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14/03/2005 | FRANCE | N°00MA02817

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6eme chambre - formation a 3, 14 mars 2005, 00MA02817


Vu, 1°/ la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 19 décembre 2000 sous le 00MA02817, présentée pour la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE, par Me Phelip, avocat ;

La COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE demande :

1°) d'annuler le jugement n° 9800264 en date du 12 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Bastia l'a déclarée entièrement responsable des désordres causés à la propriété de Mme X par les inondations de mars 1996 et octobre 1977, et a rejeté sa demande de garantie par la commune de Solaro ;

) de rejeter la demande de Mme X tendant à sa condamnation et de condamner la commu...

Vu, 1°/ la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 19 décembre 2000 sous le 00MA02817, présentée pour la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE, par Me Phelip, avocat ;

La COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE demande :

1°) d'annuler le jugement n° 9800264 en date du 12 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Bastia l'a déclarée entièrement responsable des désordres causés à la propriété de Mme X par les inondations de mars 1996 et octobre 1977, et a rejeté sa demande de garantie par la commune de Solaro ;

2°) de rejeter la demande de Mme X tendant à sa condamnation et de condamner la commune de Solaro et / ou l'Etat à la garantir des condamnations qui pourront être prononcées à son encontre ;

3°) de condamner Mme X à lui verser une somme de 1.500 € au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu, 2°/ la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 13 mai 2002 sous le 02MA00851, présentée pour la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE, par Me Phelip, avocat ;

La COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE demande :

1°/ d'annuler le jugement en date du 24 janvier 2002 par lequel le Tribunal administratif de Bastia l'a condamnée à verser une somme de 11.223, 85 € à Mme X, en réparation des dommages causés à sa propriété par les inondations de mars 1996 et octobre 1997 ;

2°/ de rejeter la demande de Mme X ou de ne lui allouer qu'une somme de 3.000 € ;

3°/ de condamner Mme X à lui verser une somme de 1.500 € au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la lettre en date du 20 janvier 2005, informant les parties, en application de l'article R.611-7 du code de justice administrative, que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu la loi n° 91428 du 13 mai 1991 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2005 :

- le rapport de Mlle Josset, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Firmin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées n° 00MA02817 et n° 02MA00851 de la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que Mme X, propriétaire de bungalows situés sur la commune de Solaro, en bordure de la RN 198, a été victime d'inondations en mars 1996 et octobre 1997 ; que par un premier jugement, le Tribunal administratif de Bastia a déclaré la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE responsable des dégâts ainsi causés, puis, par un second jugement, l'a condamnée à indemniser Mme X ;

Sur la régularité du jugement en date du 12 octobre 2000 :

Considérant que, contrairement à ce que soutient la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE, le Tribunal administratif de Bastia a répondu, dans son précédent jugement du 12 octobre 2000 ordonnant un supplément d'instruction sur la demande d'indemnisation de Mme X, au moyen tiré de ce que seule la responsabilité de l'Etat pouvait être engagée à la suite des inondations qui auraient été causées par les travaux de surélévation de la RN 198 à la propriété de Mme X ; que, par suite, la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE n'est pas fondée à soutenir que le jugement susvisé serait irrégulier pour avoir omis de statuer sur ce moyen ;

Considérant qu'il ressort des écritures déposées par la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE en première instance, que le moyen tiré du défaut d'exercice par le maire de Solaro de ses pouvoirs de police n'a pas été invoqué ; que, dès lors, la collectivité requérante ne peut valablement soutenir que le tribunal aurait omis de statuer sur ce moyen ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'aux termes de l'article 75 de la loi susvisée du 13 mai 1991 portant statut de la COLLECTIVITÉ TERRITORIALE DE CORSE, dont les dispositions sont entrées en vigueur le 1er janvier 1993 en application du décret n°'92-1302 du 15 décembre 1992 : La Collectivité territoriale de Corse assure la construction, l'aménagement, l'entretien de la voirie classée en route nationale. Par convention, la collectivité territoriale peut en déléguer la mise en oeuvre aux départements. La voirie classée en route nationale est transférée dans le patrimoine de la collectivité territoriale ;

Considérant que le transfert de propriété ainsi intervenu le 1er janvier 1993 a eu pour effet de mettre à la charge exclusive de la COLLECTIVITÉ TERRITORIALE DE CORSE l'entretien des routes nationales de l'île, ainsi que la réparation des dommages accidentels causés aux tiers du fait de ces ouvrages, postérieurement à la date du transfert ; que, dès lors, la circonstance que la RN 198 ait été construite et élargie avant la date du 1er janvier 1993, elle-même antérieure à celles des inondations en cause, n'est pas de nature à exonérer la COLLECTIVITÉ TERRITORIALE DE CORSE de la responsabilité éventuellement encourue ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que lors des travaux de surélévation réalisés en 1985 et 1988 sur la RN 198, les ouvrages la franchissant ont été insuffisamment dimensionnés, ce qui a eu pour effet d'entraîner une submersion de la route inondant les propriétés se situant en aval comme c'est le cas de la propriété de Mme X ; que, dès lors, la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE n'est pas fondée à soutenir que les inondations du terrain de Mme X seraient sans lien avec l'ouvrage public routier ; que si les bungalows appartenant à Mme X sont implantés sur un terrain situé dans un bassin versant et, par suite, soumis à un risque d'inondation, il ne résulte pas de l'instruction que ces terrains auraient été inondés avant l'exécution des travaux de surélévation sus-évoqués, ni que les risques d'inondation auraient été connus antérieurement à ces travaux ;

