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26/07/2018 | FRANCE | N°17LY00669

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 26 juillet 2018, 17LY00669


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société anonyme (SA) Purfer Transports a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 28 juillet 2014 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Rhône-Alpes l'a mise en demeure de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des bennes utilisées pour le transport de ferrailles et la décision implicite de rejet, par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dial

ogue social, de son recours contre cette mise en demeure.

Par un jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société anonyme (SA) Purfer Transports a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 28 juillet 2014 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Rhône-Alpes l'a mise en demeure de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des bennes utilisées pour le transport de ferrailles et la décision implicite de rejet, par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, de son recours contre cette mise en demeure.

Par un jugement n° 1410127 du 20 décembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 13 février 2017, la SA Purfer Transports, représentée par Me Roumeas, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 20 décembre 2016 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les décisions en litige méconnaissent les dispositions des articles L. 4121-1 et suivants du code du travail ;

- aucune des entités chargées de l'identification des risques, que ce soit le service prévention de la caisse primaire d'assurance maladie, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, la médecine du travail ou le service prévention sécurité de la société, n'avait identifié un tel risque, aucun incident ni accident n'ayant jamais été signalé ;

- l'accident du travail survenu le 23 juin 2014 trouve son origine dans le chargement défectueux d'une benne effectué par un tiers et non dans la conception de la benne, qui respecte les normes imposées aux constructeurs ;

- il n'existe pas sur le marché des bennes de dispositifs permettant de faire disparaître les risques liés aux mouvements intempestifs des barres d'ouverture des portes des bennes lors de leur manipulation comme l'exige l'administration ;

- en tout état de cause, depuis cet accident, elle a multiplié les procédures pour pallier tout risque d'accident lié à l'ouverture des bennes en procédant notamment à l'installation de chaînes de sécurité.

La requête a été communiquée au ministre du travail qui n'a pas produit d'observations.

Un mémoire enregistré le 4 juillet 2018, après la clôture de l'instruction, a été présenté pour la SA Purfer Transports.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Clot, président, rapporteur,

- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public,

- les observations de Me A..., substituant Me Rouméas, avocat de la SA Purfer Transports ;

Considérant ce qui suit :

1. Un accident du travail lié à la manipulation du système d'ouverture des portes de la benne d'un camion s'est produit le 23 juin 2014 lors du déchargement de ferrailles par un chauffeur de l'entreprise de transports routiers Purfer Transports. Sur le rapport de l'inspecteur du travail, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Rhône-Alpes a, le 28 juillet 2014, mis en demeure la SA Purfer Transports de prendre, dans le délai de quatre mois, les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des bennes utilisées pour le transport de ferrailles. Par un courrier du 11 septembre 2014, la société a formé auprès du ministre chargé du travail, contre cette mise en demeure, un recours qui a été implicitement rejeté. La SA Purfer Transports relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette mise en demeure du 28 juillet 2014 et de la décision implicite de rejet de son recours contre celle-ci.

Sur les conclusions dirigées contre la mise en demeure du 28 juillet 2014 :

2. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté comme irrecevables les conclusions de la SA Purfer Transports dirigées contre la mise en demeure qui lui a été adressée le 28 juillet 2014 au motif que la décision implicite de rejet de son recours au ministre chargé du travail, qui a le caractère d'un recours préalable obligatoire, s'y était substituée. Il n'appartient pas au juge d'appel, devant lequel l'appelant ne conteste pas la fin de non-recevoir opposée à ses conclusions par le juge de premier ressort, de rechercher d'office si cette fin de non-recevoir a été soulevée à bon droit. La SA Purfer Transports, qui reprend en appel ses conclusions tendant à l'annulation de cette mise en demeure, ne conteste pas l'irrecevabilité qui leur a été opposée par le tribunal. Par suite, ses conclusions dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté cette partie de ses conclusions doivent être rejetées.

Sur la légalité du rejet implicite du recours contre la mise en demeure du 28 juillet 2014 :

3. Aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. / Ces mesures comprennent : / 1° Des actions de prévention des risques professionnels (...) ". L'article L. 4121-2 du même code ajoute que : " L'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants : 1° Eviter les risques ; 2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ; 3° Combattre les risques à la source ; 4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ; 5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ; 6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ; 7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1 ; 8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ; 9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs. "

4. Aux termes de l'article L. 4721-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " Le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, sur le rapport de l'inspecteur du travail constatant une situation dangereuse, peut mettre en demeure l'employeur de prendre toutes mesures utiles pour y remédier, si ce constat résulte : / 1° D'un non-respect par l'employeur des principes généraux de prévention prévus par les articles L. 4121-1 à L. 4121-5 et L. 4522-1 ; / 2° D'une infraction à l'obligation générale de santé et de sécurité résultant des dispositions de l'article L. 4221-1. " L'article L. 4723-1 du même code dispose que : " S'il entend contester la mise en demeure prévue à l'article L. 4721-1, l'employeur exerce un recours devant le ministre chargé du travail. (...) Le refus opposé à ces recours est motivé. "

5. Le 23 juin 2014, alors qu'il s'apprêtait à procéder au déchargement de ferrailles contenues dans la benne posée sur le châssis du camion, un chauffeur de la SA Purfer Transports a ouvert les portes arrières de la benne et, alors qu'il venait de retirer la goupille qui retient la barre de manipulation sur la porte de gauche, cette barre, sous l'effet de la pression exercée par le chargement sur les parois latérales et sur la porte de la benne, a effectué un mouvement de rotation et a violement heurté à la tête ce salarié, qui a subi un traumatisme crânien avec hématome. Il ressort des pièces du dossier et notamment du compte-rendu d'une réunion tenue le 25 juin 2014 et du rapport de l'inspecteur du travail au DIRECCTE que la cause directe de l'accident tient à ce que la benne avait été chargée en tassant très fortement les ferrailles, en particulier du côté des portes, la pression ainsi exercée ayant provoqué le déplacement intempestif de la barre d'ouverture lors de sa manipulation en vue de l'ouverture de la porte. Cet accident révèle l'existence d'un risque pour la sécurité ou la santé des travailleurs, au sens de l'article L. 4121-1 du code du travail. En conséquence, le DIRECCTE était fondé à user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 4721-1 de ce code. La mise en demeure adressée à la SA Purfer Transports " de mettre en place sur les bennes de son parc utilisées pour le transport de ferrailles, sous 4 mois à compter de la notification de la présente décision, tout dispositif permettant de faire disparaître le risque lié au mouvement intempestif des barres d'ouverture des portes des bennes lors de leur manipulation, ou de le réduire à son niveau le plus bas ", implique qu'elle prenne notamment des mesures lors du chargement des bennes, afin de prévenir le risque qui s'est réalisé. Dès lors, le directeur régional n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

6. Il résulte de ce qui précède que la SA Purfer Transports n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la SA Purfer Transports à l'occasion du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SA Purfer Transports est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié la SA Purfer Transports et au ministre du travail.

Délibéré après l'audience du 5 juillet 2018 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 juillet 2018.

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N° 17LY00669


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY00669
Date de la décision : 26/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-03-03-01 Travail et emploi. Conditions de travail. Hygiène et sécurité. Mise en demeure de remédier à une situation dangereuse dans un établissement.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : ROUMEAS

Origine de la décision
Date de l'import : 07/08/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-07-26;17ly00669 ?
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