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09/06/2022 | FRANCE | N°21LY01376

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 09 juin 2022, 21LY01376


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'office public de l'habitat de Clermont-Ferrand dénommé Logidôme a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner l'établissement L'Art du carrelage à lui verser la somme de 38 258,13 euros, dont 35 204,92 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2016, en indemnisation du préjudice qu'il soutient avoir subi en raison de l'exécution du marché à bon de commande de pose de carrelage attribué à cette entreprise.

Par jugement n° 1601810 lu le 18 oc

tobre 2018, le tribunal a fait droit à sa demande, à hauteur de 35 050,29 euros, outr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'office public de l'habitat de Clermont-Ferrand dénommé Logidôme a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner l'établissement L'Art du carrelage à lui verser la somme de 38 258,13 euros, dont 35 204,92 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2016, en indemnisation du préjudice qu'il soutient avoir subi en raison de l'exécution du marché à bon de commande de pose de carrelage attribué à cette entreprise.

Par jugement n° 1601810 lu le 18 octobre 2018, le tribunal a fait droit à sa demande, à hauteur de 35 050,29 euros, outre intérêts à compter du 20 octobre 2016.

Procédure devant la cour

Par arrêt n° 18LY04281 lu le 4 juin 2020, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel formé par M. A... B... exerçant sous l'enseigne L'Art du Carrelage, réformé ce jugement et ramené la condamnation de l'entreprise à la somme de 18 401,40 euros.

Sur pourvoi de l'office public de l'habitat Logidôme, le Conseil d'État a, par décision n° 442501 du 29 avril 2021, annulé l'arrêt n° 18LY04281 lu le 4 juin 2020 et renvoyé l'affaire à la cour, réenregistrée au greffe le 30 avril 2021 sous le n° 21LY01376.

M. B... a présenté un nouveau mémoire, enregistré le 9 septembre 2021, dans la présente instance.

Dans le dernier état de ses écritures, il demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1601810 lu le 18 octobre 2018 et de rejeter la demande de condamnation de la SAEM Assemblia, venant aux droits et obligations de l'office public de l'habitat Logidôme, subsidiairement de réduire sa condamnation à la somme de 7 244,17 euros TTC ;

2°) de mettre à la charge de la SAEM Assemblia une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- le préjudice trouve sa cause dans la faute du maître de l'ouvrage qui, d'une part, ne lui a pas signalé la présence d'amiante dans le support et, d'autre part, ne s'est pas opposé à l'arrachage de l'ancien revêtement ; cette faute justifie, a minima, que soit retenue une part de responsabilité de 55 % ;

- les travaux dont le maître de l'ouvrage demande l'indemnisation constituent une plus­value, non pas un préjudice indemnisable, et étaient techniquement nécessaires dès lors que l'ancien revêtement ne pouvait recevoir le nouveau carrelage ;

- l'expert d'assurance n'a pas donné son accord au montant revendiqué par le maître de l'ouvrage.

La SAEM Assemblia a présenté un nouveau mémoire (dans la présente instance), enregistré le 3 juin 2021. Elle conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête, par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement attaqué en ce qu'il limite son indemnisation à 35 050,29 euros, outre intérêts, et à ce que celle-ci soit portée à 38 258,13 euros, dont 35 204,92 euros TTC, enfin à ce que soit mise à la charge de M. B... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- les travaux supplémentaires sont exclusivement imputables à la faute de l'entreprise de travaux ;

- ces travaux ne sont pas constitutifs de plus-value.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code général de la commande publique ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Arbarétaz, président ;

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

- et les observations de Me Goutille pour la SAEM Assemblia ;

Considérant ce qui suit :

1. La SAEM Assemblia, qui succède à l'office public de l'habitat Logidôme, maître d'ouvrage, et M. B..., entrepreneur de travaux, étant liés par un marché de travaux, toute demande de l'une des parties tendant à l'indemnisation de préjudices nés de l'exécution de ces travaux ne peut avoir pour fondement que la responsabilité contractuelle de l'autre partie, cette responsabilité ne pouvant être engagée qu'en raison d'un manquement aux obligations contractées par la partie mise en cause.

2. Or et d'une part, en signant le bon de commande n° 13080150 portant acceptation de son devis DE00254 tenant lieu de contrat, M. B... s'est engagé à réaliser la pose de carrelages dans les parties communes de l'immeuble implanté au 2 rue du torpilleur Sirocco, directement sur l'ancien revêtement ainsi qu'en atteste l'absence de prix rémunérant l'enlèvement de l'existant et la préparation d'un nouveau support. D'autre part, faute de spécifications techniques annexées au bon de commande, doivent tenir lieu d'obligations contractuelles les règles de l'art, c'est-à-dire l'ensemble des comportements et savoir-faire attendus d'un professionnel normalement diligent relevant du corps d'état considéré. Dans la mesure où la pose de carrelages sans enlèvement de l'ancien revêtement requiert un support homogène et parfaitement adhérent, M. B... devait s'abstenir de revêtir le carrelage ancien s'il repérait des indices de décèlement. Mais le chantier étant dépourvu de maîtrise d'œuvre, ce que l'intéressé ne pouvait ignorer en signant le contrat, il devait également, au titre du respect des règles de son art, avertir le maître d'ouvrage si la dégradation du support faisait obstacle à l'exécution des travaux, lui-même n'étant ni qualifié pour diagnostiquer les travaux supplémentaires à réaliser ni missionné pour enlever d'office les anciens carrelages et préparer un nouveau support.

