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10/04/2003 | FRANCE | N°97MA00293

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre, 10 avril 2003, 97MA00293


Vu l'ordonnance en date du 29 août 1997 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Lyon a transmis à la Cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 97-457 du 9 mai 1997, le recours présenté, au nom de l'Etat, par le ministre de l'équipement, des transports et du logement et tendant d'une part à l'annulation du jugement n° 97-705/95-706/96-423 en date du 30 octobre 1996 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a annulé, à la demande de M. X et de l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien, le permis de construire en

date du 2 octobre 1995 délivré à M. Y par le maire de la commu...

Vu l'ordonnance en date du 29 août 1997 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Lyon a transmis à la Cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 97-457 du 9 mai 1997, le recours présenté, au nom de l'Etat, par le ministre de l'équipement, des transports et du logement et tendant d'une part à l'annulation du jugement n° 97-705/95-706/96-423 en date du 30 octobre 1996 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a annulé, à la demande de M. X et de l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien, le permis de construire en date du 2 octobre 1995 délivré à M. Y par le maire de la commune de Lecci, agissant au nom de l'Etat, et d'autre part au rejet de la demande de première instance ;

Classement CNIJ : 68-02-04-04

C

Vu le recours sommaire susvisé transmis par télécopie, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 4 février 1997 et enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 97MA00293 ;

Il fait valoir que c'est à tort, ainsi qu'il le démontrera dans un mémoire ampliatif qu'il produira ultérieurement, que, pour annuler le permis de construire délivré à M. Y par le maire de Lecci en vue d'autoriser une extension de 24 m² de la superficie d'une construction existante ainsi que la modification des façades, le tribunal administratif a retenu le moyen invoqué par les requérants de première instance et tiré de la violation de l'article 9 du cahier des charges du lotissement du Domaine de SAN CIPRIANO dès lors que l'autorisation de lotir était devenue caduque en application de l'article R.315-30 du code de l'urbanisme ; qu'en effet, en application de l'article 6 du décret n° 77-860 du 26 juillet 1977, la caducité de l'autorisation de lotir du lotissement concerné a été constatée en raison de l'inachèvement des travaux sachant qu'en admettant même la réalisation dudit lotissement en deux tranches, aucune des deux tranches n'ont été achevées ; qu'ainsi le dernier alinéa de l'article R.315-50 du code de l'urbanisme était, en tout état de cause, inapplicable ; que sur la portée de cette disposition, on ne peut considérer que les règles d'urbanisme propres au lotissement demeurent en vigueur malgré la caducité de l'autorisation ; qu'ainsi, la légalité du permis de construire contesté devait s'apprécier au regard des règles générales d'urbanisme (R.N.U.) et il ne résulte d'aucune d'entre elles que la surface constructible sur le lot n° 107 était limitée à 200 m² ;

Vu l'exemplaire original de la requête susvisée, enregistré le 5 février 1997 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 avril 1997, présenté par M. Paul X et l'Association de Défense des Intérêts de Saint-Cyprien (A.D.I.S.C.), représentée par son président, à ce dûment habilité par une décision du conseil d'administration, et par lequel ils concluent au rejet de la requête et à ce que l'Etat, et/ou le maire de Lecci et / ou M. Y soient condamnés au paiement d'une somme de 6.000 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Ils font valoir que le permis annulé autorisait une surface hors oeuvre brute (S.H.O.B.) de 260 m² et non seulement comme le prétend le ministre un accroissement de 24 m² ; que ce projet qui constituait un nouveau projet devait donner lieu à un nouveau permis de construire d'autant que le permis initial était périmé ce qui interdisait tout permis modificatif ;

