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24/09/2015 | FRANCE | N°13MA03787

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 24 septembre 2015, 13MA03787


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2005 ainsi que les pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1201586 du 15 juillet 2013, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 septembre 2013 et un mémoire enregistré le 31 juillet 2015, M.B..., représenté p

ar MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 15 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2005 ainsi que les pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1201586 du 15 juillet 2013, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 septembre 2013 et un mémoire enregistré le 31 juillet 2015, M.B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 15 juillet 2013 rejetant sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2005 ainsi que les pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- s'agissant de la procédure, l'administration a implicitement mis en oeuvre la procédure de l'abus de droit sans lui accorder les garanties idoines ;

- sur le fond, l'indemnité qui lui a été versée, s'analyse en des dommages et intérêts venant réparer un préjudice moral et pécuniaire, qui lui ont été alloués en raison du caractère abusif de son licenciement ;

- il a clairement manifesté son intention d'engager des poursuites à l'encontre de son ancien employeur en l'absence de protocole transactionnel ;

- la société SAS Cotrem a fait l'objet d'un contrôle de l'URSSAF et cet organisme n'a pas remis en cause le principe de l'accord transactionnel.

Par un mémoire enregistré le 23 avril 2015, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête et fait valoir que :

- l'administration a seulement donné son effet légal à l'acte qui lui a été soumis et a regardé l'indemnité transactionnelle effectué dans l'intérêt exclusif et personnel du salarié, comme procédant d'un acte anormal de gestion ;

- l'administration ne se place pas ainsi implicitement sur le terrain de l'abus de droit, à supposer même qu'elle puisse être regardée comme ayant implicitement fondé le redressement en litige sur le caractère fictif de la transaction ;

- le requérant n'ayant pas fait l'objet d'une rupture abusive de son contrat de travail, la SAS Cotrem n'était pas tenue légalement de lui verser une indemnité ;

- dans ces circonstances, les sommes versées à M. B..., à défaut d'être fondées sur la rupture de son contrat de travail, l'ont été au titre de libéralités.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli,

- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont la SAS Cotrem, au sein de laquelle M. B... exerçait antérieurement les fonctions de directeur général, a fait l'objet, le vérificateur a constaté que la SAS Cotrem et M. B... avaient conclu un protocole d'accord transactionnel suite au licenciement pour faute grave de ce dernier ; qu'afin " de mettre un terme à leur différend et de prévenir tout litige judiciaire " et en contrepartie de " l'octroi de dommages et intérêts ", la société acceptait le versement au profit de M. B... d'" une indemnité transactionnelle de 100 000 euros " ; que le service a estimé qu'en l'absence de risque judiciaire avéré, la SA Cotrem n'était pas fondée à comptabiliser en charge déductible une telle indemnité, qui présentait selon lui les caractéristiques d'une libéralité ; que sur le fondement des dispositions des articles 109, 111-c et 111-d du code général des impôts, ces rehaussements ont été regardés comme des revenus distribués, au titre de rémunérations, distributions ou avantages occultes, rémunérations non déductibles en vertu des dispositions du 1° du I de l'article 39 du code général des impôts dont le bénéficiaire désigné était M. B... ; que ces distributions ont été imposées à l'impôt sur le revenu de l'année 2005 établi au nom de ce dernier, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que le requérant interjette appel du jugement susvisé par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2005 ;

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital. / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. / Les sommes imposables sont déterminées pour chaque période retenue pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés par la comparaison des bilans de clôture de ladite période et de la période précédente selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat ", et qu'aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) " ;

