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03/05/2016 | FRANCE | N°14MA03209

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 03 mai 2016, 14MA03209


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 8 décembre 2010 par laquelle le recteur de l'académie de Nice a arrêté sa notation pédagogique pour les années scolaires 1993/1994, 1994/1995, 1995/1996, 1996/1997, 1997/1998, 1998/1999, 1999/2000, 2000/2001 et 2001/2002 à la note de 32/60, ainsi que la décision du 12 mai 2003 arrêtant sa notation pédagogique pour l'année scolaire 2002/2003, d'enjoindre aux inspecteurs d'académie " IPS-EPS " de fonder leurs notations " sur

l'ensemble des éléments d'information dont ils disposent : chefs d'établiss...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 8 décembre 2010 par laquelle le recteur de l'académie de Nice a arrêté sa notation pédagogique pour les années scolaires 1993/1994, 1994/1995, 1995/1996, 1996/1997, 1997/1998, 1998/1999, 1999/2000, 2000/2001 et 2001/2002 à la note de 32/60, ainsi que la décision du 12 mai 2003 arrêtant sa notation pédagogique pour l'année scolaire 2002/2003, d'enjoindre aux inspecteurs d'académie " IPS-EPS " de fonder leurs notations " sur l'ensemble des éléments d'information dont ils disposent : chefs d'établissements, équipes éducatives d'EPS, usagers du service public d'éducation représentés aux conseils d'administration des établissement scolaires ", d'enjoindre au recteur d'académie de reconstituer sa carrière et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 71 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Par un jugement n° 1102321 du 22 mai 2014, le tribunal administratif de Nice a donné acte du désistement des conclusions de la requête présentée par M. B...tendant à l'annulation de la note pédagogique pour l'année 2002/2003 et a rejeté les surplus de ses conclusions.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juillet 2014, M.B..., représenté par

MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 22 mai 2014 en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa requête ;

2°) d'annuler la décision du recteur de l'académie de Nice du 8 décembre 2010 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale de procéder à la reconstitution de sa carrière depuis 1993 ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 71 000 euros en réparation du préjudice matériel et 15 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subis ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- ses conclusions à fin d'annulation étaient bien recevables ;

- la note de 32/60 a été fixée de manière arbitraire par le rectorat à partir d'éléments étrangers aux appréciations portées sur ses enseignements ;

- classé au 9ème échelon de la classe normale, il était en droit de prétendre accéder au 3ème échelon hors classe des chargés d'enseignement d'EPS ou au moins être reclassé dans le corps des professeurs d'EPS et accéder au 10ème échelon ; la moyenne de ces deux possibilités lui permet de solliciter la somme de 71 000 euros au titre du préjudice matériel.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2015, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions à fin d'annulation de la décision du 8 décembre 2010 étaient tardives ;

- à supposer qu'elles soient recevables, elles sont vouées au rejet dès lors que M. B...n'établit pas qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- les conclusions à fin d'indemnisation sont également vouées au rejet en l'absence de justification du dépôt d'une demande préalable ;

- à titre subsidiaire, la demande ne peut qu'être rejetée sur le fond.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 60-403 du 22 avril 1960 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Pena,

- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

1. Considérant que M.B..., chargé d'enseignement d'éducation physique et sportive en retraite, a refusé le 15 février 1994 de se soumettre à une inspection pédagogique ; qu'à la suite de ce refus, le requérant s'est vu attribuer, de manière constante, une note pédagogique de 3/60 pour les années scolaires 1993/1994, 1994/1995, 1995/1996, 1996/1997, 1997/1998, 1998/1999, 1999/2000, 2000/2001 et 2001/2002 ; que, par un jugement du 21 novembre 2003, le tribunal administratif de Nice a annulé, sur demande de l'intéressé, les notes pédagogiques des années 1993/1994, 1997/1998 et 1998/1999 au motif que ces dernières n'étaient pas justifiées ; que le recteur de l'académie de Nice a alors procédé à de nouvelles notations du requérant et a arrêté sa note pédagogique, pour chacune des années scolaires en cause, à 42/60 ; que celui-ci a sollicité l'annulation de ces trois notes pédagogiques ainsi que l'annulation de toutes les autres notes pédagogiques qui lui ont été attribuées au titre des années 1994/1995, 1995/1996, 1996/1997, 1999/2000, 2000/2001, 2001/2002 et 2002/2003 ; que, par un jugement du 9 janvier 2009, le tribunal administratif de Nice a fait partiellement droit à sa demande et a annulé les notations pédagogiques au titre des années scolaires 1993/1994 à 2001/2002 ; qu'en exécution de la chose jugée, le recteur de l'académie de Nice a attribué à M.B..., par une décision du 8 décembre 2010, la note de 32/60 pour chacune des années scolaires couvrant la période allant de 1993/1994 à 2001/2002 ; que M. B...a saisi le tribunal administratif de Nice d'une demande tendant à l'annulation de cette dernière décision ainsi que de la décision du 12 mai 2003 arrêtant sa notation pédagogique pour l'année scolaire 2002/2003, à ce qu'il soit enjoint aux inspecteurs d'académie de fonder leurs notations " sur l'ensemble des éléments d'information dont ils disposent : chefs d'établissements, équipes éducatives d'EPS, usagers du service public d'éducation représentés aux conseils d'administration des établissements scolaires ", à ce qu'il soit enjoint au recteur d'académie de reconstituer sa carrière, enfin à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 71 000 euros en réparation de l'ensemble des préjudices qu'il estime avoir subi ; que, par un jugement du 22 mai 2014, le tribunal administratif de Nice a donné acte du désistement des conclusions de la requête tendant à l'annulation de la note pédagogique pour l'année 2002/2003 et a rejeté les surplus de ses conclusions ; que M. B...relève appel du jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant que les premiers juges ont rejeté les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B...comme irrecevables en raison de leur tardiveté au motif que si le recours gracieux réceptionné le 31 janvier 2011 par MmeA..., inspecteur pédagogique, avait interrompu le délai de recours contentieux, une décision implicite de rejet étant née deux mois plus tard, la requête, enregistrée au greffe du tribunal le 7 juin 2011, était tardive ;

3. Considérant, toutefois, que pour la première fois en appel, M. B...produit l'ensemble des recours gracieux dont il se prévalait déjà en première instance ; que l'un d'eux, daté du 9 février 2010, a été réceptionné par son destinataire, le recteur de l'académie de Nice, le 10 février suivant et a pu faire naître une nouvelle décision implicite de rejet le 10 avril 2010 ; que, par suite, les conclusions à fin d'annulation de la demande de première instance, enregistrées le 7 juin 2011 devant le tribunal administratif de Nice n'étaient pas tardives et étaient en conséquence recevables ; que M. B...est ainsi fondée à demander l'annulation du jugement attaqué dans cette mesure ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B...;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 4 du décret du 22 avril 1960 susvisé :

" Le recteur d'académie sous l'autorité duquel est placé le chargé d'enseignement d'éducation physique et sportive attribue à celui-ci, selon les modalités définies aux 1 et 2 ci-après, une note de 0 à 100. Pour les personnels affectés dans un établissement du second degré, cette note globale est constituée de la somme : a) D'une note de 0 à 40 arrêtée par le recteur sur proposition du chef de l'établissement où exerce l'enseignant, accompagnée d'une appréciation générale sur la manière de servir. Cette note est fixée en fonction d'une grille de notation définie par arrêté du ministre chargé de l'éducation et indiquant, par échelon, une moyenne des notes ainsi que des écarts pouvant exister par rapport à cette moyenne ; b) D'une note de 0 à 60 arrêté par un membre des corps d'inspection chargés de l'évaluation pédagogique des enseignants de la discipline compte tenu d'une appréciation pédagogique portant sur la valeur de l'action éducative et de l'enseignement donné. L'appréciation pédagogique est communiquée au professeur. Un recours est ouvert au professeur soit devant l'auteur de la note, soit devant

