La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/10/2021 | FRANCE | N°19LY03227

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 14 octobre 2021, 19LY03227


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge du complément d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2011 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1700958 du 28 juin 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 août 2019 et le 11 mai 2020, M. B..., représenté par Me Marini, de

mande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge et, à titre subsidiai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge du complément d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2011 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1700958 du 28 juin 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 août 2019 et le 11 mai 2020, M. B..., représenté par Me Marini, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge et, à titre subsidiaire, la réduction, à concurrence d'un montant de 670 180 euros en droits, de ces impositions et des pénalités correspondantes.

Il soutient que :

- la procédure d'imposition est irrégulière en raison de l'incompétence territoriale de l'agent des impôts qui a effectué la vérification de comptabilité, le certificat d'identité déposé au bureau des hypothèques de Chambéry n'attribuant pas compétence au service des impôts de Moutiers ;

- la déclaration 2048-IMM ne vise pas le cas de la taxation d'une plus-value latente dégagée à l'occasion d'un changement de régime fiscal ; la déclaration à souscrire devait être déposée auprès du service territorial dont dépendant le siège social de la société et leur domicile, c'est-à-dire, respectivement, Paris et Neuilly-sur-Seine ;

- le fait générateur de l'imposition est le changement de régime fiscal, décidée par les associés le 11 janvier 2012 ;

- en sa qualité de nu-propriétaire de la moitié des parts de la SCI Loisimeg, il ne pouvait être assujetti aux impositions en litige qui doivent être établies au nom de l'usufruitier des parts.

Par un mémoire enregistré le 31 mars 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pruvost, président,

- et les conclusions de Mme Vinet, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Saint-Augustin d'Antin, qui avait pour associés M. C... B..., détenteur de 10 % des parts, ainsi que la SCI Loisimeg, dont l'intéressé possédait 50 % des parts en nue-propriété, elle-même détentrice de 70 % des parts, et pour objet social l'acquisition et l'exploitation de biens immobiliers, était propriétaire d'un chalet à Courchevel (Saint-Bon-Tarentaise) et d'un emplacement de parking à Moutiers (Savoie). Par une délibération de l'assemblée générale des associés du 11 janvier 2012, la SCI Saint-Augustin d'Antin a modifié son objet et sa dénomination sociale et pris la forme d'une SARL avec effet au 1er janvier 2012. Par acte notarié du 23 janvier 2012, cette société a vendu ce chalet, acquis en 2000 pour 9 millions de francs (1 372 041,16 euros), au prix de 13,9 millions d'euros en déclarant dans l'acte notarié que la plus-value constatée à l'occasion de la cession n'entrait pas dans le champ des plus-values immobilières dès lors qu'elle était passible de l'impôt sur les sociétés. A la suite d'un contrôle sur pièces, le centre des finances publiques de Moutiers a taxé la plus-value réalisée sur le fondement du régime applicable aux particuliers prévu aux articles 150 U à 150 VH du code général des impôts au motif que le changement de régime d'imposition de la société entraînait l'imposition immédiate de ses revenus par application du II de l'article 202 ter du code général des impôts. M. B... a, en conséquence, été assujetti, au titre de l'année 2011, à un complément d'impôt sur le revenu et à des contributions sociales à proportion de ses droits dans les bénéfices de la société, établis suivant la procédure contradictoire, lesquels ont été assortis d'intérêts de retard et de la majoration de 10 % prévue au a. du 1 de l'article 1728 du code général des impôts. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de décharge de ces impositions et conclut, à titre principal, à la décharge et, à titre subsidiaire, à la réduction, à concurrence d'un montant de 670 180 euros en droits, de ces impositions et des pénalités correspondantes.

