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13/07/2015 | FRANCE | N°13MA01251

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 13 juillet 2015, 13MA01251


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 13 décembre 2010 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'attribution de l'allocation de reconnaissance, instituée en faveur des rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilées, et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de lui octroyer le bénéfice de cette allocation.

Par un jugement n° 1101022 du 28 février 2013, le tribunal administrati

f de Marseille a rejeté la requête de M.B....

Procédure devant la cour :

Par une re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 13 décembre 2010 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'attribution de l'allocation de reconnaissance, instituée en faveur des rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilées, et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de lui octroyer le bénéfice de cette allocation.

Par un jugement n° 1101022 du 28 février 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de M.B....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 mars 2013, M. D... B..., représenté par Me C... demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 février 2013 ;

2°) d'annuler la décision du 13 décembre 2010, par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'attribution de l'allocation de reconnaissance, instituée en faveur des rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilées ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui octroyer le bénéfice de cette allocation ;

4°) de mettre à la charge de l'État (préfecture des Bouches-du-Rhône) la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- sa demande ne peut être rejetée au motif d'une acquisition tardive de nationalité française ;

- il est constant qu'il a servi au sein des groupes mobiles de sécurité entre le 15 janvier 1958 et le 8 juillet 1962 ;

- les premiers juges lui font grief de n'avoir quitté l'Algérie en mars 1964 alors qu'il ne saurait être rajouté à la loi, en ajoutant comme condition le délai écoulé entre la fin des événements d'Algérie et le départ effectif pour la France, pour reconnaître la qualité de rapatrié ;

- en tout état de cause, il est entré en France en 1964 accompagné d'autres membres des formations supplétives qui ont fait l'objet d'une mesure de rapatriement, la circonstance qu'il ne soit pas en mesure de fournir un certificat de rapatriement n'étant pas en elle-même déterminante pour apprécier sa qualité de rapatrié ;

- le tribunal a estimé qu'il ne résidait pas de façon continue en France, alors qu'il établit résider habituellement à Martigues depuis 1964 ; cette résidence habituelle ne pouvant être écartée au motif qu'il a effectué régulièrement des allers-retours dans son pays d'origine où il était marié et où il a effectivement eu quatre enfants ;

Par un mémoire, enregistré le 19 décembre 2014, le ministre de la défense mis en cause indique à la cour que seule la mission interministérielle aux rapatriés qui dépend des services du premier ministre est compétente pour représenter l'État en défense dans ce litige.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 décembre 2014, la mission interministérielle aux rapatriés conclut au rejet de la requête.

La mission soutient que :

- la cour est invitée à se référer aux écritures de première instance du préfet des Bouches-du-Rhône ;

- l'allocation de reconnaissance s'adresse par définition aux rapatriés ; or M.B..., en application d'une jurisprudence constante, ne peut se prévaloir de la qualité de rapatrié alors qu'il n'a regagné la France qu'en 1964, au seul motif d'y travailler et qu'il est régulièrement revenu en Algérie où son épouse a résidé jusqu'en 1990 et où il a eu quatre enfants.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 juin 2013.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 61-1439 du 26 décembre 1961 relative à l'accueil et à la réinstallation des Français d'outre-mer ;

- la loi n° 87-549 du 16 juillet 1987 modifiée, relative au règlement de l'indemnisation des rapatriés ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- la loi n° 94-488 du 11 juin 1994, relative aux rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilées ou victimes de la captivité en Algérie ;

- la loi de finances rectificative n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 ;

- la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des français rapatriés ;

- le décret n° 2005-477 du 17 mai 2005 pris pour application des articles 6, 7 et 9 de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- et les conclusions de Mme Massé-Degois, rapporteure publique.

1. Considérant que M. B...relève appel du jugement rendu le 28 février 2013, par le tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône du 13 décembre 2010, lui refusant le bénéfice de l'allocation de reconnaissance telle que prévue par la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

2. Considérant que pour demander le bénéfice de l'allocation de reconnaissance prévue à l'article 6 de la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés, selon les conditions dérogatoires fixées par l'article 9 de la même loi, M. B...établit sans être contesté, avoir servi comme membre des forces supplétives de l'armée française en Algérie du 15 janvier 1958 au 8 juillet 1962, avant de gagner la France au mois de mars 1964 ;

3. Considérant en premier lieu, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que sa demande tendant au bénéfice de l'allocation susmentionnée a été rejetée en raison d'une acquisition tardive de la nationalité française, alors qu'il ne ressort ni des termes de la décision litigieuse du préfet des Bouches-du-Rhône, ni du jugement attaqué que sa demande ait été rejetée pour ce motif ; que, par ailleurs, ledit jugement, pour rejeter la demande de l'appelant ne s'est pas fondé sur l'absence de résidence continue de M. B...en France mais sur le seul fait que ce dernier ne justifiait pas de la qualité de rapatrié ;

