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18/05/2015 | FRANCE | N°13MA04754

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 18 mai 2015, 13MA04754


Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2013 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 13MA04754 présentée pour M. C...B...domicilié..., par MeA... ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302912 du 27 novembre 2013 du tribunal administratif de Nice rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de dest

ination ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 8 juillet 20...

Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2013 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 13MA04754 présentée pour M. C...B...domicilié..., par MeA... ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302912 du 27 novembre 2013 du tribunal administratif de Nice rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 8 juillet 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour provisoire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans le délai de trente jours à compter de la décision à intervenir, ou de réexaminer sa demande dans le même délai, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991;

Il soutient que :

- le tribunal administratif de Nice a omis de statuer sur le moyen tiré de ce qu'il remplit les conditions posées par l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les premiers juges ont commis une erreur dans l'appréciation de sa situation ;

- il remplit les conditions permettant son admission exceptionnelle au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant refus de séjour viole les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet des Alpes-Maritimes a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour ;

- son retour en République démocratique du Congo l'exposerait à des traitements inhumains et dégradants contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le courrier du 16 décembre 2014 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les informant de la date ou de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et précisant la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 22 janvier 2014 admettant M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 avril 2015 le rapport de Mme Héry, rapporteur ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant congolais né en 1969 et entré en France en 2004, a sollicité en dernier lieu auprès des services de la préfecture des Alpes-Maritimes le 11 février 2013 son admission exceptionnelle au séjour ; que par arrêté du 8 juillet 2013, le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que M. B...relève appel du jugement du tribunal administratif de Nice du 27 novembre 2013 ayant rejeté sa demande tendant à titre principal à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que M. B...a soulevé devant le tribunal administratif le moyen tiré de ce qu'il remplissait les conditions posées par l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les premiers juges ont omis de répondre à ce moyen ; que, par suite, M. B...est fondé à soutenir que le jugement susvisé est irrégulier et doit, pour ce motif, être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Nice ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que lui soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " et qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée:/ 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail./ Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative (...) l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2 (...) " ;

5. Considérant qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ;

6. Considérant par ailleurs qu'un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ne saurait être regardé, par principe, comme attestant de " motifs exceptionnels " exigés par la loi ; qu'il appartient en effet à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner notamment si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger, ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule de même que tout élément de sa situation personnelle dont il ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

7. Considérant, d'une part, que M. B...se prévaut de son entrée en France depuis 2004 sans toutefois l'établir, de son intégration et de son engagement au sein de l'association Emmaüs depuis 2007 ainsi que des risques encourus pour sa sécurité en cas de retour au Congo, du fait de la situation générale du pays ; qu'il ne justifie pas ainsi, de motifs exceptionnels de nature à justifier la délivrance d'une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " ;

8. Considérant, d'autre part, que M. B...se prévaut d'une promesse d'embauche, au demeurant non produite, en vue d'exercer un emploi de peintre ainsi que de son métier d'artiste peintre ; que, toutefois, en se bornant à soutenir qu'il possède des compétences artistiques, cette circonstance, à la supposer établie, ne suffit pas à caractériser un motif exceptionnel au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet des Alpes-Maritimes était fondé à rejeter la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par M.B... ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être exposé aux points 7 et 8 que le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que M. B...ne peut utilement invoquer la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 dès lors que les critères de régularisation y figurant ne présentent pas le caractère de lignes directrices susceptibles d'être invoquées mais constituent de simples orientations pour l'exercice, par le préfet, de son pouvoir de régularisation ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

12. Considérant que M. B...est, selon ses propres déclarations, entré en France en 2004 ; qu'il est célibataire et sans enfant et indique ne pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que son travail associatif auprès de l'association Emmaüs et l'exposition annuelle de ses peintures à la semaine de la solidarité ne sont pas suffisants, en eux-mêmes, pour établir son insertion professionnelle ; que la seule production d'attestations par l'association Emmaüs et par une connaissance ne permettent pas d'établir qu'il aurait construit sa vie privée et familiale sur le territoire français ; que, dès lors, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas porté au droit de M. B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté contesté ; que, par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions dirigées contre la décision de refus de séjour doivent être rejetées ; que le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination doivent être annulées par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de séjour doit, par suite, être écarté ;

14. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile présentée par M. B...a été rejetée en 2005 ; que M.B..., qui se borne à évoquer la situation politique générale au Congo, n'établit pas courir des risques personnels en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, la décision fixant le Congo comme pays de destination de la mesure d'éloignement n'est pas intervenue en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de M. B...à fin d'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 8 juillet 2013 doivent être rejetées ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions présentées à fin d'injonction et tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1302912 du 27 novembre 2013 du tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : La demande de M. B...et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B..., à Me A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 23 avril 2015, où siégeaient :

- M. Guerrive, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme Héry, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 18 mai 2015.

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N° 13MA04754

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA04754
Date de la décision : 18/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Florence HERY
Rapporteur public ?: Mme FELMY
Avocat(s) : MUNIR

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-05-18;13ma04754 ?
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