Ils soutiennent, en premier lieu, que l'autorisation de lotir, qui prévoyait bien la réalisation du lotissement en deux tranches, n'était pas caduque ; que d'une part, il n'est pas contesté que la totalité de la première tranche a été lotie et vendue, chaque lot ayant fait l'objet d'un certificat administratif délivré par l'Etat et attestant de la complète viabilité des lots ; qu'à cet égard le lot relatif au permis litigieux se situe dans cette première tranche ; qu'il ressort des dispositions des articles R.315-30 et R.315-31 que la situation s'apprécie tranche par tranche et que lesdites dispositions n'interdisent que la poursuite des travaux pour les tranches dont les travaux d'aménagement n'ont pas été menés à terme ; qu'ainsi la question de la caducité de l'autorisation de lotir est réglée par lesdites dispositions concernant la première tranche ; que si, sur la deuxième tranche, seuls cinq lots ont été viabilisés et vendus, il ressort d'un arrêt du Conseil d'Etat Jestin de 1983 que l'arrêté permettant les ventes a abrogé l'arrêté de lotissement prévoyant sa caducité et qu'ainsi cet arrêt règle la question pour les deux tranches, la caducité devenant sans objet ; qu'à supposer même qu'il y ait caducité de l'autorisation de lotir, l'application des dispositions des articles R.315-30 et R.315-31 du code de l'urbanisme auraient pour seule conséquence d'interdire au lotisseur de terminer les travaux, le cahier des charges du lotissement étant applicable nonobstant la caducité de l'autorisation de lotir ; que c'est d'ailleurs le sens des conclusions du commissaire du gouvernement dans l'arrêt Crépin ; que cela étant, le permis en litige était bien contraire à l'article 9 du cahier des charges ;

Ils soutiennent, en deuxième lieu, qu'ils maintiennent les autres moyens de première instance, et notamment les moyens tirés de la violation par le projet critiqué des règles du cahier des charges relatives à la mitoyenneté, à la hauteur du mur mitoyen, du plan de masse du lotissement pour les zones constructibles par lot ainsi que les moyens relatifs à l'exigence d'un nouveau permis de construire pour la réalisation du projet dès lors que le permis de construire initial était périmé, aux incohérences et erreurs quant aux surfaces autorisées, à l'absence de visas de l'infraction dans l'arrêté contesté et à l'absence de doublement des taxes en infraction avec une circulaire ministérielle du 18 novembre 1981 et des articles 1723 quater et 1836 du code général des impôts, au non respect de l'article R.111-19 du code de l'urbanisme, applicable en l'absence de plan d'occupation des sols (POS) opposable, à l'illégalité par voie d'exception du POS de Lecci, à supposer qu'il soit applicable, en ce qui concerne l'article 2 U.V.7 et le détournement de pouvoir ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 mai 1997, présenté pour M. Y, par la S.C.P. d'avocats MORELLI-MAUREL-SANTELLI-PINNA-RECCHI et par lequel il déclare s'associer aux arguments invoqués par le ministre dans la requête d'appel ;

Il fait falloir que la caducité de l'autorisation de lotir en application de l'article R.315-30 du code de l'urbanisme a pour effet de paralyser les règles d'urbanisme contenues dans le cahier des charges ; que le Tribunal administratif de Bastia n'a pas pris en compte les éléments figurant dans un compte-rendu de la réunion du conseil de surveillance du lotissement de Saint Cyprien en date du 7 novembre 1977 prévoyant expressément que la surface du garage et des annexes ne sont pas pris en compte pour le calcul de la surface constructible du lot dans la limite d'une surface au sol de 25 m² ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 juin 1997, présenté pour l'A.D.I.S.C. et M. X et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leur mémoire susvisé et par les mêmes motifs ; ils concluent, en outre, à ce que soit prononcé le désistement d'office de l'appel formé par le ministre ;

Ils soutiennent que le ministre n'a pas produit plus de quatre mois après l'enregistrement de son appel le mémoire ampliatif qu'il annonçait et n'a pas produit dans le délai imparti par la Cour d'observations à la suite de leur premier mémoire ; qu'ainsi il y a lieu pour la Cour de prononcer un désistement d'office ; que s'agissant du compte-rendu du conseil de surveillance produit par M. Y, il convient de préciser que cet organe assure uniquement la surveillance des travaux d'entretien et ne dispose d'aucun pouvoir et notamment pas celui de modifier le cahier des charges ; qu'ainsi, la définition de la surface de plancher donnée dans ce document par un agent de l'administration de l'équipement ne présente aucune valeur réglementaire et ne saurait infirmer celle donnée par l'article R.112-2 du code de l'urbanisme ; que M. Y a été condamné par la Cour d'appel de Bastia pour construction irrégulière par un arrêt en date du 14 mai 1997 ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 juin 1997, présenté par l'A.D.I.S.C. et M. X et par lequel ils transmettent des pièces à la Cour ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 août 1997, présenté par M. Y et par lequel il demande à la Cour de prendre en compte qu'il se désiste de son intervention volontaire ou accessoire dans la présente instance ayant décidé de mettre sa construction en conformité, en exécution de l'arrêt de la Cour d'appel de Bastia et de ne pas être pénalisé par de nouveaux frais ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 septembre 1997, présenté par l'A.D.I.S.C. et par M. X et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leurs mémoires susvisés et par les mêmes motifs ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 septembre 1997, présenté par l'A.D.I.S.C et M. X et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leurs mémoires susvisés et par les mêmes motifs ; ils demandent, en outre, que la Cour mette en demeure le ministre de produire le mémoire ampliatif qu'il annonçait et à défaut de production dans un délai de quatre mois de prononcer un désistement d'office ;

