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11/07/2011 | FRANCE | N°08MA01148

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 11 juillet 2011, 08MA01148


Vu le recours, enregistré le 6 mars 2008, du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE;

LE MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400908 du 23 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a accordé à la SA BRL Exploitation la réduction des rappels de taxe professionnelle mis à sa charge au titre des années 1995 à 1998 dans les rôles des communes de Villeneuve de la Raho et de Montescot, et la réduction des cotisations initiales de taxe profession

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Vu le recours, enregistré le 6 mars 2008, du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE;

LE MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400908 du 23 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a accordé à la SA BRL Exploitation la réduction des rappels de taxe professionnelle mis à sa charge au titre des années 1995 à 1998 dans les rôles des communes de Villeneuve de la Raho et de Montescot, et la réduction des cotisations initiales de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 1999 et 2000 dans les rôles des mêmes communes, procédant de l'exonération applicable aux réseaux d'irrigations situés à l'aval de la retenue de Villeneuve de la Raho ;

2°) de remettre à la charge de la SA BRL Exploitation les droits de taxe professionnelle et les pénalités correspondantes pour un montant total de 745 785,45 euros ;

..................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative et l'arrêté d'expérimentation du Vice-président du Conseil d'Etat du 27 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2011 :

- le rapport de Mme Haasser, rapporteur,

- et les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;

Considérant que l'administration a estimé que, parmi les ouvrages composant le complexe hydraulique de Vinça/Villeneuve-de-la-Raho affermé par le département des Pyrénées-Orientales à la SA Compagnie nationale d'aménagement du Bas-Rhône Languedoc (SA CNABRL), les réseaux d'irrigation situés à l'aval de la retenue de Villeneuve-de-la-Raho étaient, en fait, exploités par la SA BRL Exploitation, filiale de la Sté CNABRL, et a, suite à des insuffisances d'imposition constatées dans les déclarations déposées par la SA BRL Exploitation, émis à son encontre des rôles supplémentaires en matière de taxe professionnelle au titre des années 1995 à 1998, mis en recouvrement les 31 décembre 1998 et 30 avril 1999 ; que la SA BRL Exploitation demande la décharge desdits rôles supplémentaires, ainsi que la décharge des cotisations initiales de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 1999 et 2000 dans les rôles des communes de Montescot et de Villeneuve-de-la-Raho, en soutenant pouvoir bénéficier de l'exonération visée à l'article 1469-1 alinéa 3 du code dès lors que l'eau livrée est consacrée à l'irrigation qui doit être entendue dans un sens large, et qu'en tout état de cause, elle est placée hors du champ de la taxe professionnelle ;

En ce qui concerne la notion d'irrigation à retenir :

Considérant qu'aux termes de l'article 1469 du code général des impôts : La valeur locative est déterminée comme suit : / 1° Pour les biens passibles d'une taxe foncière, elle est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe ; / (...) Les immobilisations destinées à la fourniture et à la distribution de l'eau sont exonérées de taxe professionnelle lorsqu'elles sont utilisées pour l'irrigation pour les neuf dixièmes au moins de leur capacité ; / (...) 2° (...) les équipements et biens mobiliers destinés à l'irrigation sont exonérés dans les mêmes conditions qu'au 1° ;

Considérant que le ministre soutient que l'irrigation doit être entendue comme un apport d'eau à des terres agricoles exclusivement, et non comme incluant l'arrosage de diverses surfaces, tels des espaces verts, des golfs ou des jardins ; que si l'ancien régime de la patente exonérait de la taxe les équipements réservés au service des abonnements agricoles d'irrigation ou d'arrosage , la loi du 29 juillet 1975 a repris la même exonération dans son texte à la suite d'amendements parlementaires émanant notamment de M. , souhaitant maintenir l'exonération des Associations Syndicales Agréées et des Sociétés Agricoles ayant pour objet l'irrigation à des fins agricoles ; que suite aux débats parlementaires, l'exonération a été réintroduite mais restreinte aux seules immobilisations utilisées pour l'irrigation pour les neuf dixièmes au moins de leur capacité ;

