La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/11/2012 | FRANCE | N°10MA02488

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 06 novembre 2012, 10MA02488


Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 2010, présentée pour M. Pierre Dominique B, demeurant ..., par Me Don Simoni ;

M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800944 du 15 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la décharge de la somme de 12 509 euros réclamée par le titre de recettes n° 817 en date du 27 juin 2008 émis par la régie du port de plaisance Charles Ornano de la commune d'Ajaccio comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

2°) d'annuler ledit titre de rec

ettes ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Ajaccio et de la régie du port de...

Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 2010, présentée pour M. Pierre Dominique B, demeurant ..., par Me Don Simoni ;

M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800944 du 15 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la décharge de la somme de 12 509 euros réclamée par le titre de recettes n° 817 en date du 27 juin 2008 émis par la régie du port de plaisance Charles Ornano de la commune d'Ajaccio comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

2°) d'annuler ledit titre de recettes ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Ajaccio et de la régie du port de plaisance Charles Ornano une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens, dont les frais du constat d'huissier du 22 août 2008 ;

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu le code des ports maritimes ;

Vu le code des douanes ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2012 :

- le rapport de Mme Jorda-Lecroq, premier conseiller,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Don Simoni, représentant M. B et de Me Bras, représentant la commune d'Ajaccio ;

1. Considérant que M. B relève appel du jugement du 15 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la décharge de la somme de 12 509 euros mise à sa charge par le titre de recettes n° 817 en date du 27 juin 2008 émis par la commune d'Ajaccio (régie du port de plaisance Charles Ornano) comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que, d'une part, en vertu de l'article L. 211-1 du code des ports maritimes, un droit de port peut être perçu dans les ports maritimes à raison des opérations commerciales ou des séjours des navires qui y sont effectués ; que, selon l'article R. 211-1 dudit code, le droit de port dû à raison des séjours des navires effectués dans le port comprend, pour les navires de plaisance ou de sport, une redevance d'équipement des ports de plaisance ; que l'article R. 214-1 de ce code précise que : " à l'occasion de leur séjour dans un port maritime, les navires de plaisance ou de sport peuvent être soumis à une redevance dite d'équipement des ports de plaisance dont les taux sont variables selon les ports. Cette redevance est à la charge du propriétaire du navire. " ; qu'en vertu de l'article L. 211-4 du même code, " (...) les droits, taxes et redevances institués par le présent titre sont perçus comme en matière de douane ; les infractions sont constatées et punies, les poursuites sont effectuées et les instances sont instruites et jugées comme en matière de douane " ; que, d'autre part, aux termes de l'article 285 du code des douanes : " (...) 4. Les taxes et redevances composant le droit de port sont perçues comme en matière de douane ; les infractions sont constatées et punies, les poursuites sont effectuées et les instances sont instruites et jugées comme en matière de douane. (...) " ; qu'aux termes de l'article 357 bis du même code : " Les tribunaux d'instance connaissent des contestations concernant le paiement, la garantie ou le remboursement des créances de toute nature recouvrées par l'administration des douanes et des autres affaires de douane n'entrant pas dans la compétence des juridictions répressives. " ;

3. Considérant que, s'il résulte de la combinaison des dispositions précitées qu'il appartient aux tribunaux de l'ordre judiciaire de se prononcer sur les litiges relatifs à la perception des redevances d'équipement des ports de plaisance, les litiges relatifs à la contestation des états exécutoires visant à assurer le recouvrement de créances de nature administrative, telles que celles relatives aux redevances d'occupation du domaine public, sont portées devant la juridiction administrative ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'entre le 14 juin 2005 et le 27 mars 2008, le navire dont M. B est propriétaire et pour lequel il bénéficiait jusqu'alors d'un poste d'amarrage dans le port de plaisance Charles Ornano a été stationné dans la zone publique de carénage de ce port afin de faire procéder, par une société privée, à des travaux d'entretien et de réparation de ce navire ; que la redevance mise à la charge de M. B par la commune d'Ajaccio (régie du port de plaisance Charles Ornano) par le titre de recettes litigieux l'a été à raison du seul stationnement du navire dans la zone publique de carénage du port de plaisance de la commune d'Ajaccio entre le 14 juin 2005 et le 27 mars 2008 ; qu'elle constitue ainsi une redevance d'occupation du domaine public et non pas une redevance pour service rendu telle que constitue la redevance d'équipement des ports de plaisance, laquelle est perçue comme en matière de douane ; que, dès lors, le présent litige, qui porte sur la contestation d'un titre de recettes relatif à la perception d'une redevance d'occupation du domaine public, relève de la compétence de la juridiction administrative ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de M. B comme portée devant une juridiction compétente pour en connaître ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B devant le tribunal administratif de Bastia ;

Sur le titre de recettes :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande présentée par M. B devant le tribunal administratif de Bastia ;

6. Considérant qu'un état exécutoire doit indiquer les bases de liquidation de la dette, alors même qu'il est émis par une personne publique autre que l'Etat, pour lequel cette obligation est expressément prévue par l'article 81 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ; qu'en application de ce principe, la commune d'Ajaccio (régie du port de plaisance Charles Ornano) ne pouvait mettre en recouvrement la somme réclamée à M. B sans indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour mettre la somme en cause à la charge de ce débiteur ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le titre de recettes du 27 juin 2008 présente seulement les mentions " carénage juillet 2005 à mars 2008 bateau Morgan AJ 574 705 ", " HT 10 459,03 " et " TVA 2 049, 97 " ; que la commune d'Ajaccio n'établit pas avoir, contrairement à ce qu'elle soutient, porté à la connaissance de M. B, antérieurement à l'émission de ce titre, les bases de liquidation de la somme de 12 509 euros réclamée ; que, dès lors, M. B est fondé à soutenir que le titre de recettes litigieux est insuffisamment motivé et à demander, pour ce motif, la décharge de l'obligation de payer la somme de 12 509 euros mise à sa charge par ledit titre ;

Sur les dépens :

8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts ainsi que les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat (...) " ; qu'ainsi, les frais résultant pour l'une des parties de la production d'un constat d'huissier ne sont pas compris dans les dépens ; que par suite, la demande de M. B tendant au remboursement au titre des dépens des frais relatifs à l'établissement d'un constat d'huissier le 22 août 2008 ne peut qu'être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

10. Considérant que, d'une part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Ajaccio (régie du port de plaisance Charles Ornano) une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la commune d'Ajaccio (régie du port de plaisance Charles Ornano) au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0800944 du 15 avril 2010 du tribunal administratif de Bastia est annulé.

Article 2 : M. B est déchargé de l'obligation de payer la somme de 12 509 euros réclamée par le titre de recettes n° 817 en date du 27 juin 2008 émis par la commune d'Ajaccio (régie du port de plaisance Charles Ornano).

Article 3 : La commune d'Ajaccio (régie du port de plaisance Charles Ornano) versera à M. B une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la commune d'Ajaccio (régie du port de plaisance Charles Ornano) tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Pierre Dominique B et à la commune d'Ajaccio (régie du port de plaisance Charles Ornano).

''

''

''

''

N° 10MA02488 2

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA02488
Date de la décision : 06/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Compétence - Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction - Compétence déterminée par un critère jurisprudentiel - Domaine - Domaine public - Occupation.

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Recouvrement - Procédure - État exécutoire.

Ports - Régime douanier des ports - Autres droits et redevances perçus dans les ports.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : DON SIMONI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-11-06;10ma02488 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award