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06/06/2017 | FRANCE | N°16MA01087

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 06 juin 2017, 16MA01087


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2011 par lequel le maire de la commune de Saint-Cyprien a délivré à la SARL Roussillon Lotissement un permis d'aménager le lotissement dénommé " les Massardes II ", sur le terrain cadastrée AN 10, sis au lieu dit " Les Massardes ", sur le territoire de la commune.

Par un jugement n° 1201865 du 21 janvier 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cou

r :

Par une requête, enregistrée le 15 mars 2016, M. D..., représenté par Me E..., dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2011 par lequel le maire de la commune de Saint-Cyprien a délivré à la SARL Roussillon Lotissement un permis d'aménager le lotissement dénommé " les Massardes II ", sur le terrain cadastrée AN 10, sis au lieu dit " Les Massardes ", sur le territoire de la commune.

Par un jugement n° 1201865 du 21 janvier 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mars 2016, M. D..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 janvier 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2011 du maire de la commune de Saint-Cyprien portant permis d'aménager le lotissement " Les Massardes II " ainsi que l'ensemble des arrêtés portant permis d'aménager modificatifs à ce permis d'aménager ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Cyprien et de la SARL Roussillon Lotissement, pour chacune d'entre elles, la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le rapporteur public a refusé de lui communiquer ses conclusions ;

- le tribunal a méconnu l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme en ne répondant au moyen tiré de l'illégalité de la 10ème modification du plan d'occupation des sols en raison d'un détournement de pouvoir ;

- le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs ;

- le tribunal a estimé à tort que le moyen tiré de l'insuffisance des annexes à l'arrêté de lotir n'était pas assorti de précisions suffisantes ;

- il ne s'est pas prononcé sur le moyen tiré de la méconnaissance du coefficient d'occupation des sols autorisé dans le lotissement ni sur celui tiré du caractère inondable du terrain ;

- le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité en vérifiant d'office s'il répondait aux conditions de l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental, alors que ce moyen n'est pas d'ordre public ;

- le conseil départemental aurait dû être consulté en application de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme ;

- le terrain étant située en zone B du plan des surfaces submersibles du Tech, l'emprise globale des opérations ne devait pas excéder 20 % de la superficie des terrains nécessaires à l'opération en vertu de l'article 1NA9 du règlement du plan d'occupation des sols ;

- les articles 2 et 4 de l'arrêté contesté comportent des dispositions qui méconnaissent les règles d'urbanisme applicables en ce qui concerne la servitude d'utilité publique EL2 et le coefficient d'occupation des sols, qui est de 0,2, et non de 0,35 ;

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, eu égard à la proximité du lotissement avec son exploitation agricole ;

- son activité d'élevage correspond à un cheptel de 50 animaux de plus de trente jours, et une distance de 25 mètres devait être respectée ;

- la desserte du terrain par les réseaux est insuffisante.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 septembre 2016, la commune de Saint-Cyprien, représentée par la SCP d'avocats CGCB, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. D... de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance, à défaut pour M. D... de justifier d'un intérêt à agir, est irrecevable ;

- la requête d'appel, qui n'a pas fait l'objet des notifications prévues à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, est irrecevable ;

- elle est également irrecevable à défaut de comporter des moyens ;

- les conclusions tendant à l'annulation des permis d'aménager modificatifs du permis d'aménager du 26 octobre 2011 sont nouvelles en appel ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2016, la SARL Roussillon Lotissement, représentée par la SCP d'avocatsB..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. D... de la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance, à défaut pour M. D... de justifier d'un intérêt à agir, est irrecevable ;

- la requête d'appel porte sur le permis modificatif n° 1 alors que le jugement attaqué ne concerne pas cette décision ;

- la requête d'appel, qui n'a pas fait l'objet des notifications prévues à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, est irrecevable ;

- elle est également irrecevable à défaut de comporter des moyens ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire distinct, enregistré le 24 octobre 2016, la SARL Roussillon Lotissement demande à la Cour, en application des dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme, de condamner M. D... à lui verser la somme de 159 043,60 euros en réparation du préjudice que lui a causé sa requête, qui présente un caractère abusif.

Un mémoire, présenté pour M. D..., a été enregistré le 12 mai 2017 et n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Portail,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de M.D..., de Me C..., représentant la commune de Saint-Cyprien et de Me B..., représentant la SARL Roussillon Lotissement ;

Une note en délibéré, présentée pour la SARL Roussillon Lotissement, a été enregistrée le 23 mai 2017.

Une note en délibéré, présentée pour la commune de Saint-Cyprien, a été enregistrée le 24 mai 2017.

Une note en délibéré, présentée pour M. D..., a été enregistrée le 29 mai 2017.