4. Considérant en second lieu qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 26 décembre 1961 relative à l'accueil et à la réinstallation des français d'outre-mer : " Les Français, ayant dû ou estimé devoir quitter, par suite d'événements politiques, un territoire où ils étaient établis et qui était antérieurement placé sous la souveraineté, le protectorat ou la tutelle de la France, pourront bénéficier du concours de l'État en vertu de la solidarité nationale affirmée par le préambule de la Constitution de 1946, dans les conditions prévues par la présente loi. Ce concours se manifeste par un ensemble de mesures de nature à intégrer les Français rapatriés dans les structures économiques et sociales de la nation (...) ". L'article 9 de la loi du 23 février 2005 déjà mentionnée prévoit, quant à lui, que : " Par dérogation aux conditions fixées pour bénéficier de l'allocation de reconnaissance et des aides spécifiques au logement mentionnées aux articles 6 et 7, le ministre chargé des rapatriés accorde le bénéfice de ces aides aux anciens harkis et membres des formations supplétives ayant servi en Algérie ou à leurs veuves, rapatriés, âgés de soixante ans et plus, qui peuvent justifier d'un domicile continu en France ou dans un autre État membre de la Communauté européenne depuis le 10 janvier 1973 (...) ".

5. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions législatives que, pour être en droit de bénéficier de l'allocation de reconnaissance selon les conditions fixées à l'article 9 cité ci-dessus, le demandeur d'une telle aide doit pouvoir justifier de sa qualité de rapatrié ; que cette qualité ne s'attache qu'aux personnes qui, établies sur des territoires anciennement placés sous la souveraineté, le protectorat ou la tutelle de la France, ont dû ou estimé devoir quitter ces territoires pour la France par suite d'événements politiques qui sont la conséquence directe de la cessation de souveraineté, du protectorat ou de la tutelle de la France sur l'un de ces territoires ; que, par ailleurs, les dispositions de cet article 9 n'ont ni pour objet, ni pour effet d'instituer, au bénéfice des anciens harkis et membres des formations supplétives ayant servi en Algérie, une présomption de ce que le départ éventuel des intéressés pour la France ou pour un autre État membre de la Communauté européenne aurait été motivé par des événements politiques directement causés par la cessation de la souveraineté de la France en Algérie ;

6. Considérant que pour rejeter les conclusions dont ils étaient saisis par M.B..., les premiers juges et contrairement à ce que soutient l'appelant n'ont pas ajouté à la loi en prenant en compte un critère du délai de départ de l'Algérie après l'indépendance mais ont, à bon droit, recherché si, dans les circonstances de l'espèce, M. B...pouvait justifier de sa qualité de rapatrié ; qu'il ressort des pièces du dossier comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges que, si M. B... a servi du 15 janvier 1958 au 8 juillet 1962 dans un groupe mobile de sécurité, il a quitté l'Algérie pour rejoindre la France en mars 1964, soit près de deux ans après l'accession à l'indépendance de ce pays ; que si l'appelant soutient qu'il n'a pu quitter plus tôt le territoire algérien en raison de son hospitalisation, celle-ci n'a duré que du 22 avril au

8 mai 1962 et qu'il a ensuite bénéficié d'un congé de maladie jusqu'au 8 juin de cette même année ; qu'ainsi les circonstances du départ en France de M.B..., qui par ailleurs après 1964 est régulièrement retourné en Algérie pour rejoindre son épouse ainsi que ses quatre enfants nés entre 1960 et 1980, ne peuvent être regardées comme ayant été dictées par les événements politiques qui sont la conséquence directe de la cessation de souveraineté de la France sur l'Algérie ; qu'ainsi et au seul motif que M. B...ne pouvait justifier de sa qualité de rapatrié au sens des dispositions de l'article 9 de la loi du 23 février 2005, le préfet des Bouches-du-Rhône pouvait sans commettre d'erreur de droit, lui refuser le bénéfice de l'allocation de reconnaissance prévue à l'article 6 de ladite loi ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ; que ces dispositions font obstacle à ce que l'État qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. B...la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et au Premier Ministre, mission interministérielle aux rapatriés.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Gonzales, président de chambre,

- Mme A... et M. E..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 13 juillet 2015.

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N° 13MA012515


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA01251
Date de la décision : 13/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

46-07 Outre-mer. Aides aux rapatriés d'outre-mer.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Patrice ANGENIOL
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : JULIEN SELLI et JOHANNA VINE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-07-13;13ma01251 ?
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