Considérant que les dispositions relatives à une exonération étant d'interprétation stricte, les équipements utilisés à l'irrigation dans le sens de l'article 1469-1 doivent être entendus comme ceux destinés à l'apport artificiel d'eau sur des terres à des fins agricoles ; qu'il suit de là que le jugement a commis une erreur de droit en considérant que devaient être exonérés les équipements destinés à l'irrigation prise dans un sens général, et doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par la SARL BRL Exploitation devant le Tribunal administratif et la Cour ;

En ce qui concerne le principe de l'imposition de la SARL BRL Exploitation à la taxe professionnelle :

Considérant qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une convention d'affermage du 10 mai 1982, le département des Pyrénées-Orientales a confié à la SA CNABRL l'exploitation du complexe hydraulique de Vinça/Villeneuve-de-la-Raho, constitué, d'une part, du barrage de Vinça, d'autre part, de huit canaux situés en aval et, enfin, de la retenue de Villeneuve-de-la-Raho ; qu'en vertu de ladite convention, la SA CNABRL a notamment pour missions d'assurer, d'une part, l'écrêtement des crues de la Têt par utilisation de la retenue de Vinça, d'autre part, le stockage de l'eau de la Têt dans les retenues de Vinça et de Villeneuve-de-la Raho en vue de leur régulation et de leur utilisation en aval et, enfin, la fourniture en gros, à partir des eaux ainsi stockées, d'eau à usage agricole pour alimenter les réseaux d'irrigation situés en aval, et d'eau brute ou potable ; qu'outre cette convention d'affermage, la SA CNABRL a conclu le 18 juillet 1980 une convention de concession avec le même département, et le 29 juillet 1981 une convention de concession avec l'Association Syndicale Agréée d'irrigation à l'aval de la retenue de Villeneuve la Raho ; que par délibération de l'Assemblée Générale Extraordinaire du 5 juillet 1993, la SA CNABRL s'est restructurée puis a confié à la SA BRL Exploitation, l'une de ses filiales, l'exploitation des réseaux d'irrigation concédés à la SA CNABRL, ainsi qu'il ressort des termes de l'Avenant du 31 août 1998 ; qu'il ressort des termes du même Avenant qu'une Assemblée Générale de l'Association Syndicale Agréée a décidé le 29 janvier 1998, dans le but d'améliorer les conditions d'exploitation et de gestion du réseau d'irrigation à l'aval de la retenue de Villeneuve la Raho par la maîtrise des coûts ... d'accepter de sous-traiter, sur demande de la SA CNABRL, l'activité d'exploitation ; que ledit Avenant a ainsi confié l'exploitation de ce réseau à la SA BRL Exploitation en qualité de sous-traitant, et que dès 1993, les contrats de fourniture d'eau étaient libellés au nom de la SA BRL Exploitation ; qu'en vertu des stipulations de l'Avenant, la société requérante exploite le réseau de distribution d'eau et perçoit sur les usagers en contrepartie le produit de la vente de l'eau ; que l'activité ainsi décrite constitue une activité professionnelle non salariée au sens des dispositions précitées de l'article 1447, qui entre dans le champ d'application de la taxe professionnelle ;

Considérant, d'autre part, qu'il ressort des documents produits que la SA BRL Exploitation dispose sur le territoire des communes concernées de plusieurs ouvrages ; qu'ainsi, et même si elle n'est pas propriétaire desdits ouvrages dont elle a cependant la disposition, dès lors qu'elle les contrôle et les utilise matériellement pour l'exercice de son activité, et quel que soit à cet égard son statut de fermier ou de sous-traitant, c'est à juste titre qu'en application des dispositions de l'article 1473 du code général des impôts, elle a été assujettie à la taxe professionnelle dans les rôles de ces communes ; que la doctrine Benoît AN 3-3-1980 ne peut être qu'écartée dès lors qu'elle vise les entreprises de traitement des ordures ménagères ;

En ce qui concerne les bases d'imposition à la taxe professionnelle :

Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur , la taxe professionnelle a pour base ... la valeur locative ... des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence (...) ; qu'il convient d'examiner si en application des dispositions précitées de l'article 1469-1 du code, la SARL BRL Exploitation consacre ses installations à l'irrigation agricole pour les neuf dixièmes au moins de leur capacité ;

