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27/02/2018 | FRANCE | N°16MA00915

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 27 février 2018, 16MA00915


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier :

- d'annuler le certificat d'urbanisme en date du 27 septembre 2013 par lequel le maire de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone a déclaré non réalisable son projet de construction d'une maison d'habitation d'une surface de plancher de 200 m² sur un terrain, cadastré AM 130 et 131, situé dans le secteur du Triolveire sur le territoire de cette collectivité et lui appartenant ;

- d'annuler partiellement la délibération du cons

eil municipal approuvant le plan local d'urbanisme de la commune concernant les zones...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier :

- d'annuler le certificat d'urbanisme en date du 27 septembre 2013 par lequel le maire de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone a déclaré non réalisable son projet de construction d'une maison d'habitation d'une surface de plancher de 200 m² sur un terrain, cadastré AM 130 et 131, situé dans le secteur du Triolveire sur le territoire de cette collectivité et lui appartenant ;

- d'annuler partiellement la délibération du conseil municipal approuvant le plan local d'urbanisme de la commune concernant les zones AU1, UD3 et UD4 ;

- d'ordonner le classement des parcelles cadastrées AM 130 et 131 en zone urbanisée ;

- et de condamner la commune de Villeneuve-lès-Maguelone à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices matériel et moral qu'il estime avoir subis du fait du classement fautif de ses parcelles en "zone bloquée"AU inconstructible pendant cinq ans.

Par un jugement n° 1306027 du 30 décembre 2015, le tribunal administratif de Montpellier a, par l'article 1er du jugement, annulé le certificat d'urbanisme du 27 septembre 2013 en tant qu'il déclare non réalisable l'opération de construction projetée sur le fondement des articles UD3 et UD4 du règlement du plan local d'urbanisme, et, par l'article 2 de ce jugement, rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mars 2016, M. C..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du 30 décembre 2015 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) d'annuler partiellement le plan local d'urbanisme de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone, approuvé le 29 mars 2013, en tant qu'il a classé les parcelles AM 130 et 131 en "zone bloquée" AU inconstructible pendant cinq années ;

3°) de condamner la commune de Villeneuve-lès-Maguelone à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait du classement illégal de ses parcelles ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone le versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

Sur l'illégalité du plan local d'urbanisme approuvé le 29 mars 2013 :

- il invoquait en première instance des moyens d'annulation par voie directe de cette délibération ;

Sur l'exception d'illégalité du plan local d'urbanisme :

- ce moyen, invoqué par voie d'exception, est recevable ;

- le classement de ses parcelles est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la distance les séparant du secteur actuel "Entrée de ville" ;

- le projet d'aménagement de ce secteur "entrée de ville" n'a pas été précédé d'une étude d'impact ;

- ce projet est imprécis quant à la date de sa réalisation et quant à sa localisation en méconnaissance des articles L. 123-2 et R. 123-12 alinéa 4 du code de l'urbanisme ;

- ce projet méconnaît l'article L. 621-31 du code de l'urbanisme et les articles L. 642-1, L. 641-1 et L. 641-2 du code du patrimoine ;

- la commune poursuit sur le même secteur deux objectifs d'intérêt général opposés, celui de la création d'infrastructures routières à l'entrée de ville et de la préservation des lieux naturels ;

- le classement de ses parcelles en zone urbanisable ou naturelle est entaché de détournement de pouvoir ;

Sur la responsabilité :

- la responsabilité sans faute de la commune est engagée sur le fondement de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme pour rupture d'égalité devant les charges publiques ;

- ce classement porte atteinte à son droit de propriété ;

- la responsabilité pour faute de la commune est engagée du fait de l'" erreur de droit " et de l'" abus de pouvoir " qu'elle a commis ;

- la commune a commis une faute en classant ses parcelles en "zone bloquée" inconstructible ;

Sur le préjudice :

- il subit un préjudice financier du fait de l'augmentation des taxes foncières concernant ses terrains ;

- la perte de la valeur vénale de ses terrains du fait de cette inconstructibilité présente un lien de causalité direct avec cette faute ;

- il subit un préjudice moral et de jouissance ;

Sur l'injonction de classer ses terrains en zone U "urbanisée":

- en application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, la Cour ordonnera le classement de ses parcelles AM 130 et AM131 en zone urbanisée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 avril 2016, la commune de Villeneuve-lès-Maguelone, représentée par la SCP d'avocats Scheuer Vernhet et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge du requérant le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable à défaut de critiquer le jugement attaqué et pour méconnaitre l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- les conclusions aux fins d'annulation du certificat d'urbanisme en litige sont irrecevables dès lors que le requérant a obtenu satisfaction sur ce point ;

