ?
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