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23/07/2019 | FRANCE | N°17LY03021

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 23 juillet 2019, 17LY03021


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La fédération départementale des chasseurs de la Loire a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 27 août 2015 par lequel le préfet de la Loire a inscrit le sanglier dans la liste des animaux classés nuisibles pour la campagne 2015-2016.

Par un jugement n° 1509188 du 27 juin 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 août 2017, la fédération départementale des chasseurs de la Lo

ire, représentée par MeA..., demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La fédération départementale des chasseurs de la Loire a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 27 août 2015 par lequel le préfet de la Loire a inscrit le sanglier dans la liste des animaux classés nuisibles pour la campagne 2015-2016.

Par un jugement n° 1509188 du 27 juin 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 août 2017, la fédération départementale des chasseurs de la Loire, représentée par MeA..., demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 27 juin 2017 et l'arrêté du préfet de la Loire du 27 août 2015 inscrivant le sanglier dans la liste des animaux classés nuisibles pour la campagne 2015-2016.

Elle soutient que :

* elle a intérêt à agir ;

* l'avis de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage (CDCFS) convoquée le 20 mai et rendu le 3 juin 2015 est irrégulier :

o il a été rendu au regard d'un document de proposition de classement du sanglier comme nuisible sur l'ensemble du département de la fédération départementale des syndicats d'exploitant agricoles (FDSEA) de la Loire qui n'a pas été diffusé aux membres composant la CDCFS préalablement à la tenue de la réunion en méconnaissance de l'article 9 du décret n° 2006-672 du 8 juin 2006 et privant ainsi les membres de la commission de la possibilité d'apprécier la pertinence de son argumentation ; cette étude de la FDSEA a été de nature à influencer le sens de l'arrêté du 27 août 2015 qui a inscrit le sanglier comme nuisible sur l'ensemble du département de la Loire ;

o le procès-verbal de la séance de la CDCFS du 3 juin 2015 a été établi le 11 août 2016 un an après la signature de l'arrêté ; il était nécessaire que le préfet ait connaissance de la teneur des débats, d'autant plus que les avis recueillis lors de la consultation organisée du 4 au 25 juin 2015 émanent quasi exclusivement d'agriculteurs concernés par les dégâts ;

* le préfet de la Loire n'a pas pris en compte les circonstances locales en méconnaissance de l'article 1er de l'arrêté ministériel du 3 avril 2012 pris pour l'application de l'article R. 427-6 du code de l'environnement ;

* un classement sur l'ensemble du département de la Loire est abusif et correspond à une décision à caractère politique et est entaché d'une erreur d'appréciation ;

* l'arrêté en litige méconnaît le plan national de maîtrise du sanglier organisé par la circulaire du 31 juillet 2009 qui prévoit que les mesures à mettre en oeuvre doivent être adaptées aux circonstances locales du département ; c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a considéré que la circulaire n'avait pas de caractère réglementaire et ne s'imposait pas au préfet de la Loire ;

* les dates de chasse au sanglier organisées par l'arrêté du 11 juillet 2015 fixant les dates et les modalités de chasse pour la campagne 2015/2016 permettent déjà une gestion réelle de l'espèce pendant plusieurs mois, y compris en temps de neige et donnent lieu à la mise en oeuvre d'un plan de gestion cynégétique dans le département ;

* l'arrêté en litige va provoquer une destruction désordonnée et quasi permanente de l'espèce.

Par ordonnance du 9 janvier 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 14 février 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

* le code de l'environnement ;

* le décret n° 2006-672 du 8 juin 2006 relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif.

* l'arrêté du 3 avril 2012 pris pour l'application de l'article R. 427-6 du code de l'environnement et fixant la liste, les périodes et les modalités de destruction des animaux d'espèces susceptibles d'être classées nuisibles par arrêté du préfet

* le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

* le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller,

* et les conclusions de Nathalie Peuvrel, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 27 août 2015, le préfet de la Loire a classé le sanglier dans la catégorie des animaux nuisibles dans le département de la Loire jusqu'au 30 juin 2016. La fédération départementale des chasseurs de la Loire relève appel du jugement rendu le 27 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité de la procédure d'édiction de l'arrêté en litige :

2. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.