- les conclusions aux fins d'annulation partielle du plan local d'urbanisme sont irrecevables pour tardiveté et sont nouvelles en appel ;

- à titre subsidiaire, les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par lettre du 6 décembre 2016, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et indiquant la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 janvier 2017, la métropole Montpellier Méditerranée Métropole, représentée par la SCP Vinsonneau-Paliès Noy Gauer et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge du requérant le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle se substitue, depuis le 1er janvier 2015 et par application de l'article 4 du décret n° 2004-1605 du 23 décembre 2014, aux communes membres dans leurs droits et obligations en matière de plan local d'urbanisme, et notamment pour défendre dans la présente instance en ce qui concerne les conclusions de la requête dirigée contre le plan local d'urbanisme de la commune ;

- à titre principal, la requête est irrecevable en application de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- toutes les conclusions de la requête, à l'exception de la demande de frais irrépétibles, sont irrecevables pour être dirigées contre les motifs du jugement attaqué ;

- les conclusions d'appel tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme en litige sont irrecevables en l'absence d'intérêt pour agir du requérant ;

- les conclusions tendant à l'annulation du plan local d'urbanisme sont irrecevables pour être nouvelles en appel et sont tardives ;

- à titre subsidiaire, les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Une ordonnance du 21 décembre 2017 a prononcé la clôture de l'instruction à la date de son émission, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire, présenté pour M. C..., a été enregistré le 12 février 2018, postérieurement à la clôture d'instruction.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 23 mai 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2014-1605 du 23 décembre 2014 portant création de la métropole dénommée " Montpellier Méditerranée Métropole " ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carassic,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant M. C..., de Me E..., représentant la commune de Villeneuve-lès-Maguelone et de Me B... représentant Montpellier Méditerranée Métropole.

1. Considérant que M. C... a déposé, le 10 juin 2013, auprès du maire de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone une demande de certificat d'urbanisme pour la réalisation d'une maison d'habitation d'une surface de plancher de 200 m² sur un terrain, cadastré AM 130 et 131, lui appartenant et situé dans le quartier du Triolveire ; que, par la décision en litige du 27 septembre 2013, le maire a déclaré que ce projet n'était pas réalisable ; que M. C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler le certificat d'urbanisme en date du 27 septembre 2013, d'annuler partiellement la délibération du conseil municipal approuvant le plan local d'urbanisme de la commune concernant les zones AU1, UD3 et UD4, d'ordonner le classement des parcelles cadastrées AM 130 et AM131 en zone urbanisée et de condamner la commune de Villeneuve-lès-Maguelone à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices matériel et moral qu'il estime avoir subis du fait du classement illégal de ses parcelles en "zone bloquée" AU ; que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont, par l'article 1er du jugement, annulé le certificat d'urbanisme du 27 septembre 2013 en tant qu'il déclare non réalisable l'opération de construction projetée sur le fondement des articles UD3 et UD4 du règlement du plan local d'urbanisme, et, par l'article 2 de ce jugement, rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. C... ; que M. C... relève appel du jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ; que la commune de Villeneuve-lès-Maguelone et la métropole Montpellier Méditerranée Métropole concluent au rejet de la requête ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant qu'en première instance, M. C... demandait l'annulation du certificat d'urbanisme en date du 27 septembre 2013 par lequel le maire de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone a déclaré non réalisable son projet de construction sur le fondement du b) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme ; que les premiers juges ont annulé ce certificat en tant qu'il déclare non réalisable l'opération de construction ; que le requérant a ainsi obtenu satisfaction sur ce point ; qu'il doit, ainsi, être regardé comme demandant uniquement en appel l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du plan local d'urbanisme de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone approuvé le 29 mars 2013, en tant qu'il a classé ses parcelles en " zone bloquée " AU inconstructible pendant cinq ans et qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

