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09/01/2017 | FRANCE | N°16MA01614

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 09 janvier 2017, 16MA01614


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 14 juin 2013 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1503181 du 25 septembre 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 avril 2016, M.A..., représenté par Me Ruffel

, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 25 s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 14 juin 2013 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1503181 du 25 septembre 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 avril 2016, M.A..., représenté par Me Ruffel, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 25 septembre 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 14 juin 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ou " salarié " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, subsidiairement, d'ordonner le réexamen de sa demande dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil, lequel renonce à percevoir l'aide juridictionnelle en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet aurait dû consulter la commission du titre de séjour ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention des droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision fixant un délai de départ volontaire :

- la décision n'est pas suffisamment motivée ;

- le préfet s'est estimé en situation de compétence liée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2016, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

M. A...a été admis au bénéficie de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 février 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signé à New-York ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies,

- les observations de Me Ruffel pour M.A....

1. Considérant que M. A..., ressortissant algérien, né le 21 août 1987, a déclaré être entré en France le 15 novembre 2011 ; que le 1er janvier 2012, il a fait l'objet d'un arrêté de remise aux autorités espagnoles, mais ne s'est pas présenté aux rendez-vous de remise ; que le 29 juin 2012, M. A... a demandé son admission au séjour ; que par arrêté du 4 octobre 2012, dont la légalité a été confirmée par le tribunal administratif le 6 décembre 2013, le préfet de l'Hérault lui a refusé le séjour ; que le 30 mai 2013, M. A...a demandé son admission au séjour en qualité de salarié ; que par un jugement du 25 septembre 2015, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 14 juin 2013 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé le séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien modifié: " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. " ;

3. Considérant que M. A..., entré une première fois en France en 2011, qui ne démontre pas être dépourvu de toute attache en Algérie où il a vécu jusqu'à l'âge de 24 ans avec ses parents et sept de ses frères et soeurs, fait valoir qu'il a établi l'ensemble de ses liens personnels et familiaux en France auprès de ses deux enfants, nés le 10 octobre 2013 et le 22 janvier 2016, lesquels bénéficient d'un document de circulation en raison de la situation régulière de leur mère, et dont il soutient s'occuper régulièrement ; que toutefois, il est constant qu'à la date de l'arrêté contesté, le premier enfant de M. A... résidait auprès de sa mère, de nationalité algérienne, avec laquelle le requérant n'a vécu en concubinage que postérieurement à l'arrêté contesté, avant de se marier le 11 janvier 2016 ; que s'il produit des photographies, ces seuls éléments ne suffisent pas à établir qu'à la date de l'arrêté attaqué, les liens personnels et familiaux de M. A... en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en particulier des conditions et de la durée du séjour du requérant en France, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'en conséquence, elle n'a méconnu ni les dispositions de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est institué une commission du titre de séjour (...) ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ;

5. Considérant que si l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature et durée de validité des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, il n'a toutefois pas entendu écarter, sauf dispositions contraires expresses, l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour, dès lors que ces ressortissants algériens se trouvent dans une situation entrant à la fois dans les prévisions de l'accord et dans celles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que toutefois, il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien, équivalentes aux dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions;

6. Considérant que, dès lors que M. A... ne satisfait pas aux conditions posées par le paragraphe 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le préfet de l'Hérault n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour mentionnée à l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant en premier lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ;

8. Considérant que M. A... soutient participer financièrement à l'éducation et à l'entretien de ses enfants, et habiter avec eux et leur mère dans un foyer stable ; que toutefois, à la date de l'arrêté attaqué, alors que seul un enfant était né, M. A... ne résidait pas auprès de ce dernier, et n'établit pas qu'il aurait tissé des liens particuliers avec lui ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault aurait, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. A..., porté atteinte à l'intérêt supérieur de son fils mineur ;

9. Considérant, en deuxième lieu, par les mêmes motifs que ceux mentionnés au considérant 3, à la date de l'arrêté attaqué, M. A... ne démontre pas que la décision l'obligeant à quitter le territoire français porterait une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale tel qu'il est garanti par les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité du délai de départ :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...)" ;

11. Considérant d'une part, qu'il ne résulte pas des dispositions précitées que la décision fixant le délai de départ volontaire doit être motivé ; qu'en tout état de cause, le délai de départ volontaire est suffisamment motivé par l'article 2 de l'arrêté qui se réfère nécessairement aux faits et dispositions cités par l'arrêté ;

12. Considérant d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, pour fixer le délai de départ volontaire dont est assortie l'obligation de quitter le territoire français, le préfet se soit estimé lié par le délai de trente jours énoncé au II de l'article précité ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme représentative des frais de procédure soit, en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative ou 37 de la loi du 10 juillet 1991, mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Ruffel, avocat et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2016, où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- Mme Steinmetz-Schies, président-assesseur,

- Mme Héry, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 9 janvier 2017.

2

N° 16MA01614


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA01614
Date de la décision : 09/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 24/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-01-09;16ma01614 ?
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