Vu le mémoire ampliatif transmis par télécopie, enregistré le 5 décembre 1997, présenté par le ministre de l'équipement, des transports et du logement et par lequel il conclut aux mêmes fins que sa requête et par les mêmes moyens ;

Il soutient, en outre, que si l'arrêté préfectoral en date du 21 février 1967 a prévu que le lotissement du Domaine de SAN CIPRIANO serait réalisé par tranches, cet arrêté est devenu caduc pour défaut d'achèvement des travaux d'aménagement prescrits, lesdits travaux devant, en tout état de cause, être réalisés dans un délai maximum de 6 ans ; qu'en admettant même la réalisation de ce lotissement par tranches, il ressort du constat établi le 27 septembre 1997 par la Direction Départementale de l'Equipement que les travaux d'aménagement d'aucune des deux tranches n'ont été achevés au sens de l'article R.315-30 du code de l'urbanisme ; qu'il ressort du même document que, dans la partie non bâtie du lotissement, la voirie n'a pas été réalisée et que, dans la partie bâtie, les chaussées, si elles ont été réalisées, n'ont pas la largeur prévue au programme initial et aucun travail d'enrobés des chaussées de la voirie principale secondaire et tertiaire n'a été réalisé ; qu'ainsi, en raison de l'inachèvement de ces travaux d'aménagement, l'autorisation de lotir était caduque ; que si la Cour estimait que les travaux de voirie restant à réaliser n'entrent pas dans le cadre des travaux d'aménagement au sens de l'article R.315-30 du code précité mais constituent des travaux de finition définis à l'article R.315-33 du même code dont l'absence de réalisation n'aurait pas pour conséquence la caducité de l'autorisation de lotir, une telle conséquence ne serait possible qu'à la condition que le lotisseur ait sollicité et obtenu l'autorisation de différer ces travaux de finition en application de l'article R.315-33 a) du code de l'urbanisme, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; qu'à cet égard, les travaux d'aménagement des voiries n'ont pas été effectués conformément aux exigences du programme de travaux en particulier dans le secteur du lot appartenant à M. Y ; que le lotisseur n'a pas exécuté ses obligations quant à la réalisation des travaux d'assainissement du lotissement, la commune, devant la carence du lotisseur, ayant construit une station d'épuration pour le lotissement ; qu'il en est de même des travaux relatifs au réseau d'évacuation des eaux pluviales et de certains équipements publics dont la réalisation incombait au lotisseur et qui ne les a pas réalisés ; que, pour toutes ces raisons, l'autorisation de lotir était caduque ; que , compte tenu du principe d'unicité de l'autorisation de lotir, la caducité de ladite autorisation a eu pour conséquence de rendre non opposables les règles contenues dans l'autorisation de lotir et notamment le cahier des charges ; que c'est d'ailleurs le sens de l'arrêt Crépin de la Cour administrative d'appel de Lyon du 5 juillet 1996 ;

Vu l'exemplaire original du mémoire susvisé, enregistré le 11 décembre 1997 ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 juin 1999, présenté par l'A.D.I.S.C et M. X et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leurs mémoires susvisés et par les mêmes motifs ;

Ils soutiennent, en outre, qu'il n'y a jamais eu de décision officielle du préfet constatant la caducité de l'autorisation de lotir relative au lotissement ici concerné mais une simple lettre émanant d'un chef de service de la Direction Départementale de l'Equipement n'ayant pas compétence pour ce faire ;

Vu le mémoire transmis par télécopie, enregistré le 13 juillet 1999, présenté par le ministre de l'équipement, des transports et du logement et par lequel il conclut aux mêmes fins que sa requête et son mémoire susvisé et par les mêmes moyens ;