3. Considérant que, dans la proposition de rectification en date du 18 décembre 2008, l'administration fiscale a relevé qu'au cours de l'exercice 2005, la société Cotrem avait passé en charge exceptionnelle au compte 678800 une indemnité transactionnelle versée pour le départ de M.B..., actionnaire principal et directeur général, d'un montant de 100 000 euros ; que la société a engagé le 19 août 2005 une procédure de licenciement pour faute grave contre ce dernier en convoquant l'intéressé à un entretien préalable ; que le requérant a fait l'objet d'une mesure de licenciement pour faute grave notifiée le 25 août 2005 en raison d'une absence d'activité et d'une utilisation abusive des moyens mis à sa disposition ; qu'à la suite de la menace de ce dernier de saisir le juge prud'homal, la société a décidé de conclure avec M. B... le 12 octobre 2005 un protocole d'accord transactionnel afin de mettre un terme au différend et de prévenir tout litige judiciaire ; que l'administration fiscale a estimé que faute de rupture abusive du contrat de travail, et en l'absence de condamnation au versement d'indemnité et d'instance judiciaire introduite contre elle, la société n'était pas tenue de verser des dommages et intérêts à son ancien dirigeant et qu'il n'existait pas de risque au cours de l'exercice justifiant la comptabilisation en charge déductible d'une telle indemnité qu'il a appréciée dès lors comme une libéralité ; que, par suite, cette indemnité a constitué pour l'administration la contrepartie de l'abandon fait par le directeur général de ses droits sociaux et, pour le surplus, une allocation bénévole versée à un ancien actionnaire qui ne pouvait figurer parmi les charges déductibles du résultat imposable de la société de l'exercice 2005 ; que l'administration fiscale a donc rehaussé ledit résultat d'un montant de 100 000 euros ; que par voie de conséquence, en vertu des articles 109-1-2°, 111-c et 111-d du code général des impôts, l'administration a regardé ces rehaussements comme des revenus distribués au titre de rémunérations, distributions ou avantages occultes, rémunérations non déductibles en vertu des dispositions du I de l'article 39 du code général des impôts dont le bénéficiaire désigné est M. B... ; qu'elle a par suite imposé ses distributions à l'impôt sur les revenus au titre de l'année 2005 entre les mains de ce dernier pour un montant de 100 000 euros ;

4. Considérant que M. B...fait valoir que l'indemnité transactionnelle est justifiée dès lors que le licenciement prononcé par la société Cotrem était abusif car fondé sur de nombreux arrêts maladies et que le risque pour l'entreprise était d'être attraite devant le juge des relations du travail impliquant une procédure longue et une indemnité majorée pour licenciement nul ; qu'il résulte de l'instruction que, par courriers en date du 18 et 29 août 2005 adressés à la société employeur, M. B...a contesté la procédure de licenciement au motif que le licenciement ne se fondait pas sur un motif réel et sérieux et que la société avait pris elle-même l'initiative de rompre le contrat de travail ; que la circonstance que, par les termes de l'accord transactionnel, M. B...ait admis que la rupture du contrat était régulière comme fondée sur une faute grave et était intervenue dans des circonstances normales est inopérante à l'effet de contester la matérialité de l'existence d'un différend, eu égard à l'objet d'un tel accord qui est destiné à y mettre fin et dont les stipulations comportent des concessions réciproques ; que, dans ces conditions, le requérant est fondé à soutenir que ladite somme de 100 000 euros lui a été allouée à titre de dommages et intérêts en contrepartie du renoncement à demander devant la juridiction prud'homale la réparation indemnitaire des préjudices moral et matériel subis du fait du licenciement ; que, par suite, ladite indemnité transactionnelle devant être admise parmi les charges déductibles de l'entreprise versante, l'administration fiscale n'était pas fondée, à la suite du rehaussement procédant de la non-déduction de cette charge, à taxer entre les mains de M. B... ladite somme regardée comme des revenus distribués au titre de rémunérations, distributions ou avantages occultes au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2005 ; que le requérant est, dès lors, fondé sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2005 ainsi que des pénalités correspondantes ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant que l'Etat étant partie perdante dans la présente instance, il y a lieu de mettre la somme de 2 000 euros à sa charge en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1201586 en date du 15 juillet 2013 du tribunal administratif de Nîmes est annulé.

Article 2 : M. B...est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2005 ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président de chambre,

- Mme Paix, président-assesseur,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 septembre 2015.

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N° 13MA03787


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA03787
Date de la décision : 24/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : DRANCOURT

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-09-24;13ma03787 ?
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