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27/03/2012 | FRANCE | N°10MA01687

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 27 mars 2012, 10MA01687


Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2010, présentée pour le GIE AUCHAN, dont le siège est 200 rue de la Recherche à Villeneuve d'Ascq (59650), par Me Hernout ; le GIE AUCHAN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800346 du 23 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en restitution de la somme de 199 627, 46 euros assortie des intérêts moratoires à compter du 17 novembre 2004, dont le paiement lui a été réclamé en sa qualité de débiteur de la " SA de Participations Quesnel " par un avis à tiers détenteur du 1

1 octobre 2004 ;

2°) de dire que la requête est recevable et de prononcer...

Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2010, présentée pour le GIE AUCHAN, dont le siège est 200 rue de la Recherche à Villeneuve d'Ascq (59650), par Me Hernout ; le GIE AUCHAN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800346 du 23 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en restitution de la somme de 199 627, 46 euros assortie des intérêts moratoires à compter du 17 novembre 2004, dont le paiement lui a été réclamé en sa qualité de débiteur de la " SA de Participations Quesnel " par un avis à tiers détenteur du 11 octobre 2004 ;

2°) de dire que la requête est recevable et de prononcer la restitution de la somme de 199 627,46 euros assortie des intérêts moratoires à compter du 17 novembre 2004 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 février 2012,

- le rapport de Mme Haasser, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;

Sur la recevabilité de la requête en restitution de l'indu :

Considérant que le GIE AUCHAN demande la restitution, à concurrence de la somme de 199 627, 46 euros et au motif qu'ils seraient indus, des versements effectués en exécution de l'avis à tiers détenteur notifié le 11 octobre 2004 pour avoir paiement, en sa qualité de débiteur de la SA " Participations Quesnel ", des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont celle-ci était redevable à la suite d'un contrôle fiscal ;

Considérant que le GIE AUCHAN a présenté, le 26 février 2007, sur le fondement des articles 1235 et 1376 du code civil, une action en répétition de l'indu, que l'administration a rejetée en invoquant sa tardiveté au regard du délai de deux mois prévu à l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales pour contester les actes de poursuite, l'avis à tiers détenteur ayant été décerné le 11 octobre 2004 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1235 du code civil : " Tout paiement suppose une dette : ce qui a été payé sans être dû, est sujet à répétition. La répétition n'est pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées. " ; qu'aux termes de l'article 1376 du même code : " Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu. " ; qu'un tel recours de plein contentieux, recevable à être présenté devant le juge administratif, n'est ni une action en remise gracieuse, ni un contentieux d'assiette, ni un contentieux de recouvrement, sa recevabilité n'étant pas soumise aux règles de délai de ce dernier contentieux mais à la prescription trentenaire, et étant subordonnée à la condition que la personne ayant versé l'impôt indu soit véritablement un tiers c'est-à-dire qu'elle ne soit ni débitrice de l'impôt, ni susceptible de voir sa responsabilité solidaire mise en oeuvre pour le paiement de l'impôt, condition remplie en l'espèce par le GIE AUCHAN, le jugement du Tribunal de commerce de Roubaix Tourcoing du 5 avril 2006 ayant énoncé que le GIE AUCHAN n'était pas le débiteur de la société Quesnel ;

Considérant que, par suite, la réclamation du GIE AUCHAN du 26 février 2007 en répétition de l'indu n'était pas dirigée contre l'avis à tiers détenteur, auquel le GIE AUCHAN a déféré de plein gré, n'avait pas en conséquence à respecter les dispositions de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales et n'était pas tardive ; qu'il y a lieu d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Montpellier du 23 février 2010, d'évoquer et de statuer immédiatement sur les moyens soulevés ; qu'en tout état de cause, la cause du rejet par le premier juge, fondée sur l'article R. 196-1, n'a pas privé le requérant d'un recours effectif en violation des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, dès lors qu'il a pu faire valoir ses droits devant le juge administratif et judiciaire, la circonstance que le jugement du Tribunal de commerce soit devenu définitif sans qu'il en ait fait appel ne pouvant être imputée qu'à sa négligence ;

Sur le bien-fondé de la demande en restitution de l'indu :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 262 du livre des procédures fiscales : " Les dépositaires, détenteurs ou débiteurs de sommes appartenant ou devant revenir aux redevables d'impôts, de pénalités et de frais accessoires dont le recouvrement est garanti par le privilège du Trésor sont tenus, sur la demande qui leur en est faite sous forme d'avis à tiers détenteur notifié par le comptable chargé du recouvrement de verser, au lieu et place des redevables, les fonds qu'ils détiennent ou qu'ils doivent, à concurrence des impositions dues par ces redevables. " ; que l'article L. 263 du livre des procédures fiscales dispose que : " L'avis à tiers détenteur a pour effet d'affecter, dès réception, les sommes dont le versement est ainsi demandé au paiement des impositions privilégiées (...). Il comporte l'effet d'attribution immédiate prévu à l'article 43 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991. " ;

