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08/07/2010 | FRANCE | N°09MA03637

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des reconduites, 08 juillet 2010, 09MA03637


Vu la requête enregistrée, par télécopie, au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 5 octobre 2009, sous le n° 09MA03637, présentée pour M. Jacques A, demeurant ... à Marseille (13006), par Me Dalançon, avocat ;

M. A demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903380 du 4 juin 2009 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 1er juin 2009 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé sa reconduite à la f

rontière et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ...

Vu la requête enregistrée, par télécopie, au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 5 octobre 2009, sous le n° 09MA03637, présentée pour M. Jacques A, demeurant ... à Marseille (13006), par Me Dalançon, avocat ;

M. A demande au président de la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903380 du 4 juin 2009 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 1er juin 2009 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat, en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser la somme de 1 500 euros à Me Dalançon lequel s'engage à renoncer, dans cette hypothèse, à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de la mission juridictionnelle qui lui a été confiée ;

........................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 1er septembre 2009 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Marseille a, sur le fondement de l'article L. 776-1 du code de justice administrative, désigné Mme Isabelle Buccafurri pour statuer sur les appels formés contre les jugements statuant sur des recours en annulation d'arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2010 :

- le rapport de Mme Buccafuri, président-désigné,

- les observations de Me Dalançon pour M. A,

- et les conclusions de Mlle Josset, rapporteur public ;

Considérant que M. A, de nationalité camerounaise, relève appel du jugement n° 0903134 du 4 juin 2009 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre le 4 juin 2009 par le préfet de la région Provence, Alpes, Côte d'Azur, préfet des Bouches-du-Rhône ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière du 4 juin 2009 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant que M. A soutient qu'il est entré en France avec ses parents en 1966, alors qu'il était âgé de 17 ans, sous couvert d'un visa et qu'il aurait vécu depuis cette date de façon continue sur le territoire français ; qu'au soutien de ses allégations, M. A a versé au dossier une attestation, établie le 2 juin 2009, démontrant que l'intéressé s'est vu délivrer un permis de conduire le 29 juin 1968 ; que le requérant fait valoir qu'il a bénéficié de plusieurs titres de séjour temporaires de 1966 à 1974 puis a résidé en France sous couvert de deux cartes de résident de 10 ans successives délivrées par les services des préfectures de Lille et Paris ; que, si M. A n'a pu verser au dossier copie des titres de séjour ainsi délivrés, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a perdu l'ensemble de ses papiers personnels le 9 décembre 1999 à Montpellier lors d'un incendie ; que si les préfectures concernées, interrogées par le préfet des Bouches-du-Rhône, n'ont pas retrouvé trace des titres ainsi délivrés à l'intéressé, cette circonstance ne permet pas, à elle seule, de considérer que l'intéressé n'aurait pas disposé de tels titres, lesquels ne sont conservés par les services administratifs que pendant une période n'excédant pas dix ans ; que, par ailleurs, si les documents, versés en annexe à la requête d'appel, relatifs à la dernière décennie ne permettent d'attester la présence de l'intéressé que de manière ponctuelle entre 2000 et 2002 puis en 2007 à Montpellier, il est constant que M. A étant sans domicile fixe depuis l'année 2000 ; que M. A a versé en annexe à sa requête copie de son passeport, délivré le 23 avril 2003 par le consulat du Cameroun à Marseille, dont l'examen ne permet pas de contester son caractère intégral, et qui révèle que l'intéressé n'a pas quitté le territoire national depuis cette date ; que, si M. A est célibataire et sans charge de famille en France, l'intéressé, arrivé en France alors qu'il était au plus âgé de 18 ans, doit être regardé comme justifiant d'une résidence habituelle en France depuis de longues années et en partie de manière régulière ; que, dans les circonstances très particulières de l'espèce, en décidant la reconduite à la frontière de M. A, par l'arrêté contesté, alors que l'intéressé était âgé de 60 ans à la date dudit l'arrêté et qu'il avait passé l'essentiel de sa vie d'adulte en France, le préfet des Bouches-du-Rhône a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière en date du 1er juin 2009 ; que, par suite, il est fondé à demander l'annulation tant du jugement dont s'agit que de l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative :

Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code: Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé ; que l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'annulation de l'arrêté par lequel le préfet ordonne la reconduite à la frontière d'un étranger n'implique que la délivrance d'une autorisation de séjour valable jusqu'à la nouvelle décision du préfet, et non celle du titre de séjour sollicité par l'intéressé ; que, par suite, les conclusions présentées, à titre principal, par M. A tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour doivent être rejetées ; qu'en revanche, par application de ces dispositions, il y a lieu, de faire droit aux conclusions aux fins d'injonction présentées, à titre subsidiaire, par l'appelant et d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, de délivrer à l'intéressé, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du présent arrêt, une autorisation provisoire de séjour lui permettant de résider sur le territoire français le temps nécessaire au réexamen de sa situation et de procéder, dans un délai de deux mois à compter de cette date, à ce réexamen ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. A a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 3 septembre 2009 ; qu'il y a donc lieu d'accorder à son conseil, Me Dalançon, la somme de 1 500 euros qu'il demande en application des dispositions combinées de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0903134 du 4 juin 2009 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille ensemble l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. A le 4 juin 2009 par le préfet de la région Provence, Alpes, Côte d'Azur, préfet des Bouches-du-Rhône, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. A, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, une autorisation provisoire de séjour lui permettant de résider sur le territoire français le temps nécessaire au réexamen de sa situation et de procéder, dans un délai de deux mois à compter de cette date, à ce réexamen.

Article 3 : L'Etat (ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire) versera, en application des dispositions combinées de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) à Me Dalençon sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Jacques A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie en sera adressée au préfet de la région Provence, Alpes, Côte d'Azur, préfet des Bouches-du-Rhône.

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N°09MA03637


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des reconduites
Numéro d'arrêt : 09MA03637
Date de la décision : 08/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Isabelle BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: Melle JOSSET
Avocat(s) : DALANCON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-07-08;09ma03637 ?
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