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22/06/2023 | FRANCE | N°22LY02748

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 22 juin 2023, 22LY02748


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... et Mme E... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 20 juin 2022 par lesquels la préfète de la Drôme a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre à cette autorité de leur délivrer le titre de séjour sollicité, dans un certain délai et sous astreinte, ou à défaut, de réexaminer leur situation.

Par un jugement n

s 2204514, 2204515 du 9 août 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal a ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... et Mme E... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 20 juin 2022 par lesquels la préfète de la Drôme a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre à cette autorité de leur délivrer le titre de séjour sollicité, dans un certain délai et sous astreinte, ou à défaut, de réexaminer leur situation.

Par un jugement n°s 2204514, 2204515 du 9 août 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour

I- Par une requête et un mémoire enregistrés les 9 septembre et 14 décembre 2022 sous le n° 22LY02748, M. C..., représenté par Me Gay, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il statue sur sa demande et l'arrêté le concernant ;

2°) d'enjoindre à la préfète de la Drôme de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou à défaut, de réexaminer sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'État, au profit de son conseil, une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour est entaché de vices de procédure au regard des articles L. 313-11 (11°), R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016, à défaut de pouvoir vérifier que le médecin ayant rédigé le rapport médical n'a pas siégé dans le collège des médecins qui a rendu l'avis du 25 avril 2022 et que ce collège était régulièrement composé, faute pour la préfète de produire cet avis ; la préfète s'est bornée à se conformer à l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) et a méconnu l'étendue de sa compétence ; il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire enregistré le 24 mai 2023, la préfète de la Drôme conclut au rejet de la requête.

II- Par une requête et un mémoire enregistrés les 9 septembre et 14 décembre 2022, sous le n° 22LY02753, Mme C..., représentée par Me Gay, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il statue sur sa demande et l'arrêté la concernant ;

2°) d'enjoindre à la préfète de la Drôme de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou à défaut, de réexaminer sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'État, au profit de son conseil, une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire enregistré le 24 mai 2023, la préfète de la Drôme conclut au rejet de la requête.

M. et Mme C... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 décembre 2022.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Chassagne, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant de la République de Serbie, et Mme C..., ressortissante de la République du Kosovo et de la République de la Macédoine du Nord, nés respectivement le 13 octobre 1961 à Grbavce et le 13 octobre 1965 à Llojan, sont entrés sur le territoire français le 16 décembre 2021 selon leurs déclarations. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté leurs demandes d'asile le 21 mars 2022, décisions qu'ils ont contestées devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 14 juin 2022 et le 11 juillet 2022. M. C... a demandé, concomitamment à sa demande d'asile, le 12 janvier 2022, la délivrance d'un titre de séjour, compte tenu de son état de santé sur le fondement des dispositions de l'article L. 425-9 et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La préfète de la Drôme, par deux arrêtés du 20 juin 2022, leur a opposé un refus de titre de séjour, fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. et Mme C..., par deux requêtes qu'il convient de joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt, relèvent appel du jugement par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes d'annulation de ces arrêtés.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...). / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. / (...). "

3. Il ressort des pièces du dossier et des termes mêmes de la décision contestée que la préfète de la Drôme, pour refuser un titre de séjour à M. C..., s'est approprié un avis du collège des médecins de l'OFII émis le 24 avril 2022, après examen de l'intéressé par le médecin qui a établi le rapport médical, selon lequel si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, toutefois, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, et au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. M. C... fait valoir que la pathologie cancéreuse dont il souffre nécessite un suivi médical et thérapeutique trimestriel, qui ne peut être effectivement obtenu au Kosovo ou dans son pays d'origine, compte tenu de la difficulté d'accès concret aux soins et à une couverture maladie. Toutefois, il ressort des propres éléments produits par l'intéressé, et notamment un compte-rendu d'examens par un interne du service des urgences du centre hospitalier Annecy Genevois du 23 décembre 2021, ainsi que des pièces médicales provenant de médecins exerçant dans plusieurs établissements médicaux du Kosovo, qu'il a bénéficié d'examens radiologique, d'imagerie par résonance magnétique, endoscopique et biologique, ainsi que de soins par radiothérapie avant son arrivée en France, où ne lui ont été prescrits, pour suivre l'évolution de sa pathologie, que des examens d'imagerie médicale par résonance magnétique, de type scanner et endoscopique, ainsi que biologiques, à intervalles réguliers. Il n'apparait pas que M. C... ne pourrait pas effectivement recevoir au Kosovo les soins nécessités par son état de santé, malgré les différents documents qu'il apporte faisant état des dysfonctionnements du système de santé, au demeurant anciens et d'ordre général, ou éventuellement en Serbie. Il se borne par ailleurs à faire état de difficultés financières mais sans en justifier. Par suite, M. C..., qui ne remet pas sérieusement en cause, par ces éléments, le sens de l'avis du 24 avril 2022, n'est donc pas fondé à soutenir que la préfète de la Drôme aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, anciennement codifiées à l'article L. 313-11 (11°), en lui refusant un titre de séjour. Le moyen ne peut être admis.

4. En deuxième lieu, les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés de ce que le refus de titre de séjour visant M. C... serait entaché de vices de procédure au regard des articles L. 313-11 (11°), R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016, à défaut de pouvoir vérifier que le médecin qui a rédigé le rapport médical n'a pas siégé dans le collège des médecins à l'origine de l'avis du 25 avril 2022 et que ce collège était régulièrement composé, et faute pour la préfète de produire cet avis, ainsi que de ce que cette autorité s'est bornée à se conformer à l'avis du collège des médecins de l'OFII et a méconnu l'étendue de sa compétence, doivent, en l'absence d'éléments nouveaux et de critique pertinente en appel, être écartés par les motifs retenus par le premier juge et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter.

5. En troisième lieu, si M. et Mme C... se prévalent de ce que résideraient sur le territoire français, le neveu par alliance de M. C..., de nationalité française, ainsi que sa sœur et son frère bénéficiant de titres de séjour, les pièces produites par les intéressés ne permettent pas de justifier de manière suffisamment circonstanciée les liens familiaux invoqués par les intéressés. En toute hypothèse, à supposer ces liens avérés, ils ne suffiraient pas, à eux seuls, compte tenu notamment de la durée de séjour en France des intéressés et de la cellule familiale qu'ils forment, à démontrer que les refus de séjour litigieux seraient entachés d'une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale en France ou d'une erreur manifeste d'appréciation. En l'absence d'éléments nouveaux et de critique pertinente en appel, ces moyens, doivent, par adoption pour le surplus des motifs retenus par le tribunal, être écartés.

6. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède que les décisions portant obligation de quitter le territoire français ne sont pas illégales par voie de conséquence de l'illégalité des refus de séjour. De même, et par suite, les décisions fixant le pays de renvoi ne sont pas davantage illégales par voie de conséquence de l'illégalité des refus de séjour et des obligations de quitter le territoire français. Les moyens ne peuvent donc qu'être écartés.

7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes. Leurs requêtes doivent donc, dans l'ensemble de leurs conclusions, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme C... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D..., Mme E... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023.

Le rapporteur,

J. Chassagne

Le président,

V.-M. Picard La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N°s 22LY02748, 22LY02753

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02748
Date de la décision : 22/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Julien CHASSAGNE
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : GAY

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-06-22;22ly02748 ?
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