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15/12/2010 | FRANCE | N°09MA01469

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 15 décembre 2010, 09MA01469


Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2009, présentée pour M. Abderrezag A, demeurant au ... par le cabinet d'avocats Dufour ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702565 du 25 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 28 février 2007 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a invalidé son permis de conduire pour solde de points nul et des décisions ayant procédé au retrait d'un point à la suite de l'inf

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Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2009, présentée pour M. Abderrezag A, demeurant au ... par le cabinet d'avocats Dufour ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702565 du 25 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 28 février 2007 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a invalidé son permis de conduire pour solde de points nul et des décisions ayant procédé au retrait d'un point à la suite de l'infraction constatée le 8 août 2005 et de six points à la suite de l'infraction commise le 18 avril 2006 ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au ministre de lui restituer les points en litige dans un délai de trois mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ;

.........................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative et l'arrêté d'expérimentation du Vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 novembre 2010,

- le rapport de M. Reinhorn, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;

Sur le bien-fondé du jugement :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.223-1 du code de la route : Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue (...) / lorsque le nombre de points est nul, le permis perd sa validité. / La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ; que l'article L.223-2 du même code prévoit que I.- Pour les délits, le retrait de points est égal à la moitié du nombre maximal de points. / II. - Pour les contraventions, le retrait de points est, au plus égal à la moitié du nombre maximal de points. / III. - Dans le cas où plusieurs infractions entraînant retrait de points sont commises simultanément, les retraits de point se cumulent dans la limite des deux tiers du nombre maximal de points. ; qu'aux termes de l'article L.223-3 du même code : Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L.223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L.225-1 à L.225-9 (...) Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif. ... ; qu'enfin l'article R.223-3 dudit code dispose I. - Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L.223-1. / II. - Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L.225-1 à L.225-9. / III.- Lorsque le ministre de l'intérieur constate que la réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie dans les conditions prévues par le quatrième alinéa de l'article L.223-1, il réduit en conséquence le nombre de points affecté au permis de conduire de l'auteur de cette infraction et en informe ce dernier par lettre simple. Le ministre de l'intérieur constate et notifie à l'intéressé, dans les mêmes conditions, les restitutions de points obtenues en application des alinéas 1 et 3 de l'article L.223-6. / IV.- Lorsque le nombre de points est nul, le préfet du département (...) enjoint à l'intéressé, par lettre recommandée, de restituer son titre de conduite dans un délai d'une semaine à compter de la réception de cette lettre. ; qu'il résulte de ces dispositions précitées que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues par les articles précités L.223-3 et R.223-3 du code de la route, sur d'une part, l'existence d'un traitement automatisé des points et la possibilité d'exercer son droit d'accès aux informations y afférentes conformément aux articles L.225-1 à L.225-9 du code de la route et d'autre part, sur le fait que l'amende forfaitaire notamment établit la réalité de l'infraction, dont la qualification est précisée, et entraîne un retrait de points correspondant à cette infraction ; que ces informations constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information en délivrant un tel document ; que, cependant, il incombe à l'intéressé lorsqu'il entend faire valoir que les mentions figurant dans le document qui lui a été remis sont inexactes ou incomplètes, de mettre le juge en mesure de se prononcer, en produisant notamment le document dont il conteste l'exactitude ; que ni l'article L.223-3, ni l'article R.223-3 du code de la route n'exigent que le conducteur soit informé du nombre exact de points susceptibles de lui être retirés dès lors que la qualification de l'infraction qui lui est reprochée est dûment portée à sa connaissance ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte des articles 529, 529-1, 529-2 et du premier alinéa de l'article 530 du code de procédure pénale que, pour les infractions des quatre premières classes dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat, le contrevenant peut, dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention, soit acquitter une amende forfaitaire et éteindre ainsi l'action publique, soit présenter une requête en exonération ; que s'il s'abstient tant de payer l'amende forfaitaire que de présenter une requête, l'amende forfaitaire est majorée de plein droit et recouvrée au profit du Trésor public en vertu d'un titre rendu exécutoire par le ministère public, lequel est exécuté suivant les règles prévues pour l'exécution des jugements de police ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 530 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : Dans les trente jours de l'envoi de l'avis invitant le contrevenant à payer l'amende forfaitaire majorée, l'intéressé peut former auprès du ministère public une réclamation motivée qui a pour effet d'annuler le titre exécutoire en ce qui concerne l'amende contestée. Cette réclamation reste recevable tant que la peine n'est pas prescrite, s'il ne résulte pas d'un acte d'exécution ou de tout autre moyen de preuve que l'intéressé a eu connaissance de l'amende forfaitaire majorée. S'il s'agit d'une contravention au code de la route, la réclamation n'est toutefois plus recevable à l'issue d'un délai de trois mois lorsque l'avis d'amende forfaitaire majorée est envoyé par lettre recommandée à l'adresse figurant sur le certificat d'immatriculation du véhicule, sauf si le contrevenant justifie qu'il a, avant l'expiration de ce délai, déclaré son changement d'adresse au service d'immatriculation des véhicules. ; que l'article L.225-1 du code de la route fixe la liste des informations qui, sous l'autorité et le contrôle du ministre de l'intérieur, sont enregistrées au sein du système national des permis de conduire ; que sont notamment mentionnés au 5° de cet article les procès-verbaux des infractions entraînant retrait de points et ayant donné lieu au paiement d'une amende forfaitaire en vertu de l'article 529 du code de procédure pénale ou à l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée prévu à l'article 529-2 du code de procédure pénale ; qu'en vertu de l'arrêté du 29 juin 1992 fixant les supports techniques de la communication par le ministère public au ministère de l'intérieur des informations prévues à l'article L.30 (4°, 5°, 6° et 7°) du code de la route, les informations mentionnées au 6° de l'article L.30, devenu le 5° de l'article L.225-1 du code de la route, sont communiquées par l'officier du ministère public par support ou liaison informatique ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le mode d'enregistrement et de contrôle des informations relatives aux infractions au code de la route conduit à considérer que la réalité de l'infraction est établie dans les conditions prévues à l'article L.223-1 du code de la route dès lors qu'est inscrite, dans le système national des permis de conduire, la mention du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, sauf si l'intéressé justifie avoir présenté une requête en exonération dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention ou formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée ;

