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06/02/2018 | FRANCE | N°17MA03209

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Chambres réunies, 06 février 2018, 17MA03209


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... J...et Mme H... C...ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 28 novembre 2012, par laquelle le conseil municipal de la commune de Châteauvieux a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1300511 du 9 octobre 2014, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette délibération.

Procédure devant la Cour avant renvoi :

Par une requête et deux mémoires, respectivement enregistrés le 5 décembre 2014 et le 18

mai 2015, la commune de Châteauvieux, représentée par la SCP Gerbaud Aoudiani Charmasson Cott...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... J...et Mme H... C...ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 28 novembre 2012, par laquelle le conseil municipal de la commune de Châteauvieux a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1300511 du 9 octobre 2014, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette délibération.

Procédure devant la Cour avant renvoi :

Par une requête et deux mémoires, respectivement enregistrés le 5 décembre 2014 et le 18 mai 2015, la commune de Châteauvieux, représentée par la SCP Gerbaud Aoudiani Charmasson Cotte Moineau Rouanet, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 octobre 2014 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de mettre à la charge de Mmes C...et J...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la délibération du 16 mai 2008 prescrivant la révision du plan local d'urbanisme a suffisamment défini les objectifs poursuivis par la révision ;

- à supposer que la Cour considère trop générale la définition des objectifs effectuée par la délibération du 16 mai 2008, la délibération adoptée le 4 mars 2009 a régularisé cette insuffisance ;

- l'omission dans les mentions de l'annonce diffusée dans un journal départemental ne peut remettre en cause le caractère exécutoire de la délibération du 16 mai 2008 ;

- les modalités de concertation ont été précisément définies par la délibération du 16 mai 2008 ;

- la délibération du 16 mai 2008 a été notifiée aux personnes publiques associées ;

- les modifications ont été apportées avant l'enquête publique et elles n'ont pas bouleversé l'économie générale du projet ;

- le classement en zone agricole de la parcelle cadastrée A544 n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 23 février et 2 octobre 2015, Mmes C... etJ..., représentées par la société civile professionnelle Alpavocat, concluent au rejet de la requête, et, par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement en ce qu'il a rejeté le moyen tiré du défaut de notification de la délibération prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme, et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Châteauvieux le versement de la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que :

- le caractère exécutoire de la délibération du 16 mai 2008 ne peut découler d'une attestation établie pour les besoins de la cause par le maire au lendemain de l'audience de première instance ;

- la mention de l'affichage de la délibération ne figure pas dans l'annonce parue dans le journal à diffusion départementale ;

- la délibération du 16 mai 2008 n'est donc pas exécutoire ;

- la commune ne justifie pas de l'envoi, ni de la réception des lettres produites relatives à la notification de la délibération prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme aux personnes publiques associées ;

- la délibération du 4 mars 2009 ne fixe pas les objectifs de l'élaboration du PLU et ne concerne que le débat relatif au projet d'aménagement et de développement durables ;

- le plan approuvé par la délibération en litige a été substantiellement modifié par rapport au projet soumis à enquête publique ;

- les modifications ont remis en cause l'économie générale du projet ;

- le classement de la parcelle A544 est entaché de l'erreur manifeste d'appréciation retenue par les premiers juges.

Par lettre du 26 février 2016, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur deux moyens relevés d'office tirés du non lieu à statuer sur le présent recours et de ce que les conclusions en appel incident présentées par les intimées sont irrecevables.

Le mémoire, enregistré le 26 février 2016, présenté pour la commune de Châteauvieux, n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Par un arrêt n° 14MA05010 du 26 avril 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a prononcé un non-lieu à statuer sur l'appel formé par la commune de Châteauvieux, et sur les conclusions incidentes présentées par les intimées et a mis à la charge de la commune de Châteauvieux une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une décision n° 400979, 400980 du 12 juillet 2017, le Conseil d'État, statuant au contentieux sur pourvoi de la commune de Châteauvieux, a annulé cet arrêt et a renvoyé à la Cour le jugement de la requête présentée par la commune de Châteauvieux.

