La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/02/2004 | FRANCE | N°00MA01473

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 3, 12 février 2004, 00MA01473


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 10 juillet 2000 sous le n° 00MA01473, présentée pour Z... Lucie X, demeurant ...) et Y... Dominique X, demeurant ..., par Me X... ;

Les requérantes demandent à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 973766 du 10 mai 2000 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision en date du 7 avril 1997 par laquelle le maire de Montpellier a refusé d'accorder à Y une autorisation d'accès à la route départementale n° 17 ;


2'/ de condamner la commune de Montpellier à leur payer, au titre des frais ex...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 10 juillet 2000 sous le n° 00MA01473, présentée pour Z... Lucie X, demeurant ...) et Y... Dominique X, demeurant ..., par Me X... ;

Les requérantes demandent à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 973766 du 10 mai 2000 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision en date du 7 avril 1997 par laquelle le maire de Montpellier a refusé d'accorder à Y une autorisation d'accès à la route départementale n° 17 ;

2'/ de condamner la commune de Montpellier à leur payer, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, une somme de 7.000 F augmentée des intérêts de droit à compter de la présente requête ;

Classement CNIJ : 135-02-03-02-04

C

Les requérantes soutiennent :

- que le jugement est entaché d'un vice de forme en ce que, contrairement aux dispositions de l'article R. 200 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, il ne comporte ni dans ses visas ni dans ses motifs l'analyse des moyens qu'elles ont développés en première instance et ne fait pas mention des mémoires des 2 et 7 avril 2000 par lesquels elles ont répliqué aux observations des autres parties ;

- qu'elles justifient d'un intérêt pour agir, dès lors qu'en l'absence d'un droit d'accès ouvert par l'administration à Y, elles se voient contraintes de subir des troubles sérieux de jouissance de leur propriété ;

- que la décision critiquée se fonde sur une décision de l'autorité départementale en date du 28 mars 1997, qui d'une part, au regard de la localisation de l'accès envisagé, est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît le principe d'égalité entre les propriétaires riverains de la voie publique et qui d'autre part annihile les droits qu'elles tenaient de décisions rendues par le juge civil ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré au greffe le 21 novembre 2000, le mémoire présenté par B ; ils concluent au rejet de la requête et demandent en outre à la Cour de condamner les requérantes d'une part au paiement d'une somme de 50.000 F pour procédure abusive, d'autre part au paiement d'une somme de 20.000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; ils font valoir :

- qu'il n'est pas établi que les mémoires non visés dans le jugement attaqué auraient été reçus par le greffe avant la clôture de l'instruction ; que cette omission ne fait pas grief aux requérantes dès lors que le débat sur l'intérêt à agir avait déjà été contradictoirement engagé et qu'il est contradictoirement rouvert en appel ;

- que c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les requérantes ne justifiaient d'aucun intérêt pour agir ; que leur intérêt de propriétaire, tiers à l'acte critiqué, n'est ni suffisant ni légitime, dès lors qu'elles sont seules à l'origine du trouble dont elles se plaignent ;

- que la requête est tardive, dans la mesure où elle est dirigée contre des décisions confirmatives ;

- que l'administration n'était pas tenue de régulariser la situation en leur accordant un accès à la route départementale n° 17 ;

- que l'administration n'a pas rompu l'égalité entre les usagers en tenant compte des situations différentes dans lesquelles se trouvent les requérantes et l'un de leurs voisins immédiats ;

- qu'ils sont fondés à demander la condamnation des requérantes pour abus de droit ;

Vu, enregistré au greffe le 5 avril 2001, le mémoire en défense présenté par la commune de Montpellier ; la commune conclut au rejet de la requête et en outre à la condamnation des requérantes à lui verser la somme de 15.000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Elle fait valoir :

- que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement critiqué manque en fait ; que les mémoires non visés ne contenaient pas d'éléments nouveaux ; que le juge n'est pas tenu de répondre à tous les moyens invoqués ; que le fait que les expéditions du jugement puissent contenir des erreurs est sans portée juridique ;

