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24/01/2008 | FRANCE | N°03MA02474

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 24 janvier 2008, 03MA02474


Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2003, présentée pour M. André X, élisant domicile ... ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 011991 en date du 20 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995 et 1996 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de just

ice administrative ;

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Vu la loi n° 67-5 ...

Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2003, présentée pour M. André X, élisant domicile ... ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 011991 en date du 20 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995 et 1996 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………..

Vu la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 modifiée portant statut des navires et autres bâtiments de mer ;

Vu la loi n° 77-1467 du 30 décembre 1977 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 décembre 2007 :

- le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X a acquis, le 29 décembre 1995, douze parts de copropriété d'un navire de pêche dénommé « Viking Gladius », destiné à être exploité à partir de l'île de la Réunion ; qu'il a déduit de son revenu global les déficits industriels et commerciaux résultant, d'une part, pour l'année 1995, de sa quote-part de l'investissement réalisé pour l'acquisition de ce navire sur le fondement de l'article 238 bis HA du code général des impôts, et, d'autre part, pour l'année 1996, de sa quote-part du résultat d'exploitation de ce navire, sur le fondement du 1° du I de l'article 156 du même code ; que la copropriété a fait l'objet d'une vérification de comptabilité en 1998 ; qu'à la suite de ce contrôle, l'administration a remis en cause pour l'année 1995 la déduction par M. X de l'investissement réalisé, et, pour l'année 1996, la déduction du déficit d'exploitation ; que M. X relève appel du jugement en date du 20 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995 et 1996, en conséquence de ces redressements ;

Sur la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 quater du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : « Chaque membre des copropriétés de navires régies par le chapitre IV de la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer est personnellement soumis à l'impôt sur le revenu à raison de la part correspondant à ses droits dans les résultats déclarés par la copropriété » ; qu'aux termes du I de l'article 73 de la loi du 30 décembre 1977, demeuré en vigueur pour les copropriétés de navire : « 1° (…) La procédure de vérification des déclarations est suivie directement entre l'administration et la copropriété » ; qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : « (…) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification » ; qu'il résulte de ces dispositions combinées, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 30 décembre 1977, que l'avis de vérification de comptabilité prévu par l'article L. 47 du livre des procédures fiscales doit être adressé à la copropriété et non à chacun de ses membres ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait dû lui adresser en tant que copropriétaire du navire « Viking Gladius » l'avis de vérification de comptabilité de la copropriété de ce navire ; qu'en outre, le requérant n'est pas fondé à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des termes de la documentation administrative de base référencée 13 L 1513, laquelle est relative à la procédure d'imposition ;

Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que l'avis de vérification et la notification de redressement ont été adressés à la « copropriété de navire Gladius » et non au gérant de la même copropriété demeure sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition dès lors qu'il n'est pas contesté que ces actes sont effectivement parvenus à leur destinataire ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que les redressements assignés à M. X ne procèdent pas d'une vérification de comptabilité des activités qu'il exerçait à titre personnel mais d'un simple contrôle sur pièces de ses déclarations fiscales individuelles ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été irrégulièrement privé des garanties attachées aux vérifications de comptabilité et notamment des garanties prévues à l'article L. 10 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, c'est avec la seule copropriété que l'administration a engagé une procédure de vérification de comptabilité ; qu'il en résulte que seule la copropriété pouvait soumettre à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires le désaccord persistant sur les redressements qui lui ont été notifiés ; que par suite, M.X n'est pas fondé à soutenir qu'en ne lui réservant pas la possibilité de saisir cette commission, l'administration aurait entaché la procédure d'imposition d'irrégularité ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 54 A du livre des procédures fiscales : « Les déclarations, les réponses, les actes de procédure faits par l'un des deux conjoints ou notifiés à l'un d'eux sont opposables de plein droit à l'autre » ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir, sur le terrain de la loi fiscale, que la notification qui lui a été adressée serait irrégulière faute d'avoir été également adressée à son épouse ; que, sur ce point également, le contribuable n'est pas fondé à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des termes de la documentation administrative de base référencée 13 L 1513, laquelle est relative à la procédure d'imposition ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la déduction de l'investissement au titre de l'année 1995 :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la loi susmentionnée du 3 janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer : « Sauf convention contraire, le constructeur est propriétaire du navire en construction jusqu'au transfert de propriété au client. Ce transfert se réalise avec la recette du navire après essais » ; qu'aux termes de l'article 238 bis HA du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'époque des faits : « I. Les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés ou assujetties à un régime réel d'imposition peuvent déduire de leurs résultats imposables une somme égale au montant total des investissements productifs réalisés dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion à l'occasion de la création ou de l'extension d'exploitations appartenant aux secteurs d'activité de l'industrie, de la pêche, de l'hôtellerie, du tourisme, des énergies nouvelles, de l'agriculture, du bâtiment et des travaux publics, des transports et de l'artisanat. La déduction est opérée sur le résultat de l'exercice au cours duquel l'investissement est réalisé, le déficit éventuel de l'exercice étant reporté dans les conditions prévues au I des articles 156 et 209 (…) » ; qu'aux termes de l'article 46 quaterdecies D de l'annexe III audit code : « La déduction est pratiquée par l'entreprise propriétaire. Elle est opérée sur les résultats imposables, déterminés avant toute autre déduction ou abattement, de l'exercice au cours duquel l'immobilisation a été livrée à l'entreprise ou créée par elle » ; enfin, qu'aux termes de l'article 1604 du code civil : « La délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur » ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que, contrairement à ce que soutient le contribuable, le fait générateur du droit à déduction du montant total des investissements que peut exercer l'entreprise est constitué, soit par la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé, soit, comme c'est la cas en l'espèce, par la livraison effective de l'immobilisation dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, et de La Réunion et non par l'achat des parts de copropriété ;

Considérant que, s'il résulte de l'instruction qu'un permis provisoire de navigation a été délivré le 26 décembre 1995 pour le « Viking Gladius », la validité de ce document, qui a été accordé au chantier naval Océa et non à la copropriété elle-même, est limitée à la seule journée du 26 décembre 1995 sous réserve de la mise en place sur le navire d'une drome de sauvetage réglementaire et ne permet pas de retenir cette date du 26 décembre 1995 comme celle de la livraison du navire à la copropriété dès lors que celle-ci n'est pas la bénéficiaire du permis et qu'il n'est pas contesté que le permis de navigation définitif n'a été accordé que le 19 juin 1996 ; que, s'il résulte également de l'instruction qu'un procès-verbal de recette du navire, établi le 26 décembre 1995 entre le constructeur et la société « Compagnie Viking », mentionne que le navire est considéré comme livré à la même date à 18 heures, ce document a été suivi d'un second procès-verbal de recette, établi le 21 juin 1996 entre les mêmes parties, attestant que le navire n'a été livré qu'à cette même date à 24 heures après essais de la jauge et du franc-bord ; que, contrairement à ce que soutient le contribuable, les circonstances que la « cession de quirats » entre la société « Compagnie Viking » et M. X a été réalisée le 29 décembre 1995 et que la demande d'immatriculation du navire a été déposée le 15 décembre 1995 ne permettent pas de retenir que la livraison du navire auquel étaient attachées ces parts aurait été effectuée avant le 31 décembre 1995 ; qu'enfin, il n'est pas contesté par le requérant que le navire n'a été assuré par la copropriété que le 2 mai 1996 et se trouvait donc, jusqu'à cette date, sous la responsabilité du constructeur, le certificat de franc-bord n'étant délivré que le 26 avril 1996 ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments, et sans qu'il y ait lieu de se référer aux modalités de paiement du navire qui sont indépendantes de sa date de livraison, que le navire ne peut être regardé comme ayant été livré à la copropriété avant le 31 décembre 1995 et que l'investissement, dont la déduction a été opérée par le requérant, pour sa quote-part, en 1995, ne peut être regardé comme réalisé au cours de l'exercice 1995 ; que, par suite, l'administration a pu à bon droit réintégrer la somme déduite par M. X dans les revenus perçus par l'intéressé au titre de l'année 1995 ; qu'en outre, les instructions administratives référencées 4 A 2133 du 1er septembre 1993 et 4 H 3 1996 du 22 octobre 1996, la seconde étant en toute hypothèse postérieure à l'expiration du délai de déclaration des revenus de l'année 1995, ne comportent au sujet de la date de réalisation de l'investissement et de la notion de livraison des navires aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait ici application ;