Procédure devant la Cour après renvoi :

Par le mémoire enregistré le 26 février 2016 et communiqué aux parties après renvoi, et deux mémoires, respectivement enregistrés les 19 septembre et 9 octobre 2017, la commune de Châteauvieux, représentée par la SCP Gerbaud Aoudiani Charmasson Cotte Moineau Rouanet, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 9 octobre 2014 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de mettre à la charge des intimées le versement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, en outre, que :

- l'application de la jurisprudence du Conseil d'Etat doit nécessairement conduire la Cour à écarter le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Marseille tiré de l'insuffisance des objectifs poursuivis par la délibération prescrivant l'élaboration du PLU ;

- la délibération du 16 mai 2008 est exécutoire, l'affichage et la publication ayant été réalisés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2017, Mmes C...etJ..., représentées par la société civile professionnelle Alpavocat, concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Châteauvieux le versement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles ajoutent que :

- la cassation opérée ne portant que sur un problème de forme, la Cour confirmera le bien-fondé du jugement du tribunal administratif de Marseille ;

- le moyen tiré du caractère non exécutoire de cette délibération, qui fonde l'annulation de la délibération en litige, reste fondé.

Le mémoire, enregistré le 25 octobre 2017, présenté pour Mmes C...etJ..., n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Busidan,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant la commune de Châteauvieux et de Me K... représentant Mmes C...etJ....

Une note en délibéré présentée pour Mmes C...et J...a été enregistrée le 30 janvier 2018.

1. Considérant que le conseil municipal de Châteauvieux a approuvé la révision du plan d'occupation des sols de la commune valant élaboration du plan local d'urbanisme (PLU) par une délibération du 28 novembre 2012 ; qu'à la demande de Mmes J...etC..., le tribunal administratif de Marseille a, par un jugement n° 1300511 du 9 octobre 2014, annulé cette délibération ; que l'appel relevé par la commune contre ce jugement a fait l'objet d'un non-lieu à statuer par un arrêt de la présente Cour rendu le 26 avril 2016 ; qu'après avoir cassé cet arrêt pour erreur de droit, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, lui a renvoyé l'affaire par une décision du 12 juillet 2017 ;

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les motifs d'annulation retenus par le tribunal administratif de Marseille :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptible de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier " ; qu'il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un plan local d'urbanisme, de se prononcer sur les différents motifs d'annulation retenus par les premiers juges en application de ces dispositions, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui ;

3. Considérant que, pour annuler la délibération en litige, le tribunal administratif de Marseille a retenu quatre motifs, le premier tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la délibération du 16 mai 2008, prescrivant la révision du plan d'occupation des sols valant élaboration du PLU, en ce qu'elle ne comprenait pas d'objectifs, définis au moins dans leurs grandes lignes, poursuivis par l'élaboration de ce document d'urbanisme, le deuxième tiré du vice de procédure tenant à l'absence de caractère exécutoire de cette même délibération du 16 mai 2008, le troisième tiré du vice de procédure tenant à la méconnaissance des dispositions de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme dès lors que les modifications apportées après l'enquête publique au projet de PLU avaient bouleversé l'économie générale du projet arrêté, ces trois vices entraînant l'annulation totale de la délibération contestée, enfin le quatrième tiré de ce qu'une erreur manifeste d'appréciation entachait le classement en zone agricole de la parcelle cadastrée section A n° 544 et entraînant dans cette seule mesure l'annulation de la délibération en litige ;

