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19/10/2023 | FRANCE | N°23LY01393

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 19 octobre 2023, 23LY01393


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2022 par lequel la préfète de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte, ou à défaut, de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 2207446 du 24 mars 2023, le tribunal a rejeté cette dema

nde.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 24 avril 2023, M. B..., ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2022 par lequel la préfète de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte, ou à défaut, de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 2207446 du 24 mars 2023, le tribunal a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 24 avril 2023, M. B..., représenté par Me Gay, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre à la préfète de la Drôme de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions ; il méconnait également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

M. B... ayant été régulièrement averti du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Chassagne, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant de la République de Côte d'Ivoire, déclare être né le 25 juin 2003 à Daloa et être entré sur le territoire français à la fin de l'année 2019. Par une ordonnance du 8 janvier 2021, le juge des tutelles du tribunal judiciaire de Valence a prononcé la mainlevée de la tutelle précédemment ouverte en sa faveur après son placement provisoire à l'aide sociale à l'enfance de la Drôme. M. B... a demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à la préfète de la Drôme qui, par un arrêté du 14 octobre 2022, lui a opposé un refus et fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble qui a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance ou du tiers digne de confiance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. ". Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée.

3. Pour refuser à M. B... la délivrance d'un titre de séjour, la préfète de la Drôme a relevé, d'une part, que l'intéressé ne pouvait se prévaloir des dispositions précitées faute pour lui d'avoir été effectivement confié à l'aide sociale à l'enfance ou un tiers digne de confiance entre l'âge de seize ans et de dix-huit ans et, d'autre part, que malgré l'obtention d'un diplôme en langue française dit " A... B1 " le 6 juillet 2021, et d'un certificat d'aptitude professionnelle " maintenance des bâtiments de collectivité " en juin 2022 ainsi que le suivi d'une formation, il ne justifiait pas d'un avis de la structure d'accueil ou d'un tiers digne de confiance ni avoir rompu tout lien avec sa famille restée dans son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier que la mainlevée de la tutelle évoquée précédemment tient à ce que cette tutelle avait été obtenue sur la base de fausses informations et d'une dissimulation par l'intéressé de sa véritable identité. Il apparaît également que le juge pour enfants du tribunal judiciaire de Dieppe a rendu le 27 août 2020 un jugement de non-lieu à assistance éducative fondé sur le motif tiré de ce que les documents d'état civil produits par M. B... avaient fait l'objet d'un avis défavorable des services de la police aux frontières, et que l'intéressé avait sollicité, sous une autre identité, une prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance de la Drôme. M. B... ne remet pas sérieusement en cause ces différents éléments. C'est donc légalement que la préfète a estimé que, faute pour lui d'avoir été confié à l'aide sociale à l'enfance ou un tiers digne de confiance entre l'âge de seize ans et de dix-huit ans, sa situation ne relevait pas des dispositions citées au point précédent. En outre, et en toute hypothèse, en admettant même que l'intéressé aurait rempli la condition d'âge et de prise en charge, le refus contesté a été pris après une analyse globale de la situation de l'intéressé, sans qu'aucune erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des autres conditions prévues par l'article L. 435-3 ci-dessus ne puisse être retenue. Par suite, aucune violation de cet article, dans ses différents éléments, ne saurait être admise.

4. En deuxième lieu, M. B... se prévaut de son entrée sur le territoire français en 2019 à l'âge de seize ans, affirmant qu'il était mineur, qu'il n'est pas responsable des mentions erronées sur son premier acte de naissance et qu'il a cherché à obtenir un acte de naissance rectifié, que ces actes n'ont pas été vérifiés avant que soit prononcée la mainlevée de la tutelle, qu'il est intégré sur le plan personnel et scolaire et n'a pas de liens dans son pays d'origine. Toutefois, alors que, compte tenu de ce qui a déjà été dit, M. B... ne saurait être regardé comme justifiant de sa minorité, et en admettant même qu'il serait effectivement entré en France à la fin de l'année 2019, il n'y était présent que depuis moins de trois années à la date du refus de titre de séjour contesté. Il ne ressort pas des pièces du dossier, malgré les diplômes évoqués précédemment après une scolarité avec de bons résultats et les témoignages en sa faveur de plusieurs de ses professeurs et d'agents de son établissement d'affectation, que l'intéressé puisse être regardé comme suffisamment intégré d'un point de vue personnel et professionnel. Il est par ailleurs célibataire et sans enfant sur le territoire national, rien ne permettant de dire qu'il n'aurait plus d'attaches dans son pays d'origine, où il a toujours auparavant vécu et où résident deux sœurs et un frère ainsi que son père, dont le décès n'est pas justifié. Par suite, aucune violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne saurait être admise.

5. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour. Par suite, la décision fixant le pays de destination n'est pas davantage illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français. Les moyens ne peuvent donc qu'être écartés.

6. Il résulte de ce qui précède, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. La requête de M. B... doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre.

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure.

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 octobre 2023.

Le rapporteur,

J. Chassagne

Le président,

V-M. Picard La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière

2

N° 23LY01393


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY01393
Date de la décision : 19/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Julien CHASSAGNE
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : GAY

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-10-19;23ly01393 ?
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