3. Il résulte de l'instruction, et il n'est pas sérieusement contesté par la SAEM Assemblia, que certains carreaux anciens se décelaient et étaient inaptes à recevoir le nouveau revêtement ce qui faisait obstacle à ce que M. B... exécutât sa prestation sans qu'ait été enlevé le revêtement défectueux. En revanche, celui-ci n'a pu sans méconnaître ses obligations contractuelles procéder d'office à leur arrachage sans en référer au maître de l'ouvrage qui n'était pas tenu à une obligation de surveillance du chantier et n'était pas davantage tenu de communiquer un diagnostic sur la présence d'amiante en sous-face dans la mesure où les travaux programmés originellement ne comportaient pas de démolition de l'existant, au sens de l'article R. 1334-29-5 du code de la santé publique.

4. Dès lors qu'en cours de chantier, il s'est avéré nécessaire d'arracher les anciens carrelages avant d'en poser de nouveaux, les frais d'enlèvement de la colle amiantée découverte en sous-face et les frais annexes constituent, non pas un préjudice mais une dépense que le maître de l'ouvrage devait prendre en charge pour obtenir livraison d'un nouveau revêtement conforme aux règles de l'art. La valeur de ces travaux ayant été incorporée au patrimoine de la SAEM Assemblia, il est sans incidence sur la qualification de ces dépenses que le maître d'ouvrage soutienne qu'il aurait renoncé à l'opération de rénovation s'il en avait connu les contraintes. Il suit de là que les postes de désamiantage (16 098,16 euros TTC), d'échafaudage (6 396,81 euros) pour l'accès provisoire aux logements, de condamnation des portes de logement donnant accès à la partie commune à désamianter (1 159,52 euros TTC), de digicode (3 367,29 euros TTC) ne sauraient donner lieu à indemnisation par l'entrepreneur.

5. En revanche, M. B... ayant pris l'initiative, en violation de ses obligations contractuelles, de commencer à arracher les anciens carrelages, provoquant la mise en suspension de poussière d'amiante, il doit répondre des surcoûts liés à l'intervention du maître d'ouvrage afin de sécuriser en urgence les parties communes. Doivent ainsi être indemnisées les dépenses liées au relogement du locataire occupant le logement desservi directement par le hall d'entrée, soit 2 199,90 euros et de remise en état de ce logement affecté par la proximité des travaux, soit 1 813,45 euros TTC et 4 142,79 euros TTC de travaux de menuiserie et de plâtrerie. Enfin, la somme de ces trois postes (8 156,14 euros) représentant 23 % de la totalité des dépenses exposées par le maître de l'ouvrage pour le désamiantage des parties communes (35 204,92 euros), les dépenses de personnel exposées par l'établissement pour traiter l'incident, soit 3 053,21 euros TTC, doivent être indemnisées par M. B... dans cette proportion, soit 702,23 euros TTC.

6. Ainsi qu'il est dit au point 3, l'office public de l'habitat Logidôme n'a pas commis de faute contractuelle en sa qualité de maître de l'ouvrage. La SAEM Assemblia ne saurait être tenue de garder à sa charge une partie de la somme de 8 858,37 euros dont 6 658,47 euros TTC qui, par les motifs exposés au point 5, constitue le préjudice indemnisable découlant de la faute de l'entreprise.

7. Il résulte de ce qui précède, d'une part, que M. B... est fondé à soutenir que sa condamnation assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2016 doit être ramenée de 35 050,29 euros à 8 858,37 euros dont 6 658,47 euros TTC et que le jugement attaqué doit être réformé en conséquence, d'autre part, que la SAEM Assemblia n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le même jugement, le tribunal a refusé de lui allouer une indemnité supérieure à 35 050,29 euros et que son appel incident doit être rejeté.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de la SAEM Assemblia au titre des frais exposés par M. B... exerçant sous l'enseigne L'Art du Carrelage et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées par la SAEM Assemblia, partie perdante, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La condamnation de 35 050,29 euros mise à la charge de M. B... par l'article 1er du jugement n° 1601810 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est ramenée à 8 858,37 euros dont 6 658,47 euros TTC.

Article 2 : Le jugement n° 1601810 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand lu le 18 octobre 2018 est réformé en ce qui a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : La SAEM Assemblia versera à M. B... exerçant sous l'enseigne L'Art du Carrelage une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SAEM Assemblia et à M. B... exerçant sous l'enseigne L'Art du Carrelage.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2022 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juin 2022.

Le président, rapporteur,

Ph. ArbarétazLe président assesseur,

Ph. Seillet

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 21LY01376 2

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01376
Date de la décision : 09/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

66-07-01 Travail et emploi. - Licenciements. - Autorisation administrative - Salariés protégés.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : TEILLOT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-06-09;21ly01376 ?
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