3. En premier lieu, aux termes de l'article 9 du décret n° 2006-672 du 8 juin 2006 : " Sauf urgence, les membres des commissions reçoivent, cinq jours au moins avant la date de la réunion, une convocation comportant l'ordre du jour et, le cas échéant, les documents nécessaires à l'examen des affaires qui y sont inscrites. "

4. La fédération départementale des chasseurs de la Loire soutient que l'avis de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage (CDCFS) convoquée le 20 mai 2015 a été rendu le 3 juin 2015 de façon irrégulière, la fédération départementale des syndicats d'exploitant agricoles (FDSEA) de la Loire ayant produit le jour même de la réunion un document de travail préconisant le classement du sanglier parmi les animaux nuisibles sur l'ensemble du département de la Loire alors que le projet d'arrêté soumis à l'examen de la commission ne proposait un tel classement que sur quelques sous massifs du département.

5. Il ressort des pièces du dossier, notamment du procès verbal de la séance du 3 juin 2015, au cours de laquelle son président a précisé que, s'agissant d'un dossier technique, " l'Etat restera neutre ", que la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage a émis, à la majorité de ses membres, un avis favorable au classement comme nuisible du sanglier sur une partie du territoire du département. Dans ces conditions, le fait que de l'étude de la FDSEA, discutée en cours de séance, n'y a été présentée que le jour même, ne peut être regardé comme ayant été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise par le préfet de la Loire ou de priver la fédération départementale des chasseurs de la Loire d'une garantie.

6. En second lieu, ni les dispositions de l'article 14 du décret du 8 juin 2006, aux termes duquel : " Le procès-verbal de la réunion de la commission indique le nom et la qualité des membres présents, les questions traitées au cours de la séance et le sens de chacune des délibérations. Il précise, le cas échéant, le nom des mandataires et des mandants. / Tout membre de la commission peut demander qu'il soit fait mention de son désaccord avec l'avis rendu. / L'avis rendu est transmis à l'autorité compétente pour prendre la décision. ", ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'imposent que le préfet, qui doit seulement avoir connaissance de l'avis de la commission, soit destinataire du compte-rendu intégral de la séance de la commission avant de prendre une décision portant classement comme nuisible d'une espèce animale.

7. S'il n'est pas contesté que le procès-verbal de la séance de la CDCFS réunie le 20 mai 2015 n'a été établi que le 11 août 2016, soit postérieurement à la date à laquelle a été pris l'arrêté contesté, il n'est pas contesté que l'avis de cette commission avait été porté à la connaissance du préfet de la Loire avant le 27 août 2015, date de l'arrêté en cause. La fédération requérante n'est, par suite, pas fondée à soutenir que cet arrêté a été pris au terme d'une procédure irrégulière par méconnaissance des dispositions sus rappelées de l'article 14 du décret du 8 juin 2006.

Sur la légalité des mesures décidées par le préfet de la Loire par son arrêté du 27 août 2015 :

8. En vertu de l'article R. 427-6 du code de l'environnement, et de l'article 1er de l'arrêté du 3 avril 2012 pris pour son application, en fonction des particularités locales et après avis de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage, le préfet peut décider par arrêté de classer le sanglier dans la liste d'espèces d'animaux classées nuisibles pour l'un au moins des motifs suivants : 1° Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ; / 2° Pour assurer la protection de la flore et de la faune ; / 3° Pour prévenir des dommages importants aux activités agricoles, forestières et aquacoles ; / 4° Pour prévenir les dommages importants à d'autres formes de propriété. Dans ce cas, il fixe par arrêté annuel les périodes et les modalités de destruction et délimite les territoires concernés par la destruction de cette espèce.

9. Il peut être légalement procédé à ce classement, dès lors que cette espèce est répandue de façon significative dans le département et que, compte tenu des caractéristiques géographiques, économiques et humaines de celui-ci, il est établi que sa présence est à l'origine d'atteintes significatives aux intérêts protégés par ces mêmes dispositions ou qu'elle est susceptible de leur porter atteinte.

