La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/04/2004 | FRANCE | N°00MA00606

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre - formation a 3, 27 avril 2004, 00MA00606


Vu, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 27 mars 2000, sous le n° 00MA00606, la requête présentée par M. Pierre-Louis X, demeurant ... ;

M. X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 9 décembre 1999, notifié le 31 janvier 2000, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Nice a refusé de mettre fin à son congé de longue maladie et de l'affecter sur un poste ;

2°/ d'annuler ladite décision ;
>3°/ de reconnaître l'incurie des services du rectorat et la situation de pénurie dans la...

Vu, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 27 mars 2000, sous le n° 00MA00606, la requête présentée par M. Pierre-Louis X, demeurant ... ;

M. X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 9 décembre 1999, notifié le 31 janvier 2000, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Nice a refusé de mettre fin à son congé de longue maladie et de l'affecter sur un poste ;

2°/ d'annuler ladite décision ;

3°/ de reconnaître l'incurie des services du rectorat et la situation de pénurie dans laquelle il a été plongé ;

Classement CNIJ : 36 05 04 02

C

4°/ de condamner l'Etat à lui payer l'intégralité de ses traitements soit 140.000 F au titre de la période du 9 novembre 1995 au 8 novembre 1997 et 280.000 F au titre de la période du 9 novembre 1997 au 8 novembre 1999 ;

5°/ de reconstituer sa carrière jusqu'à l'obtention effective d'un poste, et de le condamner à lui verser 500.000 F à titre de dommages et intérêts ;

L'intéressé soutient :

- que dès le 31 août 1995, il a demandé à reprendre ses fonctions, certificat médical à l'appui ; qu'il a réitéré cette demande à plusieurs reprises en 1996 ; qu'il a fait l'objet de deux arrêtés ministériels des 14 mai 1996 et 5 mai 1997 l'affectant à un nouveau poste, et dont il n'a jamais pu obtenir qu'ils soient exécutés ;

- que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, il n'a pas refusé systématiquement de se rendre aux convocations médicales ; qu'en novembre 1994, il a négocié un nouveau rendez-vous, n'ayant pu se rendre à la convocation initiale ; que, en septembre 1995, il recevait une convocation le 16 septembre pour un rendez-vous le 18 ; que le médecin de l'administration attestera ensuite de son état de santé sans plus jamais le convoquer : avis du 26 avril 1996 pour la période du 9 novembre 1995 au 8 août 1996, avis du 20 septembre 1996 pour la période du 9 août 1996 au 8 février 1997, et avis du 21 janvier 1997 pour la période du 9 février 1997 au 9 mai 1997 ;

- que, s'agissant de la convocation du 4 mars 1997, du docteur Y, à Clermont-Ferrand, il a répondu qu'il se rendrait à toute convocation accompagnée de l'ordre de mission lui permettant de s'y rendre ; qu'il n'a ensuite reçu aucune autre convocation jusqu'au 27 juillet 1999, date à la quelle il est convoqué au SHS Sainte-Marie à Nice ;

- que l'affection dont il souffrait ne présentait pas une telle gravité qu'elle l'aurait empêché de reprendre ses fonctions dès la rentrée 1995 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 29 mars 2002, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ; le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir :

- que le jugement du Tribunal administratif de Nice ayant été prononcé le 9 décembre 1999, la requête de M. X semble tardive ;

- que les conclusions relatives à l'incurie de ses services et les incidences sur la vie de l'intéressé sont nouvelles en appel ;

- que la demande de versement d'une indemnité au titre de dommages et intérêts n'a pas été précédée d'une demande préalable ;

- que la requête ne présente aucun moyen d'appel de nature à mettre la Cour en mesure d'apprécier son bien-fondé ;

- que, à titre subsidiaire, la décision maintenant M. X en congé de longue maladie a été justifiée par le fait que ce dernier a refusé de se rendre aux convocations des médecins agréés qui lui étaient adressées par le comité médical, la seule production des certificats de ses médecins traitants ne pouvant juridiquement suffire à permettre la reprise de ses fonctions ;