Il soutient, en outre, qu'il n'existe aucune disposition dans le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel imposant un délai de quatre mois pour produire un mémoire ampliatif annoncé dans un recours sommaire ; qu'aucune décision n'est nécessaire pour constater la caducité d'une autorisation de lotir ; qu'en l'espèce, la lettre adressée par le chef de service de la direction de l'équipement n'est qu'un document récognitif ;

Vu l'exemplaire original du mémoire susvisé, enregistré le 19 juillet 1999 ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 septembre 1999, présenté par l'A.D.I.S.C. et M. X et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leurs mémoires susvisés et par les mêmes motifs ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 octobre 1999, présenté par l'A.D.I.S.C. et M. X et par lequel ils transmettent une pièce à la Cour ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 juin 2001, présenté par l'A.D.I.S.C et M. X et par lequel d'une part ils concluent aux mêmes fins que leurs mémoires susvisés et par les mêmes motifs et d'autre part ils transmettent des pièces à la Cour ;

Ils soutiennent, en outre, qu'il résulte d'un arrêt du Conseil d'Etat rendu le 26 mai 2001 dans une espèce relatif au même lotissement, que l'autorisation de lotir n'est pas caduque concernant la première tranche, au sein de laquelle se situe le lot en litige dans la présente instance ; que si dans cet arrêt, le Conseil d'Etat a jugé que la surface de plancher à prendre en compte était la surface nette et non la surface brute, dans un arrêt antérieur du 23 mars 1988 publié au recueil Lebon, le Conseil d'Etat avait pris une position différente ; que si la Cour entend suivre la position retenue par le Conseil d'Etat dans son arrêt de 2001, le motif d'annulation du permis de construire retenu par le Tribunal administratif de Bastia ne pourrait être validé ; que toutefois, saisie par l'effet dévolutif de l'appel , la Cour devrait alors constater la violation par le permis de construire en litige des dispositions de l'article du cahier des charges du lotissement, non caduc pour la première tranche, et relatif à la mitoyenneté , de la méconnaissance de l'article R.111-19 du code de l'urbanisme ainsi que de l'illégalité de la construction qui est implantée en zone inconstructible au plan de masse ; qu'ils maintiennent, en outre, les autres moyens qu'ils avaient développés en première instance ;

Vu les ordonnances du président de la formation de jugement ordonnant la clôture puis la réouverture de l'instruction, ensemble les décisions portant successivement enrôlement, radiation et enrôlement de l'instance susvisée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 ;

Vu le décret n° 58-1466 du 31 décembre 1958 ;

Vu le décret n° 77-860 du 26 juillet 1977 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2003 :

- le rapport de Mme BUCCAFURRI, premier conseiller ;

- les observations de M. Paul X en son nom propre et en sa qualité de président de l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien ;

- et les conclusions de M. BENOIT, premier conseiller ;

Sur les conclusions aux fins de désistement d'office du ministre :

Considérant qu'aux termes de l'article R.152 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors applicable : Si, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée, le demandeur n'a pas produit le mémoire complémentaire dont il avait expressément annoncé l'envoi ou, dans les cas mentionnés au dernier alinéa de l'article R.141, n'a pas rétabli le dossier, il est réputé s'être désisté. ;

Considérant que, par la requête sommaire susvisée, le ministre de l'équipement, des transports et du logement, a interjeté appel du jugement en date du 30 octobre 1996 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a annulé, à la demande de M. X et de l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien (A.D.I.S.C.), l'arrêté en date du 2 octobre 1995 par lequel le maire de la commune de Lecci, agissant au nom de l'Etat, a délivré à M. Y un permis de construire en vue de l'extension d'une maison située sur le lot n° 107 du lotissement Saint Cyprien sis sur le territoire de cette commune ; que dans ladite requête, le ministre annonçait la production d'un mémoire ampliatif ; que par une lettre en date du 29 octobre 1997, notifiée au ministre le 5 novembre suivant, le président de la formation de jugement de la Cour de céans a mis en demeure le ministre de produire, dans un délai d'un mois, le mémoire dont s'agit ; que le ministre a produit un mémoire ampliatif le 5 décembre 1997, soit dans le délai qui lui était imparti ; que, par suite, M. X et l'A.D.I.S.C. ne sont pas fondés à soutenir qu'il y aurait lieu pour la Cour de prendre acte du désistement d'office de l'appel introduit par le ministre ;

