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26/01/2004 | FRANCE | N°99MA01796

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5eme chambre - formation a 3, 26 janvier 2004, 99MA01796


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 6 septembre 1999, et régularisé le 13 septembre 1999 sous le n° 99MA001796, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ;

Le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 9703716 du 23 juin 1999 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à payer à M. John X une somme de 1.020.000 F majorée des intérêts de droit ;

2'/ de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Montpellier ;

Classement

CNIJ : 60-01-04-01

C

Il soutient :

- que la responsabilité de l'Etat ne saurait ê...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 6 septembre 1999, et régularisé le 13 septembre 1999 sous le n° 99MA001796, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ;

Le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 9703716 du 23 juin 1999 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à payer à M. John X une somme de 1.020.000 F majorée des intérêts de droit ;

2'/ de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Montpellier ;

Classement CNIJ : 60-01-04-01

C

Il soutient :

- que la responsabilité de l'Etat ne saurait être, en l'espèce, mise en cause ;

- qu'en effet, l'arrêté du 25 avril 1997 ordonnant la fermeture définitive du camping exploité sur le territoire de la commune de Lespinassière par M. X a été pris, au nom de cette commune, par le préfet de l'Aude agissant par substitution du maire défaillant, sur le fondement de l'article L.2215-1 du code général des collectivités territoriales ;

- qu'en pareil cas, la mesure de police décidée par une autorité agissant dans le cadre de son pouvoir de substitution, engage la responsabilité de la commune ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré au greffe de la Cour le 25 octobre 1999, le mémoire présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR qui persiste dans ses conclusions et moyens ;

Vu le mémoire enregistré au greffe de la Cour le 28 décembre 1999 présenté pour M. John X par Maître Vézian, avocat, qui conclut :

1°/ au rejet de la requête ;

2°/ à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité complémentaire de 630.000 F (96.041,88 euros) avec intérêts légaux à compter du 26 septembre 1997 ;

3°/ de condamner l'Etat à lui payer une somme de 10.000 F (1.524,49 euros) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Il soutient :

- que la requête d'appel du ministre est tardive ; que la requête a été signée par le sous-directeur du contentieux et des affaires juridiques dont il n'est pas établi qu'il serait titulaire d'une délégation du ministre de l'intérieur à l'effet de signer de telles requêtes ;

- que le ministre n'est pas recevable à contester pour la première fois en appel le principe de la responsabilité de l'Etat qui n'avait pas été contesté en première instance ;

- que le ministre ne peut se prévaloir de l'arrêt du 17 juin 1999 par lequel la Cour de céans a annulé l'ordonnance du président du Tribunal administratif de Montpellier du 20 mars 1998 au motif que la responsabilité de l'Etat n'était pas susceptible d'être recherchée, qui n'est pas revêtue de l'autorité de chose jugée, alors qu'au surplus, cet arrêt est frappé d'un pourvoi devant le Conseil d'Etat ;

- que, dans la mesure où l'arrêté du préfet de l'Aude emportait retrait de l'autorisation d'aménager le camping, remontant au 23 juin 1980, l'acte administratif en cause a revêtu le caractère d'une décision d'urbanisme ;

- que, dès lors, le préfet était compétent pour prendre une telle mesure en vertu de la règle du parallélisme des formes, la commune de Lespinassière étant dépourvue de plan d'occupation des sols ;

- que, par suite, la responsabilité de l'Etat est engagée à raison de cet acte ; que la responsabilité de l'Etat est engagée à son égard pour faute, en raison de l'engagement de l'indemniser pris par le préfet de l'Aude, que le ministre refuse de respecter ;

- que les conseils et informations erronés que lui a délivrés le préfet de l'Aude, en lui indiquant qu'il avait droit à une indemnisation à la charge de l'Etat et qu'il s'en remettrait au tribunal pour la détermination du préjudice, l'ont incité à adopter un comportement qui se révèle préjudiciable et engagent ainsi la responsabilité de l'Etat ;

- qu'au surplus, l'Etat a engagé sa responsabilité pour faute lorsque le préfet a accordé l'autorisation d'ouverture du camping sans procéder à une étude des risques topographiques et climatiques ;

- que c'est à tort que le tribunal a écarté la perte des revenus futurs de l'indemnisation accordée ; qu'un tel préjudice, parfaitement évaluable en argent, n'est pas éventuel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2003 ;

- le rapport de M. Alfonsi, premier conseiller ;

- les observations de Maître Vezian pour M. John X ;