10. Par l'arrêté du 27 août 2015 en litige, pris en application de l'article 1er de l'arrêté du 3 avril 2012, le préfet de la Loire, a classé le sanglier nuisible dans le département de la Loire jusqu'au 30 juin 2016 et a autorisé les gardes particuliers sur le territoire pour lequel ils sont commissionnés à détruire à tir, uniquement par balle, les sangliers toute l'année, de jour seulement et sous réserve de l'assentiment du détenteur du droit de destruction. Le même arrêté dispose que l'auteur de la destruction en informe les autorités administratives dans les 72 heures qui suivent le prélèvement de l'animal.

11. Il ressort des pièces du dossier que le nombre de sangliers tués à la chasse dans le département de la Loire connaît une augmentation notable et continue depuis au moins 2001 traduisant ainsi un accroissement de leur population globale, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté par la fédération départementale des chasseurs de la Loire. Il est également établi que cette espèce est à l'origine de dégâts qui peuvent être importants et qui ont fait l'objet d'une demande d'indemnisation dans 45 % des 327 communes du département. Dans ces circonstances, le préfet de la Loire a pu, sans erreur d'appréciation, classer le sanglier comme espèce nuisible.

12. La fédération départementale des chasseurs de la Loire soutient que ce classement est entaché d'une erreur d'appréciation en tant qu'il ne se limite pas aux quatre sous massifs qu'elle avait proposés.

13. Toutefois et d'une part, il ressort des données produites tant par le préfet de la Loire que par la fédération elle-même que si les dégâts les plus importants provoqués par les sangliers se concentrent, pour l'essentiel, dans la plaine du Forez, l'ensemble des dommages causés aux intérêts agricoles déclarés est globalement réparti sur l'ensemble du département.

14. D'autre part, contrairement à ce que soutient la Fédération appelante, l'autorisation donnée, dans les conditions restrictives rappelées au point 10, de procéder à la destruction des sangliers durant une période qui excède de trois mois seulement celle au cours de laquelle leur chasse est autorisée ne peut être regardée comme conduisant à " une destruction désordonnée et quasi permanente de l'espèce " dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que l'augmentation régulière des prélèvements de sangliers au cours des périodes de chasse qui s'étendent du 1er juin à la fin du mois de février ne suffit pas à endiguer l'accroissement de leur population.

15. Enfin, il n'apparaît pas non plus, au vu de ces mêmes données, que la mesure contestée présente un caractère excessif au regard des intérêts protégés mentionnés par l'article R. 427-6 du code de l'environnement. Dans ces circonstances, la fédération départementale des chasseurs de la Loire n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation dans sa prise en compte des particularités locales.

16. Ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Lyon, par les motifs énoncés au points 9 de son jugement, et qu'il y a lieu pour la cour d'adopter, la fédération départementale des chasseurs de la Loire ne peut utilement soutenir que le préfet a méconnu le plan national de maîtrise du sanglier mis en oeuvre par la circulaire DEVN0916820C du 31 juillet 2009, ces dispositions, dépourvues de caractère réglementaire, ne liant pas le préfet qui conserve un pouvoir d'appréciation au regard des circonstances locales ainsi que le précise, d'ailleurs, la circulaire elle-même.

17. Il résulte de tout ce qui précède que la fédération départementale des chasseurs de la Loire n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :

18. Les dispositions de L. 761-1 du code de justice administrative faisant obstacle à ce que soit mis à charge l'Etat qui n'est pas la partie perdante une somme à ce titre, les conclusions de la fédération départementale des chasseurs de la Loire en ce sens doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la fédération départementale des chasseurs de la Loire est rejetée.

Article 2

: Le présent arrêt sera notifié à la fédération départementale des chasseurs de la Loire et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera délivrée au préfet de la Loire.

No 17LY030212


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17LY03021
Date de la décision : 23/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-08 Agriculture et forêts. Santé publique vétérinaire.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Pierre THIERRY
Rapporteur public ?: Mme PEUVREL
Avocat(s) : LAGIER

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-07-23;17ly03021 ?
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