Considérant que l'avis à tiers détenteur ne peut permettre de saisir que les sommes appartenant ou devant appartenir au redevable de l'impôt, en l'espèce la société Quesnel, redevable de rappels de TVA envers le comptable public, ou au débiteur du redevable, en l'espèce le GIE AUCHAN ; que l'émission d'un avis à tiers détenteur entraîne, en application de l'article L. 263 du livre des procédures fiscales, une attribution immédiate des fonds au profit du Trésor, créancier privilégié, et ce " quelle que soit la date à laquelle les créances même conditionnelles ou à terme que le redevable possède à l'encontre du tiers détenteur deviennent effectivement exigibles ", à condition que la créance existe, c'est-à-dire ait donné lieu à facturation ;

Considérant qu'il convient de vérifier si à la date de réception des avis à tiers détenteur du 11 octobre 2004 délivrés aux membres du GIE AUCHAN, ceux-ci étaient débiteurs de la société Quesnel, et dans l'affirmative, à quelle hauteur ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'entre le 6 septembre 2004 et le 20 janvier 2005, la société Quesnel a cédé à la banque Themis des créances que cette société détenait sur le GIE AUCHAN pour un montant de 257 585,67 euros en application de la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981, dite loi Dailly, qui rend la cession opposable aux tiers dès la date apposée sur le bordereau de cession, ainsi que le précise l'article 4 de cette loi, codifié sous l'article L. 313-27 du Code monétaire et financier, sans notification préalable obligatoire ;

Considérant que pour les factures cédées entre le 6 septembre et le 11 octobre 2004, soit un montant de 74 762,25 euros, la société Quesnel pouvait valablement opérer des cessions de créances et, du fait de cette cession, le GIE AUCHAN n'était plus le débiteur de la société Quesnel pour les montants figurant sur les bordereaux, mais devenait débiteur de la banque Themis à qui il aurait dû verser ce montant, sans que le défaut d'information du GIE AUCHAN et du Trésor sur l'existence de telles cessions ait une influence sur la solution du litige ;

Considérant que les avis à tiers détenteur en cause ne pouvaient emporter attribution au profit du comptable des sommes correspondant aux factures émises postérieurement à la notification des avis à tiers détenteur dans la mesure où à la date du 11 octobre 2004, les créances correspondant à ces factures " à émettre " par la société Quesnel n'étaient pas nées et restaient simplement éventuelles ;

Considérant que le GIE AUCHAN ne reste redevable au Trésor que pour les factures émises avant l'avis à tiers détenteur et qui n'avaient pas fait l'objet, à cette date, d'une cession Dailly ; que par suite, parmi les trois factures émises avant les avis à tiers détenteur, reçus soit le 14 soit le 18 octobre 2004 selon l'établissement destinataire, mais cédées postérieurement à cette réception, seule la facture de 3 510,96 euros établie au nom de l'établissement d'Amiens est concernée par un avis à tiers détenteur notifié de façon certaine le 14 octobre, ce qui invalide la cession Dailly opérée le 19 octobre ; que le GIE AUCHAN ne reste en définitive débiteur du Trésor qu'à hauteur de cette somme de 3 510, 96 euros, et est fondé à obtenir la décharge de la différence entre le montant de 199 627,46 euros et celui de 3 510,96 euros, soit 196 116,50 euros ;

Sur les intérêts moratoires :

Considérant que le GIE AUCHAN demande l'allocation d'intérêts moratoires à compter du 17 novembre 2004, date de son premier versement au Trésor public sans préciser la base légale de sa demande, qu'il ne peut la fonder sur les dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales qui n'est applicable que dans le cadre d'un dégrèvement consécutif à une réclamation contentieuse ; qu'il peut en revanche invoquer les dispositions de l'article 1378 du Code civil selon lesquelles : " S'il y a eu mauvaise foi de la part de celui qui a reçu, il est tenu de restituer tant le capital que les intérêts ou les fruits, du jour du paiement " ; que toutefois, si l'administration a commis une erreur en ne remboursant pas les sommes versées à tort, elle ne s'est pas rendue coupable de mauvaise foi au vu des circonstances de l'espèce ; qu'il y a lieu de rejeter la demande d'intérêts moratoires ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le GIE AUCHAN est fondé à soutenir que c'est partiellement à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que l'Etat est condamné à verser au GIE AUCHAN la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il sera restitué au GIE AUCHAN le montant de 196 116,50 euros qu'il a versé au Trésor public au titre de la taxe sur la valeur ajoutée.

Article 2 : L'Etat versera au GIE AUCHAN la somme de 1 500 euros au titre des frais de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du GIE AUCHAN est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au GIE AUCHAN et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Copie en sera adressée à la Direction des services fiscaux des Bouches-du-Rhône et au Trésorier payeur général de l'Hérault.

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N° 10MA01687 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA01687
Date de la décision : 27/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-01-05-02-03-01 Contributions et taxes. Généralités. Recouvrement. Paiement de l'impôt. Autres questions relatives au paiement de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : Mme NAKACHE
Rapporteur ?: Mme Anita HAASSER
Rapporteur public ?: M. GUIDAL
Avocat(s) : SELARL DOXA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-03-27;10ma01687 ?
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