Sur les fins de non recevoir opposées par la commune et la métropole à la requête d'appel et à la demande de première instance :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La requête (...) contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. " ; que M. C..., dans sa requête d'appel page 6, "conteste le jugement rendu par le tribunal administratif de Montpellier en date du 30 décembre 2015 en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts et du remboursement de ses frais d'avocat" et demande à la Cour de "confirmer le jugement rendu par le tribunal administratif de Montpellier pour le surplus" ; que cette requête énonce ainsi des conclusions tendant à la réformation partielle du jugement attaqué ; qu'elle contient aussi page 22 un récapitulatif des moyens à l'appui de ces conclusions ; que, par suite, la fin de non recevoir tirée de ce que la requête serait insuffisamment motivée en méconnaissance de l'article R. 411-1 du code de justice administrative doit être écartée ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit au point 2, la requête ne tend pas à l'annulation du certificat d'urbanisme du 27 septembre 2013 ; que, par suite, la commune et la métropole ne peuvent utilement soutenir que le requérant n'aurait pas intérêt à faire appel du jugement qui a fait droit à ses conclusions de première instance sur ce point ;

5. Considérant, en troisième lieu, que la métropole n'est pas fondée à soutenir que les conclusions d'appel tendant à l'annulation du plan local d'urbanisme de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone approuvé le 29 mars 2013 en tant qu'il a classé les parcelles AM130 et AM131 en "zone bloquée" AU seraient irrecevables pour être nouvelles en appel, dès lors que M. C... a demandé en première instance l'annulation partielle du plan local d'urbanisme de la commune notamment en ce qui concerne la zone AU ;

6. Considérant, toutefois, qu'aux termes des dispositions de l'article R. 123-24 du code de l'urbanisme : " Font l'objet des mesures de publicité et d'information édictées à l'article R. 123-25 : a) La délibération qui prescrit l'élaboration ou la révision du plan local d'urbanisme et définit les modalités de la concertation, en application des articles L. 123-6 et L. 123-13 (...) " ; qu'en vertu de l'article R. 123-25 du même code : " Tout acte mentionné à l'article R. 123-24 est affiché pendant un mois au siège de l'établissement public de coopération intercommunale compétent et dans les mairies des communes membres concernées, ou en mairie. Mention de cet affichage est insérée en caractères apparents dans un journal diffusé dans le département.(...) " ; que le délai de recours contentieux ouvert à l'encontre d'une délibération qui, comme en l'espèce, approuve un plan local d'urbanisme, court, quelle que soit la date à laquelle le plan local d'urbanisme devient exécutoire, à compter de la plus tardive des deux dates correspondant, l'une au premier jour d'une période d'affichage en mairie d'une durée d'un mois, l'autre à l'insertion effectuée dans la presse locale ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la délibération du 29 mars 2013 par laquelle le conseil municipal a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune a été affiché à la porte de la mairie de Villeneuve-lès-Maguelone du 23 avril au 23 mai 2013 ; qu'il ressort des pièces du dossier que mention de cet affichage a été insérée, le 23 avril 2013, dans le journal d'annonces légales n° 1638 du 30 avril 2013 diffusé dans le département ; que, par suite, les conclusions d'appel du requérant tendant à l'annulation partielle de cette délibération approuvant le plan local d'urbanisme sont tardives et, dès lors, irrecevables ; que la fin de non recevoir, opposée sur ce point par la commune et la métropole, doit être accueillie ;

Sur la responsabilité de la commune :

En ce qui concerne la responsabilité sans faute de la commune :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " N'ouvrent droit à aucune indemnité les servitudes instituées par application du présent code en matière de voirie, d'hygiène et d'esthétique ou pour d'autres objets, notamment l'utilisation du sol, la hauteur des constructions, la proportion des surfaces bâties et non bâties dans chaque propriété, l'interdiction de construire dans certaines zones et en bordure de certaines voies, la répartition des immeubles entre diverses zones. Toutefois, une indemnité est due s'il résulte de ces servitudes une atteinte à des droits acquis ou une modification à l'état antérieur des lieux déterminant un dommage direct, matériel et certain (...) ". ; que cet article ne pose pas un principe général de non indemnisation des servitudes d'urbanisme mais l'assortit expressément de deux exceptions touchant aux droits acquis par les propriétaires et à la modification de l'état antérieur des lieux et ne saurait avoir ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à ce que le propriétaire dont le bien est frappé d'une servitude prétende à une indemnisation dans le cas exceptionnel où il résulte de l'ensemble des conditions et circonstances dans lesquelles la servitude a été instituée et mise en oeuvre, ainsi que de son contenu, que ce propriétaire supporte une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi ; que cet article n'a par conséquent pour effet, ni de priver le propriétaire, dont le bien serait frappé d'une telle servitude, de la propriété de son bien, ni de porter à cette propriété une atteinte d'une gravité telle que le sens et la portée de ce droit s'en trouvent dénaturés, ni d'exclure tout droit à réparation du préjudice résultant d'une telle servitude ;