S'agissant du motif tiré de l'illégalité de la délibération prescrivant l'élaboration du PLU en raison d'une insuffisante définition des objectifs :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable : " Le plan local d'urbanisme est élaboré à l'initiative et sous la responsabilité de la commune. La délibération qui prescrit l'élaboration du plan local d'urbanisme et précise les modalités de concertation, conformément à l'article L. 300-2, est notifiée au préfet (...) " ; que l'article L. 300-2 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération du 16 mai 2008, dispose que : " I - Le conseil municipal (...) délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole, avant : / a) Toute élaboration ou révision (...) du plan local d'urbanisme / (...) " ; qu'il est précisé au cinquième alinéa du I du même article, applicable au présent litige, que : " Les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux a, b et c ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies par la délibération prévue au premier alinéa ont été respectées. Les autorisations d'occuper ou d'utiliser le sol ne sont pas illégales du seul fait des vices susceptibles d'entacher cette délibération ou les modalités de son exécution. " ;

5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'adoption ou la révision du plan local d'urbanisme doit être précédée d'une concertation associant les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées ; que le conseil municipal doit, avant que ne soit engagée la concertation, délibérer, d'une part, et au moins dans leurs grandes lignes, sur les objectifs poursuivis par la commune en projetant d'élaborer ou de réviser ce document d'urbanisme, et, d'autre part, sur les modalités de la concertation ; que si la délibération prescrivant l'élaboration du PLU est susceptible de recours devant le juge de l'excès de pouvoir, son illégalité ne peut, en revanche, eu égard à son objet et à sa portée, être utilement invoquée contre la délibération approuvant le plan local d'urbanisme ; qu'ainsi que le prévoit l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme précité, les irrégularités ayant affecté le déroulement de la concertation au regard des modalités définies par la délibération prescrivant la révision du document d'urbanisme demeurent ...;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler la délibération du 28 novembre 2012 approuvant le PLU de la commune de Châteauvieux, les premiers juges ont retenu le motif tiré, par voie d'exception, de ce que la délibération du 16 mai 2008 prescrivant le PLU était illégale pour avoir insuffisamment défini les objectifs poursuivis par l'élaboration de ce document d'urbanisme ;

S'agissant du motif tiré du vice de procédure tenant au défaut de caractère exécutoire de la délibération prescrivant l'élaboration du PLU :

7. Considérant que l'article R. 123-24 du code de l'urbanisme énonce que la délibération qui prescrit l'élaboration ou la révision du PLU et définit les modalités de la concertation fait l'objet des mesures de publicité et d'information édictées à l'article R. 123-25, lequel prévoit un affichage pendant un mois en mairie et l'insertion d'une mention de cet affichage, en caractères apparents, dans un journal diffusé dans le département ; que ces mêmes dispositions, aujourd'hui codifiées aux articles R. 153-20 et R. 153-21, soumettent le caractère exécutoire de la délibération à l'exécution de ces formalités ;

8. Considérant que l'absence de caractère exécutoire de la délibération du conseil municipal prescrivant l'élaboration ou la révision du plan local d'urbanisme et précisant les modalités de concertation ne remet pas en cause l'existence juridique de cet acte, ni ne fait obstacle à ce que son annulation soit recherchée devant le juge de l'excès de pouvoir ; qu'elle ne s'oppose pas davantage à ce que soit utilement invoqué, à l'encontre de la délibération approuvant le plan local d'urbanisme, tout moyen relatif à la régularité du déroulement de la concertation au regard des modalités définies par la délibération en prescrivant l'élaboration ou la révision ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la délibération du 16 mai 2008 prescrivant l'élaboration du PLU de la commune ne serait pas devenue exécutoire en raison du défaut d'accomplissement de l'ensemble des formalités de publicité prévues au 1er alinéa de l'article R. 123-25 du code de l'urbanisme ne peut, eu égard à son objet et à sa portée, être utilement invoqué contre la délibération approuvant le PLU ; qu'il en résulte que c'est à tort que, pour annuler la délibération du 28 novembre 2012 approuvant le PLU de la commune de Châteauvieux, les premiers juges ont retenu le motif tiré du vice de procédure tenant à ce que la délibération prescrivant le PLU ne serait pas devenue exécutoire ;

S'agissant du motif tiré du vice de procédure tenant au non-respect des dispositions de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme :

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 2ème alinéa de l'article L. 123-10 applicable du code de l'urbanisme : " Après l'enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié, est approuvé par délibération (...) du conseil municipal. " ;

10. Considérant qu'il est loisible à l'autorité compétente de modifier le plan local d'urbanisme après l'enquête publique sous réserve, d'une part, que ne soit pas remise en cause l'économie générale du projet et, d'autre part, que cette modification procède de l'enquête, ces deux conditions découlant de la finalité même de l'enquête publique ;

11. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que le classement en zones naturelles N de deux secteurs situés aux lieux-dits Crespillon et Rochazal classés en zone à urbaniser AU dans le projet de plan arrêté le 21 novembre 2011 est intervenu après l'enquête publique par le plan approuvé par la délibération en litige, et non avant cette enquête publique comme le soutient la commune ; qu'est sans incidence à cet égard la circonstance que, par échange de courriers avec les services préfectoraux introduits dans le dossier d'enquête publique, la commune avait déjà manifesté la volonté de modifier en ce sens le classement de ces zones ;

12. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier qu'entre le projet de PLU arrêté et le plan modifié après enquête publique, la suppression des secteurs AUbe des quartiers de Rochazal et de Crespillon a réduit de 7,85 hectares, sur un total de 9, 11 hectares, la superficie potentiellement constructible classée en zone AU ; qu'en outre, il est constant que dans le règlement de la zone Urbaine UB figurant au PLU approuvé après enquête publique a été introduite une " contrainte de densité " sur les parcelles par une augmentation des logements ; que la commune soutient sans être démentie que la constructibilité des secteurs AUbe prévus dans le PLU arrêté était subordonnée à la réalisation de travaux d'assainissement et de travaux routiers ; que, dans ces conditions, les intimées n'établissent pas que la suppression des secteurs AUbe précités empêcherait la construction de 16 logements sur les 85 prévus à terme par le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) de la commune ; que, par suite, elles ne justifient pas qu'entre le projet arrêté et celui modifié après enquête publique, la commune serait passée d'un parti pris d'urbanisme privilégiant l'extension urbaine à un parti pris d'urbanisme privilégiant la densification urbaine ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que les modifications apportées après enquête publique au projet de PLU auraient bouleversé son économie générale ; qu'il en résulte que c'est à tort que, pour annuler la délibération du 28 novembre 2012 approuvant le PLU de la commune de Châteauvieux, les premiers juges ont retenu le motif tiré du vice de procédure tenant à ce que la commune n'aurait pu modifier son projet après enquête publique, sans organiser une nouvelle enquête publique en application de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme ;

S'agissant du motif tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant le classement de la parcelle cadastrée A544 :

13. Considérant que la partie de la parcelle A544 classée en zone agricole par la délibération approuvant le PLU en litige est constituée d'un terrain d'une superficie qui est estimée par la commune à 2 500 m² et à 3 000 m² par les intimées, sur une superficie parcellaire totale d'environ 8 000 m² ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des photographies versées par les deux parties, que ce terrain pentu, actuellement recouvert de pins noirs, débute, dans sa partie basse, derrière la maison de Mme J... et débouche, en sa partie haute, sur un plateau agricole ; que si, d'après l'historique photographique de la parcelle versé par la commune, ce talus a pu avoir une vocation agricole il y a plusieurs décennies, la topographie distingue nettement, à l'heure actuelle et depuis au moins les années 1970, la zone agricole et la portion de la parcelle A544 que la commune a entendu lui rattacher par la délibération en litige ; que cette dernière ne verse au dossier aucun élément de nature à établir le potentiel agronomique actuel de ce terrain ; qu'il ressort des pièces du dossier notamment des documents graphiques du PLU que cette partie de la parcelle A544, laquelle supporte déjà une construction dans sa portion classée en zone urbaine, est insérée par deux côtés dans cette zone urbaine et jouxte une zone à urbaniser sur son dernier côté ; qu'il ressort également des pièces du dossier que, contrairement à ce qu'affirme la commune, la déclivité de ce terrain, bordé sur trois côtés soit de constructions soit de terrains constructibles, et desservi par les réseaux d'eau potable, d'assainissement, d'électricité et de téléphone, n'empêche nullement la constructibilité qui lui était reconnue dans le précédent document d'urbanisme ; que dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la délibération en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en tant qu'elle classe en zone A la portion précitée de la parcelle A544 appartenant aux intimées ;