Sur les conclusions présentées à titre principal :

2. Aux termes de l'article 202 ter du code général des impôts : " (...) II. Si une société ou un organisme dont les revenus n'ont pas la nature de bénéfices d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou minière, d'une exploitation agricole ou d'une activité non commerciale cesse totalement ou partiellement d'être soumis à l'un des régimes définis aux articles 8 à 8 ter, 238 ter, 239 quater A, 239 quater B, 239 quater C, 239 quater D, 239 septies et au I des articles 239 quater et 239 quinquies, l'impôt sur le revenu est établi au titre de la période d'imposition précédant immédiatement le changement de régime, à raison des revenus et des plus-values non encore imposés à la date du changement de régime, y compris ceux qui proviennent des produits acquis et non encore perçus ainsi que des plus-values latentes incluses dans le patrimoine ou l'actif social. Toutefois, en l'absence de création d'une personne morale nouvelle, ces dernières plus-values ne sont pas taxées dans les conditions prévues au premier alinéa du présent II si l'ensemble des éléments du patrimoine ou de l'actif sont inscrits au bilan d'ouverture de la première période d'imposition ou du premier exercice d'assujettissement à l'impôt sur les sociétés, en faisant apparaître distinctement, d'une part, leur valeur d'origine et, d'autre part, les amortissements et provisions y afférents qui auraient été admis en déduction si la société ou l'organisme avait été soumis à l'impôt sur les sociétés depuis sa création./ La société ou l'organisme doit, dans un délai de soixante jours à compter de la réalisation de l'événement qui a entraîné le changement de régime mentionné au premier alinéa du présent II, produire au service des impôts les déclarations et autres documents qu'il est normalement tenu de souscrire au titre d'une année d'imposition (...) ".

3. Aux termes de l'article 53 A de l'annexe III au code général des impôts : " Sous réserve des dispositions de l'article 302 septies A bis, les contribuables, autres que ceux soumis au régime défini à l'article 50-0, sont tenus de souscrire chaque année, dans les conditions et délais prévus aux articles 172 et 175, une déclaration permettant de déterminer et de contrôler le résultat imposable de l'année ou de l'exercice précédent ". Aux termes de l'article 38 de l'annexe III au même code : " I. - La déclaration dont la production est prévue aux articles 53 A et 302 septies A bis du code général des impôts et ses annexes bis et ter doivent mentionner : a. La récapitulation des éléments concourant à la détermination du résultat, ainsi que le montant des recettes nettes soumises à la contribution mentionnée à l'article 234 nonies du code général des impôts ; (...) IV. - Les déclarations et les documents qui y sont joints doivent être remis en double exemplaire au service des impôts du siège de la direction de l'entreprise ou, à défaut, du lieu du principal établissement ".

4. Aux termes enfin de l'article 350 terdecies de l'annexe III au code général des impôts : " I. Sous réserve des dispositions des articles 409 et 410 de l'annexe II au code général des impôts, seuls les fonctionnaires de la direction générale des finances publiques appartenant à des corps des catégories A et B peuvent fixer les bases d'imposition et liquider les impôts, taxes et redevances ainsi que proposer les rectifications. (...) II. Les fonctionnaires mentionnés au premier alinéa du I peuvent exercer les attributions que ces dispositions leur confèrent à l'égard des personnes physiques ou morales ou groupements de personne de droit ou de fait qui ont déposé ou auraient dû déposer dans le ressort territorial du service déconcentré ou du service à compétence nationale dans lequel ils sont affectés une déclaration, un acte ou tout autre document (...) ".

5. Si le siège social de la SCI Saint Augustin d'Antin était situé avenue des Ternes, à Paris, et si celle-ci a procédé à la publication de son changement de forme sociale au registre du commerce et des sociétés du greffe du tribunal de commerce de Paris et à l'enregistrement de cet acte auprès du service des impôts des entreprises du 17ème arrondissement de Paris, il ne résulte pas de l'instruction que cette société ait eu, à cette adresse ou au domicile de M. B... à Paris, le siège de sa direction. Il est constant qu'elle était propriétaire d'un chalet, situé dans la commune de Saint-Bon-Tarentaise, donné en location à l'année à M. A... B..., son gérant, et lui procurant ses seuls revenus, lequel doit être regardé comme son principal établissement. L'agent du centre des finances publiques de Moutiers, qui appartient à la direction départementale des finances publiques de la Savoie, était donc territorialement compétent pour procéder au contrôle sur pièce de la société, celle-ci étant tenue, en vertu des dispositions précitées, de souscrire auprès des services compétents de cette direction départementale, de la même façon que ses résultats annuels, la déclaration prévue au dernier alinéa de l'article 202 ter exigée par son changement de régime d'imposition, et notifier le redressement.

