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26/09/2014 | FRANCE | N°12MA01362

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 26 septembre 2014, 12MA01362


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 6 avril 2012 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et régularisée par courrier le 10 avril 2012, sous le n° 12MA01362, présentée par le préfet des Alpes-Maritimes ;

Le préfet des Alpes-Maritimes demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104856 du 8 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé sa décision du 23 novembre 2011 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A...C...en assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30

jours, lui a enjoint de délivrer à M. C...un titre de séjour portant la mention ...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 6 avril 2012 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et régularisée par courrier le 10 avril 2012, sous le n° 12MA01362, présentée par le préfet des Alpes-Maritimes ;

Le préfet des Alpes-Maritimes demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104856 du 8 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé sa décision du 23 novembre 2011 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A...C...en assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours, lui a enjoint de délivrer à M. C...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, et a mis à la charge de l'Etat la somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de confirmer la légalité de ces décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 septembre 2014, le rapport de Mme Ciréfice, premier conseiller ;

1. Considérant que, par jugement en date du 8 mars 2012, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 23 novembre 2011 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de délivrer un titre de séjour et a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours à M. A...C..., de nationalité tunisienne, en raison de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne et de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet des Alpes-Maritimes relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier de l'extrait d'acte de naissance de M. A...C...et de l'extrait d'acte de mariage de M. A...B...qui mentionnent une filiation, une date et un lieu de naissance strictement identiques, que M. A... B... et M. A... C...sont en l'espèce une seule et même personne ; qu'il s'ensuit que les pièces établies au nom de M. A...B...doivent être regardées comme revêtant la même force probante que celles établies au nom de M. A...C... ;

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l 'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République." ; et qu'aux termes de l'article R. 313-21 du même code : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. " ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 12 de la loi du 15 novembre 1999 : " La conclusion d'un pacte civil de solidarité constitue l'un des éléments d'appréciation des liens personnels en France, au sens du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, pour l'obtention d'un titre de séjour " ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les débats parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 15 novembre 1999, que si la conclusion d'un pacte civil de solidarité par un étranger soit avec un Français soit avec un étranger en situation régulière, n'emporte pas, à elle seule, délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire, la conclusion d'un tel pacte constitue toutefois un élément de la situation personnelle de l'intéressé, dont l'autorité administrative doit tenir compte pour apprécier si un refus de délivrance de carte de séjour n'entraînerait pas une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

5. Considérant que M. C...fait valoir être entré en France le 12 septembre 2000 et y résider de façon continue depuis cette date ; que, suite à son mariage avec une ressortissante française en décembre 2002, il a obtenu un titre de séjour valable du 30 décembre 2002 au 29 décembre 2003, à l'expiration duquel il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français ; que, par jugement en date du 25 octobre 2005, le tribunal de grande instance d'Albi a prononcé le divorce de l'intéressé ; qu'il a conclu le 28 avril 2011 un pacte civil de solidarité avec une autre ressortissante française avec laquelle il soutient vivre maritalement depuis août 2008 ; que si à la date de l'arrêté litigieux, le pacte civil de solidarité n'avait qu'une durée de sept mois, il ressort des pièces du dossier, notamment du contrat de bail conclu en novembre 2009 corroboré par de nombreuses quittances de loyer, tous établis aux noms de M. C... et de sa compagne, du contrat d'assurance habitation souscrit par sa partenaire désignant M. C...et elle-même comme bénéficiaires ainsi que des factures de fourniture d'électricité, que l'intéressé justifie d'une communauté de vie avec cette ressortissante française depuis au moins deux ans ; que, par ailleurs, les pièces produites par M. C...consistant notamment en des relevés de compte bancaire, des factures de fourniture d'électricité et des bulletins de salaire démontrent sa présence habituelle sur le territoire français depuis l'expiration de son titre de séjour en décembre 2003 ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, M. C...doit être regardé comme ayant le centre de ses intérêts privés et personnels en France ; que, par suite, et ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, le préfet des Alpes-Maritimes n'est pas fondé à soutenir qu'en prenant son arrêté, il n'aurait pas porté au droit de M. C...au respect de sa vie privée et familiale, protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que par les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet des Alpes-Maritimes n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé son arrêté en date du 23 novembre 2011, lui a enjoint de délivrer à M. C...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, et a mis à la charge de l'Etat la somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1 : La requête du préfet des Alpes-Maritimes est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. C...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M.C....

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

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N° 12MA01362


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA01362
Date de la décision : 26/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Virginie CIREFICE
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : CHOUKROUN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-09-26;12ma01362 ?
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