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20/11/2014 | FRANCE | N°13MA02230

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 20 novembre 2014, 13MA02230


Vu la requête, enregistrée le 10 juin 2013, présentée pour M. A... C...B..., élisant domicile..., par Me Gonand ;

M. C... B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202178 du 9 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 janvier 2012 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé son admission au séjour et l'a invité à quitter le territoire français à l'expiration de son contrat d'introduction de travailleur saisonnier, visé par les services du ministre chargé du tr

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2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhô...

Vu la requête, enregistrée le 10 juin 2013, présentée pour M. A... C...B..., élisant domicile..., par Me Gonand ;

M. C... B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202178 du 9 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 janvier 2012 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé son admission au séjour et l'a invité à quitter le territoire français à l'expiration de son contrat d'introduction de travailleur saisonnier, visé par les services du ministre chargé du travail ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de trois semaines à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, sur le fondement des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 1 500 euros, à verser à Me Gonand, qui s'engage dans ce cas à renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2014:

- le rapport de M. Haïli, premier conseiller ;

- et les observations de Me Gonand, avocat de M. C...B... ;

1. Considérant que, par arrêté du 10 janvier 2012, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande d'admission au séjour que lui avait présentée le 17 octobre 2011 M. C... B..., ressortissant marocain, sur le fondement de l'article L. 313-11 7° et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et l'a invité à quitter le territoire français à l'expiration de son contrat d'introduction de travailleur saisonnier, visé par les services du ministre chargé du travail ; que M. C...B...interjette appel du jugement en date du 9 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant que l'article L. 111-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable à la date de l'arrêté attaqué, dispose que les dispositions de ce code s'appliquent " sous réserve des conventions internationales " ; que l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 stipule que " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord " ; que l'article 3 du même accord prévoit que " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

3. Considérant que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire français, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord ; que, toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation en faveur d'un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié ; qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14, il appartient à l'autorité administrative de vérifier si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'un titre portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels ;

4. Considérant par ailleurs qu'il résulte des dispositions de l'article R. 341-7-2 du code du travail, dans sa version issue du décret n° 84-169 du 8 mars 1984, expressément abrogé par le décret n° 2007-801 du 11 mai 2007, de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, depuis sa version issue de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006, et de l'article R. 5221-23 du code du travail, que la durée pendant laquelle un étranger peut occuper un ou plusieurs emplois saisonniers ne peut excéder six mois sur douze mois consécutifs ;

5. Considérant que l'arrêté attaqué, qui ne vise pas l'accord franco-marocain, pris à tort sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en tant que celui-ci concerne la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", relève que M. C...B...est entré en France le 19 avril 2011 sous couvert d'un visa D portant la mention " travailleur saisonnier ", valable du 18 avril au 17 juillet 2011, et que l'intéressé a été titulaire de contrats saisonniers depuis 2001 ; que cet arrêté est motivé par la circonstance que M. B..." ne peut arguer du caractère systématique des prolongations de ses contrats au-delà de la période de six mois fixée par l'ancien article R. 342-7-2 du code du travail ", " n'est pas titulaire d'un contrat de travail visé conformément à l'article L. 5221-2 du code du travail " et " M. C...B...A..., qui se prévaut d'une promesse d'embauche comme ouvrier agricole sous réserve de régularisation, ne peut justifier de motifs exceptionnels ou humanitaires pour être admis au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " ; que cet arrêté trouve un fondement légal dans l'exercice par le préfet du pouvoir de régularisation discrétionnaire dont il dispose pour délivrer un titre portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 313-14 ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...B..., âgé de quarante-six ans à la date de l'arrêté attaqué, a été employé en qualité de travailleur saisonnier sur une exploitation agricole de 2001 à 2011 sous couvert de contrats conclus dans le cadre des dispositions applicables du code du travail, notamment de ses articles L. 122-1 et R. 341-7-2, contrats qui, de 2003 à 2006, ont fait l'objet de prolongations chaque année, soit à quatre reprises, au-delà d'une durée de six mois ; qu'il a été titulaire d'une carte de séjour portant la mention " travailleur saisonnier " valable du 18 avril 2008 au 17 avril 2011 ; qu'à la date de l'arrêté attaqué, ce titre avait été renouvelé pour la période du 19 avril 2011 au 18 avril 2014 ; qu'il n'est pas contesté que le requérant est retourné à l'issue de chaque contrat au Maroc où résident, selon le préfet des Bouches-du-Rhône, son épouse et ses quatre enfants, nés entre 1988 et 2001, et l'ensemble de ses attaches familiales, à l'exception de son père, titulaire d'une carte de résident ; qu'ainsi, eu égard à l'ensemble de ces circonstances, alors même que M. C... B... a travaillé en France, dans le cadre d'un processus d'immigration de travail contrôlé par les pouvoirs publics sans pour autant que soient respectées pendant quatre ans les conditions légales et réglementaires en vigueur, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il ne pouvait se prévaloir ni de motifs exceptionnels ni de considérations humanitaires pour être admis au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant par ailleurs qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République." ; qu'aux termes de l'article R. 313-21 du même code : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. " ; que l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale " ;

8. Considérant que si M. C...B...fait valoir qu'il a désormais le centre de ses intérêts personnels et économiques en France, il n'établit pas avoir tissé des liens personnels en France, alors qu'il n'est pas contesté qu'il a rejoint à l'issue de chacun de ses contrats son pays d'origine où il n'est pas dépourvu d'attaches privées et familiales ; qu'ainsi, alors même que réside en France son père, il ne ressort pas des pièces du dossier que le centre de ses intérêts personnels et familiaux, lesquels s'apprécient dans leur globalité et concrètement, se situe en France ; que, dans ses conditions, l'arrêté attaqué n'a pas porté une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris, et n'a, par suite, pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter également ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte, ainsi que les conclusions de son avocat tendant au bénéfice des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C...B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...B..., à Me Gonand et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches du Rhône.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA02230
Date de la décision : 20/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : GONAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-11-20;13ma02230 ?
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