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26/06/2012 | FRANCE | N°10MA04141

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 26 juin 2012, 10MA04141


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 8 novembre 2010, sous le 10MA04141, complétée par un mémoire enregistré le 21 janvier 2011, présentée pour Mme Fella A, demeurant ..., par Me Goldmann, avocate ;

Mme Fella A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800885 du 2 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 26 novembre 2007 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la solidarité a autorisé l'Association po

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 8 novembre 2010, sous le 10MA04141, complétée par un mémoire enregistré le 21 janvier 2011, présentée pour Mme Fella A, demeurant ..., par Me Goldmann, avocate ;

Mme Fella A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800885 du 2 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 26 novembre 2007 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la solidarité a autorisé l'Association pour la réadaptation sociale à procéder à son licenciement pour motif économique ;

2°) d'annuler cette décision du 26 novembre 2007 et de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2012 :

- le rapport de Mlle Josset, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

- les observations de Me Daviau pour Mme A et de Me Gay substituant Me Giraud, pour l'Association pour la réadaptation sociale ;

Considérant que Mme A était employée par l'Association pour la réadaptation sociale (ARS) et exerçait ses fonctions d'agent administratif, pour la moitié de son temps de travail, au sein du service de prévention de nuit (SPN) ; qu'au cours de l'année 2007, l'association a décidé de procéder à la fermeture de ce service ; que, par lettre du 10 mai 2007, la direction de l'association a informé Mme A, membre du comité d'entreprise, de la modification de son contrat de travail par réduction de son temps de travail de moitié ; que Mme A ayant refusé cette réduction, l'association a saisi l'inspecteur du travail d'une demande tendant à autoriser le licenciement de l'intéressée pour motif économique ; que, par une décision en date du 1er août 2007, l'inspecteur du travail a opposé un refus à la demande ; que, par décision du 26 novembre 2007, le ministre du travail, de l'emploi et de la solidarité, saisi par l'association précitée d'un recours hiérarchique, a annulé la décision de l'inspecteur du travail et a autorisé le licenciement de Mme A ; que cette dernière fait appel du jugement en date du 2 novembre 2010, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté son recours contre cette décision ministérielle ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 436-1 du code du travail alors en vigueur : " Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un membre titulaire ou suppléant du comité d'entreprise qui ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement(...) " ; qu'en vertu des dispositions précitées du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions qu'il exerce normalement ni avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte, notamment, des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise, y compris lorsque l'entreprise fait l'objet d'une procédure de redressement ou en cas de liquidation judiciaire compte tenu des perspectives de reprise ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

En ce qui concerne la réalité du motif économique et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 321-1 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. " ;

Considérant que l'association, spécialisée dans la prévention et la protection des mineurs et des jeunes délinquants, gère plusieurs établissements, foyers et dispositifs et a en particulier pour mission de permettre aux mineurs et jeunes majeurs de sortir de la prostitution, de la drogue et de leur marginalité ; que le Service de Protection de Nuit, créé à titre expérimental en 1997, a pour mission la prévention de la délinquance et la protection des mineurs et des jeunes majeurs, la prévention des exclusions et des problématiques associés (rupture familiale, délinquance, prostitution des mineurs et jeunes majeurs, toxicomanies) ; que ce service doit être regardé, eu égard à ses missions qui s'inscrivent également dans la prévention et la protection des mineurs et des jeunes délinquants, comme un service de l'ARS et non comme présentant à lui seul les caractéristiques d'un secteur d'activité, alors même que selon les dispositions de l'article R. 314-10 du code de la santé et de la famille, les financements de ce service doivent être individualisés ; que, par suite, les difficultés économiques doivent s'apprécier au niveau de l'ensemble de l'association ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'analyse annuelle des comptes au 31 décembre 2006 élaborée par la société d'expertise comptable Secafi Alpha, que l'ARS dispose d'une structure de bilan saine faisant apparaître des marges de manoeuvre d'investissements importantes avec un niveau de trésorerie lui aussi important, correspondant à une année de produits, que l'endettement est limité et que les résultats du SPN n'ont qu'un faible impact sur les résultats d'ensemble de l'association ; que, dans ces conditions, l'association ARS ne démontre pas la réalité du motif économique invoqué ; qu'en conséquence c'est à tort que le ministre chargé du travail a autorisé le licenciement pour motif économique de Mme A ; qu'il y a donc lieu d'annuler le jugement attaqué et l'autorisation ministérielle en litige ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A est fondée à demander l'annulation du jugement susvisé et de la décision du 26 novembre 2007 du ministre du travail, de l'emploi et de la solidarité annulant la décision du 1er août 2007 de l'inspecteur du travail et autorisant son licenciement pour motif économique ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l'ARS demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er: Le jugement susvisé du 2 novembre 2010 du tribunal administratif de Marseille et la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la solidarité du 26 novembre 2007 sont annulés.

Article 2 : L'association ARS versera à Mme A une somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Fella A, à l'Association pour la réadaptation sociale et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

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N° 10MA04141 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA04141
Date de la décision : 26/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés non protégés - Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Melle Muriel JOSSET
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CABINET GRUMBACH ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-06-26;10ma04141 ?
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