9. Considérant que le classement en litige par le plan local d'urbanisme des parcelles de M. C... ne modifie que le nord de la parcelle AM 130 en zone à urbaniser AU, le reste de l'unité foncière restant très majoritairement classé en zone urbaine ; que le classement en zone AU " bloquée " entraîne le seul report de son urbanisation pendant cinq ans dans l'attente d'une opération d'ensemble et répond à un objectif d'intérêt général précis d'aménagement maîtrisé et harmonieux de l'entrée de ville ; que ce classement ne prive pas M. C... de la propriété de son bien, qu'il peut vendre contrairement à ce qu'il soutient ; que, dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'il supporterait une charge spéciale et exorbitante du fait de ce classement ; que, dès lors, les conclusions du requérant tendant à l'engagement de la responsabilité sans faute de la commune sur le fondement des dispositions de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme ou du principe d'égalité devant les charges publiques doivent être rejetées ;

En ce qui concerne la responsabilité pour faute de la commune :

10. Considérant que les premiers juges ont, pour annuler le certificat d'urbanisme en litige, estimé que ce document ne pouvait pas déclarer non réalisable la construction envisagée par M. C..., sur le fondement des articles 3 relatif à l'accès et à la voirie et 4 relatif à la desserte par les réseaux du règlement de la zone UD du plan local d'urbanisme, au motif que ces dispositions ne pouvaient pas être opposés indistinctement aux deux parcelles AM130 et AM131 placées dans une situation différente, la parcelle AM130 étant classée à la fois en zone UDa et en zone 1AU ; que la délivrance par la commune d'un certificat d'urbanisme illégal constitue une faute de nature à engager sa seule responsabilité, ce que la commune ne conteste d'ailleurs pas en appel ;

11. Considérant que le moyen tiré de ce que la commune aurait commis une faute pour avoir commis une "erreur de droit" en juillet 2013 et un "abus de pouvoir" n'est pas accompagné de précisions suffisantes pour permettre au juge d'en apprécier le bien-fondé et doit, par suite, être écarté ;

12. Considérant que le requérant soutient aussi que le classement illégal de ses parcelles AM130 et AM131 en "zone bloquée" par le plan local d'urbanisme approuvé le 29 mars 2013 engage la responsabilité pour faute de la commune ;

13. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'orientation d'aménagement du secteur "entrée de ville" prévoit une " zone bloquée " inconstructible pendant cinq ans dans l'attente notamment de la réalisation d'une nouvelle voie de liaison entre l'avenue de Palavas et le carrefour des chemins de la Mort Aux Anes et de l'Arnel ; que le règlement du plan local d'urbanisme indique que la zone UD recouvre des espaces de la commune déjà urbanisés dans lesquels les équipements publics existants ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter ; que cette zone comprend un secteur UDa caractérisé par un tissu bâti assez dense ; que le règlement définit la zone 1AU comme une zone recouvrant les espaces de la commune, pas ou insuffisamment équipés et/ou nécessitant des études complémentaires, destinés à être ouverts à l'urbanisation à moyen terme sous forme d'opérations d'ensemble et soumis à orientations d'aménagement pour en garantir un aménagement cohérent et caractérisée par une inconstructibilité, à l'exception de certains équipements publics, jusqu'à la mise à niveau des capacités des réseaux et modifications du plan local d'urbanisme ; qu'il ressort des pièces du dossier que ce plan, d'une part, maintient le classement de la parcelle AM131, déjà classée par le plan d'occupation des sols en secteur UDa, en zone urbaine constructible UDa ainsi que le classement de la presque totalité de la parcelle AM130 en secteur UDa et, d'autre part, modifie le classement de la seule pointe nord de la parcelle AM130, classée par le plan d'occupation des sols en zone agricole NC, en zone constructible à urbaniser 1AU, dans le sens de l'ouverture à l'urbanisation demandée par M. C... ; que, eu égard au parti d'urbanisme retenu dans ce secteur par les auteurs du plan et aux caractéristiques de ces parcelles, leur classement n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'en outre, la circonstance que cette orientation d'aménagement n'aurait pas été précédée d'une étude d'impact ou serait imprécise quant à la date de sa réalisation et quant à sa localisation est sans incidence sur la légalité de ce classement ; que l'objectif d'intérêt général poursuivi par la création d'infrastructures routières à l'entrée de ville n'est pas contradictoire avec celui de la préservation des lieux naturels ; qu'il n'est pas établi que le classement des parcelles du requérant en zone urbanisable ou à urbaniser serait entaché de détournement de pouvoir ; que par suite, en l'absence d'illégalité du classement de ces parcelles par le plan, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