En ce qui concerne l'imputation des déficits sur le revenu global de l'année 1996 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts dans sa rédaction issue de l'article 72 de la loi de finances pour 1996 : « L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (…) sous déduction : 1. du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement. Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : (...) 1° bis. Des déficits provenant, directement ou indirectement, des activités relevant des bénéfices industriels et commerciaux lorsque ces activités ne comportent pas la participation personnelle continue et directe de l'un des membres du foyer fiscal à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité. (…) Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables au déficit ou à la fraction du déficit provenant de l'exploitation de biens meubles corporels acquis à l'état neuf, non encore livrés au 1er janvier 1996 et ayant donné lieu avant cette date à une commande accompagnée du versement d'acomptes au moins égaux à 50 % de leur prix (...)» ;

Considérant, d'une part, qu'il est constant que M. X ne participe pas de manière personnelle, continue et directe à l'exploitation du navire de pêche « Viking Gladius » basé à la Réunion et que sa situation entre dans les prévisions du 1° bis du 1. de l'article 156 du code général des impôts qui refusent l'imputation sur le revenu global des déficits provenant d'activités ne comportant pas la participation personnelle continue et directe de l'un des membres du foyer fiscal à l'accomplissement des actes nécessaires à cette activité ;

Considérant, d'autre part, que le requérant ne soutient pas que sa situation relèverait du champ d'application des mesures transitoires légales, prévues au 1° bis du 1. de l'article 156 du code général des impôts ;

Considérant, en second lieu, que le contribuable n'est pas fondé à se prévaloir des termes du second alinéa du paragraphe 90 de l'instruction référencée 4 A 7 96 du 1er août 1996, qui admet d'assimiler les biens livrés avant le 1er janvier 1996 à des biens non encore livrés pour l'application des mesures transitoires prévues au 1° bis du 1. de l'article 156 du code général des impôts dès lors que, comme il a été dit, le navire de pêche « Viking Gladius » ne peut être regardé comme ayant été livré avant le 1er janvier 1996 ; qu'en toute hypothèse, en ce qui concerne les biens livrés, comme c'est le cas du navire « Viking Gladius » après le 31 décembre 1995, il résulte des termes mêmes de l'instruction susrappelée que l'administration a subordonné le bénéfice des mesures de faveur qu'elle institue à la condition que les biens aient donné lieu au 1er janvier 1996 à une commande accompagnée du versement d'acomptes au moins égaux à 50 % de leur prix et à la condition que le démarrage effectif de l'activité, caractérisé par la réalisation de premières opérations commerciales de ventes ou de prestations de services, soit intervenu au plus tard à la fin du premier semestre de l'année 1996 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le versement effectif par la copropriété au constructeur ou à d'autres « opérateurs » d'acomptes au moins égaux à 50 % du prix du navire aurait été réalisé au 1er janvier 1996 ou que la copropriété ait réalisé au premier semestre de l'année 1996 des opérations commerciales de ventes de produits ou de réalisation de prestations de services ; qu'à cet égard, l'acquisition par la copropriété d'immobilisations et de fournitures diverses nécessaires à l'activité et l'embauche de personnel, réalisées au premier semestre de l'année 1996, même si elles ont concouru à la réalisation postérieure d'opérations commerciales de ventes ne peuvent être assimilées à de telles opérations ; que la circonstance que l'activité de pêche présente dans la région où naviguait le « Viking Gladius » un caractère saisonnier n'est pas davantage de nature à permettre aux requérants de s'exonérer de la condition prévue par la doctrine au nom d'un « principe de neutralité » fiscale qui imposerait que les activités saisonnières bénéficient du même traitement fiscal que les activités régulières ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. André X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Copie en sera adressée à Me Johanet et au directeur de contrôle fiscal Sud-Est.

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N° 03MA02474


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 03MA02474
Date de la décision : 24/01/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. Jean-Louis BEDIER
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : JOHANET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-01-24;03ma02474 ?
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