La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/11/2018 | FRANCE | N°18MA00300

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 09 novembre 2018, 18MA00300


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 18 juillet 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1706065 du 22 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 janvier 2018, sous le n° 18MA00300

, M.A..., représenté par Me B...demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 18 juillet 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1706065 du 22 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 janvier 2018, sous le n° 18MA00300, M.A..., représenté par Me B...demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 22 décembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 18 juillet 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la date de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer ;

- l'arrêté contesté méconnaît les stipulations de l'article 6-4 de l'accord franco-algérien et les dispositions de l'article L. 313-11-6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet a violé les stipulations de l'article 6-2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le motif tiré de la prétendue reconnaissance frauduleuse de l'enfant n'a pas eu de suite de la part du procureur de la République et est sans incidence ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la de la convention relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juillet 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D...a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., né le 21 mai 1988, de nationalité algérienne, relève appel du jugement du 22 décembre 2017 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 juillet 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen qui n'était pas inopérant tiré de l'erreur de droit entachant le motif de la reconnaissance frauduleuse par M. A...de son enfant. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Marseille.

Sur la légalité de l'arrêté du 18 juillet 2017 :

4. M. A...ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-11 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles ne sont pas applicables aux ressortissants algériens dont l'admission au séjour est entièrement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien.

5. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 4°) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A...a reconnu son enfant de nationalité française le 1er mars 2017 postérieurement à sa naissance, le 20 juin 2016. Pour justifier de sa contribution aux besoins de son fils, le requérant produit dix mandats cash dont cinq sont postérieurs à l'arrêté contesté et ne peuvent dès lors être pris en compte. Les cinq autres ne démontrent une telle contribution que pour une période restreinte de quatre mois allant du 2 mars au 15 juin 2017. Les tickets de caisse versés au débat qui soit ne mentionnent pas le nom de M. A..., soit concernent des articles qui ne sont pas destinés à un enfant, tel qu'un parfum ou des vêtements en taille adulte, ainsi que des photos et des attestations rédigées en des termes insuffisamment circonstanciés par la mère de l'enfant, des membres de sa famille, ainsi que des connaissances, ne sont pas suffisants, à eux seuls, pour établir qu'il subviendrait aux besoins de son enfant depuis sa naissance ou depuis au moins un an. Par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône a pu légalement refuser de lui délivrer un certificat de résidence en qualité de parent d'enfant français.

7. Il ressort des mentions de l'arrêté contesté que le préfet des Bouches-du-Rhône a pris en compte le fait que les services du tribunal d'instance de Marseille ont saisi le procureur de la République, sur le fondement des dispositions de l'article 40 du code de procédure pénale, pour soupçon de reconnaissance d'enfant frauduleuse lors de la délivrance du certificat de nationalité française de l'enfant. Si M. A...soutient que ces faits n'ont pas eu de suite judiciaire et que sa déclaration de paternité est valablement établie, sans être contredite par le préfet des Bouches-du-Rhône qui ne justifie pas du caractère frauduleux de la reconnaissance en paternité du requérant, le préfet aurait en tout état de cause pris la même décision en se fondant sur l'autre motif mentionné au point 6 tiré de l'absence de contribution aux besoins de son fils.

8. Si l'article 6-2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoit que " Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ", cette stipulation n'a ni pour objet, ni pour effet d'interdire qu'une mesure administrative soit prise à l'égard de personnes faisant l'objet de poursuites pénales.

9. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

10. Ainsi qu'il a été dit au point 6, M. A...est le père d'un enfant français né le 20 juin 2016, qu'il a reconnu plus de neuf mois après sa naissance et un mois après le dépôt de sa demande de titre de certificat de résidence et pour lequel il n'établit pas subvenir à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an. Le requérant déclare être séparé de la mère de l'enfant depuis fin 2015 et n'a donc jamais vécu avec eux. Par ailleurs, M. A...n'établit ni même n'allègue être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt quatre ans. Dans ces conditions et alors même qu'il serait titulaire d'un contrat de travail à durée déterminée pour un emploi de vendeur, l'arrêté en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, le moyen tiré de ce que cet arrêté aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, il n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

11. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

12. M. A...n'établit pas avoir de liens suffisamment intenses avec son fils avec lequel il ne vit pas et dont la contribution à ses besoins n'est pas justifiée ainsi qu'il a été dit au point 6. Dans ces conditions, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas, en prenant l'arrêté en litige, méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté préfectoral du 18 juillet 2017 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

14. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A...n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions de M. A...aux fins d'injonction.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 22 décembre 2017 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Marseille et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 26 octobre 2018, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- MmeD..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 9 novembre 2018.

2

N° 18MA00300

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA00300
Date de la décision : 09/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : PODA BAIMANAI

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-11-09;18ma00300 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award