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07/04/2015 | FRANCE | N°14MA01181

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 07 avril 2015, 14MA01181


Vu la requête, enregistrée le 18 mars 2014, présentée pour Mme C...B..., demeurant..., par la SCP Gouiry Mary Calvet Benet ;

Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200200 du 21 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 25 novembre 2011 ayant refusé à la SA Seac Guiraud Frères l'autorisation de la licencier et a enjoint au ministre de prendre une nouvelle décision dans un délai de deux mois à compter de la noti

fication du jugement ;

2°) de confirmer la décision du ministre ;

3°) de...

Vu la requête, enregistrée le 18 mars 2014, présentée pour Mme C...B..., demeurant..., par la SCP Gouiry Mary Calvet Benet ;

Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200200 du 21 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 25 novembre 2011 ayant refusé à la SA Seac Guiraud Frères l'autorisation de la licencier et a enjoint au ministre de prendre une nouvelle décision dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de confirmer la décision du ministre ;

3°) de mettre à la charge de la SA Seac Guiraud Frères la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mars 2015 :

- le rapport de M.A...'hôte, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

1. Considérant que, par un courrier en date du 22 mars 2011, la SA Seac Guiraud Frères a demandé l'autorisation de licencier Mme B..., employée administratif au sein de l'établissement de Montredon-des-Corbières et par ailleurs représentante du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'établissement et conseiller du salarié ; que l'inspecteur du travail de l'Aude lui a opposé un refus le 16 mai 2011 et, saisi sur recours hiérarchique, le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a confirmé cette décision le 25 novembre 2011 ; que Mme B... défère à la Cour le jugement du 21 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a, à la demande de la SA Seac Guiraud Frères, annulé la décision du ministre du 25 novembre 2011 et enjoint à ce dernier de prendre une nouvelle décision dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'en matière d'autorisation de licenciement des salariés protégés, les décisions prises sur recours hiérarchique par le ministre ne se substituent pas aux décisions de l'inspecteur du travail, dès lors que ce recours ne présente pas un caractère obligatoire ; que, par suite, la demande, présentée par la SA Seac Guiraud Frères devant le tribunal contre la décision confirmative du ministre du 25 novembre 2011 devait être regardée comme tendant aussi à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail du 16 mai 2011 ayant refusé d'autoriser le licenciement de Mme B... ; qu'en omettant de statuer également sur la légalité de cette dernière décision, les premiers juges ont méconnu leur office et, par suite, ont entaché d'irrégularité leur jugement ; que, dès lors, celui-ci doit être annulé dans cette mesure ;

3. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour de se prononcer par la voie de l'évocation sur les conclusions de la SA Seac Guiraud Frères tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail du 16 mai 2011 et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du ministre du 25 novembre 2011 ;

Sur la légalité des décisions attaquées :

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par deux courriers en date des 19 novembre et 11 décembre 2009, la SA Seac Guiraud Frères a proposé à Mme B... un changement de poste de travail ; que, le 28 décembre 2009, Mme B... a porté plainte devant le procureur de la République pour discrimination en raison de ses origines et de ses convictions religieuses ; qu'après enquête, la plainte a été classée sans suite le 8 octobre 2010, au motif que l'infraction ne paraissait pas suffisamment constituée ou caractérisée ; que, le 22 mars 2011, la SA Seac Guiraud Frères a demandé l'autorisation de licencier Mme B... arguant de l'attitude négative et de la volonté délibérée de l'intéressée de s'opposer au directeur de l'usine de Montredon-des-Corbières ayant créé un trouble objectif au sein de l'établissement et rendant impossible la poursuite de la relation de travail ; que, pour rejeter cette demande, l'inspecteur du travail a estimé que la société ne rapportait pas la preuve du trouble créé au sein de l'entreprise par le comportement de la salariée ; que le ministre a confirmé cette décision mais en substituant au motif retenu celui tiré de ce que la bonne foi de la salariée lors de sa plainte ne pouvait être mise en cause et que les dispositions de l'article L. 1134-4 du code du travail imposaient en conséquence un refus ;

En ce qui concerne la décision du ministre :

