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10/07/2012 | FRANCE | N°10MA02587

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 10 juillet 2012, 10MA02587


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 8 juillet 2010, sous le n° 10MA02587, présentée pour l'ASSOCIATION COMMUNAUTE COSTE, représentée par son président en exercice, dont le siège social est sis 14 rue des Chassaintes à Nîmes (30900), par la SELAS d'avocats Barthélémy et associés ;

L'ASSOCIATION COMMUNAUTE COSTE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902104 du 6 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision en date du 9

décembre 2008 par laquelle l'inspecteur du travail de la 1ère section du Gard a...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 8 juillet 2010, sous le n° 10MA02587, présentée pour l'ASSOCIATION COMMUNAUTE COSTE, représentée par son président en exercice, dont le siège social est sis 14 rue des Chassaintes à Nîmes (30900), par la SELAS d'avocats Barthélémy et associés ;

L'ASSOCIATION COMMUNAUTE COSTE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902104 du 6 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision en date du 9 décembre 2008 par laquelle l'inspecteur du travail de la 1ère section du Gard a refusé d'autoriser le licenciement de M. Pierre , salarié protégé, et, d'autre part de la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville en date du 9 juin 2009 confirmant la décision de refus de l'inspecteur du travail ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 juin 2012 :

- le rapport de Mme Buccafurri, président assesseur,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Guillemin, pour M. ;

Considérant que l'ASSOCIATION COMMUNAUTE COSTE, qui gère une maison d'enfants à caractère social (MCES), accueillant des adolescents placés sous mandat judiciaire ou social, a organisé un voyage éducatif en Roumanie du 4 au 30 juillet 2008 de huit de ces jeunes accompagnés d'une bénévole et de trois éducateurs spécialisés, dont M. , recruté le 15 février 1991 en cette qualité par ladite association et ancien membre du comité d'entreprise dont le renouvellement était fixé au 11 décembre 2008 ; que l'ASSOCIATION COMMUNAUTE COSTE, ayant, à l'issue d'une enquête interne, eu connaissance de dysfonctionnements qui se seraient produits dans le déroulement de ce voyage, a, par un courrier du 14 octobre 2008, saisi l'inspection du travail du Gard d'une demande d'autorisation de licenciement de M. pour faute, les deux autres éducateurs ayant participé au voyage en cause faisant eux-mêmes l'objet d'une procédure de licenciement qu'ils ont contestée ultérieurement devant le conseil des prud'hommes ; que, par une décision en date du 9 décembre 2008, l'inspectrice du travail de la 1ère section du Gard a refusé l'autorisation de licencier M. ; qu'à la suite du recours hiérarchique formé à l'encontre de cette décision, par un courrier du 3 février 2009, reçu le 6 février suivant, par l'ASSOCIATION COMMUNAUTE COSTE, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville a confirmé la décision de refus de l'inspectrice du travail, par une décision du 9 juin 2009 ; que l'ASSOCIATION COMMUNAUTE COSTE relève appel du jugement n° 0902104 du 6 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de refus de l'inspectrice du travail du 9 décembre 2008 et de la décision ministérielle du 9 juin 2009 la confirmant ;

Sur la légalité des décisions contestées :

Sans qu'il besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué et les autres moyens de la requête ;

Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

Considérant, d'autre part, que le caractère contradictoire de l'enquête menée conformément aux dispositions de l'article R. 2421-11 du code du travail, applicable aux licenciements des membres d'un comité d'entreprise, impose à l'inspecteur du travail, saisi d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé fondée sur un motif disciplinaire, de mettre à même l'employeur et le salarié de prendre connaissance de l'ensemble des éléments déterminants qu'il a pu recueillir, y compris des témoignages, et qui sont de nature à établir ou non la matérialité des faits allégués à l'appui de la demande d'autorisation ; que toutefois, lorsque la communication de ces éléments serait de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui les ont communiqués, l'inspecteur du travail doit se limiter à informer le salarié protégé et l'employeur, de façon suffisamment circonstanciée, de leur teneur ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, qu'au cours de l'enquête effectuée par l'inspectrice du travail, cette dernière a recueilli des témoignages de trois des adolescents ayant participé au voyage litigieux par lesquels ceux-ci revenaient en partie sur certaines de leurs déclarations effectuées antérieurement ; qu'il ressort également des pièces du dossier, et notamment de l'examen de la décision de refus de l'inspectrice du travail, que ces témoignages ont été pris en compte par l'inspectrice du travail en particulier pour estimer que la réalité des trois premiers griefs reprochés à M. n'était pas établie ; qu'ainsi, , contrairement à ce que faisait valoir le ministre devant le Tribunal administratif, les témoignages ont été déterminants dans la prise de décision de l'inspectrice du travail, confirmée par la décision ministérielle qui fait également état de ces témoignages ; qu'il n'est pas démontré par l'administration que l'employeur ait été mis à même d'en prendre connaissance et qu'il en ait eu communication ; que, si M. soutient que ces documents faisaient partie du rapport de l'enquête de l'inspectrice du travail qui a d'ailleurs prolongé l'enquête à la suite de ces témoignages, cette circonstance n'est pas de nature à établir que l'employeur a pu avoir effectivement communication desdits documents ; qu'il n'est pas davantage démontré ni même allégué que la communication des témoignages en question à l'employeur aurait été de nature à porter gravement préjudice à leurs auteurs justifiant que l'inspectrice du travail n'informe l'employeur de façon circonstanciée que de leur teneur ; qu'en tout état de cause, il n'est pas établi par l'administration qu'une telle information aurait été donnée à l'employeur ; que, dans ces conditions, l'enquête n'a pas été menée contradictoirement, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 2421-11 du code du travail ; que ce vice de procédure substantielle est de nature à entraîner l'annulation des décisions de refus d'autorisation de licenciement contestées de l'inspectrice du travail et du ministre, lesquelles ne sont pas fondées sur le motif tiré de ce que la procédure de licenciement était en lien avec le mandat détenu par M. et alors que, ni en première instance ni en appel, le ministre n'a sollicité du juge une substitution de motifs ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ASSOCIATION COMMUNAUTE COSTE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 6 mai 2010, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail du 9 décembre 2008 refusant l'autorisation de licenciement de M. et de la décision ministérielle du 9 juin 2009 la confirmant ; qu'elle est, dès lors, fondée à demander l'annulation desdits jugement et décisions ;

Sur les conclusions reconventionnelles présentées par M. Liégois :

Considérant, en premier lieu, que M. n'est pas recevable, dans le cadre du présent litige qui est un litige d'excès de pouvoir, à présenter des conclusions reconventionnelles à fin de condamnation de l'association appelante à lui verser une somme pour propos vexatoires et procédure abusive ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. demande également à la Cour de condamner l'association appelante à lui verser la somme de 1 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens qui avait été mise à sa charge par le jugement attaqué ; que, compte tenu de l'annulation dudit jugement prononcée par le présent arrêt, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'ASSOCIATION COMMUNAUTE COSTE, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés par l'ASSOCIATION COMMUNAUTE COSTE et non compris dans les dépens ;

DÉ C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0902104 du 6 mai 2010 du Tribunal administratif de Nîmes est annulé.

Article 2 : La décision du 9 décembre 2008 de l'inspecteur du travail de la 1ère section du Gard refusant d'autoriser le licenciement de M. Pierre et la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville en date du 9 juin 2009 confirmant la décision de refus de l'inspecteur du travail sont annulées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION COMMUNAUTE COSTE, à M. Pierre et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

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N° 10MA02587 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA02587
Date de la décision : 10/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-03-02-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Modalités de délivrance ou de refus de l'autorisation. Modalités d'instruction de la demande. Enquête contradictoire.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Mme Isabelle BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELAS JACQUES BARTHELEMY et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-07-10;10ma02587 ?
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