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 23 juin 1999 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à payer à M. X une indemnité de 1.020.000 F (155.498 euros) majorée des intérêts de droit en réparation des conséquences dommageables ayant résulté pour lui de la fermeture, ordonnée par arrêté du préfet de l'Aude du 27 avril 1997, du camping Vert de Clocher qu'il exploitait sur le territoire de la commune de Lespinassière ; que, par la voie de l'appel incident, M. X demande que l'Etat soit condamné à lui verser un complément d'indemnité de 630.000 F (96.042,88 euros) ;

Sur la recevabilité du recours :

Considérant, en premier lieu, que l'absence de timbre à date sur la requête d'appel du ministre de l'intérieur, reçue par télécopie au greffe de la Cour le 6 septembre 1999 et régularisée par la réception, le 13 septembre 1999, du mémoire original, qui résulte d'une simple erreur matérielle, n'est pas de nature à remettre en cause l'exactitude des mentions figurant au registre du greffe de la Cour selon lesquelles cette requête a été enregistrée le 6 septembre 1999 ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que la requête du ministre de l'intérieur, qui disposait, eu égard à la date à laquelle le jugement du tribunal administratif de Montpellier dont il relève appel lui a été notifié, d'un délai expirant le 7 septembre 1999, est tardive ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. Riera, sous-directeur des affaires juridiques et du contentieux du ministère de l'intérieur était titulaire d'une délégation régulière, qui lui a été consentie par arrêté du 5 juin 1997 publié au Journal officiel du 10 juin 1997 ; que la fin de non recevoir tirée par M. X de ce que le recours aurait été signé par une autorité incompétente doit, par suite, être écartée ;

Au fond :

Considérant que l'arrêté du 25 avril 1997, qui a constitué une mesure de police prise par le préfet de l'Aude par substitution du maire de la commune de Lespinassière auquel une mise en demeure restée sans effet avait été adressée le 17 avril 1997, ne pouvait engager, le cas échéant, que la responsabilité de la seule commune de Lespinassière ; qu'il suit de là que la demande de M. X tendant à obtenir de l'Etat la réparation des conséquences dommageables d'un tel arrêté était mal dirigée ; qu'ainsi, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a retenu la responsabilité de l'Etat et l'a condamné à verser des indemnités à M. X ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'arrêté du 25 avril 1997 portant fermeture du camping qu'exploitait M. X a été pris compte tenu du risque d'inondation auquel est exposé le terrain, qui occupe l'ancien lit d'une rivière dans un site encaissé dépourvu de possibilités d'évacuation, et où le niveau des eaux monte rapidement en cas de crue ; que toutefois, dès lors que ces faits étaient connus lors de la délivrance de l'autorisation d'exploiter le camping, M. X est fondé à soutenir qu'en lui délivrant une telle autorisation le 23 juin 1980, le préfet de l'Aude a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Considérant qu'en raison de la faute ainsi commise, M. X est en droit de prétendre à une indemnité correspondant au coût des investissements qu'il a réalisés pour l'exploitation de son camping, ainsi qu'à celui des travaux de mise en conformité qu'il avait effectués, à la demande de l'administration, peu de temps avant l'intervention de l'arrêté ordonnant la fermeture de son camping, dont le montant total non contesté s'élève à la somme de 1.020.000 F (155.498 euros) ;

Considérant, en revanche, que l'autorisation d'exploiter son camping délivrée à M. X étant entachée d'illégalité, les revenus qu'il aurait pu retirer de la poursuite de l'exploitation de ce camping jusqu'à l'age de sa retraite seraient résultés d'une opération elle-même illégale ; qu'il ne saurait, dès lors, en tout état de cause, prétendre à être indemnisé d'un tel manque à gagner ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR n'est pas fondé à se plaindre, de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à payer à M. X une indemnité de 1.020.000 F ; qu'il y a lieu de rejeter l'appel incident de M. X ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. X, une somme de 1.200 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR, ensemble les conclusions d'appel incident de M. X sont rejetés.

Article 2 : L'Etat est condamné à payer à M. X une somme de 1.200 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'INTERIEUR et à M. X.

Délibéré à l'issue de l'audience du19 décembre 2003 où siégeaient :

M. Moussaron, président,

M. Francoz et M. Alfonsi, premiers conseillers,

assistés de Mme Ranvier, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 26 janvier 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Richard Moussaron Jean-François Alfonsi

Le greffier,

Signé

Patricia Ranvier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 99MA01796


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA01796
Date de la décision : 26/01/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: M. ALFONSI
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : VEZIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-01-26;99ma01796 ?
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