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28/03/2006 | FRANCE | N°05MA01801

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des reconduites, 28 mars 2006, 05MA01801


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 19 juillet 2005, présentée pour Mme Fatma X, demeurant chez Mme Samira Y ..., par Me Kuhn-Massot, avocat ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-03847 en date du 21 juin 2005 par lequel le Vice-président délégué du Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière en date du 17 juin 2005, pris à son encontre par le préfet des Bouches-du-Rhône ;

2°) d'annuler l'arrêté de recond

uite à la frontière en date du 17 juin 2005 ;

3°) de condamner l'Etat au paiement d'une...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 19 juillet 2005, présentée pour Mme Fatma X, demeurant chez Mme Samira Y ..., par Me Kuhn-Massot, avocat ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-03847 en date du 21 juin 2005 par lequel le Vice-président délégué du Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière en date du 17 juin 2005, pris à son encontre par le préfet des Bouches-du-Rhône ;

2°) d'annuler l'arrêté de reconduite à la frontière en date du 17 juin 2005 ;

3°) de condamner l'Etat au paiement d'une somme de 1.500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le décret n° 2004-789 du 29 juillet 2004 relatif au contentieux des arrêtés de reconduite à la frontière et modifiant la partie Réglementaire du code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la cour administrative de Marseille en date du 27 décembre 2004 donnant délégation à Mme Nicole Lorant, président, pour statuer sur les appels formés contre les jugements statuant sur des recours en annulation d'arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu en séance publique le 21 mars 2006 :

- le rapport de Mme Lorant, président ;

- les observations de Me Kuhn Massot pour la requérante ;

- les conclusions de Mme Fernandez, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants :… 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 20 mai 2003, de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les moyens de la requête :

Considérant qu'indépendamment de l'énumération, donnée par l'article L.511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait prendre une mesure de reconduite à la frontière à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que, lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, dont les stipulations sont semblables, en ce qui concerne les ressortissants algériens, aux dispositions du 11° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : « Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit (…) 7° Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que selon les avis convergents de trois médecins, l'état pathologique anxio-dépressif majeur et agoraphobique de Mme X est extrêmement grave, et que toute interruption de traitement et de suivi médical, notamment résultant de son retour en Algérie, est de nature à porter gravement atteinte à sa santé ; que ne peut suffire à contredire ces avis, l'avis du médecin inspecteur de santé publique, postérieur à l'arrêté ordonnant la reconduite, très peu circonstancié et établi sans que ce médecin ait eu l'entier dossier de Mme X selon les affirmations non contestées de la requérante ; que par suite, Mme X, qui en invoquant l'article 12 bis-11 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée doit être regardée comme invoquant les dispositions de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien précité, est fondée à soutenir qu'elle remplissait les conditions susvisées pour se voir attribuer de plein droit un certificat de résidence tel que défini ci-dessus, et que l'arrêté du 17 juin 2005 par lequel le préfet a décidé sa reconduite à la frontière est intervenu en méconnaissance de ces dispositions ; que, dès lors, Mme X est fondée à soutenir que, c'est à tort, que par le jugement attaqué, le Vice-président délégué du Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'à la suite d'une annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions de l'article L.512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de munir l'étranger d'une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L.911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet des Bouches du Rhône de se prononcer sur la situation de Mme X, dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir ce délai d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1.500 euros que Mme X demande au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement en date du 21 juin 2005 et l'arrêté de reconduite à la frontière en date du 17 juin 2005 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de statuer sur la situation de Mme X, dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à Mme X la somme de 1.500 euros (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Fatma X, au préfet des Bouches du Rhône et au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

05MA01801 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des reconduites
Numéro d'arrêt : 05MA01801
Date de la décision : 28/03/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Nicole LORANT
Rapporteur public ?: Mme FERNANDEZ
Avocat(s) : KUHN MASSOT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-03-28;05ma01801 ?
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