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29/11/2011 | FRANCE | N°11MA00838

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 29 novembre 2011, 11MA00838


Vu l'arrêt n° 06MA03390 et n° 06MA03389 du 27 janvier 2009 par lequel la Cour de céans a rejeté les requêtes de M. A tendant, pour la première, à l'annulation du jugement n° 0408502 du 5 octobre 2006 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 1er mars 2004 du directeur départemental de la sécurité publique des Bouches-du-Rhône lui infligeant un blâme et à l'annulation de ladite décision et, pour la seconde, à l'annulation du jugement n° 0509001 du 5 octobre 2006 par lequel ledit tribunal administra

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Vu l'arrêt n° 06MA03390 et n° 06MA03389 du 27 janvier 2009 par lequel la Cour de céans a rejeté les requêtes de M. A tendant, pour la première, à l'annulation du jugement n° 0408502 du 5 octobre 2006 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 1er mars 2004 du directeur départemental de la sécurité publique des Bouches-du-Rhône lui infligeant un blâme et à l'annulation de ladite décision et, pour la seconde, à l'annulation du jugement n° 0509001 du 5 octobre 2006 par lequel ledit tribunal administratif a rejeté sa demande d'enquête et sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 septembre 2005 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de douze mois, dont neuf avec sursis ;

Vu l'arrêt n° 326604 du 11 février 2011, par lequel le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt susmentionné de la Cour de céans en tant qu'il s'est prononcé sur le bien-fondé du jugement du 5 octobre 2006 du tribunal administratif de Marseille rejetant la demande de M. A tendant à l'annulation de la décision du 13 septembre 2005 du ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire et a renvoyé l'affaire à ladite Cour dans les limites de la cassation prononcée ;

Vu les mémoires, enregistrés le 15 avril 2011 et le 7 octobre 2011, présentés pour M. Christian A, domicilié ..., par Me Bonnefoi, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0509001 du tribunal administratif de Marseille et la décision du 13 septembre 2005 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de douze mois, dont neuf avec sursis ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 364,30 euros à titre d'indemnisation des traitements non versés et des sommes retenues sur ses traitements au titre de l'exclusion temporaire de fonctions ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 160 euros au titre du préjudice financier généré par la perte totale de salaires du fait du retard d'avancement dû aux sanctions ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 835,25 euros au titre du préjudice financier généré par le trimestre manquant pour le calcul de la pension civile de retraite ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 835,25 euros au titre du préjudice d'avancement pour un montant de 2 160 euros ;

6°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 525 euros au titre du préjudice financier généré par le trimestre manquant pour le calcul de la pension civile de retraite ;

7°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7 000 euros au titre du préjudice moral généré par une sanction disproportionnée et la circonstance qu'il a terminé sa carrière dans l'administration le 20 décembre 2010 sans avoir été réhabilité aux yeux de son entourage et de ses collègues ;

8°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros au titre du préjudice moral généré par son exclusion temporaire de fonctions ;

9°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative, outre les dépens, qui s'élèvent à la somme de 5 585,80 euros ;

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Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu l'arrêté ministériel du 7 mai 1974 modifié portant règlement intérieur d'emploi des gradés et gardiens de la paix de la police nationale ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre exceptionnel, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2011 :

- le rapport de M. Reinhorn, rapporteur,

- les conclusions de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur public,

- et les observations de Me Bonnefoi pour M. A ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que l'arrêté du 13 septembre 2005 infligeant à M. A,

sous-brigadier de la police nationale, la sanction d'exclusion temporaire de fonctions est motivé, en premier lieu, par le mauvais accueil que ce dernier a réservé au public venu déposer une plainte devant son bureau de police, révélé par une enquête déclenchée après un incident survenu le 1er juillet 2004 et, en second lieu, par le fait que l'intéressé a continué à porter les cheveux longs jusqu'aux épaules avec sa tenue d'uniforme malgré le blâme reçu l'année précédente et les nouvelles mises en demeure qui lui ont été faites ; qu'il résulte de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif de Marseille a considéré que l'administration aurait pu prendre légalement la sanction en cause sur le seul fondement du second motif, dès lors que la violation des droits de la défense invoquée par le requérant ne concernait que l'activité du bureau de police de Saint-Louis et était sans incidence sur la légalité du motif tiré du refus d'obéissance en ce qui concerne la coupe de cheveux ; que les moyens relatifs au bien-fondé de l'affectation du requérant à l'enregistrement des plaintes dans ce poste de police et à l'impossibilité dans laquelle il se serait trouvé d'assurer correctement, dans une situation constitutive d'une sanction déguisée, les tâches qui lui étaient confiées durant la période de mai à septembre 2004 compte tenu du peu d'effectifs présents étant dès lors inopérants, le tribunal administratif de Marseille n'a pas entaché son jugement d'irrégularité en n'y répondant pas ;