Considérant que parmi les documents produits par les parties, seule l'enquête du SESDO fait état de chiffres différenciant les divers usages de l'eau prélevée et relatifs aux années 1993 et 1994 valant période de référence pour les années d'imposition 1995 et 1996 en cause ; qu'il en ressort que les quantités d'eau cédées aux exploitants agricoles à partir de la retenue de Villeneuve de la Raho représentaient en 1993 et 1994 respectivement 78 ,48 % et 81,70 % des quantités d'eau totales cédées par la requérante ; que si ces chiffres, non sérieusement contestés, ne recouvrent que deux années il n'est ni soutenu, ni justifié, qu'ils auraient évolué de manière sensible par la suite ; que la SARL BRL Exploitation ne peut en conséquence se prévaloir d'une exonération de taxe professionnelle au titre des dispositions de l'article 1469-1 invoqué ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que LE MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a accueilli la demande de la SA BRL Exploitation ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Montpellier en date du 23 octobre 2007 est annulé

Article 2 : La SA BRL Exploitation est rétablie dans les rôles de la taxe professionnelle au titre des années 1995 à 2000.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE et à la SA BRL Exploitation.

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N° 08MA1148


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA01148
Date de la décision : 11/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - ASSIETTE - NOTION D'IRRIGATION AU SENS DE L'ARTICLE 1469-1° DU CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS.

19-03-04-04 La SARL BRL Exploitation demande à bénéficier de l'exonération de taxe professionnelle prévue à l'alinéa 3 de l'article 1469-1° du CGI, selon lequel La valeur locative est déterminée comme suit : / 1°) Pour les biens passibles d'une taxe foncière, elle est calcultée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe ; / (...) Les immobilisations destinées à la fourniture et à la distribution de l'eau sont exonérées de taxe professionnelle lorsqu'elles ssont utilisées pour l'irrigation pour les neuf dixièmes au moins de leur capacité ; / (...) 2° (...) les équipements et biens mobiliers destinés à l'irrigation sont exonérés dans les mêmes conditions qu'au 1°.,,,Si l'ancien régime de la patente exonérait de la taxe les équipements réservés au service des abonnements agricoles d'irrigation ou d'arrosage, il résulte des travaux parlementaires que la nouvelle loi du 29 juillet 1975 a souhaité maintenir l'exonération des ASA et des sociétés agricoels ayant pour objet l'irrigation à des fins agricoles mais l'a restreinte aux seules immobilisations utilisées pour l'irrigation pour les neuf dixièmes au moins de leur capacité. Les dispositions relatives à une exonération étant d'interprétation stricte, les équipements utilisés à l'irrigation dans le sens de l'article 1469-1 doivent être entendus comme ceux destinés à l'apport artificiel d'eau sur des terres à des fins agricoles.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES - NOTION D'IRRIGATION AU SENS DE L'ARTICLE 1469-1° DU CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS.

19-03-045-01 La SARL BRL Exploitation demande à bénéficier de l'exonération de taxe professionnelle prévue à l'alinéa 3 de l'article 1469-1° du CGI, selon lequel La valeur locative est déterminée comme suit : / 1°) Pour les biens passibles d'une taxe foncière, elle est calcultée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe ; / (...) Les immobilisations destinées à la fourniture et à la distribution de l'eau sont exonérées de taxe professionnelle lorsqu'elles ssont utilisées pour l'irrigation pour les neuf dixièmes au moins de leur capacité ; / (...) 2° (...) les équipements et biens mobiliers destinés à l'irrigation sont exonérés dans les mêmes conditions qu'au 1°.,,,Si l'ancien régime de la patente exonérait de la taxe les équipements réservés au service des abonnements agricoles d'irrigation ou d'arrosage, il résulte des travaux parlementaires que la nouvelle loi du 29 juillet 1975 a souhaité maintenir l'exonération des ASA et des sociétés agricoels ayant pour objet l'irrigation à des fins agricoles mais l'a restreinte aux seules immobilisations utilisées pour l'irrigation pour les neuf dixièmes au moins de leur capacité. Les dispositions relatives à une exonération étant d'interprétation stricte, les équipements utilisés à l'irrigation dans le sens de l'article 1469-1 doivent être entendus comme ceux destinés à l'apport artificiel d'eau sur des terres à des fins agricoles.


Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Anita HAASSER
Rapporteur public ?: M. GUIDAL
Avocat(s) : CABINET CONSEILS FISCAUX REUNIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-07-11;08ma01148 ?
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