Considérant, par ailleurs, que si la collectivité requérante invoque l'article 640 du code civil aux termes duquel les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés, y percevoir les eaux qui en découlent naturellement , en faisant valoir que le terrain de Mme X est situé dans le bas d'un double bassin, les inondations subies par la propriété de Mme X, ainsi qu'il vient d'être dit, ne résultent pas d'une cause naturelle, mais des travaux de surélévation de la RN 198 ;

Considérant que sa responsabilité étant engagée sans faute, la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE ne peut utilement invoquer les fautes qu'auraient commises des tiers, notamment les riverains du cours d'eau et la commune de Solaro ; que par suite, la COLLECTIVITE TERRORIALE DE CORSE doit être déclarée entièrement responsable des conséquences dommageables de l'inondation du terrain de Mme X ;

Sur le préjudice :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le tribunal et non sérieusement contestée, que Mme X a dû, à la suite de l'inondation survenue en mars 1996, procéder à la réfection de l'installation électrique de ses bungalows et au remplacement de trois cumulus pour un montant justifié de 11.223, 85 € (73.623, 60 F) ; que si la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE soutient que ces travaux auraient amélioré l'existant, elle n'apporte aucun élément à l'appui de cette allégation ; qu'en outre, il ne résulte pas de l'instruction que ces travaux permettraient un prix de location plus élevé des bungalows par Mme X ; que, dès lors, il n'y a pas lieu d'appliquer un abattement de vétusté ;

Considérant que les travaux de terrassement et de creusement d'un fossé d'évacuation réalisés en 1992 ne sont pas consécutifs aux inondations survenues en mars 1996 et octobre 1997 ; que, par suite, ces travaux, alors même qu'ils auraient été nécessités par les travaux déjà évoqués de surélévation de la RN 198 ne peuvent, en tout état de cause, donner lieu à réparation ;

Considérant que si Mme X fait état de perte de loyers pour un montant de 13.446 € (88.200 F) en 1996, elle n'en justifie pas ;

Considérant qu'il est constant que Mme X n'a pas présenté devant le tribunal administratif, avant la clôture de l'instruction, de conclusions tendant à l'attribution d'une indemnité pour trouble de jouissance ; qu'il s'agit ainsi de conclusions nouvelles en appel et, par suite, irrecevables ;

Sur l'appel en garantie dirigé contre la commune de Solaro :

Considérant que si la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE soutient que les inondations du terrain de Mme X résultent du comblement par les propriétaires riverains des fossés d'évacuation traversant leurs propriétés, elle ne l'établit pas ; que, par voie de conséquence, elle n'est pas fondée à soutenir que le maire aurait commis une faute dans l'exercice de ses pouvoirs de police, en n'imposant pas aux riverains le rétablissement de ces fossés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal l'a déclarée entièrement responsable des conséquences dommageables des inondations survenues sur la propriété de Mme X et l'a condamnée à verser à l'intéressée la somme de 11.223, 85 € ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que Mme X n'a pas demandé au tribunal, avant la clôture de l'instruction, qu'il enjoigne à la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE d'entreprendre les travaux destinés à empêcher la survenance de nouvelles inondations de son terrain ; que, par suite, le moyen tiré de ce que celui-ci aurait omis de statuer sur de telles conclusions ne peut être qu'écarté ;

Considérant que la présente décision n'implique pas qu'il soit enjoint à la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE d'entreprendre les travaux préconisés par l'expert ; que, par suite, les conclusions déposées à cette fin sont irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE doivent dès lors être rejetées ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE à payer à Mme X la somme de 1.500 euros qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Les requêtes de la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE sont rejetées.

Article 2 : La COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE versera à Mme X une somme de 1.500 € (mille cinq cent euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions incidentes de Mme X sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X, à la COLLECTIVITE TERRITORIALE DE CORSE, à la commune de Solaro et au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

Copie en sera adressée au préfet de Haute-Corse.

Nos 00MA02817, 02MA00851 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA02817
Date de la décision : 14/03/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. GANDREAU
Rapporteur ?: M. Jacques CHAVANT
Rapporteur public ?: M. FIRMIN
Avocat(s) : PHELIP

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2005-03-14;00ma02817 ?
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