1. Considérant que par arrêté du 26 octobre 2011, le maire de la commune de Saint-Cyprien a délivré à la SARL Roussillon Lotissement un permis d'aménager pour la réalisation d'un lotissement dénommé " les Massardes II, sur un terrain cadastrée section AN n° 10, sis au lieu dit " Les Massardes ", sur le territoire de la commune ; que par un jugement du 21 janvier 2016, dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation dudit arrêté ;

Sur les fins de non recevoir opposées à la requête d'appel par les défendeurs :

2. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que M. D... a procédé à la notification de sa requête conformément aux dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

3. Considérant, d'autre part, que la requête, qui est suffisamment motivée, répond aux prescriptions fixées par les dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, applicables aux instances d'appel en vertu de l'article R. 811-13 du même code ;

4. Considérant, en revanche, que les conclusions tendant à l'annulation des permis d'aménager modificatifs du permis d'aménager du 26 octobre 2011 sont nouvelles en appel et, dès lors, irrecevables ;

Sur la fin de non recevoir opposée à la demande de première instance par les défendeurs :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, issu de l'ordonnance susvisée du 18 juillet 2013, entrée en vigueur le 19 août 2013, un mois après sa publication au Journal officiel de la République Française : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation " ; que s'agissant de dispositions nouvelles qui affectent la substance du droit de former un recours pour excès de pouvoir contre une décision administrative, elles sont, en l'absence de dispositions contraires expresses, applicables aux recours formés contre les décisions intervenues après leur entrée en vigueur ; qu'elles ne sont, dès lors, pas applicables au recours formé par M. D... contre le permis d'aménager en litige délivré le 26 octobre 2011 ;

6. Considérant que M. D... est propriétaire d'une parcelle sise au mas Sistach, situé au voisinage immédiat du terrain d'assiette du lotissement " Les Massardes II " ; qu'il justifie ainsi d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de ce permis d'aménager ;

Sur la légalité de l'arrêté du 26 octobre 2011 :

7. Considérant, d'une part, que l'article 1 NA9 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Saint-Cyprien dispose : " L'emprise globale des opérations ne doit pas excéder 30 % de la superficie des terrains nécessaires à ces opérations. Pour tous les terrains situés en zone inondable B, l'emprise globale des opérations ne doit pas excéder 20 % de la superficie des terrains nécessaires à ces opérations. En secteur 1NAf, le coefficient d'emprise au sol ne doit pas excéder 35 % de la superficie des terrains nécessaires à ces opérations. Sauf dans les secteurs classés inondables par le plan de prévention des risques d'inondation. Dans ces secteurs, les coefficients d'emprise respecteront le document approuvé. " ;

8. Considérant, d'autre part, qu'il ressort de l'avis émis par la direction départementale des territoires et de la mer le 24 janvier 2014, certes postérieur à la décision attaquée, mais qui porte sur une situation de fait inchangée depuis la date de la décision attaquée, que le terrain d'assiette du lotissement " Les Massardes II " est situé en zone B inondable du plan de surfaces submersibles délimité par le décret du 24 septembre 1964; que si la commune de Saint-Cyprien soutient que des travaux hydrauliques ont été effectués et que les terrains d'assiette du projet ne se situent plus en zone inondable à la date de délivrance du permis d'aménager en litige, elle n'en justifie pas ;

9. Considérant, enfin, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 1 NA9 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Saint-Cyprien que le coefficient d'emprise au sol autorisé en zone INAf, où se situe le terrain d'assiette du projet en litige, n'est de 0, 35, en l'absence de plan de prévention des risques d'inondation approuvé, qu'en ce qui concerne les terrains qui ne sont pas situés en zone inondable B ; qu'il en résulte également que ce coefficient est de 0,2 pour les terrains situés en zone inondable B ; que M. D... est fondé, dans ces conditions, à soutenir que le permis d'aménager en litige, qui autorise un coefficient d'emprise au sol supérieur à 0,2, méconnaît les dispositions précitées du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Saint-Cyprien ;

10. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est de nature, en l'état de l'instruction, à entraîner l'annulation de l'arrêté contesté ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; qu'il est, dès lors, fondé à demander l'annulation tant de ce jugement que du permis d'aménager en litige ;

Sur les conclusions de la SARL Roussillon Lotissement fondées sur l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en oeuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes du requérant et qui causent un préjudice excessif au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel. " ;

13. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. D..., voisin immédiat du projet faisant l'objet du permis d'aménager modificatif contesté, et dont le recours est fondé, aurait mis en oeuvre le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre cette décision dans des conditions qui excèderaient la défense de ses intérêts légitimes ; qu'il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions de la SARL Roussillon Lotissement fondées sur les dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. D..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par la commune de Saint-Cyprien et par la SARL Roussillon Lotissement au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Saint-Cyprien et de la SARL Roussillon Lotissement, pour chacune d'entre elles, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. D... et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 21 janvier 2016 du tribunal administratif de Montpellier et l'arrêté du 26 octobre 2011 du maire de la commune de Saint-Cyprien sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Les conclusions de la SARL Roussillon Lotissement fondées sur les dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme sont rejetées.

Article 4 : la commune de Saint-Cyprien versera à M. D... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : la SARL Roussillon Lotissement versera à M. D... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Les conclusions de la commune de Saint-Cyprien et de la SARL Roussillon Lotissement fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7: Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à la commune de Saint-Cyprien et à la SARL Roussillon Lotissement.

Copie en sera adressée au Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Perpignan.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2017, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- M. Portail, président-assesseur,

- Mme Busidan, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 juin 2017.

2

N° 16MA01087


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA01087
Date de la décision : 06/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Lotissements.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : PECHEVIS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-06-06;16ma01087 ?
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