- que les requérantes sont dépourvues d'un intérêt leur donnant qualité pour agir dans la mesure où la décision contestée s'analyse comme une décision individuelle défavorable à Y qui peut seul en contester la légalité ; que cette décision ne lèse pas leur droit de propriété de façon suffisamment directe pour justifier leur action ;

- que l'acte critiqué ne fait pas grief, dès lors qu'il présente le caractère d'un simple avis qui ne présente pour son destinataire aucun caractère obligatoire ;

- que l'acte contesté n'est entaché d'aucune erreur de droit, dès lors que le droit d'accès peut être limité pour des motifs de sécurité publique ;

- qu'aucune erreur manifeste d'appréciation n'entache l'acte en cause, qui est justifié par la prise en compte de l'accroissement important de la circulation routière sur la voie en cause depuis 1992 ;

- que l'acte attaqué n'est source d'aucune discrimination entre les propriétaires riverains de la route départementale 17, dès lors qu'il a été répondu de façon différenciée à des demandes d'accès selon la situation des parcelles concernées ;

- que la méconnaissance par le juge administratif de la chose jugée par le juge civil ne peut être utilement invoquée par les requérantes ;

Vu, enregistré au greffe le 24 août 2001 en réplique présenté par les requérantes ; elles persistent dans leurs précédentes conclusions et font valoir en outre :

- que la décision en litige ne saurait, en raison de son caractère inédit, être regardée comme un acte confirmatif ;

- qu'il n'existe en l'espèce aucune différence de situation de nature à justifier une dérogation au principe constitutionnel d'égalité ;

- que la demande de condamnation dont ils font l'objet pour procédure abusive est injustifiée ;

Vu, enregistré au greffe le 27 janvier 2004, le nouveau mémoire présenté par les requérantes ; elles persistent dans leurs précédentes conclusions et concluent en outre à la condamnation de la commune de Montpellier à leur payer la somme de 1.068 euros avec intérêts de droit au titre des frais irrépétibles ainsi qu'au rejet de la demande d'indemnisation présentée au même titre par la commune de Montpellier ; elles font valoir que leur intérêt pour agir est notamment fondé sur l'illégalité du permis de construire accordé à Y ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2004 :

- le rapport de M. CHERRIER, premier conseiller ;

- les observations de Me X... pour Z... Lucie X et Y... Dominique X ;

- et les conclusions de M. HERMITTE, premier conseiller ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant que par une décision en date du 7 avril 1997, le maire de la commune de Montpellier a refusé de délivrer à Y l'autorisation d'accéder directement à la route départementale n° 17 à partir de la parcelle cadastrée AM 33 qu'il possède sur le territoire de ladite commune ; que cette décision est de nature à affecter la situation juridique de Z... Lucie X et de Y... Dominique X, qui avaient précédemment fait juger par les juridictions judiciaires que, compte tenu de la possibilité de créer un tel accès direct, A ne pouvait prétendre obtenir une servitude légale de passage sur un chemin dont elles sont propriétaires ; qu'ainsi, les requérantes sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté comme irrecevable leur demande d'annulation de la décision du 7 avril 1997 au motif qu'elles ne justifieraient d'aucun intérêt leur donnant qualité pour contester cette décision ; que, dès lors, ce jugement est entaché d'irrégularité et doit être annulé ;

Considérant que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres chefs d'irrégularité invoqués par les requérantes, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par ces dernières devant le Tribunal administratif de Montpellier ;

Sur la légalité de la décision du 7 avril 1997 :

Considérant que pour motiver son refus de faire droit à la demande d'autorisation présentée par Y, le maire de Montpellier s'est approprié les motifs de sécurité contenus dans une lettre du 28 mars 1997 adressée à l'intéressé par le chef d'agence de Montpellier-Lunel des services techniques du département de l'Hérault ; que ces motifs sont suffisamment clairs et précis ; qu'il n'est pas contesté que Y avait en sa possession ladite lettre lorsqu'il a reçu notification de la décision du 7 avril 1997 ; qu'ainsi, il a été mis à même de connaître les motifs et de discuter le bien fondé du refus qui lui a été opposé par le maire de Montpellier ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision critiquée ne serait pas suffisamment motivée doit être écarté ;