14. Considérant, toutefois, que la Cour, qui écarte les motifs d'annulation totale de la délibération en litige retenus par les premiers juges, est saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel ; qu'il lui appartient d'examiner les autres moyens soulevés par Mmes C... et J...;

S'agissant du moyen tiré du défaut de notification de la délibération prescrivant l'élaboration du PLU :

15. Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme, applicable à la date de la délibération prescrivant l'élaboration du PLU : " (...) La délibération qui prescrit l'élaboration du plan local d'urbanisme et précise les modalités de concertation, conformément à l'article L. 300-2, est notifiée au préfet, au président du conseil régional, au président du conseil général et, le cas échéant, au président de l'établissement public prévu à l'article L. 122-4, ainsi qu'au président de l'autorité compétente en matière d'organisation des transports urbains et, si ce n'est pas la même personne, à celui de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de programme local de l'habitat dont la commune est membre et aux représentants des organismes mentionnés à l'article L. 121-4. Lorsque la commune est limitrophe d'un schéma de cohérence territoriale sans être couverte par un autre schéma, la délibération est également notifiée à l'établissement public chargé de ce schéma en application de l'article L. 122-4. " ;

16. Considérant que la commune de Châteauvieux a versé au dossier de première instance copie de lettres, datées du 5 juin 2008, transmettant à dix-sept personnes publiques la délibération prescrivant l'élaboration du PLU et leur demandant si elles souhaitaient être associées à la nouvelle procédure de révision du plan d'occupation des sols valant élaboration du PLU ; que les intimées ne contestent pas l'envoi effectif de ces lettres à leurs destinataires en se bornant à relever, sans autre précision, que la commune ne justifie pas de leur envoi, ni de leur réception ; que, par suite, le moyen précité doit être écarté ;

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales en raison d'un défaut d'affichage de la convocation des conseillers municipaux :

17. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier de première instance que la commune de Châteauvieux a produit la convocation du conseil municipal à la séance du 28 novembre 2012 au cours de laquelle a été adoptée la délibération en litige ; que cette pièce mentionne son affichage le 22 novembre ; que, par suite, le moyen, tiré de ce qu'en méconnaissance de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales la convocation à cette séance n'aurait pas été affichée, manque en fait ;

S'agissant du moyen tiré du vice de procédure tenant au non-respect des dispositions de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales :

18. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires. " ; qu'il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération d'un conseiller municipal intéressé à l'affaire qui fait l'objet de cette délibération, c'est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l'illégalité ; que, de même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d'exercer une influence sur la délibération ; que, cependant, s'agissant d'une délibération déterminant des prévisions et règles d'urbanisme applicables dans l'ensemble d'une commune, la circonstance qu'un conseiller municipal intéressé au classement d'une parcelle ait participé aux travaux préparatoires et aux débats précédant son adoption ou à son vote n'est de nature à entraîner son illégalité que s'il ressort des pièces du dossier que, du fait de l'influence que ce conseiller a exercée, la délibération prend en compte son intérêt personnel ;

19. Considérant que la délibération litigieuse détermine des prévisions et règles d'urbanisme dont le champ d'application s'étend à l'ensemble de la commune ; qu'il résulte des principes rappelés au point 18 que la seule circonstance que des parcelles appartenant à certains conseillers municipaux ou à leur famille auraient été classées en zone urbaine ou en zone à urbaniser ne peut suffire à établir que la délibération en litige, en procédant à ces classements, aurait pris en compte les intérêts personnels de ces conseillers municipaux ; que si les intimées font valoir que des parcelles appartenant à la famille du maire ou de Mme G... ont bénéficié d'un classement favorable à leurs intérêts de propriétaires, elles ne fournissent aucune précision, notamment quant à la localisation des terrains en cause ; que, dès lors, le moyen précité doit être écarté ;