Considérant que pour rejeter le moyen tiré de ce que le retrait de points consécutif à l'infraction constatée le 18 avril 2009, les premiers juges ont estimé que dès lors que

M. A ne rapportait pas la preuve de ce qu'il avait formulé une requête en exonération contre l'avis de contravention portant amende forfaitaire ou une réclamation contre le titre exécutoire portant amende forfaitaire majorée, la réalité des infractions en cause devait être regardée comme établie ; que ce faisant, alors qu'il incombe tout d'abord au ministre chargé de l'intérieur de rapporter la preuve du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'amende forfaitaire majorée avant d'examiner si le contrevenant apporte alors la preuve d'une requête en exonération régulièrement formée contre l'avis de contravention ou d'une réclamation régulière contre le titre exécutoire portant amende forfaitaire majorée, les premiers juges ont inversé la charge de la preuve et ont ainsi entaché d'irrégularité le jugement attaqué ; que, par suite, il y a lieu de réformer ledit jugement en tant que, pour statuer sur les conclusions à fin d'injonction de

M. A, il a refusé, pour le motif sus analysé, de prendre en compte l'illégalité, par voie d'exception, des cinq retraits de points afférents aux cinq infractions susmentionnées ;

Considérant qu'il y a lieu pour la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur la demande de M. A présentée devant le Tribunal administratif de Marseille ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision de retrait de six points à la suite de l'infraction relevée le 18 avril 2006 :

Considérant que le ministre n'a produit, avant la clôture de l'instruction, aucun élément de nature à établir le paiement de l'amende forfaitaire au taux minoré, au taux normal ou au taux majoré ou l'exécution d'une composition pénale par M. A pour l'infraction en cause ; qu'il n'établit pas non plus la condamnation pénale définitive de ce dernier pour cette infraction ; que, dès lors, et alors même que le procès-verbal relatif à l'infraction comporte la signature de l'intéressé sous la mention reconnaît l'infraction , M. A est fondé à soutenir que la réalité de ladite infraction ne saurait être retenue comme établie ;

Sur l'infraction constatée le 8 août 2005 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les mentions figurant sur le volet avis de contravention remis au contrevenant le 11 août 2005 à la suite de l'infraction constatée le 8 août, établi sur imprimé CERFA, conformément aux dispositions des articles A 37 et suivants du code de procédure pénale dans leur rédaction issue tant de l'arrêté du 5 octobre 1999 que de l'arrêté du 24 octobre 2003, relatives à la perte de points, aux conséquences du paiement de l'amende et au droit d'accès au traitement automatisé du système national du permis de conduire répondent aux exigences d'information prévues par les dispositions des articles L.223-3 et R.223-3 du code de la route ; que M. A s'est acquitté 18 août 2005 de l'amende forfaitaire mise à sa charge, dont le montant était indiqué dans l'avis de contravention incluant la carte de paiement ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant que l'intéressé a reçu communication desdites informations à l'occasion de l'infraction dont il s'agit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de retrait de points afférente à l'infraction du 8 août 2005 ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision ministérielle du 28 février 2007 portant invalidation du permis de conduire :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler la décision susmentionnée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que l'exécution du présent arrêt, eu égard à ses motifs, implique nécessairement, en application des dispositions de l'article L.911-1 du code de justice administrative, que le ministre chargé de l'intérieur restitue, dans un délai d'un mois à compter du présent arrêt, à M. A son titre de conduite affecté d'un crédit de six points, qui seront rétablis dans le traitement automatisé mentionné à l'article L.223-3 du code de la route, sauf si l'intéressé a obtenu un nouveau permis de conduire et sans préjudice des décisions de retrait de points à raison d'autres infractions commises postérieurement par l'intéressé ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie, la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées de M. A ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille du 25 février 2009 est annulé en tant qu'il n'a pas pris en compte l'illégalité du retrait de points sur le capital de points du permis de conduire de M. A afférent à l'infraction relevée le 18 avril 2006. La décision de retrait de six points prise par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales consécutivement à cette infraction est annulée ainsi que la décision en date du 28 février 2007 par laquelle le ministre a invalidé le permis de conduire de M. A pour solde de points nul.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de procéder, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, à la restitution à M. A de son permis de conduire, affecté d'un crédit de six points, qui seront rétablis dans le traitement automatisé mentionné à l'article L.223-3 du code de la route, sauf si l'intéressé a obtenu un nouveau permis de conduire et sans préjudice des décisions de retrait de points à raison d'autres infractions commises postérieurement par l'intéressé.

Article 3 : Les conclusions de M. A tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Abderrezag A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N° 09MA01469 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA01469
Date de la décision : 15/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: M. Dominique REINHORN
Rapporteur public ?: M. GUIDAL
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS DUFOUR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-12-15;09ma01469 ?
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