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18/11/2021 | FRANCE | N°21LY00495

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 18 novembre 2021, 21LY00495


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 6 août 2020 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2001499 du 9 novembre 2020, la magistrate désignée du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 15 février 2021, M. B..., repré

senté par Me Faure Cromarias, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 6 août 2020 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2001499 du 9 novembre 2020, la magistrate désignée du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 15 février 2021, M. B..., représenté par Me Faure Cromarias, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans le même délai et de lui délivrer, dans l'attente, un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, d'une part, le versement à son profit de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, d'autre part, le versement à son conseil de la somme de 3 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

- la décision attaquée est illégale en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet du Puy-de-Dôme qui n'a pas présenté d'observations.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Evrard, présidente-assesseure, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant géorgien né le 21 février 1981, est entré en France au mois de novembre 2019, selon ses déclarations, et a sollicité la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande, instruite selon la procédure accélérée dès lors que l'intéressé est ressortissant d'un pays d'origine sûr, a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 février 2020. Par un arrêté du 6 août 2020, le préfet du Puy-de-Dôme lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours sur le fondement du 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 9 novembre 2020 par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, l'arrêté attaqué vise le 6° du I de l'article L. 511-1 ainsi que les articles L. 743-1 à L. 743-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, indique que l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides a, par une décision du 28 février 2020 notifiée le 11 juin 2020, rejeté la demande d'asile de M. B..., et que si l'intéressé a formé un recours devant la Cour nationale du droit d'asile le 25 juillet 2020, il ne bénéficie plus du droit de se maintenir en France en application de l'article L. 743-2 du même code. Par suite, cet arrêté comporte la mention des circonstances de fait et de droit qui en constituent le fondement, et, notamment, justifie du motif pour lequel M. B... ne bénéficie plus du droit au séjour en tant que demandeur d'asile et est, par suite, suffisamment motivé.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version alors en vigueur : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent ". Aux termes de l'article L. 743-2 du même code, dans sa version alors en vigueur : " Par dérogation à l'article L. 743-1, (...) le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque (...) 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2 (...) ". Aux termes du I. de l'article L. 723-2 du même code, dans sa version alors en vigueur : " I. - L'office statue en procédure accélérée lorsque : 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L. 722-1 ; (...) ". Aux termes de l'article L. 722-1 du même code, dans sa version alors en vigueur : " Un pays est considéré comme un pays d'origine sûr lorsque, sur la base de la situation légale, de l'application du droit dans le cadre d'un régime démocratique et des circonstances politiques générales, il peut être démontré que, d'une manière générale et uniformément pour les hommes comme pour les femmes, quelle que soit leur orientation sexuelle, il n'y est jamais recouru à la persécution, ni à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants et qu'il n'y a pas de menace en raison d'une violence qui peut s'étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle dans des situations de conflit armé international ou interne. Le conseil d'administration fixe la liste des pays considérés comme des pays d'origine sûrs, dans les conditions prévues à l'article 37 et à l'annexe I de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ". Enfin, par une délibération du 9 octobre 2015, le conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a inclus la Géorgie dans la liste des pays d'origine sûrs.

4. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile présentée par M. B... a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, statuant en procédure accélérée sur le fondement du 1° du I de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que M. B... est ressortissant de Géorgie, pays d'origine sûr. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier, et, notamment, de la fiche TelemOfpra produite par le préfet du Puy-de-Dôme en première instance, dont les mentions font foi jusqu'à preuve du contraire, que la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a été notifiée à l'intéressé le 11 juin 2020. M. B... ne produit aucun élément de nature à établir que cette mention serait erronée. Il avait ainsi, à la date de l'arrêté contesté, le 6 août 2020, perdu son droit au maintien sur le territoire français et pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en application du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'il a formé, le 25 juillet 2020, un recours devant la Cour nationale du droit d'asile, ce recours n'étant pas de nature à lui conférer un droit au séjour.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".

6. M. B... fait valoir qu'il souffre d'une insuffisance rénale chronique de stade 5, d'un diabète de type 1 et qu'il est en attente d'une transplantation rénale. Toutefois, si le requérant produit une convocation pour une consultation groupée " pré-greffe " au centre hospitalier de Clermont-Ferrand le 11 décembre 2020, au demeurant postérieure à la décision attaquée, ni cette convocation, ni les autres pièces produites ne permettent d'estimer qu'une telle transplantation était effectivement possible, ni qu'elle aurait été envisagée dans le cas de l'intéressé. Il ne ressort en outre ni du rapport établi le 30 juin 2020 par l'organisation suisse d'aide aux réfugiés sur l'accès aux soins médicaux en Géorgie, dont les éléments sont très généraux, ni des certificats médicaux produits par le requérant, établis le 31 juillet 2020 et le 1er septembre 2020 par un médecin de la structure " Lits halte soins santé " de Royat, le 15 avril 2020 par le service des maladies métaboliques du centre hospitalier de Vichy, le 4 août 2020 par le service de néphrologie, transplantation et hémodialyse du centre hospitalier de Clermont-Ferrand, le 11 août 2020 par un cardiologue et le 18 février 2021 par un médecin de la structure Appartements de Coordination Thérapeutique (ACT) de Clermont-Ferrand, qui se bornent à décrire la pathologie de l'intéressé et le traitement médicamenteux et par dialyse qui lui est prescrit, et à indiquer, s'agissant des certificats établis le 1er septembre 2020 et le 18 février 2021, que le requérant ne peut voyager dans des conditions de totale sécurité, sans néanmoins apporter une quelconque précision à l'appui de cette affirmation, que M. B... ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié à son état de santé en Géorgie ni voyager sans risque vers ce pays. Par ailleurs, l'attestation du 18 février 2021 dont se prévaut le requérant, établie par un praticien hospitalier du service de chirurgie gynécologique du centre hospitalier de Clermont-Ferrand, qui indique que le site internet www.vidal.ge ne comporte aucune référence au médicament Orgaran ne permet pas, à elle seule, d'établir que ce traitement, au demeurant prescrit à l'intéressé postérieurement à la décision attaquée, ne serait pas disponible en Géorgie ni qu'aucun autre traitement ne pourrait lui être substitué. Enfin, si le requérant fait valoir qu'il n'exerce aucune activité et ne peut avoir accès en Géorgie aux différents traitements médicaux qui lui sont nécessaires, il ne verse au soutien de cette affirmation aucun élément justificatif concernant le coût de ce traitement, ni l'impossibilité financière dans laquelle il serait d'accéder à ce traitement ou à une prise en charge médicale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.

7. En dernier lieu, dans les circonstances de l'espèce et eu égard de ce qui a été dit au point 6, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination devrait être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

9. En second lieu, M. B... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision attaquée. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par la magistrate désignée du tribunal administratif de Clermont-Ferrand.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, la magistrate désignée du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président,

Mme Evrard, présidente-assesseure,

Mme Lesieux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 novembre 2021.

2

N° 21LY00495


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00495
Date de la décision : 18/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : FAURE CROMARIAS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-11-18;21ly00495 ?
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