Considérant que le maire de Montpellier, qui a la police de la circulation sur les routes départementales à l'intérieur des agglomérations en vertu de l'article l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales, pouvait, sans porter pour autant une atteinte illégale au droit d'accès des riverains à la voie publique, refuser l'autorisation sollicitée dans l'intérêt de la sécurité routière ;

Considérant que, pour estimer que la sortie envisagée par Y présentait un danger, le maire de Montpellier a retenu la présence de virages serrés et sans visibilité sur la portion de voie en cause et l'augmentation constante du trafic sur la route départementale N° 17 ; qu'en se bornant à invoquer les effets sur les conditions de circulation de l'aménagement de deux-ronds points anglais dans le secteur concerné, les requérantes n'établissent pas que l'auteur du refus attaqué aurait commis une erreur dans l'appréciation du risque encouru par les usagers de la voie publique en cas de réalisation de l'accès projeté ; que si celui-ci était techniquement réalisable et devait être situé dans le prolongement d'un accès dont dispose d'ores et déjà une parcelle sur laquelle est implanté un temple tibétain recevant du public, ces circonstances ne sont pas de nature, dès lors qu'elles ne sont pas directement en rapport avec les conditions de circulation, à remettre sérieusement en cause la réalité du risque susmentionné ;

Considérant que les requérantes invoquent une rupture de l'égalité entre les usagers et une atteinte à leur droit de propriété ; qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, le maire peut, si des circonstances particulières le justifient, refuser une autorisation d'accès à la voie publique ; que lorsque, comme en l'espèce, l'appréciation de ces circonstances n'est pas erronée, les refus qu'il oppose ne sauraient porter aucune atteinte illégale au principe d'égalité des usagers, ni au droit de propriété ;

Considérant que les requérantes ne peuvent utilement invoquer l'autorité de la chose jugée par les juridictions judiciaires dans un litige ne portant pas sur le même objet que la demande sur laquelle il est présentement statué ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non recevoir autres que celle tenant à l'intérêt des requérantes pour agir, que ces dernières ne sont pas fondées à se plaindre de ce que le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande d'annulation de la décision du 7 avril 1997 ;

Sur les conclusions indemnitaires de B :

Considérant que les conclusions des requérantes tendent à l'annulation d'une décision en matière d'excès de pouvoir ; que, dès lors, les conclusions reconventionnelles de B tendant à l'octroi d'une indemnité doivent en tout état de cause être rejetées comme irrecevables ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Montpellier, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer aux requérantes la somme qu'elles réclament au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de ces dispositions, d'une part de condamner les requérantes à payer à la commune de Montpellier une somme de 1.000 euros et d'autre part de rejeter les conclusions présentées à leur encontre par B ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement susvisé du 10 mai 2000 est annulé.

Article 2 : La requête susvisée de Z... Lucie X et de Y... Dominique X est rejetée.

Article 3 : Les requérantes paieront une somme de 1.000 euros (mille euros) à la commune de Montpellier en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de B tendant à l'allocation d'une indemnité et à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Z... Lucie X, à Y... Dominique X, à la commune de Montpellier, à B et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Délibéré à l'issue de l'audience du 29 janvier 2004, où siégeaient :

M. ROUSTAN, président de chambre,

M. LAFFET, président assesseur,

M. CHERRIER, premier conseiller,

assistés de Mme EJEA, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 12 février 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Marc ROUSTAN Philippe CHERRIER

Le greffier,

Signé

Françoise EJEA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N°'''MA01473


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA01473
Date de la décision : 12/02/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: M. CHERRIER
Rapporteur public ?: M. HERMITTE
Avocat(s) : BRANCHET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-02-12;00ma01473 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award