- que la circonstance qu'il ait fait l'objet d'arrêtés de mutation sur des postes de titulaire académique ne l'autorisait pas davantage à exercer les fonctions correspondantes ;

- que son traitement a été versé conformément aux dispositions de l'article 34-4° de la loi du 11 janvier 1984 ;

- qu'il faut noter que dès les premiers refus du requérant de se présenter aux convocations des médecins agréés, le traitement de M. X aurait pu être suspendu, de même que durant la période ou de son propre fait il était en situation irrégulière ;

- qu'enfin ayant été radié des cadres, il ne peut plus solliciter un poste d'enseignant ;

Vu enregistré le 29 mars 2002, le mémoire en réponse présenté par M. X, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que le jugement ayant été notifié le 31 janvier 2000, sa requête introduite le 27 mars 2000 était recevable ;

Vu, enregistré le 25 mars 2004, le nouveau mémoire présenté par M. X, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n°86-442 du 14 mars 1986 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 avril 2004 :

- le rapport de Mme LORANT, président assesseur ;

- les observations de M. Pierre-Louis X ;

- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été notifié à M. X le 31 janvier 2000 ; que par suite sa requête enregistrée à la Cour administrative d'appel de Marseille le 27 mars 2000 n'est pas tardive ;

Sur le bien-fondé du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 : Le fonctionnaire en activité a droit....4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi traitement. ; que l'article 35 du décret 86-442 du 14 mars 1986 susvisé prévoit que : Pour obtenir un congé de longue maladie ou de longue durée, les fonctionnaires en position d'activité ou leurs représentants légaux doivent adresser à leur chef de service une demande appuyée d'un certificat de leur médecin traitant spécifiant qu'ils sont susceptibles de bénéficier des dispositions de l'article 34 (3° ou 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée.

Le médecin traitant adresse directement au secrétaire du comité médical prévu aux articles 5 et 6 un résumé de ses observations et les pièces justificatives (...).

Sur le vu de ces pièces, le secrétaire du comité médical fait procéder à la contre-visite du demandeur par un médecin agréé compétent pour l'affection en cause.

Le dossier est ensuite soumis au comité médical compétent. (...)

L'avis du comité médical est transmis au ministre qui le soumet pour avis, en cas de contestation par l'administration ou l'intéressé, ou dans l'hypothèse prévue au deuxième alinéa de l'article 28 ci-dessus, au comité médical supérieur visé à l'article 8 du présent décret(...). ; qu'aux termes de l'article 36 du même décret : Un congé de longue maladie ou de longue durée peut être accordé ou renouvelé pour une période de trois à six mois. La durée du congé est fixée, dans ces limites, sur la proposition du comité médical.

L'intéressé ou son représentant légal doit adresser la demande de renouvellement du congé à l'administration un mois avant l'expiration de la période en cours. Le renouvellement est accordé dans les conditions fixées à l'article 35 ci-dessus. (...). ; qu'enfin l'article 41 dudit décret dispose que : Le bénéficiaire d'un congé de longue maladie ou de longue durée ne peut reprendre ses fonctions à l'expiration ou au cours dudit congé que s'il est reconnu apte, après examen par un spécialiste agréé et avis favorable du comité médical compétent.