6. Les dispositions de l'article 150 VG du code général des impôts, dont le requérant se prévaut, ont seulement vocation à fixer les règles de détermination du montant de la plus-value et le lieu de l'accomplissement de la formalité de l'enregistrement. Ces dispositions n'ont pas vocation à déterminer le lieu de la déclaration de résultats devant être souscrite en application des dispositions de l'article 202 ter du code général des impôts. Le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure du fait de l'incompétence territoriale de l'agent ayant réalisé le contrôle et notifié la proposition de rectification doit, par suite, être écarté.

Sur les conclusions présentées à titre subsidiaire :

7. Aux termes de l'article 8 du code général des impôts : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. En cas de démembrement de la propriété de tout ou partie des parts sociales, l'usufruitier est soumis à l'impôt sur le revenu pour la quote-part correspondant aux droits dans les bénéfices que lui confère sa qualité d'usufruitier. Le nu-propriétaire n'est pas soumis à l'impôt sur le revenu à raison du résultat imposé au nom de l'usufruitier. (...) ".

8. Aux termes de l'article 150 U du code général des impôts : " I.- Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. (...) ".

9. Aux termes de l'article 578 du code civil : " l'usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d'en conserver la substance ".

10. Lorsque la propriété des droits sociaux est démembrée, l'usufruitier des parts est imposable à hauteur des bénéfices courants de l'exploitation et le nu-propriétaire à hauteur des profits exceptionnels. L'usufruitier et le nu-propriétaire des droits sociaux démembrés peuvent toutefois convenir d'une répartition conventionnelle des résultats sociaux opposable à l'administration fiscale lorsqu'elle procède d'une convention licite et a été conclue ou insérée dans les statuts de la société avant la clôture de l'exercice aux termes d'un acte régulièrement enregistré.

11. En l'espèce, M. B... possédait la nue-propriété de 50 % des parts de la SCI Loisimeg qui détenait elle-même 70 % des parts de la SCI Saint-Augustin d'Antin. Il résulte de l'instruction qu'aucune convention n'a été conclue entre le nu-propriétaire et l'usufruitier. M. B... soutient toutefois que, si la vente du chalet de Courchevel constitue un profit exceptionnel pour la SCI Saint-Augustin d'Antin, il n'en va pas de même pour la SCI Loisimeg, qui a simplement perçu un produit financier résultant de sa participation dans une société. Il en déduit qu'en tant que nu-propriétaire des parts de cette société, il ne pouvait être imposé à raison de ce bénéfice courant. Toutefois, contrairement à ce que soutient M. B..., la transformation de la SCI Saint-Augustin en SARL a eu pour conséquence la disparition de celle-ci et la création d'une nouvelle personne morale, générant l'imposition d'une plus-value latente et le changement de nature des actifs détenus par la SCI Loisimeg. Le revenu résultant de cet évènement ne saurait constituer un bénéfice courant de l'exploitation pour la SCI Loisimeg et constitue au contraire un profit exceptionnel, taxable entre les mains du nu-propriétaire. Par suite, c'est par une exacte application de ces dispositions que l'administration a estimé que M. B..., en sa qualité de nu-propriétaire, était imposable au titre de la plus-value réalisée.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Evrard présidente-assesseure,

Mme Lesieux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 octobre 2021.

4

N° 19LY03227


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03227
Date de la décision : 14/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-01-03-01-02-02 Contributions et taxes. - Généralités. - Règles générales d'établissement de l'impôt. - Contrôle fiscal. - Vérification de comptabilité. - Compétence du vérificateur.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Dominique PRUVOST
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : MARINI

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-10-14;19ly03227 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award