5. Considérant, en premier lieu, que, pour annuler la décision du ministre, le tribunal a estimé que la demande d'autorisation de licenciement présentée par la SA Seac Guiraud Frères était motivée par le comportement fautif de Mme B... et que, dans la mesure où celle-ci avait agi avec une légèreté blâmable eu égard à l'absence de tout commencement de preuve à l'appui de ses allégations et aux répercussions sur la réputation de son employeur et du directeur de l'usine, le ministre ne pouvait refuser l'autorisation en se fondant sur la seule bonne foi de l'intéressée ;

6. Considérant que la requérante, qui ne conteste pas que la demande de licenciement était fondée sur un motif disciplinaire, fait grief aux premiers juges d'avoir estimé que son ressenti ne suffisait pas à caractériser sa bonne foi et d'avoir fondé leur analyse sur les énonciations d'un arrêt de la cour d'appel de Montpellier rendu postérieurement à la décision du ministre, ayant condamné l'intéressée pour dénonciation calomnieuse envers son supérieur hiérarchique ; que, si le tribunal a relevé que " les attendus de l'arrêt de la cour d'appel mentionnent d'ailleurs qu'à l'audience Mme B... s'est bornée à alléguer un "ressenti de discrimination" ", il n'a cependant pas mis en cause la bonne foi de Mme B... mais a estimé, comme il vient d'être dit, que le ministre ne pouvait se fonder sur ce seul motif pour refuser l'autorisation ; que les moyens sont dès lors inopérants ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que l'article L. 1132-1 du code de travail prohibe toute mesure discriminatoire à l'égard d'un salarié en raison, notamment, de son origine, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, ou de ses convictions religieuses ; que l'article L. 1134-4 du même code prévoit qu'est nul et de nul effet le licenciement d'un salarié faisant suite à une action en justice engagée par ce salarié ou en sa faveur, sur le fondement des dispositions précitées, lorsqu'il est établi que le licenciement n'a pas de cause réelle et sérieuse et constitue en réalité une mesure prise par l'employeur en raison de cette action en justice ;

8. Considérant que la demande d'autorisation présentée par la SA Seac Guiraud Frères ne faisait pas suite à une action en justice engagée par Mme B... mais à une simple plainte auprès du procureur de la République ; que, par suite, la requérante ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 1131-4 du code du travail ;

9. Considérant, en troisième lieu, que les moyens tirés de ce que les propositions de changement de poste qui ont été faites à Mme B... n'auraient pas respecté les dispositions de l'article L. 1222-6 du code du travail et de ce que le licenciement envisagé serait en lien avec l'appartenance syndicale de la salariée ne sont pas de nature à mettre en cause le bien-fondé du jugement qui a estimé que le motif de refus retenu par le ministre était entaché d'illégalité ; qu'ils ne peuvent dès lors qu'être écartés ;

En ce qui concerne la décision de l'inspecteur du travail :

10. Considérant que la SA Seac Guiraud Frères n'a soulevé en première instance pas plus qu'en appel de moyens dirigés contre la décision de l'inspecteur du travail du 16 mai 2011 ; que la demande de la SA Seac Guiraud Frères tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail du 16 mai 2011 doit dès lors être rejetée ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA Seac Guiraud Frères n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail du 16 mai 2011 et Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du ministre du 25 novembre 2011 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les demandes présentées par les parties au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 janvier 2014 est annulé en tant qu'il n'a pas statué sur les conclusions de la SA Seac Guiraud Frères tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail de l'Aude du 16 mai 2011 ayant refusé d'autoriser le licenciement de Mme B....

Article 2 : Les conclusions de la SA Seac Guiraud Frères tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail de l'Aude du 16 mai 2011 sont rejetées.

Article 3 : La requête d'appel de Mme B... est rejetée.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...et à la SA Seac Guiraud Frères.

Copie en sera adressée au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

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N° 14MA1181

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01181
Date de la décision : 07/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

06-07 Alsace-Moselle. Professions - Commerce - Industrie.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Vincent L'HÔTE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : GESICA NARBONNE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-04-07;14ma01181 ?
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