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29/06/2023 | FRANCE | N°23LY01052

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 29 juin 2023, 23LY01052


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2023 par lequel le préfet du Rhône, préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes, a ordonné sa remise aux autorités allemandes responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par jugement n° 2300733 du 20 février 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et deux mémoires, enregistrés le

s 24 mars, 5 avril et 27 avril 2023, Mme B..., représentée par Me Djinderedjian, demande à la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2023 par lequel le préfet du Rhône, préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes, a ordonné sa remise aux autorités allemandes responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par jugement n° 2300733 du 20 février 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 24 mars, 5 avril et 27 avril 2023, Mme B..., représentée par Me Djinderedjian, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 février 2023 ainsi que l'arrêté susvisé ;

2°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de réexaminer sa situation et l'autoriser à présenter sa demande d'asile ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté méconnaît l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du même règlement.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 6 avril 2023 et 7 avril 2023, la préfète du Rhône conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 24 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., né le 30 juin 1994, de nationalité kosovare, est entrée en France, selon ses déclarations, le 7 novembre 2022. Elle a sollicité, le 21 novembre 2022, le statut de réfugié. Saisies le 27 octobre 2022 d'une demande de prise en charge de la demande de l'intéressée, sur le fondement de l'article 12 du règlement (UE) n° 604/2013, les autorités allemandes ont accepté leur responsabilité par un accord explicite le 13 décembre 2022. Par un arrêté du 23 janvier 2023, la préfète du Rhône a ordonné la remise de Mme B... aux autorités allemandes, responsables de l'examen de sa demande d'asile. Mme B... relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les Etats membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux (...). La demande est examinée par un seul Etat membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable (...) 2. Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ". Le premier paragraphe de l'article 17 de ce règlement dispose que : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ". Il résulte de ces dispositions que la faculté laissée à chaque Etat membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement précité, est discrétionnaire et ne constitue pas un droit pour les demandeurs d'asile. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

3. En outre, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

4. D'une part, si Mme B... justifie par les pièces produites que son état de santé nécessite la réalisation de trois séances d'hémodialyse par semaine en raison d'une insuffisance rénale terminale, elle n'apporte toutefois aucun élément de nature à établir qu'elle ne pourrait être prise en charge médicalement en Allemagne pour sa pathologie. D'autre part, elle se borne à évoquer une admission aux urgences le 26 novembre 2022 en raison d'une hypertension artérielle et des céphalées après une séance de dialyse qui ont entraîné des diarrhées et des douleurs abdominales et à produire trois certificats médicaux datés des 3, 12 et 24 avril 2023, postérieurs à la date de la décision en litige, indiquant, de manière lapidaire, que tout voyage est contre-indiqué. Ces éléments ne sauraient démontrer qu'elle ne pourrait voyager sans risque vers l'Allemagne, notamment par transport médicalisé. Il appartient dans une telle hypothèse à la préfète de s'assurer que l'intéressée pourra être prise en charge immédiatement à son arrivée en Allemagne. Enfin, Mme B... ne soutient ni n'allègue qu'il existerait de sérieuses raisons de croire qu'il existe en Allemagne des défaillances systémiques dans le traitement des demandeurs d'asile et elle ne fait état d'aucun élément particulier susceptible d'établir qu'elle serait soumise en Allemagne à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision litigieuse serait contraire à l'article 3 du règlement susvisé et à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doivent être écartés.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Les conclusions qu'elle présente aux mêmes fins en appel doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 juin 2023.

La rapporteure,

V. Rémy-NérisLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY01052

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY01052
Date de la décision : 29/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : DJINDEREDJIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-06-29;23ly01052 ?
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