Sur la légalité de l'arrêté du 2 octobre 1995 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 7 mars 1963 qui a été modifié par trois arrêtés des 21 février 1967, 19 août 1969 et 8 novembre 1977, le préfet de la Corse a délivré à la société SEQUIFRANCE l'autorisation de lotir un ensemble de terrains situés dans la commune de Lecci Di Porto Vecchio ; que le Tribunal administratif de Bastia a prononcé l'annulation de l'arrêté susvisé au motif que le permis de construire en litige méconnaissait les dispositions de l'article 9 du cahier des charges du lotissement, dans sa version approuvée par l'arrêté préfectoral du 8 novembre 1977 , qui prévoient que, sur les lots de moins de 2.000 m², ne peuvent être admises que des constructions d'une surface bâtie au sol d'un maximum de 200 m² et d'une surface hors oeuvre cumulée des planchers d'un maximum de 200 m2 ;

Considérant que, pour contester le jugement attaqué, le ministre fait valoir que le cahier des charges du lotissement ne pouvait plus recevoir application et que la légalité du permis de construire en litige devait seulement être appréciée au regard des règles nationales d'urbanisme, dès lors que l'autorisation de lotissement aurait été frappée de caducité, faute pour le lotisseur d'avoir achevé les travaux d'aménagement au 31 décembre 1980, date résultant des dispositions de l'article R.315-30 du code de l'urbanisme, dans la rédaction qui lui a été donnée par le décret n° 77-860 du 26 juillet 1977 modifiant le code de l'urbanisme et relatif aux lotissements, combinées avec celles de l'article 6, alinéa 3 de ce décret ; qu'ainsi, en faisant application de ce cahier des charges, le tribunal administratif aurait entaché son jugement d'une erreur de droit ;

Considérant qu'aux termes de l'article R.315-30 du code de l'urbanisme : L'arrêté d'autorisation du lotissement devient caduc si les travaux d'aménagement ne sont pas commencés dans un délai de dix-huit mois à compter de la notification au lotisseur de l'arrêté d'autorisation ou de la date à laquelle l'autorisation est réputée accordée en application de l'article R.315-21. Il en est de même si lesdits travaux ne sont pas achevés dans le délai fixé par l'arrêté et qui ne peut être supérieur à une durée de trois ans décomptée comme il est dit à l'alinéa précédent. Toutefois, dans le cas où la réalisation des travaux par tranches a été autorisée, les délais impartis au lotisseur en application des alinéas ci-dessus s'appliquent aux travaux de la première tranche. Les délais impartis pour réaliser les travaux des autres tranches sont fixés par l'arrêté d'autorisation sans qu'ils puissent excéder une durée de six ans décomptée comme il est dit à l'alinéa premier du présent article. Lorsque l'autorisation est devenue caduque, l'opération ne peut être poursuivie qu'en ce qui concerne les tranches dont les travaux d'aménagement ont été menés à terme. ; qu'en vertu de l'article R.315-32 du même code, aucune mutation entre vifs ou location concernant les terrains compris dans un lotissement ne peut être effectuée avant l'intervention de l'arrêté autorisant le lotissement et l'exécution des prescriptions imposées au lotisseur par ledit arrêté ; que, pour garantir la bonne application de ces dispositions, l'article R.315-36 du même code prévoit la délivrance, par le préfet, d'un certificat mentionnant l'exécution des prescriptions imposées dans l'arrêté d'autorisation... ;

