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20/10/2016 | FRANCE | N°15MA04864

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 20 octobre 2016, 15MA04864


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 14 août 2013 par laquelle l'inspectrice du travail de la 3ème section du pôle travail de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Provence-Alpes-Côte d'Azur a autorisé la SA SNEF à la licencier pour inaptitude physique.

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Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2015, la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 14 août 2013 par laquelle l'inspectrice du travail de la 3ème section du pôle travail de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Provence-Alpes-Côte d'Azur a autorisé la SA SNEF à la licencier pour inaptitude physique.

Par un jugement n° 1306059 du 20 octobre 2015, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 14 août 2013.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2015, la SA SNEF, représentée par Me B..., Association B...et Friburger, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 20 octobre 2015 ;

2°) de rejeter la demande de première instance de Mme A... ;

3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- quant au manquement allégué à l'obligation de reclassement, le tribunal s'est mépris sur la portée du contrôle juridictionnel qu'il lui appartenait d'exercer, a ajouté une condition à la loi et commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- les recherches de reclassement ont été sérieuses et loyales, au sein de l'entreprise comme au sein du groupe.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2016, Mme D...A..., représentée par Me E..., Cabinet E...et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la SA SNEF sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les moyens soulevés par la SA SNEF ne sont pas fondés ;

- le médecin du travail n'a pas procédé à l'étude de son poste de travail.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chanon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant la SA SNEF, et de MeC..., représentant Mme A....

1. Considérant qu'à la suite d'un arrêt de travail pour maladie et de deux avis rendus par le médecin du travail les 11 et 25 février 2013, Mme A..., employée par la SA SNEF et titulaire des mandats de délégué du personnel et de membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, a été déclarée inapte à son poste de chargée d'affaires au sein de l'établissement SNEF Technologie ; que, par lettre du 27 février 2013 établie en réponse à une demande de l'employeur, le médecin a précisé que la salariée était apte à exercer un poste de chargée d'affaires dans un autre service de l'entreprise ou au sein d'une autre société du groupe ; que, par courrier du 5 juillet 2013, la société a sollicité l'autorisation de licencier l'intéressée pour inaptitude physique ; que, par jugement du 20 octobre 2015, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 14 août 2013 par laquelle l'inspectrice du travail de la 3ème section du pôle travail de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi Provence-Alpes-Côte d'Azur a accordé l'autorisation de licenciement ; que la SA SNEF relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 1226-2 du code du travail : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. / L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail " ;

3. Considérant qu'en vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que l'employeur a, conformément aux dispositions de l'article L. 1226-2 du code du travail, cherché à reclasser le salarié sur d'autres postes appropriés à ses capacités, le cas échéant par la mise en oeuvre, dans l'entreprise, de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que le licenciement ne peut être autorisé que dans le cas où l'employeur n'a pu reclasser le salarié dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, menée tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises du groupe auquel elle appartient, ce dernier étant entendu, à ce titre, comme les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SA SNEF a proposé à Mme A... un poste de responsable de projet au sein de la direction des ressources humaines de l'entreprise à Marseille, compatible avec les préconisations du médecin du travail, qui a été refusé par la salariée, par lettre reçue par l'employeur le 9 avril 2013 renvoyant à une précédente réponse du 9 janvier 2013, au motif légitime, notamment, qu'il s'agissait d'une simple mission alors que la salariée souhaitait un emploi de chargée d'affaires ; qu'un poste de " chef de projet automatisme ", disponible au sein de la société Firac implantée à Poissy, filiale du groupe auquel la SA SNEF appartient, a également été refusé du fait de l'éloignement géographique et au motif qu'il ne correspondait pas à un poste d'ingénieur mais de technicien ; que, toutefois, un employeur ne peut proposer une offre de reclassement dans un emploi de catégorie inférieure qu'en l'absence démontrée de toute possibilité de reclasser le salarié dans un emploi équivalent ; que si, en vue du reclassement de l'intéressée, la SA SNEF a également adressé, le 5 mars 2013, un courrier électronique à l'ensemble de ses agences et des sociétés du groupe, soit quatre-vingt-dix-neuf courriers selon Mme A... et cent treize selon l'employeur, d'une part, ce courriel se borne à mentionner le poste de chargé d'affaires occupé en dernier lieu par la salariée sans faire état de son expérience au sein de l'entreprise ni de ses diverses compétences professionnelles ; qu'il est accompagné du curriculum vitae fourni par l'intéressée lors de son recrutement en 1995 alors qu'elle en avait fait parvenir un nouveau actualisé au mois de juillet 2012 ; que, d'autre part, l'employeur verse au débat seulement vingt-deux réponses et n'allègue pas avoir procédé à une relance pour obtenir les informations manquantes ; que, dans ces conditions, l'imprécision du courriel du 5 mars 2013 ainsi que le faible taux de réponse ne sont pas de nature à démontrer qu'un reclassement dans un emploi approprié aux capacités de Mme A... était impossible alors que le groupe compte près de dix mille salariés ; que, par suite, compte tenu des possibilités existant au sein de la société et du groupe ainsi que des motifs de refus du poste de responsable de projet avancés par la salariée, la SA SNEF ne peut être regardée comme s'étant livrée à une recherche sérieuse de reclassement ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA SNEF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision de l'inspectrice du travail en date du 14 août 2013 ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Mme A..., qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par la SA SNEF et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société le versement à la salariée de la somme de 2 000 euros au même titre ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SA SNEF est rejetée.

Article 2 : La SA SNEF versera à Mme A... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SA SNEF, à Mme D... A...et à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Délibéré après l'audience du 4 octobre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Chanon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 octobre 2016.

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N° 15MA04864 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA04864
Date de la décision : 20/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-035-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Motifs autres que la faute ou la situation économique. Inaptitude ; maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : ASSOCIATION GRAVIER et FRIBURGER

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-10-20;15ma04864 ?
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