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme :

20. Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme : " (...) les plans locaux d'urbanisme (...) déterminent les conditions permettant d'assurer, dans le respect des objectifs du développement durable : 1° L'équilibre entre : a) Le renouvellement urbain, le développement urbain maîtrisé, la restructuration des espaces urbanisés, la revitalisation des centres urbains et ruraux ;b) L'utilisation économe des espaces naturels, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières, et la protection des sites, des milieux et paysages naturels ; c) La sauvegarde des ensembles urbains et du patrimoine bâti remarquables ; //(...) " ;

21. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que si les zones du quartier Bel Air ouvertes à l'urbanisation se trouvaient auparavant en zone agricole, elles comptent néanmoins déjà des constructions en nombre suffisant pour une densification urbaine en hameaux ; que, d'autre part, si l'extension urbaine se fait au détriment d'une parcelle d'une valeur agronomique certaine dans chacun des secteurs dits Embeyrac, Goudets et Village, et si dans le secteur dit Calada, la délibération en litige approuve la création d'une zone urbaine UB1, de forme approximativement rectangulaire, dans un secteur précédemment classé quasi exclusivement en zone agricole, il ressort également des pièces du dossier que d'autres secteurs de la commune ont été restitués à la zone agricole ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à l'échelle du plan, la délibération en litige serait incompatible avec le principe d'équilibre fixé par l'article L. 121-1 précité du code de l'urbanisme ;

S'agissant du moyen tiré de la violation de l'article R. 123-5 du code de l'urbanisme :

22. Considérant que le moyen précité n'est pas assorti des précisions permettant à la Cour d'apprécier son bien-fondé et sa portée ;

S'agissant du moyen tiré du caractère injustifié du classement de certaines parcelles :

23. Considérant qu'en se bornant à se référer aux observations des services de l'Etat émises après l'arrêt du projet de PLU et portant sur la valeur agronomique de certaines parcelles classées en zone à urbaniser, Mmes J...et C...n'établissent pas l'erreur manifeste d'appréciation entachant le classement de ces parcelles ;

24. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Châteauvieux est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé en totalité la délibération du 28 novembre 2012 par laquelle le conseil municipal de Chateauvieux a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune ; qu'il y a lieu de réformer le jugement attaqué, en tant qu'il excède l'annulation partielle qu'il a prononcée de la délibération tenant à l'erreur manifeste d'appréciation entachant le classement en zone agricole d'une partie de la parcelle A544 appartenant à Mmes J...etC... ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

25. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il ne paraît pas inéquitable de laisser à chacune des parties à l'instance la charge des frais qu'elles ont exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1300511 du 9 octobre 2014 du tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu'il excède l'annulation partielle de la délibération du 28 novembre 2012 approuvant le plan local d'urbanisme de la commune de Châteauvieux en tant qu'elle classe en zone agricole une partie de la parcelle cadastrée A544 appartenant à Mmes C...etJ....

Article 2 : Le surplus de la demande de Mmes C...et J...et des conclusions de la requête est rejeté

Article 3 : Les conclusions présentées par Mmes C...et J...tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Châteauvieux, à Mme H... C...et Mme B...J....

Délibéré après l'audience du 17 janvier 2018, où siégeaient :

Mme Erstein, présidente de la Cour,

M. Bocquet, président de chambre,

Mme Buccafurri, présidente de chambre,

M. Poujade, président de chambre,

M. Portail, président assesseur,

M. Marcovici, président assesseur,

Mme Busidan, première conseillère,

Mme F..., première conseillère,

Mme E..., première conseillère,

Mme I..., première conseillère,

Mme A..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 6 février 2018.

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N° 17MA03209


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