Considérant que, de même, le décret n° 58-1466 du 31 décembre 1958 relatif aux lotissements, sur le fondement duquel a été autorisé le lotissement en cause, prévoyait, dans son article 5, que le préfet pouvait imposer au lotisseur l'exécution de tous travaux nécessaires à la viabilité du lotissement en ce qui concerne notamment la voirie, la distribution d'eau, l'évacuation des eaux usées, l'éclairage, la réalisation d'aires de stationnement, d'espaces libres ou de plantations et que l'exécution de ces travaux par tranches pouvait être autorisée ; que, d'ailleurs, les articles 8 et 9 de ce décret prévoyaient l'interdiction de vendre des lots avant l'achèvement des travaux et la délivrance, à cet effet, par le préfet, d'un certificat à l'occasion de chaque vente ou location ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, lorsque l'exécution de travaux nécessaires à la viabilité et à l'équipement d'un lotissement ont été prescrits et que l'autorisation de les exécuter par tranches a été accordée, le défaut d'exécution des travaux de l'une des tranches dans le délai prévu a pour effet de rendre caduque l'autorisation du lotissement ; qu'il en résulte, conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article R.315-30 du code de l'urbanisme, que l'opération ne peut se poursuivre que pour les tranches dont les travaux d'aménagement ont été menés à leur terme ; qu'il en résulte aussi nécessairement que les documents du lotissement, et notamment le cahier des charges approuvé, s'ils sont frappés de caducité, faute d'objet, pour les tranches du lotissement dont l'aménagement n'a pas été mené à terme, continuent à régir celles dont l'aménagement a été achevé ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'arrêté préfectoral du 21 février 1967 et du cahier des charges qui y était annexé, ce qui n'est d'ailleurs plus contesté par le ministre, que les travaux du lotissement en cause devaient être réalisés en deux tranches ; qu'il est constant d'une part que la quasi-totalité des lots de la première tranche ont été vendus et d'autre part que le préfet a délivré pour chaque vente le certificat d'achèvement des travaux prévu par l'article 9 du décret du 31 décembre 1958 ; qu'il ressort également des pièces du dossier, et notamment du constat d'avancement des travaux du lotissement dressé le 24 septembre 1997 par les agents de la direction départementale de l'équipement, versé aux débats par le ministre, que si l'aménagement de la seconde tranche du lotissement n'a pas été menée à son terme, la voirie principale et secondaire de la première tranche dudit lotissement a été réalisée par le lotisseur ; que si le ministre fait valoir, en invoquant les constatations opérées en 1997 par les services de l'équipement, que les voies de la première tranche du lotissement ne comporteraient pas de revêtement en bitume, ni d'accotements ou trottoirs et n'auraient pas été réalisées conformément au programme de travaux annexé à l'autorisation de lotir et qu'enfin certains équipements prévus dans ledit programme n'auraient pas été exécutés, la seule production d'un constat établi en 1997, soit plus de vingt ans après la délivrance par le préfet, comme il a été dit ci-dessus, des certificats d'achèvement des travaux concernant la première tranche du lotissement, n'est pas de nature à démontrer que les carences relevées par le ministre seraient imputables au lotisseur et ne résulteraient pas d'un défaut d'entretien ou de dégradations des équipements en cause ; que si le ministre fait valoir que la première tranche du lotissement en cause ne disposait pas d'un réseau d'assainissement réalisé par le lotisseur et était desservie par une station d'épuration édifiée par la commune de Lecci, l'attestation du maire de cette collectivité établie le 9 septembre 1996, produit au dossier par le ministre au soutien de son argumentation, fait seulement état de la nécessité de la réalisation de cet équipement par la collectivité en raison du sous-dimensionnement du réseau d'assainissement réalisé par le lotisseur et non pas de son défaut de réalisation ; qu'il suit de là, et alors même que certains travaux ont été mal ou partiellement exécutés et que certains ouvrages seraient affectés de malfaçons, les travaux d'aménagement, au sens des dispositions de l'article R.315-30 du code précité, de la première tranche du lotissement de Saint Cyprien, doivent être regardés comme ayant été pour l'essentiel réalisés ; que, par suite, c'est à bon droit, que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a considéré que le cahier des charges approuvé par arrêté du 7 mars 1963, tel qu'ultérieurement modifié, devait recevoir application pour cette partie du lotissement dans laquelle est situé le terrain d'assiette du projet de construction autorisé par l'arrêté susvisé du 2 octobre 1995 ;

Considérant qu'en vertu de l'article 9 du cahier des charges du lotissement, dans la rédaction qui lui a été donnée à la suite de l'arrêté du 8 novembre 1977, ne peuvent être autorisées sur les lots d'une superficie inférieure à 2.000 m², ce qui est le cas dans la présente instance, que des constructions d'une superficie au sol de 200 m² et d'une surface hors oeuvre cumulée de plancher de 200 m2 ; qu'il résulte de ces dispositions que tant l'emprise au sol que la surface hors oeuvre cumulée de plancher, laquelle est égale à la surface hors oeuvre nette des constructions, contrairement à ce qu'a estimé sur ce point le tribunal administratif, ne doit pas dépasser 200 m² ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la construction déjà édifiée de M. Y sur le lot n° 107 du lotissement de Saint Cyprien développe une surface hors oeuvre nette de plancher de 162m² ; que le permis de construire contesté autorise un projet de construction pour une surface hors oeuvre nette de plancher de 24 m² et a donc pour effet de porter la surface hors oeuvre nette de plancher cumulée à 186 m2, soit en deçà du maximum fixé à 200 m² par l'article 9 du cahier des charges approuvé ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler l'arrêté en date du 2 octobre 1995 susvisé, le tribunal administratif s'est fondé sur la violation des dispositions précitées de l'article 9 du cahier des charges du lotissement ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. X et l'A.D.I.S.C. devant le tribunal administratif ;

Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article 9 du cahier des charges du lotissement, dans sa version approuvée par l'arrêté préfectoral du 8 novembre 1977, imposent d'une part , pour l'ensemble des lots comportant une superficie de moins de 2.000 m², ce qui est le cas de l'espèce, un retrait minimum de 5 mètres par rapport aux limites séparatives et prévoient d'autre part, pour chaque lot, une implantation jointive et des règles particulières de retrait par rapport aux dites limites séparatives suivant des plans annexés au cahier des charges ;

Considérant que les prescriptions du cahier des charges d'un lotissement approuvé par l'autorité préfectorale sur le fondement du décret susvisé du 31 décembre 1958, comme en l'espèce, présentent un caractère réglementaire et s'imposent tant à l'autorité chargée de délivrer le permis qu'à son pétitionnaire ; que ce caractère s'attache aux prescriptions du plan à lui annexé auquel renvoie l'article 9 du cahier des charges du lotissement de Saint Cyprien ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan CC2 annexé au cahier des charges, que ce document n'autorise une mitoyenneté du lot n° 107, terrain d'assiette du projet contesté, que par rapport aux lots n° 105 et n° 106 ; que, dans ces conditions, le projet en litige devait respecter avec le lot n° 104, en limite duquel il est situé, la règle de retrait d'un minimum de 5 mètres fixée par l'article 9 précité pour l'ensemble des lots de moins de 2.000 m² ; qu'il résulte de l'examen des plans annexés à la demande de permis de construire déposée par M. Y pour la réalisation du projet litigieux que la construction en litige doit être édifiée partiellement en limite séparative par rapport au lot n° 104 ; qu'il suit de là que M. X et l'A.D.I.S.C sont fondés à soutenir que le permis de construire en litige a été délivré en méconnaissance des dispositions sus-rappelées de l'article 9 du cahier des charges du lotissement et du plan CC2 qui y est annexé et à solliciter, pour ce motif, son annulation ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.600-4-1 du code de l'urbanisme, issu de la loi susvisée du 13 décembre 2000 et applicable en l'espèce : Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier , et notamment de l'examen des plans annexés à la demande de permis de construire en cause, qu'une partie de la construction projetée est implantée au sein de la zone, indiquée comme étant non constructible par le plan CC2 annexé au cahier des charges du lotissement ; qu'ainsi, M. X et l'A.D.I.S.C. sont également fondés à soutenir que le permis de construire en litige a été délivré en méconnaissance des règles induites par ledit plan ; qu'en l'état de l'instruction, aucun des autres moyens invoqués par M. X et l'A.D.I.S.C. ne paraît susceptible de fonder également l'annulation de la décision contestée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'équipement, des transports et du logement n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté susvisé du 2 octobre 1995 ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à M. X et à l'A.D.I.S.C une somme de 800 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de l'équipement, des transports, du logement et du tourisme est rejetée.

Article 2 : L'Etat (ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer) est condamné à payer à M. X et à l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien la somme de 800 euros ( huit cents euros) sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, à M. X, à l'Association de Défense des Intérêts de Saint Cyprien, à la commune de LECCI et à M. Y.

Délibéré à l'issue de l'audience du 27 mars 2003, où siégeaient :

M. ROUSTAN, président de chambre,

M. HERMITTE et Mme BUCCAFURRI, premiers conseillers,

assistés de Mlle RANVIER, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 10 avril 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Marc ROUSTAN Isabelle BUCCAFURRI

Le greffier,

Signé

Patricia RANVIER

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

N° 97MA00293 13


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 97MA00293
Date de la décision : 10/04/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: Mme BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. BENOIT
Avocat(s) : SCP MORELLI MAUREL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-04-10;97ma00293 ?
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