Sur les préjudices :

14. Considérant que la faute commise par la commune en délivrant un certificat d'urbanisme illégal n'ouvre droit à indemnité que dans la mesure où M. C... justifie d'un préjudice certain en lien direct avec cette seule faute de l'administration ;

En ce qui concerne le préjudice financier :

15. Considérant que la circonstance, à la supposer même établie, que la taxe foncière pesant sur les parcelles AM130 et AM131 aurait augmenté de 200 % entre les années 2004 et 2013 ne résulte que de l'application de la loi fiscale ; que, par suite, ce chef de préjudice ne présente pas de lien de causalité direct avec la délivrance fautive du certificat d'urbanisme du 27 septembre 2013 ; que ce chef de préjudice ne peut dès lors ouvrir droit à réparation ;

En ce qui concerne la perte de la valeur vénale :

16. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 13, les parcelles du requérant sont majoritairement maintenues en zone urbanisée UD par le plan local d'urbanisme et la seule modification apportée par ce plan sur une petite partie de la parcelle AM130 permet l'ouverture à l'urbanisation de cette parcelle ; que, par suite, le requérant ne peut utilement faire valoir que ses parcelles auraient subi une perte de la valeur vénale du fait de l'inconstructibilité résultant de ce classement ; qu'en tout état de cause, la restriction de construire sur une petite partie de la parcelle AM130 ne résulte pas de la délivrance d'un certificat d'urbanisme illégal, mais de son classement légal, ainsi qu'il a été dit au point 13, par le plan local d'urbanisme ; qu'en l'absence de lien de causalité direct avec la faute retenue au point 10, M. C... n'est pas fondé à demander l'indemnisation du préjudice allégué ;

En ce qui concerne le préjudice moral, les troubles dans les conditions d'existence et le " préjudice de jouissance " :

17. Considérant que le requérant a subi du fait de la délivrance fautive du certificat d'urbanisme des troubles dans ses conditions d'existence pendant plus de deux années de procédure contentieuse entre cette délivrance en septembre 2013 et l'annulation de cette décision prononcée par le jugement du 30 décembre 2015 du tribunal administratif de Montpellier ; qu'il a subi une perte de chance de réaliser un projet immobilier sur ce terrain pendant cette période de deux années ; qu'il sera fait une juste évaluation de l'ensemble des préjudices subis par le requérant en condamnant la métropole Montpellier Méditerranée Métropole, venant aux droits de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone, à lui verser la somme de 3 000 euros à ce titre ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses conclusions indemnitaires ; qu'il est seulement fondé à demander la condamnation de la métropole Montpellier Méditerranée Métropole, venant aux droits de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone, à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation des préjudices subis et la réformation, dans cette mesure du jugement attaqué ;

Sur ses conclusions aux fins d'injonction :

19. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé par un permis modificatif, peut limiter à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixer le délai dans lequel le titulaire du permis pourra en demander la régularisation. " ;

20. Considérant que si M. C... demande sur le fondement de ces dispositions que la Cour enjoigne à la collectivité de classer ses parcelles en zone U, l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme est inapplicable au cas d'espèce ; que ses conclusions aux fins d'injonction doivent, par suite, être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. C..., qui n'est pas pour l'essentiel la partie perdante dans la présente instance, le versement à la commune de Villeneuve-lès-Maguelone et de la métropole Montpellier Méditerranée Métropole de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, M. C... a obtenu l'aide juridictionnelle totale par décision du 23 mai 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Montpellier ; que, par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me D... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de la métropole Montpellier Méditerranée Métropole, venant aux droits de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone, le versement à Me D... d'une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1 : La métropole Montpellier Méditerranée Métropole, venant aux droits de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone, versera à M. C... la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice.

Article 2 : Le jugement du 30 décembre 2015 du tribunal administratif de Montpellier est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : La métropole Montpellier Méditerranée Métropole, venant aux droits de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone, versera à Me D... une somme de 1 000 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Villeneuve-lès-Maguelone et de la métropole Montpellier Méditerranée Métropole présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C..., à la commune de Villeneuve-lès-Maguelone, à la métropole Montpellier Méditerranée Métropole et à Me A...D....

Délibéré après l'audience du 13 février 2018, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme Carassic, première conseillère.

Lu en audience publique, le 27 février 2018.

10

N° 16MA00915


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA00915
Date de la décision : 27/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Certificat d'urbanisme. Effets.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : PETIOT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-02-27;16ma00915 ?
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