un autre membre des corps d'inspection. La note de 0 à 40, la note de 0 à 60, la note globale et les appréciations sont communiqués par le recteur à l'intéressé. La commission administrative paritaire académique peut, à la requête de l'enseignant, demander la révision de la note de 0 à 40. (...) " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de la grille nationale de notation pédagogique des enseignants d'EPS de classe normale produite au dossier, que la note pédagogique de 32/60 correspond à la note minimale d'un enseignant placé au 5ème échelon ; que pour l'année scolaire 1993-1994, M. B...était situé au 9ème échelon de la classe normale, auquel correspond une note minimale de 39/60 et qu'il se trouvait placé, pour l'année scolaire 2001-2002, au 11ème échelon de ladite classe, échelon auquel correspond une note minimale de 39/60 ; que, par ailleurs, M. B...avait obtenu une note pédagogique de 48,70/60 pour l'année scolaire 1988-1989 et une note de 42/60 pour l'année 2002-2003 ; que, dans ces conditions, en décidant d'attribuer à M. B...la note de 32/60 de manière constante sur neuf années scolaires consécutives, sans l'assortir de surcroît d'une appréciation littérale permettant d'en fournir la justification, cette note étant largement inférieure à la note minimale correspondant aux échelons auxquels il se trouvait durant la période considérée, le recteur de l'académie de Nice a entaché sa décision datée du 8 décembre 2010 d'une erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à demander l'annulation de la décision du 8 décembre 2010 du recteur de l'académie de Nice ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ;

9 .Considérant que l'annulation de la décision du 8 décembre 2010 par laquelle le recteur de l'académie de Nice a attribué à M. B...la note de 32/60 pour chacune des années scolaires couvrant la période allant de 1993/1994 à 2001/2002, n'implique pas nécessairement la reconstitution de la carrière de l'intéressé à compter du premier jour de la rentrée scolaire

1993-1994 jusqu'à la fin de l'année scolaire 2001-2002 ainsi qu'il le sollicite, mais seulement le réexamen de sa notation pour les années scolaires en cause ; que les conclusions de l'appelant tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche de procéder à cette formalité dans le délai de 2 mois à compter de la date de lecture du présent arrêt ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

10. Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, l'administration a répondu au fond en première instance sur les conclusions indemnitaires de M. B...sans leur opposer une quelconque fin de non-recevoir, liant ainsi le contentieux à leur égard ; que celles-ci sont donc recevables ; que si M. B...soutient qu'au vu des appréciations très favorables dont il bénéficiait en 1992, il était en droit de prétendre à son accession au 10ème échelon de la classe normale des chargés d'enseignement d'EPS avec effet au 29 mars 1993 correspondant au 3ème échelon hors classe de ce corps ou au moins à un reclassement au 10ème échelon dans le corps des professeurs d'EPS, et réclame la somme de 71 000 euros correspondant selon lui à la moyenne de la perte de rémunération ces deux possibilités de progression de carrière, ledit préjudice financier ne présentant pas un caractère certain, il ne saurait donner lieu à indemnisation ; que, toutefois, il justifie d'un préjudice moral dont il sera fait une juste appréciation en l'évaluant à la somme de 1 500 euros ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions indemnitaires ; qu'il y a lieu de condamner l'Etat au versement de la somme de 1 500 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

13. Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. B...présentées sur le fondement des dispositions précitées et de condamner l'État au versement de la somme de 2 000 euros ;

D E C I D E

Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Nice du 22 mai 2014 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. B...tendant à l'annulation de la décision du 8 décembre 2010 par laquelle le recteur de l'académie de Nice a arrêté sa notation pédagogique pour les années scolaires 1993/1994, 1994/1995, 1995/1996, 1996/1997, 1997/1998, 1998/1999, 1999/2000, 2000/2001 et 2001/2002 à la note de 32/60 et en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. B...à fin d'indemnisation.

Article 2 : La décision du 8 décembre 2010 du recteur de l'académie de Nice est annulée.

Article 3 : L'Etat est condamné à verser à M. B...la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros.

Article 4 : L'Etat versera à M. B...la somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Nice.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2016 où siégeaient :

- M. Gonzales, président,

- Mme Baux, premier conseiller,

- Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 3 mai 2016.

Le rapporteur,

Signé

E. PENA

Le président,

Signé

S. GONZALES

Le greffier,

Signé

C. LAUDIGEOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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N° 14MA032092


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA03209
Date de la décision : 03/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-06-01 Fonctionnaires et agents publics. Notation et avancement. Notation.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Eleonore PENA
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : DUPETIT-EVRARD

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-05-03;14ma03209 ?
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