Cet examen peut être demandé soit par le fonctionnaire, soit par l'administration dont il relève. (...). ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, adjoint d'enseignement en économie, en congé de longue maladie depuis le 9 novembre 1992, a été muté dans l'académie de Nice à la rentrée scolaire 1993 et affecté au lycée Toqueville à Grasse ; que n'ayant pu prendre ses fonctions, il a été placé en congé de longue durée à compter du 9 novembre 1993 ; que les 9 mars 1996, 22 mai 1996, 08 octobre 1996, 21 novembre et 28 novembre 1996, il a sollicité sa réintégration à compter du 9 août 1996, à l'issue d'une prolongation de 3 mois de son congé de longue durée, sur un poste de titulaire académique en produisant des certificats médicaux de son médecin traitant et en indiquant, dans son courrier du 22 mai, souhaiter rencontrer un expert de l'administration en même temps qu'il recevait un arrêté ministériel en date du 15 mai 1996, portant mutation ou réintégration à titre provisoire dans l'académie de Nice à compter du 1er septembre 1996 ; que, pour toute la période comprise entre le 9 août 1996 et le 17 août 1999, le comité médical départemental s'est réuni une seule fois, le 17 août 1999, et que quatre décisions explicites ont finalement été prises, prolongeant d'office le congé de longue durée de M. X, une le 8 septembre 1999, pour la période du 9 août 1996 au 8 novembre 1996, et trois le 30 août 1999, pour les périodes du 9 novembre 1996 au 8 novembre 1997, du 9 novembre 1997 au 8 novembre 1998 et du 9 novembre 1998 au 8 novembre 1999 ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que lorsqu'un fonctionnaire placé en position de congé de longue durée demande à reprendre ses fonctions à l'issue de la période de congé de longue durée en cours et sollicite de son administration une contre-visite, il appartient à cette dernière de poursuivre la procédure de réintégration engagée par l'agent en faisant droit à cette demande et en convoquant le comité médical dans des délais permettant d'y répondre avant la date initiant une nouvelle période de congé de longue durée ;

Considérant que M. X affirme, sans être contredit, et sans que cela soit infirmé par les pièces du dossier, n'avoir reçu aucune convocation de son administration en vue d'une expertise médicale avant le 4 mars 1997, alors que l'administration n'invoque aucune circonstance justifiant de cette carence ; que, dès lors, la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Nice a rejeté les demandes de M. X formulées entre le mois de mars et de mai 1996, tendant à être réintégré à l'issue de son congé de longue durée expirant le 8 août 1996 est entachée d'erreur de droit et ne peut qu'être annulée ; que la circonstance qu'il a été convoqué ultérieurement le 4 mars 1997, convocation à laquelle d'ailleurs il ne peut être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant refusé de se rendre, est sans influence sur le caractère illégal de la décision attaquée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Nice a rejeté ses demandes de réintégration au 9 août 1996 ;

Sur les conclusions à fin de condamnation du ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie à verser des dommages et intérêts :

Considérant que ces conclusions, qui sont nouvelles en appel, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les autres conclusions de M. X :

Considérant que les conclusions de M. X tendant à ce que la Cour, selon ses propres termes, reconnaisse l'incurie des services du rectorat et la situation de pénurie dans laquelle il a été plongé, ne tendent ni à l'annulation d'une décision de l'administration, ni à une condamnation, ni à obtenir l'exécution d'une décision de justice ; que, dès lors, elles ne sont pas susceptibles d'être accueillies ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que l'exécution du présent arrêt entraîne l'obligation pour l'administration de réexaminer la situation de M. X à la date du 9 août 1996, au regard d'une éventuelle réintégration, après contre-visite d'un médecin expert et avis du comité médical, avec toutes conséquences de droit ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice en date du 9 décembre 1999 et la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Nice a refusé de mettre fin au congé de longue durée de M. X et de l'affecter sur un poste à compter du 9 août 1996 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à l'administration de réexaminer la situation de M. X à la date du 9 août 1996, au regard d'une éventuelle réintégration, après contre-visite d'un médecin expert et avis du comité médical, avec toutes conséquences de droit.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Z et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Délibéré à l'issue de l'audience du 6 avril 2004, où siégeaient :

M. LAPORTE, président de chambre,

Mme LORANT, présidente assesseur,

Mme GAULTIER, premier conseiller,

assistés de Mme LOMBARD, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 27 avril 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Guy LAPORTE Nicole LORANT

Le greffier,

Signé

Marie-Claire LOMBARD

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 00MA00606


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA00606
Date de la décision : 27/04/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPORTE
Rapporteur ?: Mme Nicole LORANT
Rapporteur public ?: M. BOCQUET
Avocat(s) : COLSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-04-27;00ma00606 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award