Sur les conclusions d'excès de pouvoir :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 bis de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : aucune distinction ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leur sexe ; que ce principe ne s'oppose pas, toutefois, à ce que des fonctionnaires soient traités différemment dès lors qu'ils ne sont pas placés dans une situation identique ;

Considérant que M. A, qui exerce, au contact direct du public, les fonctions de sous-brigadier de police en tenue d'uniforme, s'est vu infliger une sanction disciplinaire le 13 septembre 2005 en raison de sa coupe de cheveux qui contrevient délibérément et de manière persistante aux règles élémentaires qui président au port de la tenue et à la coupe de cheveux ; que le règlement intérieur d'emploi des gardiens et gradés de la police nationale annexé à l'arrêté du ministre de l'intérieur du 7 mai 1974 précise notamment que : les fonctionnaires soumis au présent règlement doivent veiller à ce que la coupe de leurs cheveux demeure soignée et compatible avec le port des coiffures de service... ; que ces règles ont été complétées par les dispositions d'une note de service à caractère réglementaire, en date du 11 avril 1998, en ces termes : le personnel masculin doit avoir une coupe de cheveux soignée et compatible avec le port d'une coiffure administrative... le personnel féminin doit, s'il porte habituellement les cheveux longs, les coiffer avec un chignon ou les dissimuler sous la casquette ;

Considérant, par ailleurs, qu'aux termes de l'article 28 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable des tâches qui lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public... ; qu'aux termes de l'article 7 du décret du 18 mars 1986 portant code de déontologie de la police nationale : Placé au service du public, le fonctionnaire de police se comporte envers celui-ci d'une manière exemplaire ; qu'aux termes de l'article 111-7 de l'arrêté du 22 juillet 1996 portant règlement général d'emploi de la police nationale : Dans le respect des lois et règlements en vigueur et dans le respect du code de déontologie de la police nationale, tout fonctionnaire de police doit exécuter loyalement les instructions et les ordres qui lui sont donnés par l'autorité supérieure (...) ; qu'aux termes de l'article 113-38 dudit règlement : Les fonctionnaires actifs de la police nationale exécutent les missions qui leur sont assignées et les ordres qu'ils reçoivent (...) ; qu'il en résulte que le requérant, qui a refusé de manière réitérée d'obtempérer à la mise en demeure qui lui était faite de porter les cheveux conformément aux dispositions réglementaires sus-rappelées sous sa coiffure de service, a commis une faute passible de sanction disciplinaire, sans qu'une telle sanction ne soit caractéristique de faits de harcèlement moral ;

Considérant, en deuxième lieu, que, s'il n'est pas contesté que M. A a continué à porter les cheveux longs jusqu'aux épaules malgré le blâme qui lui avait été infligé et les mises en garde réitérées qui lui étaient faites, il ressort des pièces du dossier qu'en l'état des faits susmentionnés reprochés à l'agent, le ministre de l'intérieur n'aurait pas pu, sans erreur manifeste d'appréciation, prendre la même sanction d'exclusion de fonctions de douze mois dont neuf mois avec sursis en se fondant sur ce seul motif, alors que le caractère fautif du mauvais accueil réservé par M. A au public venu déposer une plainte devant le bureau de police, tel qu'il résulterait d'une enquête déclenchée après un incident survenu le 1er juillet 2004, qui constituait l'autre motif de la sanction, n'est pas suffisamment établi par les pièces produites au dossier ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 septembre 2005 du ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire par laquelle le ministre de l'intérieur lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de douze mois, dont neuf avec sursis ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant que les conclusions susmentionnées sont irrecevables comme étant nouvelles en appel ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'en vertu des dispositions susmentionnées, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante, du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par le ministre de l'intérieur doivent dès lors être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que M. A demande au titre de ses frais exposés et non compris dans les dépens et des dépens dont il allègue avoir eu la charge ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 059001 du 5 octobre 2006 du tribunal administratif de Marseille et la décision du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration en date du 13 septembre 2005 portant exclusion temporaire de fonctions de

M. A pour une durée de douze mois dont neuf avec sursis sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 3 : Les conclusions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Christian A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA00838
Date de la décision : 29/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions. Erreur manifeste d'appréciation.


Composition du Tribunal
Président : M. REINHORN
Rapporteur ?: M. Dominique REINHORN
Rapporteur public ?: Mme VINCENT-DOMINGUEZ
Avocat(s) : SCP DELAPORTE BRIARD TRICHET ; SCP DELAPORTE BRIARD TRICHET ; BONNEFOI ; BONNEFOI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-11-29;11ma00838 ?
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